"Les Yeux dans l'Obscurité Primordiale" ouvre le bal. Powell et Harren nous entraînent dans une aventure steampunk victorienne où un docteur ambitieux et un ingénieur un peu fou s’aventurent dans l’espace. Mais une présence spectrale hante leur vaisseau… Mars peut attendre, car l’horreur a déjà pris place à bord. C'est surtout la tension psychologique qui domine, avec un zeste de science sans conscience. "Le Kelpie", signé Becky Cloonan, plonge dans une ambiance plus terre-à-terre, mais non moins effrayante. Dans un village isolé, un fantôme surnommé le Kelpie rôde. Ceux qui s’approchent trop près de cette créature finissent par disparaître. Quand il débarque un soir avec son cheval et tout ruisselant à la porte du logis d'une charmante demoiselle, on comprend que la rencontre ne va pas être sans conséquences funestes. "La Nuit du Jabberwock", par Mike Mignola, est une aventure entre rêve et réalité. Un homme, au coin du feu, partage un souvenir étrange avec sa famille : une rencontre qui défie la logique et le temps. Mystérieux et typiquement "Mignolien". Avec un langage qui oscille entre verbiage victorien et élucubrations linguistiques. Si vous ne comprenez pas tout, personne ne vous en voudra, j'ai moi-même des doutes à ce sujet. Enfin, "Le Cadeau du Major Courtenay", une création du seul Powell, revient à l’époque victorienne avec une histoire de noblesse, de secrets, et… d’intrus inquiétants. Quand un vieil ami et son domestique débarquent, le manoir devient le théâtre de révélations surprenantes. Les invités décident de coucher dehors, dans une tente, et semblent bien décidés à ne pas entrer dans la somptueuse demeure. Et lorsque ça se produit, c'est le drame ! Dans l’ensemble, Petits Contes Macabres est une déclaration d’amour au genre fantastique et horrifique. Les amateurs de frissons et de récits surnaturels trouveront ici de quoi nourrir leurs insomnies, tandis que les fans des auteurs apprécieront le mariage harmonieux entre leurs styles distincts. Et si le ton des histoires est inégal, le charme opère, au point qu'on regrette la faible pagination de l'ensemble. Alors, à défaut de fantômes dans votre salon pour les fêtes de fin d'année, voilà un petit cadeau apprécié : digne compagnon d'une lecture hivernale, près de la cheminée, pourquoi pas accompagnée d'une tasse de thé bien fumante. Si vous optez pour avoir de la compagnie, vérifier bien qu'elle sera un peu plus inoffensive que celle qui déroule les contes de cet album !
PETITS CONTES MACABRES : TERREUR DE GROUPE AVEC HARREN ET SES AMIS
L'APPEL À CTHULHU : LE TALENT DE NORM KONYU CHEZ BLACK RIVER
Alors oui, je l’avoue sans rougir (ou presque) : je n’ai jamais aimé Lovecraft. Voilà, c’est dit. Ne tapez pas trop fort, ça fait mal. Mais reconnaissons-le, même si ses idées et son style me laissent de marbre, cet album parvient à transformer tout ça en un véritable plaisir visuel et narratif. Et rien que pour ça, il mérite qu’on s’y attarde. D'autant plus que tout le processus créatif est disséqué minutieusement dans une partie de "bonus" qui est aussi conséquente que celle consacrée aux illustrations. Vous pouvez y trouver une interview très complète, des exemples de la manière dont Norm Konyu passe du sketch préparatoire au fignolage de sa production sur Photoshop. C'est pertinent car à première vue, le procédé peut sembler simple, voire naïf. Or, il n'en est rien, et on se rend compte de la tâche avec toutes ces précisions nécessaires. Black River propose donc un ouvrage qui ressemble surtout à un artbook. En version originale, le travail de Norm Konyu avait été proposé sous la forme d'un financement participatif, qui était déjà dans la poche au bout de soixante minutes. C'est devenu une véritable production grâce à Titans Book, et aujourd'hui c'est disponible en français. On pourra juste émettre, à défaut de réserves, quelques doutes sur certains choix de traductions qui auraient pu être plus inspirés. De même, on attend avec beaucoup d'intérêt ce que proposera l'éditeur dans les mois prochains. Nous avions un peu l'impression d'une pause prolongée, ces temps derniers, et d'un manque de direction claire dans la ligne éditoriale. Ce type de livre est peut-être une ressource à explorer pour le futur.
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LE PODCAST LE BULLEUR PRÉSENTE : LA 3e KAMERA
- La sortie de l’album Les météores que nous devons au scénario de Jean-Christophe Deveney, au dessin de Tommy Redolfi et le tout est édité chez Delcourt
- La sortie du deuxième tome de la série Inoubliables que l’on doit à Fabien Toulmé et qui est édité chez Dupuis
- La sortie du 7e tome de la série Les aigles de Rome, un série que l’on doit à Enrico Marini et aux éditions Dargaud
- La sortie de l’album Eurydice que signe Lou Lubie au scénario, Solen Guivre au dessin et qui est édité chez Delcourt
- La sortie de l’album Les femmes ne meurent pas par hasard que l’on doit au scénario de Charlotte Rotman qui suit l’avocate Anne Bouillon, au dessin de Lison Ferné et c’est publié aux éditions Steinkis
- La réédition en intégrale du Spirou que l’on doit à Émile Bravo baptisé L’espoir malgré tout, un titre paru aux éditions Dupuis.
SOMNA : LE PLAISIR DÉMONIAQUE DE CLOONAN ET LOTAY
Somna est le fruit d'une équipe artistique exclusivement féminine. Becky Cloonan, qui s’occupe de la majeure partie du « monde réel », démontre qu'elle a vraiment atteint une forme de maturité enviable. Elle excelle dans la représentation des costumes d'époques, apporte un soin méticuleux aux détails. Tula Lotay, en revanche, se concentre sur les rêves. Ses planches sont construites sur un modèle différent et plus libre, elles privilégient des gros plans suggestifs : des mains, des visages, des corps dans des poses lascives. C'est elle qui doit insuffler la charge érotique puissante qui porte toute l'œuvre et elle y parvient particulièrement bien ! Son usage de couleurs vives confère à la plupart des scènes un attrait tentateur et onirique bienvenu, et le lecteur parvient vite à ressentir ce qui faire peur et dans le même temps attirer irrésistiblement Ingrid, qui accepte l'inavouable et y succombe rêve après rêve. Car oui, Somna parle de sexe, et bien que les dessins ne soient pas non plus pornographiques (des caresses appuyées, des corps nus qui s'étreignent, mais les parties intimes restent dans l'ombre) les scènes de passion physique sont celles qui rythment l'ensemble, qui caractérisent l'évolution du personnage féminin, qui vont aussi amener à sa chute. Un choix narratif et thématique qui sied parfaitement au style de Lotay, dont le travail a toujours porté une dimension érotique affirmée, visible même dans ses couvertures d’œuvres dites grand public. Une tension émerge entre ce que les deux artistes essaient de raconter et cette sensualité omniprésente. Les personnages féminins, et occasionnellement masculins, sont des objets de désir magnifiés, ils sont tous beaux, esthétisés, sauf le prêtre libidineux qui est une caricature de cette religion abjecte dans sa volonté de dominer grâce à l'hypocrisie. Le démon existe bien, mais il est à trouver dans le cerveau malade de ceux qui voudraient nier l'accès à la sexualité, plutôt que dans la luxure présumée de celles qui acceptent d'embrasser le plaisir physique, comme la plus naturelle des choses. Somna a remporté l'Eisner Award de la meilleure nouvelle série, cet été à San Diego. Venant de la culture puritaine et chafouine par excellence, la récompense n'en a que plus de prix. Il s'agit aussi, soulignons-le, du premier album targué Delcourt, qui adapte en Vf des histoires publiées chez DSTLRY, un nouvel éditeur qui compte dans son catalogue naissant et à venir des poids lourds du secteur. L'ouvrage est d'une beauté évidente, et brille comme un cadeau implacable.
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