SIEGE OF DARKNESS : GHOST RIDER DANNY KETCH EPIC COLLECTION VOL.6


 Dans les années 1990, Marvel aimait les chaînes, les flammes, le cuir noir et les entités infernales. Avec Siege of Darkness, on tient l’illustration parfaite de cette période où tout devait être plus sombre, plus violent, plus mystique – quitte à y laisser un peu de cohérence en route. Ne cherchez pas dans votre collection de vieilles revues Lug puis Semic, il est question aujourd'hui de matériel inédit, du sixième volume de la Epic Collection consacré à Ghost Rider Danny Ketch, le Rider incontournable pour ceux qui sont nostalgiques de cette période gothique. Tout commence là où Road to Vengeance s’achevait : Lilith, mère des monstres, revient sur le devant de la scène accompagnée de ses enfants dégénérés, les Lilin. Mais surprise : elle a changé de patron. Fini Centurious, place à Zarathos, le démon très intime qui hante les origines mêmes du Ghost Rider. Face à eux, une brochette de héros et anti-héros en quête de rédemption ou de vengeance : Ghost Rider, Blaze, Vengeance (une sorte de Rider bis, incarné par Michael Badalino, un flic aux méthodes musclées), Morbius, Doctor Strange, les Nightstalkers et quelques seconds couteaux plus ou moins possédés par leurs démons personnels. Sur le papier, tout est réuni pour un grand événement horrifique à la sauce Marvel : l’apocalypse apporté par des brumes démoniaques, des civils carbonisés par paquets de douze, des motos en feu qui déchirent la nuit, des épées mystiques, des trahisons, des tunnels secrets sous les cimetières, des rituels et, bien sûr, un vieux grimoire ou deux (le Darkhold joue un rôle central dans cette histoire). C’est une parodie d'Inferno sous stéroïdes, plus proche de Hellraiser que de Harry Potter : sérieux, brutal, sans humour (il y en a un peu, mais pas de quoi se vautrer en hurlant de rire). Mais si Siege of Darkness a tout du blockbuster infernal sur le papier, c’est aussi un chaos éditorial en 17 parties, où le récit semble aussi perdu que ses héros. Difficile de suivre la trame d’un épisode à l’autre tant la qualité et le style des dessins fluctuent : certains numéros baignent dans une ambiance poisseuse et envoûtante, d’autres sombrent dans la confusion visuelle, à tel point qu’on se surprend à se demander qui sont parfois les personnages et si l'artiste au travail sur certaines planches est un vrai professionnel, ou un amateur recruté en convention contre un ou deux sketchs.



Le vrai plaisir vient de cette galerie de personnages en roue (crantée) libre. Tout le monde y passe, tout le monde a son moment de gloire ou de chute. Certains se font liquider, d'autres disparaissent, quelques-uns réapparaîtront dans une autre série, et d’autres sombreront dans l’oubli (mention spéciale au pauvre Pilgrim, rapidement évaporé). Morbius trahit tout le monde puis se ravise, Doctor Strange tente de garder le cap avant de subir une métamorphose, et la jeune Jinx explose de rage quand elle croit que Modred a tué Louise Hastings. Et puis il y a Salomé, la Sorcière Suprême d’avant la continuity traditionnelle, qui débarque sans prévenir pour voler la vedette à tout le monde et prépare son propre arc narratif ailleurs. On adore. Ou on est consterné. L’ensemble se lit comme une descente aux enfers orchestrée par un éditeur possédé : ça sent le souffre, la panique narrative, les deadlines trop serrées, mais ça se lit d’un trait. Il y a quelque chose d’étrangement attachant dans cette volonté de tout mettre sur la table – y compris ce qu’on n’avait pas demandé. Une sorte de carnage mystico-gothique qui joue la carte de la surenchère, quitte à ne plus trop se souvenir de ce qui a été raconté dans l'épisode précédent. Ce qui peut s'avérer frustrant dans cet album, c'est finalement le peu de pages qui sont réellement consacrées à Ghost Rider; il n'est qu'un personnage parmi tant d'autres et même si c'est dans son titre que nous trouvons le dessinateur le plus intéressant, à savoir Ron Garney, il n'empêche, nous avons bien peu de matière à nous mettre sous la dent. C'est pourtant une période décisive car petit à petit, le Rider aussi, sous sa forme démoniaque, s'est attaché à Stacy, la jeune femme amoureuse de Danny… et c'est toujours dans ce même volume que la révélation va avoir lieu : l'attirance qu'elle éprouve pour ce motard à tête enflammée et tout à fait compréhensible puisqu'il s'agit bel et bien de son fiancé. Le reste du temps, tous les héros de cette histoire sont trop occupés à se taper dessus, à disparaître sur le plan mystique, à souffrir et à jurer vengeance, pour qu'on puisse vraiment s'attacher à ce qui leur arrive. Bref, c'est la sinistrose la plus totale, probablement cet instant dans l'histoire ou les comic books qui étaient devenus gothiques à souhait ont carrément viré dans le délire, sans se soucier de ce qu'ils étaient en train de raconter. Siege of Darkness aurait pu être le renouveau glorieux des Midnight Sons. Ce fut leur chant du cygne. L’événement censé les propulser a fini par les consumer. Si vous lisez l'anglais décemment, vous avez une chance de tout dévorer d'un coup. Courage ?



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