Nous sommes presque à l'orée des années 80, et il faut bien être honnête, Daredevil n'est pas franchement la priorité chez Marvel, qui continue de publier les aventures du héros par inertie, sans y croire plus que ça. Du reste les dessinateurs se succèdent, et pourtant il se passe des choses sur la série, et lorsque Frank Miller est annoncé pour son arrivée, au numéro 158, peu immaginent que l'histoire est sur le point de s'écrire. Au départ donc, c'est Roger McKenzie qui poursuit sa prestation au scénario, et bonne pioche, Miller peut bénéficier de l'encrage d'un certain Klaus Janson, avec qui le mariage est naturel. Les premières pages permettent d'évacuer la présence d'un super vilain capable de se déphaser brièvement avec le temps réel (le Chasseur), et donc d'apparaître intangible, même s'il doit solidifier à nouveau son corps pour frapper. Obsédé par sa veangeance contre Daredevil qui l'a battu dans le passé, il connaît sa double identité, mais tout cela ne lui évitera pas de finir d'une bien horrible façon, incrusté en partie dans une pierre tombale. Ce qui retient surtout l'attention, dans la série, c'est en fait son coté vaudevilesque. Murdock est aveugle, mais c'est un sacré tombeur! Dans ces années-là, la situation est la suivante : il est en couple (plus ou moins) avec la fille d'un riche industriel, Heather Glenn, qui ne supporte plus sa double existence (oui, elle sait, ce n'est jamais bon signe...). Mais La Veuve Noire est revenue faire un tour dans les parages, et la secrétaire de Matt, une certaine Becky, attend fidélement dans l'ombre que son patron jette son dévolu sur elle. Il faut dire qu'elle ne fait pas le poids à coté de la froide beauté d'Heather, ou d'une super espionne : elle est en fauteuil roulant...
Bien vite, Daredevil se retrouve aux prises avec Bullseye. Oui, le dingo par excellence, capable de tout transformer en une arme. Le "Tireur" comme on l'appelait alors en Vf s'en prend tout d'abord à la Veuve pour atteindre notre Tête à Cornes. La pauvre prend cher, mais ça a le don d'irriter DD qui se rend sur au parc d'attractions de Coney Island pour l'affrontement final (blague). Entre temps Bullseye a eu une idée de génie : envoyer des seconds couteaux défier son adversaire, pour en étudier les réactions, les techniques de combat. Ce qui ne lui évitera pas une vraie humiliation, au point d'en perdre momentanément la boule. Très sensible, en fin de compte.
L'époque McKenzie est en fait loin d'être inintéressante, elle comprend certes des moments faibles (un épisode avec Hulk lâché dans New-York, que Daredevil parvient à raisonner, tout en finissant dans un bien sale état aux urgences...) mais aussi de petites pépites, comme l'enquête patiemment conduite par le journaliste Ben Urich, qui a compris que Matt Murdock est aussi un super type costumé, et rassemble indices puis preuves, avant une confrontation à l'hopital, dont la résolution est probablement un peu trop hâtive. Miller lui fait des siennes à travers le dessin, dans un style bien plus réaliste et conventionnel que ce qu'il fera par la suite, mais son story telling, sa façon de rendre chaque planche cinématographique, son rendu de la ville sombre et de la population qui y grouille, son utilisation de certaines vignettes allongées ou étirées, permet de donner une vie, un cachet, un caractère crapuleux à son travail, et c'est exactement ce qui convient à Daredevil. Personne depuis Gene Colan n'avait été capable de comprendre et traduire cela.
Reste à approfondir le personnage, lui offrir une crédibilité grâce à des trouvailles extraordinaires (une parmi d'autres, la plus significative, Elektra) mais cela ne tardera pas. On s'en rend compte quand on feuillette le numéro 164, où Daredevil raconte ses "origines" à un Ben Urich qui a tout compris. Les grandes lignes de la tragédie fondatrice sont là, mais il manque tout de ce souffle épique qui transforme un adolescent handicapé en un héros sans peur et capables de prouesses. Ici tout est emballé très vite, et ce qui en découle est certes un super héros fonctionnel, mais qui n'a pas encore cette épaisseur que Miller va lui conférer, en creusant de nouveaux espaces dans l'existence de Matt Murdock, pour en bouleverser le parcours. Cela reste tout de même une mise en bouche de qualité, trop souvent snobé par les puristes puisque Miller n'est pas l'artisan principal des choix opérés durant ces épisodes. Pour ce qui est d'une publication vf, outre les vieux Strange et les adaptations pas toujours respectueuses et complètes, il existe chez Panini la collection Marvel Icons, qui héberge la prestation de Frank Miller. Cette première phase constitue le menu du tome 0.
(à suivre, la semaine prochaine)
L'époque McKenzie est en fait loin d'être inintéressante, elle comprend certes des moments faibles (un épisode avec Hulk lâché dans New-York, que Daredevil parvient à raisonner, tout en finissant dans un bien sale état aux urgences...) mais aussi de petites pépites, comme l'enquête patiemment conduite par le journaliste Ben Urich, qui a compris que Matt Murdock est aussi un super type costumé, et rassemble indices puis preuves, avant une confrontation à l'hopital, dont la résolution est probablement un peu trop hâtive. Miller lui fait des siennes à travers le dessin, dans un style bien plus réaliste et conventionnel que ce qu'il fera par la suite, mais son story telling, sa façon de rendre chaque planche cinématographique, son rendu de la ville sombre et de la population qui y grouille, son utilisation de certaines vignettes allongées ou étirées, permet de donner une vie, un cachet, un caractère crapuleux à son travail, et c'est exactement ce qui convient à Daredevil. Personne depuis Gene Colan n'avait été capable de comprendre et traduire cela.
Reste à approfondir le personnage, lui offrir une crédibilité grâce à des trouvailles extraordinaires (une parmi d'autres, la plus significative, Elektra) mais cela ne tardera pas. On s'en rend compte quand on feuillette le numéro 164, où Daredevil raconte ses "origines" à un Ben Urich qui a tout compris. Les grandes lignes de la tragédie fondatrice sont là, mais il manque tout de ce souffle épique qui transforme un adolescent handicapé en un héros sans peur et capables de prouesses. Ici tout est emballé très vite, et ce qui en découle est certes un super héros fonctionnel, mais qui n'a pas encore cette épaisseur que Miller va lui conférer, en creusant de nouveaux espaces dans l'existence de Matt Murdock, pour en bouleverser le parcours. Cela reste tout de même une mise en bouche de qualité, trop souvent snobé par les puristes puisque Miller n'est pas l'artisan principal des choix opérés durant ces épisodes. Pour ce qui est d'une publication vf, outre les vieux Strange et les adaptations pas toujours respectueuses et complètes, il existe chez Panini la collection Marvel Icons, qui héberge la prestation de Frank Miller. Cette première phase constitue le menu du tome 0.
(à suivre, la semaine prochaine)
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