Ami des profondeurs insondables, soyez les bienvenus au point Némo : c'est là, au fin fond de l'océan, que l'humanité enterre tous les déchets provenant de la conquête spatiale, qu'elle ne sait pas où entasser autrement. Or, voici qu'un jour un objet en provenance de l'espace, non identifié, finit par s'abattre exactement au point Némo, comme s'il était au courant de nos conventions terriennes. Un bateau militaire est rapidement dépêché sur place et un sous-marin expérimental très performant, l'Andromeda, secrètement envoyé sur le site, afin d'établir un premier contact avec ce que les militaires et les haut responsables des différentes nations pensent être probablement une forme de vie extraterrestre. Les scientifiques et intervenants à bord du sous-marin sont issus de différentes nationalités et se forgent rapidement la conviction qu'ils sont aussi dispensables : en cas de pépin, personne n'est au courant de ce qu'ils sont censé faire et du coup, s'ils venaient à disparaître, personne ne les pleurerait vraiment. Les profondeurs sous-marines, ce ne sont en réalité pas que de jolis poissons multicolores qui font le bonheur des chaînes "nature et découvertes", c'est aussi et surtout un lieu propice aux récits horrifiques, où les ténèbres vous enserrent, la pression vous écrase, où aucun être humain ne peut véritablement vivre, sauf celui qui est l'incarnation du croisement entre l'Homme et Atlantide, c'est-à-dire Aquaman. Le roi des mers est toujours là pour prêter main-forte quand les choses dérapent, pour apparaître fugacement telle une légende, punir les coupables et sauver ceux qui peuvent et doivent l'être. Un Aquaman presque spectral, qu'on voit intervenir de page en page dans une armure absolument magnifique, synthèse très réussie de coraux marins, de couches sédimentées et d'habits royaux. Il n'y a pas à dire, il a fière allure, avec ce look inédit pondu par Christian Ward.
Ram V, le scénariste indien de cette histoire, est en train de se bâtir une très solide réputation ces dernières années, avec des récits d'horreur capables de mêler aussi bien la métaphysique que la monstruosité la plus repoussante. Ici, il est question d'une menace qui n'est pas exactement ce qu'elle semble au départ, dont l'origine va se révéler peu à peu et qui a le pouvoir d'agir non pas sur la réalité extérieure mais sur la vie intérieure de chacun des acteurs présents dans le sous-marin Andromeda. Ils ont tous leurs propres failles, leurs démons et ce sont ces derniers qui vont être le véritable danger, qui va servir de carburant dans cette aventure, qui est tout de même un peu emberlificotée. Il faut être honnête, il ne se passe finalement pas grand-chose dans ce qui est un thriller d'épouvante psychologique en conditions extrêmes et ultra confinées. On aurait pu rêver à une histoire un peu plus simple, un peu moins abstraite, néanmoins on se consolera avec le dessin de Christian Ward : pour peu que vous soyez des fans de ce type de travail, vous allez probablement vous régaler. Ici, nous sommes dans le digital le plus pur avec un traitement des couleurs qui est à la fois proche du féerique, mais aussi de la pénombre, de l'étouffement. Ward a cette faculté de faire apparaître l'irréalité, pour en tirer quelque chose de crédible et de bien présent. Il alterne les vignettes de petite taille et les plans qui respirent, capable d'infuser à Andromeda cette grandeur majestueuse et silencieuse qui convient à ce genre d'album. Nous l'avons ainsi plus apprécié comme une démonstration artistique intéressante que comme un véritable récit passionnant. Quant à Aquaman, notre roi des mers, il est finalement assez discret et joue son rôle de légende plus que d'homme proche de ses semblables. Du reste, qui peut vraiment être proche d'Aquaman ?
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