SUPERMAN THE WORLD : ANTHOLOGIE COSMOPOLITE POUR LE KRYPTONIEN


 Il n’y aura donc pas de jaloux. Après Batman : The World, cette anthologie cosmopolite qui offrait une série d’épisodes courts mettant en scène le Chevalier Noir dans divers contextes nationaux, c’est au tour de Superman d’avoir droit au même traitement. Le timing, il faut le reconnaître, est parfait : l’Homme d’Acier est plus que jamais sous les feux des projecteurs. Commençons pour une fois, par deux remarques qui ne sont pas des plus flatteuses, mais qu’il convient néanmoins d'aborder librement. La première concerne les équipes artistiques mobilisées ici. Il faut le noter : le principe d’une représentation “nationale” est parfois réduit à un simple prétexte. Certains auteurs choisis, comme Jorge Jimenez pour l’Espagne ou Stevan Subić pour la Serbie, sont déjà des habitués des super-héros, et travaillent régulièrement pour DC Comics. Leur confier une histoire se déroulant dans leur pays d’origine est une idée logique, certes, mais qui s’avère peut-être moins surprenante – et donc moins stimulante – que lorsqu’un véritable pont culturel est établi entre DC et un autre univers graphique. Du coup, on préférera les contributions issues d’auteurs extérieurs à la sphère super-héroïque traditionnelle. Par exemple, Fabio Celoni pour l’Italie, bien plus connu pour son travail chez Disney, propose une relecture plus audacieuse.. Deuxième réserve : les histoires elles-mêmes. Trop souvent, elles cèdent à la tentation du cliché touristique. À Florence, Superman affronte une intrigue directement inspirée de La Divine Comédie ; en Allemagne, il est question d’un acier ultra-résistant ; au Brésil, au Cameroun ou au Mexique, il se heurte à des divinités locales ou à des échos incas. Bref, on surfe sur la carte postale, sur le folklore facilement identifiable, au détriment de la singularité ou de la profondeur. Un soupçon d’audace narrative n’aurait pas été de trop. À ce jeu-là, la France s’en tire mieux que beaucoup. L’épisode signé Sylvain Runberg (avec Martial Toledano) s’affranchit des clichés en nous immergeant dans un enfer urbain très quotidien : celui du métro parisien. La population y est… disons, pas toujours des plus chaleureuses. Offrir des vacances romantiques à Lois Lane dans la Ville Lumière n’a donc rien d’une sinécure, et le couple finira par s’échapper vers une destination bien plus logique – et recommandable – pour deux amoureux venus de Métropolis : la Provence. Ce récit, drôle et malin, compte parmi les meilleurs de tout le recueil.



Il est suivi, juste derrière, par un autre excellent épisode, lui aussi particulièrement éclairant sur ce qui fait l’essence même de Superman. Et comme par hasard, il s’agit du récit américain, signé Dan Jurgens et Lee Weeks – ce dernier prouvant une nouvelle fois qu’il est un dessinateur exceptionnel. Dans cette histoire, Superman affronte une créature gigantesque venue d'ailleurs, que l’armée s’empresse de vouloir éliminer sans chercher à comprendre les raisons de son apparition. Mais Superman, ce n’est pas la peur de l’Autre. Ce n’est pas un va-t-en-guerre, ni un soldat obtus. C’est un homme – ou plutôt un surhomme – qui tente toujours de comprendre ce qui pousse l’adversaire à agir. Il tend la main avant de brandir le poing. Et ces quelques pages, d’une grande justesse, condensent à elles seules l’éthique fondamentale du personnage, et la recette de son succès depuis plus de 85 ans. S'agissant d'une anthologie, il serait totalement inutile de dresser une liste exhaustive de tous les artistes et des différents synopsis, pour chacun des épisodes. Je vous laisse le plaisir de découvrir et de picorer ; clairement, certains sont vraiment très touchants et vont vous plaire énormément, d'autres sont probablement plus anecdotiques et cela va dépendre aussi de votre sensibilité. On retrouve un Superman à ses débuts pour la parenthèse en Inde, et même un superman beaucoup plus âgé, pour ce qui est de la République Tchèque. J'en ai déjà parlé plus haut, mais j'ai aimé les pages réalisées par Jorge Jimenez, qui emmène Superman dans sa ville natale de Granada, pour une journée malheureusement sans super pouvoirs, où il va faire tout un tas de petites rencontres et tenter de rester fidèle à ses habitudes, sans être capable de voler ou être invulnérable. Toute cette petite histoire reflète très bien ce que nous savons et aimons de Superman. Petite déception pour ceux qui auraient aimé retrouver Krypto dans les différents épisodes, ou qui aurait souhaité que les récits s'ouvrent à d'autres membres de la famille, comme Supergirl : ici c'est Superman et uniquement Superman, avec en plusieurs occasions lLois Lane et plus rarement Lex Luthor, des histoires de kryptonite. Une plongée donc vers l'essentiel, qui comme toutes les tentatives de ce genre n'a pas vocation à entrer au Panthéon du genre mais juste à souligner l'universalisme d'un personnage, qui peu importe sous quelle latitude on l'observe et on le lit, conserve des caractéristiques qui font de lui le héros part excellence, une image de ce que l'être humain peut avoir de meilleur. Silence final pour le dernier épisode au Japon, qui prouve que Superman et mangas sont aussi bien assortis que le jus de pomme et le saumon. 




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