MADAME WEB : LE VIDE DERRIÈRE LA TOILE


 Certains médias ont pris l'habitude d'attendre les spectateurs à la sortie des salles, le mercredi, pour leur demander leur opinion sur les nouveautés du jour. Dans le cas de Madame Web, il convenait de se placer plutôt dans une des petites rues derrière le cinéma, là où débouchent les issues de secours qui permettent aux cobayes honteux de quitter l'établissement, sans trop se faire remarquer. Vous l'avez peut-être déjà lu ou entendu un peu partout, ce film est très mauvais; pour autant, vous avez peut-être cette fibre en vous, cette envie de vouloir croire à l'impossible, au complot. On vous aurait menti ! Et bien non, il n'y a rien à sauver dans Madame Web. Ou plutôt si, la plastique des actrices et en particulier de Dakota Johnson et Sydney Sweeney, qui ont su raviver notre intérêt pour leur long-métrage sur le red carpet américain, lors de la présentation officielle. Mais une fois sur grand écran, on frise la catastrophe industrielle majeure. En fait, tout est bancal, de l'histoire inexistante aux effets spéciaux absolument illisibles, qui viennent plomber une dernière demi-heure où on n'arrive même plus à comprendre ce qui est en train de se produire sous nos yeux. Cassandra Webb est une secouriste qui a la faculté de savoir ce qui va se produire à l'avance, une sorte de précognition qu'elle a hérité d'un peuple araignée et d'une bestiole au venin très particulier, dans la jungle du Pérou, que sa propre mère était venue découvrir. Cette dernière a été abattue de sang-froid par le grand méchant du jour, Ezekiel (Tahar Rahim), qui n'a aucune autre motivation si ce n'est de venger les avanies qu'il a subies quand il était petit et d'assouvir son besoin d'être toujours plus riche. Certes, il fait des cauchemars qui impliquent trois jeunes filles, en apparence trois cosplayeuses dans des costumes improbables, qui rappellent vaguement ceux des comic books (de Julia Carpenter, Anya Corazon et Mattie Franklin). Cette vision du futur trouve évidemment un écho dans le présent, avec nos trois adolescentes qui sont autant de caricatures telles qu'imaginées par un adulte dépassé. Et qui plus est, elles ne disposent absolument d'aucun pouvoir. Les flash forwards ne servent qu'à annoncer un événement qui n'aura jamais lieu. Traquées et pourchassées, les trois donzelles trouve l'aide de Cassandra qui les prend sous son aile. Nait alors une dynamique qui voudrait être pétillante et drôle, mais qui la plupart du temps est juste consternante.




Dès votre plus jeune âge, l'école vous apprend la nécessité d'employer des conjonctions de coordination, l'importance d'établir une liaison entre différents paragraphes pour former un tout cohérent. Au cinéma également, les scènes doivent avoir une unité d'intention pour que le film reste crédible. Ici, ce n'est clairement pas le cas. Madame Web empile les poncifs et des raccourcis, à commencer par le peuple araignée qui sauve Cassandra, quand elle n'est qu'un bébé à naître, et dont l'apparence sur grand écran est profondément ridicule. Aucune caractérisation du grand méchant, comme nous l'avons déjà dit, aucune logique dans la réunion des trois adolescentes; pire encore, la transformation régulière d'Ezekiel qui ressent le besoin d'endosser un costume arachnéen bon marché, qui est d'un mauvais goût extrême, pour liquider ses adversaires. Qu'est-ce qui le pousse à se grimer ainsi, le mystère est vraiment déroutant. Cassandra, qui a un certain point du film décide de partir au Pérou sur les traces de sa mère et qui comme par hasard, en l'espace de quelques minutes, retrouve tout ce qu'elle est venu chercher, toutes les réponses à ses questions, c'est aussi un choix paresseux. Parce qu'il faut bien l'admettre, à un moment donné, plus personne ne savait comment les offrir aux spectateurs, ces réponses, alors on leur balance le tout au visage, histoire de signifier que ça y est, on est arrivé au bout du scénario et que désormais, jusqu'au crédits de fin, ça va être du grand n'importe quoi, en roue libre. Et en effet, la résolution de Madame Web s'accomplit dans une bataille ultime, sur le toit d'un entrepôt, totalement illisible ! Les personnages courent, frappent, tombent, la caméra les suit avec frénésie, tremble de partout, mais on n'y comprend absolument rien. C'est visuellement proche de l'épileptique et de l'amateurisme. Bref, il n'y a absolument rien à sauver dans ce long métrage qui met en scène un personnage totalement méconnu du grand public, qui n'a donc absolument aucune raison de donner sa chance à un produit bâclé, qui plus est incendié par la quasi-totalité des critiques. Sony compte bien récidiver un peu plus tard dans l'année avec Kraven et même un énième Venom; c'est un des plus grands mystères du 7e art que cette insistance pathétique. Certes, il s'agit de renouveler les droits d'exploitation des personnages, mais pour autant, doit-on se contenter de pitreries aussi grotesques ?






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