SPIDER-MAN LIFETHEFT ET LA SAGA DES VRAIS FAUX PARENTS DE PETER PARKER


 Finissons l'année 2021 avec du vintage, voulez-vous. Back to 1994 avec Lifetheft. Voici une histoire qui nous ramène à l'époque de Strange, le mensuel des super-héros publié par Lug puis Semic. Tout commences lorsque la professeure Sanchez met au point un appareil dont les caractéristiques sont tout autant formidables qu'effrayantes. Il s'agit du Juvenator, un engin capable de transférer l'énergie vitale d'un individu à un autre; autrement dit si vous trouvez un cobaye et que vous le reliez à la machine, vous pouvez en "aspirer" la vie même, pour votre profit. Le Vautour, qui purge une peine de prison, a appris l'existence de cet appareil et puisqu'il est désormais très âgé et mourant (atteint d'un cancer) il décide de s'évader, pour s'emparer de l'engin, retrouver sa jeunesse et donc survivre, en exerçant le métier qu'il aime le plus, celui de criminel patenté. Seulement voilà, comme d'habitude, Spider-Man se dresse sur sa route. C'est un moment un peu particulier pour le Tisseur de toile puisque ses deux parents, Richard et Mary Parker, que tout le monde croyait décédé depuis longtemps, ont fait réapparition les mois précédents avec l'excuse d'avoir passé vingt ans dans les geôles soviétiques. Les époux Parker en repris leur place au côté du fiston et de la Tante May. Cette dernière a des doutes sur leur véritable identité et n'accepte pas la situation sereinement. Tous les lecteurs évidemment ont comprit qu'elle a raison. Peter Parker de son côté a tendance à être naïf et il finit par se laisser convaincre qu'il a enfin retrouvé des parents jusque là disparus. Cela va même l'inciter à révéler sa véritable identité; erreur tragique, le voici qui se démasque devant ceux qu'il pense être des êtres chers, et qui dès l'instant où la double identité de Spider-Man est révélée, jettent le masque et deviennent ce qu'ils sont vraiment, des sortes d'androïdes sophistiqués, des formes de vie artificielles mises au point par le Caméléon, dont l'objectif était initialement de découvrir l'identité secrète du héros.



Tout le monde sait que Peter Parker, à travers les très nombreuses photos publiées, a des connexions évidentes avec Spider-Man, aussi le Caméléon a-t-il décidé de lui soutirer indirectement des informations avec ce subterfuge technologique. Vous trouvez ça tiré par les cheveux? Ne vous inquiétez pas, c'est l'opinion de tout le monde à l'époque, et il faut vraiment beaucoup d'imagination pour parvenir à gober cette histoire. Néanmoins, sur le moment, ce fut un choc bien typique des années 90 où tout était possible y compris l'invraisemblable le plus complet. C'est David Michelinie qui écrit cette histoire qui ne s'embarrasse pas de détails crédibles et c'est un Mark Bagley désormais bien installé sur le titre, et très à l'aise avec les différents personnages, qui illustre l'ensemble. Bien entendu la révélation de l'identité de Spider-Man entraîne un drame. Si le "père" veut poursuivre sa mission jusqu'au bout, la "mère" elle se laisse tromper par des sentiments humains induits et elle finit par se comporter comme une véritable génitrice aimante et protectrice. Elle décide de protéger le secret du fiston, alors que son mari lui est prêt à le vendre. Il va s'en suivre alors une terrible bataille où les créatures artificielles vont se révéler pour ce qu'elles sont, c'est-à-dire des sortes de monstres activables par télécommande. En parallèle à tout cela le mariage de Peter Parker et Mary Jane connait quelques turbulences, dû au fait que la confiance, c'est quelque chose qui s'entretient. Et Spider-Man est le roi des non-dits et de la culpabilité permanente. Lifetheft est disponible dans le dernier volume de la Epic Collection Spider-Man paru à ce jour, aux Etats-Unis. Il faudra encore patienter pour que la collection des Intégrales Panini en arrive à ce stade. Juste derrière, on peut trouver un crossover du nom de Pursuit où les événements sont approfondis à travers les différents titres arachnéens de l'époque, et où la trame se densifie et se complexifie encore plus (avec les plans du Bouffon Vert, nous en parlerons bientôt). Si pour vous la capacité de suspendre l'incrédulité est une seconde nature, ces épisodes ont de quoi vous retourner le cerveau. En plus, c'est une injection de nostalgie immédiate! 


J'en profite pour vous remercier très sincèrement pour votre fidélité au blog et au Mag' mensuel. 2021 fut une année difficile à bien des égards, aussi plus que jamais c'est une chance d'avoir un public correct, érudit, passionné, avec qui on peut échanger chaque jour sur les réseaux sociaux, à commencer par notre rendez-vous indispensable : www.facebook.com/universcomics

Bonne année et rendez-vous en 2022!

A.D AFTER DEATH : UN REMÈDE À LA MORT

A.D After Death est avant tout une fascinante opération de narration, avec une histoire divisée en trois gros chapitres, et racontée en alternant prose et bande-dessinée. Scott Snyder se lance dans une aventure audacieuse, celle d'un monde où le remède à la mort a été trouvé, permettant ainsi aux êtres humains de vivre presque éternellement, mais à condition d'en payer le prix.
Le scénariste a recours au journal intime d'un certain Jonah Cooke, pour nous livrer une vision intimiste et personnelle de ce qui s'est produit, des années d'enfance du protagoniste, qui assiste impuissant à la maladie de sa mère (qui se manifeste au départ par des malaises subits et impressionnants) au moment où la situation s'emballe, et l'humanité se découvre en péril. Relire cela au moment au on claironne 200 000 cas de covid 19 journaliers en France, ça donne des suées.
Snyder a le mérite de vraiment soigner la prose, le texte, qui par endroits recèle de véritables trouvailles pertinentes, des petites phrases ou des réflexions intelligentes et marquantes, mais il est souvent contraints de diluer sa pensée dans une profusion de détails sensoriels ou cognitifs qui peuvent perdre le lecteur de passage. After Death exige une attention de tous les instants, et a été conçu comme un roman dont les différentes parties sont fragmentées par des passages dessinés, confiés à Jeff Lemire. Celui-ci reste fidèle à sa veine poétique et sensible, avec un trait en apparence grossier ou caricatural, qui privilégie l'émotion, une forme de tristesse existentielle qui s'unit à merveille avec le discours de Snyder, et une mise en couleur à l'aquarelle qui peut sembler, sur certaines pages, de toute beauté. A un certain moment il est même question de l'invention d'une nouvelle couleur, et on pourrait y croire, tant Lemire est persuasif, avec trois fois rien. 

Jonah Cooke est en permanence obliger de noter dans des carnets tous les instants importants de sa (longue) vie, car la perte de mémoire, le passé qui revient, encore et encore, comme une boucle, et l'impossibilité d'en tirer de vraies leçons, sont au centre de cet ouvrage. L'écriture est alors le moyen de sauver le monde, notre monde intérieur, celui qui se délite et s'effiloche, dès lors que l'éternité nous tend les bras, qu'il n'existe plus de temporalité humaine pour scander les ans, et nous rapprocher d'une fin qui nous fait apprécier et jouir du (bref) parcours.
Passé et présent finissent par se recouper, se confondre, dans un jeu de piste narratif qui trouve une explication rationnelle à la toute fin, avec en définitive une importance moindre attachée au remède à la mort en lui-même, et ses implications sociales et scientifiques. C'est une interrogation existentielle qui irrigue cette œuvre insolite, qui la dirige vers des sommets poétiques sur certains points, et la rend si aride sur d'autres. On regrettera juste que les illustrations de Lemire, dans les parties en prose, se contentent de donner dans la redondance, ou la figuration minimaliste, plutôt que de magnifier un texte en soi soigné.
A.D After Death a toutes les chances de vous dérouter, éloigner, ou ensorceler. Une expérience de lecture à tenter, qu'on se le dise! 


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GEORGE PEREZ : LE PORTFOLIO DES TEEN TITANS


Toutes les nouvelles ne sont pas bonnes à prendre. comme vous le savez (presque) tous, George Perez a récemment communiqué au sujet de son état de santé, et les nouvelles ne sont franchement pas bonnes. L'artiste avait déjà décidé de se retirer de la vie d'artiste professionnel, toujours pour les mêmes raisons, mais cette fois la gravité de ce qu'il a annoncé lui-même sur les réseaux sociaux ne donne plus guère d'espoir. Un cancer du pancréas en phase 3 et incurable, avec une espérance de vie de six mois à un an. C'est probablement la nouvelle la plus dramatique de cette fin d'année, côté comics américains, et c'est la raison pour laquelle nous souhaitions avoir une pensée pour celui qui nous a tant fait rêver, en cette période de fête où vous avez peut-être offert ou (re)lu une des œuvres de Perez, comme les Teen Titans, par exemple? 


Les Titans, donc, restent marqués profondément par le travail de Perez. Avec Marv Wolfman, il a su donner corps à un groupe de jeunes héros, désireux de s'affranchir de leurs ainés, mais en proie aux doutes inhérents à l'âge, aux relations sentimentales tumultueuses, aux secrets de famille douloureux, à la trahison.
Voici donc une petite série de "pin-up" qui nous rappellent le talent de Perez, et l'importance de son run sur une série devenue, de son fait, une sorte de madeleine pour ceux qui l'ont découverte en temps réel. L'art, lui, est immortel. 








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SPIDER-MAN ROUND ROBIN : L'EMPIRE SECRET EN 1991

 


L'Empire Secret, ça vous dit quelque chose? Un peu dans le genre de l'Hydra, mâtinés de Ku-Klux-Klan, les membres de cette secte criminelle se baladent cagoulés et portent un numéro d'appartenance sur leurs chasubles. Ils trament dans l'ombre, et jamais rien de bon. On les retrouve dans une saga en six parties, publiée à l'époque dans les pages de Strange, la mythique revue Lug/Semic. Au States, Round Robin sera présenté à un rythme bimensuel en 1991, et ce sera l'occasion pour Al Milgrom de laisser à David Michelinie, le scénariste habituel de la série Amazing Spider-Man, le temps de souffler et de préparer ses futures intrigues.
En fait, c'est l'editor Danny Fingeroth qui a passé "commande" de ces épisodes, car il souhaitait que Spidey s'acoquine avec des noms en vogue parmi les anti-héros des années 90. Du coup, le tisseur fait équipe avec Moon Knight, Darwhawk, Nova, Night Thrasher (Fighter, en Vf) et le Punisher. Les méthodes de la plupart d'entre eux sont un poil plus expéditives, et ils ont un complexe de culpabilité moins développé.
En face d'eux, nous découvrons un ennemi sorti des tiroirs du Cavalier Lunaire. Midnight est un ancien allié de Moon Knight, que ce dernier croit avoir laissé pour mort. Mais le type est costaud, il a survécu, et l'Empire Secret l'a rafistolé, le transformant en un cyborg dangereux et ambitieux. Découvrant ses pouvoirs fabuleux, mais aussi sa nouvelle apparence physique peu engageante, il cherche à prendre le commandement de l'organisation criminelle, tout en haïssant et attendant l'occasion rêvée pour se venger de Marc Spector, coupable de l'avoir hâtivement abandonné sur le champ de bataille. Au passage, il tombe amoureux de son infirmière dévouée, qui derrière ses lunettes de geekette d'hôpital, cache elle aussi son jeu, et se révélera être bien différente de ce que l'on pouvait penser au départ.

Et Spider-Man dans tout ça? Le tisseur sort d'un affrontement sérieux avec une tri-sentinelle (sentinelle à trois têtes) où il a reçu l'aide de Nova. S'il va être concerné par cette aventure, c'est parce qu'il tombe par inadvertance sur Darkhawk, qui se fait agresser par Midnight et ses sbires. Pendant ce temps-là, le Punisher malmène les petites frappes du quartier et commencent lui aussi à remonter une filière, qui va le guider jusqu'à l'Empire Secret. Et c'est Captain America et les Vengeurs qui informent Spidey des liens unissant l'assaillant, et Moon Knight. Tout ce petit monde va se serrer les coudes, et ça va castagner. Mémorable une scène où Frank Castle veut jouer aux gros bras, mais se retrouve avec un dispositif lui enserrant la poitrine, et l'électrocute lentement. Au bord de la crise cardiaque, il est sauvé in extremis par Night Trasher, mais tombe misérablement dans les vapes (et hop, un petit flashback/cauchemar pour rappeler ses origines au lecteur qui ne le connaît pas encore très bien).
Mark Bagley est au dessin. Banal, avec le recul, mais pas pour les années 90, quand il était encore à ses premières armes avec Spider-Man. Son style est ici plus académique et bizarrement plus fouillé, le trait plus carré. L'encrage de Randy Emberlin lui vient en aide, mais on devine d'emblée que l'artiste est à l'aise, et qu'il va probablement rester quelque temps (à peine...) sur la série, ou le personnage.
Si vous lisez la VO, sachez que "Round Robin" est aussi le titre d'un gros pavé sorti dans la Marvel Epic Collection, le volume 22 pour être précis. Ces épisodes (#353 à #358) sont précédés et suivis d'autres histoires, qui firent l'actualité en 1991 et 1992. Sans être indispensables ou légendaires, ça reste une bonne petite saga truffée d'action, dont les lecteurs de l'époque se rappellent probablement avec nostalgie. C'est votre cas?



 

Sur ce, Joyeux Noël à toutes et à tous!





MATRIX RESURRECTIONS : UN (PRESQUE) GRAND RETOUR !

 


🎬Matrix Resurrections (de Lana Wachowski)

Le quatrième et nouveau volet de Matrix est bicéphale. Et soyons honnêtes d'emblée, la première partie est de loin ma préférée. Il fallait recoller les morceaux, sortir les jouets de la boîte, et Lana Wachowski y parvient avec dextérité et cette touche d'humour froid et désabusé qu'on peut souvent se permettre quand on entreprend de déconstruire une œuvre, pour s'adonner aux joies de la méta-narration. Si le spectateur a vu les trois premiers, il est forcément de connivence, et la mise en abyme de ce qui fut une des franchises les plus marquantes de l'histoire moderne du cinéma (tant pour le fond que surtout la forme) est réussie, avec de surcroît cette fascination de voir les ravages du temps sur les personnages principaux. La matrice n'empêche pas les rides ou les pattes d'oies. Resurrections n'abuse pas de cette maîtrise formelle qui fit les grandes heures des précédents. Ce fut le choc visuel, ce sera désormais, là aussi, une manière de tenir le passé à distance, comme à vouloir être sarcastique envers cette esthétique révolutionnaire, depuis intégrée par un peu tout le monde. Hormis une paire de scènes hautement spectaculaires (bien entendu le final, par exemple) le volume 4 reste modeste et frugal sur ce point. Là où le film commence à décevoir, c'est logiquement quand nous replongeons pour de bon dans la dualité entre la dimension fictive (qui serait en fait la nôtre, la vraie) et l'univers de la matrice. Illusion désirée et choyée, ou réalité sordide et cauchemardesque, bonds de l'un à l'autre, règlements de compte et histoire sentimentale assez convenu (Neo et Trinity vont-ils se retrouver? La véritable question est à quelle minute du film cela va se concrétiser...) font que Matrix Resurrections devient presque banal, ressemble alors à n'importe quel produit SF d'aujourd'hui, et dont il serait paradoxalement une des grandes sources d'inspiration. Du coup Wachowski a l'intelligence d'emprunter à son tour aux héritiers, avec une scène qui n'est pas sans lorgner vers les zombies de Walking Dead, à la sauce numérique. On sort de ces deux heures avec l'impression d'avoir regardé un film plaisant mais qui a perdu de son cachet en se prenant au sérieux, après avoir promis et annoncé une réjouissante ironie lors des prémices. On est passé près de quelque chose de fort, de beau, d'intelligent. Près, mais à côté.

LE PODCAST LE BULLEUR PRÉSENTE : KOSMOS


 Dans le 118e épisode de son podcast, Le bulleur vous présente Kosmos, album que l’on doit au scénario de Pat Perna, au dessin de Fabien Bedouel, édité chez Delcourt. Cette semaine aussi, on revient sur l’actualité de la bande dessinée et des sorties avec :

– La sortie de l’album L’île des oubliés, titre que l’on doit au scénario de Roger Seiter à partir du roman de Victoria Hislop, au dessin de Fred Vervisch et c’est édité chez Phileas

– La sortie de l’album Les cœurs insolents que l’on doit au scénario d’Ovidie, au dessin d’Audrey Lainé et c’est édité chez Marabulles

– La sortie de l’album Total que l’on doit à Ugo Bienvenu et c’est édité chez Denoël graphic

– La sortie de l’album La commode aux tiroirs de couleurs que l’on doit à Véronique Grisseaux qui adapte le roman d’Olivia Ruiz, au dessin de Winoc et Amélie Causse et c’est édité chez Grand angle

– La sortie de l’album Le monde sans fin que l’on doit au scénario de Jean-Marc Jankovic, au dessin de Christophe Blain et c’est édité chez Dargaud

– La sortie de la première partie de Ténébreuse, premier tome que l’on doit au scénario d’Hubert, au dessin de Vincent Mallié et c’est édité chez Dupuis dans la collection Aire libre



 
 

FANTASTIC FOUR DE JOHN BYRNE OMNIBUS : FANTASTIC 80s CHEZ PANINI




 Fantastic Four! Une famille, une légende, un des titres emblématiques de l'univers Marvel, qui évoque tout de suite la grande époque de Stan Lee et Jack Kirby, des pionniers du super héroïsme tel que nous l'aimons. Mais quand on parle des Fantastiques, il y a d'autres grandes épopées à découvrir, si on veut passer des heures de lecture inoubliables avec le quatuor le plus célèbre de la bande dessinée américaine. Il y a donc une autre période dans l'histoire de la famille Richards qui est considérée comme essentielle, celle de John Byrne. Panini Comics publie un Omnibus très attendu, qui comprend non seulement les premiers épisodes du run des années 80 de Byrne, mais aussi d'autres tirés des années précédentes. Oui, parce que le grand John a tout d'abord exécuté le dessin des autres (Marv Wolfman surtout) avant de prendre seul les commandes du vaisseau. Le volume s'ouvre ainsi sur les #61-62 de Marvel Team-Up, un mensuel dédié aux aventures de Spider-Man, en compagnie d'un invité de passage. Écrit par le légendaire Chris Claremont, avec qui Byrne a travaillé (je ne vous apprend rien...) sur Uncanny X-Men, il est centré sur le Tisseur de toile qui combat le terrifiant Super Skrull, aidé d'abord par la torche humaine, puis par Miss Marvel. Des histoires amusantes, voire agréables, où lecteur peut admirer ce que le dessinateur peut faire avec Johnny Storm, une sorte d'apéritif avant le grand repas qui va suivre. Arrive donc la période Wolfman, qui est clairement un cycle d'épisodes à vocation cosmique. Les grands personnages qui traversent ces pages sont ceux qu'on peut côtoyer quand on s'embarque pour les étoiles. Galactus, bien entendu, mais aussi Terrax, ou encore Blastaar. Point d'orgue de ces numéros, le vieillissement accéléré des Fantastiques (sauf La Torche) qui deviennent des vieillards décrépis, placés dans des caissons de survie. Et puis finalement la jeunesse revient, et le quatuor est plus bondissant que jamais, pour d'autres aventures. Qui seront cette fois l'apanage du grand Byrne, en solitaire. Byrne, qui a un don inné pour raconter des histoires simples, alliant super héroïsme classique et attention aux dynamiques personnelles des personnages. Les grandes lignes de la narration sont toujours entrecoupées de micro événements, de pistes qui n'attendent qu'à être explorées ou approfondies, et la richesse de la prestation se dévoile sur la distance. 




Les premiers épisodes de Byrne sont intéressants, mais ils manquent encore d'ambition, et ne sont que le tour de chauffe avant ce qui va suivre; On peut y retrouver des ennemis récurrents, comme l'alchimiste Diablo, ou des bandits plus classiques, comme Hammerhead. Le souffle épique gagne du terrain lorsque Ego, la Planète vivante, fait son apparition, mais surtout avec le #236, à l'occasion du vingtième anniversaire des Fantastiques. Reed et les siens sont enfermés dans une cité miniature "sous cloche" où ils vivent un quotidien parallèle, loin de celui réel où ils sont des super-héros. C'est Fatalis qui les a piégés et installés dans cette parodie d'existence. Liddleville a été "édifiée" uniquement pour satisfaire les machinations du dictateur de la Latvérie, et c'est une trouvaille très agréable, qui va être reprise plusieurs fois dans les comics, notamment dans un arc narratif du Punisher, qui va vivre plus tard le même type de (més)aventure. L'aspect plus "humain" n'est pas en reste, puisque Reed Richards continue de tenter de trouver une solution au problème de la métamorphose de Ben Grimm. La création des Fantastiques, c'est en grande partie sa responsabilité, et si son meilleur ami est devenu une chose en pierre, il n'a de cesse de mettre au point une technique pour lui rendre son corps d'autrefois. Une tentative qui va avoir des effets néfastes, amenant une régression spectaculaire et horrible chez l'infortuné compagnon. Il est aussi question de Frankie Raye, une des nombreuses compagnes de la Torche, qui vit un véritable cauchemar : voilà qu'elle a la capacité de prendre feu, et qu'une sorte de pellicule enveloppe son épiderme. Voici donc venir Nova, peut-être la compagne idéale pour Johnny, si ce n'est qu'un destin plus grand, dans les étoiles, semble l'attendre. Et c'est des étoiles que vient le grand danger; le retour de Galactus n'est jamais une bonne chose, et cette fois encore il va falloir que les FF trouvent un stratagème pour empêcher le géant de bouloter notre planète, faute de quoi il ne restera rien à écrire et Byrne sera déjà au chômage... Le tout avec cette touche plastique ultra reconnaissable, ce trait souple et soigné, qui est certes desservi par une mise en couleurs assez criarde, le papier brillant n'arrangeant pas les affaires de l'ensemble. Si vous ne souhaitez pas investir dans cette omnibus (erreur!) vous pouvez fouiner dans les brocantes à la recherche de vieux numéros de Nova, chez Lug. Mais vous aurez des trous dans votre collection, et des pages en petit format qui ne rendent pas justice au contenu de ces épisodes. Un bon conseil, donc, investissez vite avant que le tirage soit épuisé. 



ZAGOR REVIENT CHEZ BLACK AND WHITE AVEC ... LES REVENANTS!


 Cela fait bien longtemps que Zagor a disparu des librairies ou des marchands de journaux en France. Autrefois le personnage avait un public plutôt fourni, à la bonne époque des petits formats en noir et blanc, des "fumetti" italiens publiés par Lug puis Semic. Zagor, l'esprit à la hache, dans le mensuel Yuma, c'est probablement quelque chose que vous avez déjà lu si comme moi vous avez dépassé la quarantaine. Autrement il est possible que vous ne connaissiez pas bien ce personnage, qui ressemble beaucoup à un super-héros, bien qu'il en soit pas du tout un. Créé par Sergio Bonelli (sous le pseudonyme de Guido Nolitta) et par le dessinateur Gallieno Ferri, il s'agit d'un des deux trois personnages les plus connus de la bande dessinée italienne, avec Tex, Dylan Dog ou Diabolik. Ses aventures se déroulent dans la première moitié du 19e siècle, dans une vaste forêt imaginaire de l'Amérique de l'Est, appelée sombrement Darkwood. Son rôle est celui d'instaurer une cohabitation pacifique entre les colons, qui arrivent toujours plus nombreux pour entamer une nouvelle existence dans un cadre qu'ils espèrent ouvert à tous les possibles, et les Indiens, qui sont peu à peu chassés, spoliés de leurs terres. Les deux camps on leurs torts et souvent la guerre, les massacres, l'incompréhension, font des ravages. Zagor est l'élément qui permet d'ajouter un peu d'équilibre et de justice dans tout cela; à ses côtés un petit mexicain ventru, qui ne pense qu'à manger et dormir, un pleutre sympathique qui est tout de même bien souvent utile: Cico. Impossible de vraiment déterminer de quoi parle Zagor chaque mois... la série est capable de changer de sujet, convoquant ainsi des extraterrestres, des vampires, des druides maléfiques, ou simplement des histoires western avec des trappeurs, des Indiens ou des pistoleros. Le royaume de la contamination des genres, avec une forte influence de la littérature populaire et des B-movies d'autrefois. Ici les éditions Black and White nous proposent de redécouvrir Zagor avec un album de luxe, dans lequel les ennemis principaux sont rien de moins que... des zombies !



Il s'agit d'un tirage à 400 exemplaires en noir et blanc grand format. Black and White est spécialisée dans la production de ce genre d'album; des tirages limités dont la qualité artistique est bluffante, contenant et contenu. Ici l'ouvrage est présenté avec une extraordinaire couverture de Roberto Della Torre, dont le marché italien n'a donc pas eu la chance de profiter. On trouve également une riche introduction qui permet de contextualiser la lecture, ce qui ne gâche rien. Pour le retour de Zagor, l'histoire choisie (la même que nous avions personnellement retenu, il y a deux ans, pour un projet finalement avorté, faute de sérieux de la part des investisseurs...) est tirée d'un numéro spécial. Autrement dit elle échappe à la continuité habituelle du mensuel italien et ne nécessite pas d'autres lectures précédentes ou successives pour être appréciée en tant que telle. Le principal intérêt de cette histoire est le dessin de Emanuele Barison. Ce qui fait la qualité, mais parfois le talon d'Achille de Zagor, c'est le caractère assez classique de l'interprétation graphique du personnage. Il faut dire que chez Bonelli les codes ont longtemps été préservés et que les lecteurs italiens sont plutôt frileux quand il s'agit d'innover avec notre héros. L'héritage de Ferri et de ses épigones modernes est un sacré carcan! Ici le dessinateur s'amuse avec les ombres, propose des planches où on passe de la pénombre la plus totale à des éclairs de clarté; les corps et les visages sont très marqués, anguleux, il se dégage une sensation de modernité et de puissance qui est inhabituelle pour le titre. Certaines scènes sont même carrément à la limite du sacrilège pour les conservateurs, comme lorsque Zagor traverse la forêt au pas de course, ou dompte un sanglier avec une énergie, un style, qui lui donne un sacré coup de jeune. Des scènes jouissives et de fort impact, d'autant plus que Barison donne une touche spectrale à ses planches, qui sied bien au ton du récit. Le scénario est œuvre de Moreno Burattini, l'homme qui est en charge du destin de notre héros depuis bien des années, et c'est une aventure horrifique assez classique et accessible pour tous, qui dépoussière et en même temps confirme le petit monde de l'Esprit à la hache. Zagor y est sur la piste de deux meurtriers, Frost et Kostner, près de Cloudy Hill. Le plus féroce des deux est présenté devant la justice, quand notre héros apprend que plusieurs morts récents ont disparu de leurs cercueils, dans le village. Pour cela, il décide d'aider son ami, le shérif Kowalski, et le médecin local, le Dr Bronsky, dans leur enquête. Au départ tout le monde pense à un voleur/profanateur de cadavres, mais bientôt le lecteur doit accepter l'incroyable: ce sont bien des morts qui reviennent du sommeil éternel! Toutefois pas de zombies avides de chair humaine ou de contamination incontrôlable, ici il semblerait que l'après-vie soit l'opportunité de régler des comptes en suspens, et de se faire peur, tout au long de 176 pages, qui ressuscitent alors un personnage trop longtemps disparu. On attend la suite. 

Si vous souhaitez en savoir plus et acquérir une copie de l'ouvrage :

https://www.editions-blackandwhite.com/produit/zagor-les-revenants/



LE DERNIER SECRET D'HITLER : THRILLER SOUS-MARIN AUX HUMANOÏDES ASSOCIÉS


 La guerre, et ses secrets, ses épisodes en coulisses, ce qui ne reste pas gravé dans les livres d'histoire, mais qui contribue à faire basculer le destin de l'humanité, dans un camp ou dans l'autre. Dans cette histoire il sera question de sous-marins, de traque, d'une lutte sous les eaux, entre mensonges et froids calculs. Notre album trouve sa source à Kiel, un port de la Mer Baltique, dans le U Boat Bunker d'une armée nazie qui se sait sur la sellette, en cette toute fin d'année 44. Le jeune capitaine Wolfrman fait partie des derniers qui obéissent encore aux ordres et donnent satisfaction à l'état major, c'est pourquoi on lui confie un précieux chargement qu'il faudra acheminer jusqu'au Japon. Mais outre les difficultés du voyage, il devra aussi composer avec la présence écrasante du haupststurmführer Kemmling qui se révèle impatient, autoritaire, et peu décidé à composer avec un “jeunot” qu'il n'aime pas, tout en n'ayant pas les compétences pour s'en défaire. Au cours de leur périple, la nécessité de remonter parfois en surface fait que le sous-marin est repéré par un avion de la Royal Air Force, puis pris en chasse par un autre submersible, aux ordres de sa Majesté. Vous ne le savez peut-être pas, mais jusque-là jamais un sous-marin n'a “coulé” (façon de parler) un autre alors que l'engin est sous les flots. Question de déontologie, mais aussi de techniques (une torpille mal ajustée, et vous révélez clairement votre position à l'ennemi). En parallèle, le récit se concentre aussi sur des soldats, ou plutôt barbouzes américains. Eux souhaitent avant tout s'enrichir, et la nouvelle de la précieuse cargaison, quand il leur est demandé de la récupérer dans le submersible allemand, sans le détruire, leur fait tourner la tête. On leur a fait croire qu'il s'agit d'un trésor en lingots d'or, et on a vu bien des être humains oublier les ordres et la patrie, devant l'appât du gain. La grande partie de cache-cache et course poursuite peut commencer, à l'abri des regards, dans les profondeurs abyssales... 



Pour qu'un tel récit fonctionne, il faut que les éléments tirés de la véritable Histoire soient suffisamment passionnants et documentés pour convaincre aussi bien le lecteur avide d'aventures, que celui plus tatillon qui souhaite des faits, pas de la fantaisie débridée. Ici Mathieu Mariolle parvient aisément à atteindre ce double objectif, et il instaure un climat de claustrophobie évidente, avec parfois quelques "remontées" bienvenues à la surface qui permettent au récit de progresser, avant une inévitable replongée, là où tout se joue, sous les flots. Fabio Piacentini livre des planches très chargées en détails, s'attardant souvent dans une vision mécanique et analytique des engins, de leurs plus intimes rouages, contribuant à nous les rendre réels, à nous immerger complètement dans cet univers semi carcéral où toutes les informations ne pénètrent pas, et où il faut savoir parfois espérer et tenter un coup de poker pour battre l'ennemi à son propre jeu. Les couleurs de Massimo Travaglini ont aussi un rôle majeur dans cet affrontement silencieux, notamment quand les ambiances passent du bleu au rouge, en fonction du camp évoqué, si le submersible est anglais ou allemand. S'il y a un reproche à formuler, c'est peut-être celui de l'aspect trop patiné, trop lisse de certaines vignettes/pages spectaculaires, qui auraient gagné à être plus sauvages, sales, débridées. La froideur (la beauté?) clinique de ce Dernier Secret d'Hitler est un atout, mais sur la longueur, elle laisse espérer un coup de folie qui n'arrive pas. Mais jamais le suspens ne retombe, jamais le récit ne s'égare, où le trait de Piacentini ne baisse en régime. C'est un album de guerre de qualité qui est proposé par les Humanoïdes Associés, qui joue intelligemment sur l'absence d'information et sur l'initiative personnelle, dans un conflit idéologique et technologique qui sert de toile de fond à un thriller sous les mers, vraiment réussi. 



DCEASED 2 : UN PEU D'ESPOIR DANS UN MONDE DE MORTS-VIVANTS


 Darkseid est mort (?), mais avec lui la plupart des grands héros de la planète. Il faut dire que l'équation d'anti vie qui s'est répandue à travers les systèmes informatiques du monde entier, avec la complicité involontaire de Cyborg, a représenté une menace inévitable et d'une ampleur inédite pour la Terre. Dans ces conditions, il ne restait plus aux survivants qu'à quitter la planète pour s'en aller trouver un nouveau monde où repartir à zéro. Pourtant il reste encore une chance de sauver ce qui peut l'être. Oui, Superman et Batman, et tous les grands héros décédés, ne vont certes pas revenir, mais ceux qui ont été infectés mais qui n'ont pas été exterminés pourrait bien être soignés. Le même organisme de Cyborg, qui est à la base du virus qui s'est diffusé un peu partout, peut aussi abriter une sorte d'antidote, d'équation de vie, qui pourrait permettre de ramener ce beau monde. C'est d'ailleurs assez étonnant, car on nous explique dans cet album que le remède se trouve dans le sang de Cyborg... or de ce dernier il ne restait qu'une tête décapitée qui fonctionnait encore avec l'équivalent d'un "peu de batterie"... difficile d'imaginer dans ces conditions qu'il lui reste un encore du sang. Mais bon, passons ce détail. Le fait est que Tom Taylor ravive la flamme de l'espoir, et avec lui le jeune Damian Wayne, qui est devenu le nouveau Batman, ou encore Jon Kent le fils de Superman, qui a pris la place de son père. Même chose pour Wonder girl par exemple, qui se substitue à Wonder Woman. Ensemble tous ces héros vont avoir fort à faire pour parvenir à atteindre leur objectif. Pendant ce temps-là les drames personnels continuent d'abonder; c'est par exemple au tour de Black Canary de perdre celui qu'elle a toujours aimé, à savoir Green Arrow. Cependant pas question de trucider l'archer une bonne fois pour toutes; il s'agit au contraire de le protéger, d'attendre patiemment que lui aussi puisse revenir. Attention cependant, tout le monde n'a pas forcément le même rêve, et particulièrement ceux qui autrefois faisaient partie des criminels, des super-vilains, et qui ont choisi une méthode beaucoup plus radicale pour en finir avec l'infection. Ce sont deux visions du monde qui (comme auparavant) s'affrontent dans Dceased. 


Si Tom Taylor nous plaît vraiment, c'est parce qu'il a compris les personnages. Il suffit de voir comment il présente la relève (Jon, Damian, Cassie) tout en mettant en exergue les subtiles différences qui les singularisent, par rapport à la génération précédente. Surtout Damian, qui n'hésite pas à lancer des traits d'humour, ou assumer ses sentiments. Le monde de DCeased, où l'espoir tout à coup renaît, peut-il être interprété comme une parabole du monde post covid, où le vaccin autorise à envisager un retour à la normale dans les prochains mois? C'est un peu audacieux de prétendre cela, et comparer ce qui s'apparente à une grippe chez la très grande majorité de la population, au cauchemar de cet univers (attendez de voir ce qu'est devenu Plastic Man, pas si glamour et impressionnant de son vivant, beaucoup plus terrifiant une fois zombifié) est assez ridicule. Toutefois, s'il est un domaine où les comics excellent, c'est la réalisation de tableaux cauchemardesques, pour ensuite alimenter le rêve d'un lendemain meilleur, où le meilleur de l'homme pourra renaître et assurer une descendance collective. Ici cela passe bien entendu par deux derniers chapitres où l'action explose, avec notamment un John Constantine qui devient une pièce maitresse du récit, à coups de plans personnels savamment mijotés, d'utilisation parfois abusive de la magie. Un anti héros qu'on aime détester, et qui oscille là en permanence entre le rôle ingrat du traître égoïste, et celui de sauveur de l'humanité, disposé au sacrifice ultime. Trevor Hairsine illustre le tout avec une évidente maestria, ses planches sont très réussies, efficaces, parfaitement aptes à transcrire la puissance apocalyptique d'un tel récit, où des super-héros d'autrefois ne subsiste qu'une communauté aux abois, mais qui va lutter pour le bien de tous, jusqu'à la dernière échéance. De quoi vous inciter à donner une chance à cette conclusion de l'invasion zombie, qui est une des sorties les plus marquantes du catalogue Urban Comics, en ce dernier trimestre. 



BATMAN WHITE KNIGHT HARLEY QUINN : HARLEEN QUINZEL LA STAR DU JOUR


 Parmi toutes les réalités alternatives, les univers narratifs parallèles, celui que Sean Murphy propose dans les histoires regroupées sous le label "Batman White Knight" a probablement de beaux jours devant lui. Il faut dire que pour une fois on découvre des choses différentes et surtout qui tiennent la route, avec la caractérisation inédite de personnages que nous connaissons déjà bien, mais qui sont ici mis en lumière d'une façon fort différente. Place ce coup-ci à un approfondissement du rôle de Harley Quinn dans Gotham. L'album démarre alors que le Joker est mort, Bruce Wayne lui est toujours derrière les barreaux et la ville de Gotham traverse une période d'accalmie, avec la disparition de tous ceux qui autrefois en faisaient une cité mal famée. Néanmoins un certain "Producteur" trame dans l'ombre pour mettre les mains sur la criminalité locale et redevenir le grand patron de la pègre de Gotham. Il a à son service une soi-disant "Starlette", une sorte de pin-up droit sortie des films des années 50 et qui s'attaque aux stars du cinéma du golden age. Pas de quoi motiver particulièrement Harleen Quinzel, qui est déjà bien occupée à gérer sa vie de mère célibataire, avec deux enfants en bas âge, mais aussi ses deux autres bébés, à savoir des hyènes aussi sympathiques, attachantes que fidèles. C'est un portrait de femme crédible que Murphy dresse ici; encore jeune et désormais prise dans les filets d'une existence et d'une maternité qui ne lui correspondent pas tout à fait, ou en tous les cas dont elle n'a pas encore pris pleinement la mesure. L'album a aussi l'intelligence de ne pas la présenter comme une victime du Joker, qui a subi cette relation toxique, mais au contraire nous montre les prémices de l'histoire, lorsque les deux tourtereaux se sont rencontrés, et le rôle salvateur qu'à souhaité jouer la demoiselle, à tel point de confondre probablement le rôle du patient et celui de l'amant. Bref l'approfondissement psychologique occupe une place de choix et c'est tant mieux. 


C'est donc une femme qui occupe le rôle central dans cette histoire; une femme seule, plein de rêves et d'envie de sauver le monde, à commencer par son monde, c'est-à-dire Jack Napier, l'homme qu'elle aime, c'est-à-dire celui qui deviendra par la suite le Joker. Et c'est pour cela que ce récit est touchant. Harley Quinn, dans l'univers de Sean Murphy (et Katana Collins) c'est une identité dont Harleen Quinzel pourrait se passer, et qu'elle essaie d'ailleurs de laisser derrière elle. C'est un peu comme un costume qu'il faut endosser pour prêter main-forte à la police locale, mais en réalité c'est un sacrifice, une seconde peau qui ne correspond pas à un désir véritable. Cette histoire est mise en scène, ou plutôt dessinée, par Matteo Scalera. L'artiste italien a un style qui n'est pas d'ailleurs sans rappeler celui de Murphy; lui aussi a subi l'influence du manga, lui aussi propose des vignettes avec un cadrage audacieux, et des silhouettes qui semblent taillées à la serpe, et en même temps l'énergie, le dynamisme, la vitesse de son travail, n'enlèvent rien à la grande qualité esthétique, la beauté des planches, qui sont même d'ailleurs plus lisibles que celle de Murphy. L'univers du White Knight est d'autant plus intéressant qu'il laisse sur la touche Batman. Pour une fois Bruce Wayne n'est pas au centre de la scène à distribuer des torgnoles, mais il opère de la prison, d'où il prodigue conseils, recommandations et encouragements. Même lorsqu'il s'évade pour prêter main-forte, il arrive trop tard sur les lieux et finalement se révèle être inutile. Du coup c'est vraiment Harley Quinn la star, même si malgré elle. Sean Murphy et sa femme Katana Collins sont donc les auteurs de quelque chose de réussi, d'attachant et qu'on vous recommande sans aucune retenue.



LE PODCAST LE BULLEUR PRÉSENTE : LE FAUX SOIR


 Dans le 117e épisode de son podcast, Le bulleur vous présente Le faux soir, album que l’on doit au scénario de Denis Lapière et Daniel Couvreur, au dessin de Christian Durieux, édité chez Futuropolis. Cette semaine aussi, on revient sur l’actualité de la bande dessinée et des sorties avec :

– La sortie de l’album Tiki, une année de chien que l’on doit au scénario conjoint de David Azencot et Fred Leclerc et au dessin de ce dernier. L’album est édité chez la boite à bulles

– La sortie de l’album La bibliomule de Cordoue que l’on doit au scénario de Wilfrid Lupano, au dessin de Léonard Chemineau et c’est édité chez Dargaud

– La sortie de l’album Le dernier livre que l’on doit au scénario de François Durpaire, au dessin de Brice Bingono et c’est édité chez Glénat

– La sortie du second tome de la série Le serpent et la lance intitulé Maison-vide, albums que l’on doit à Hub et aux éditions Delcourt

– La sortie de l’album Murakami — le septième homme et autres récits, adapté des nouvelles d’Haruki Murakami par Jean-Christophe Deveney, mis en dessin par PMGL et édité chez Delcourt

– La réédition de l’album Blonde platine que l’on doit à Adrian Tomine et c’est édité chez Delcourt



VELVET : L'ESPIONNE DE BRUBAKER REVIENT EN INTÉGRALE CHEZ DELCOURT


 Elle n'est plus tout jeune, elle fut autrefois très attirante et a eu une vie pleine de mystère et de rebondissements, mais aujourd'hui, c'est juste une secrétaire comme tant d'autres, insignifiante et invisible aux yeux de ses collègues, des hommes pour qui elle n'est que celle qui leur apportera un café et qui rédigera les rapports du chef, lorsque tel sera son désir. Pourtant Velvet Templeton est embauchée dans une agence d'espionnage, peut-être la plus mystérieuse et efficace du monde. Ce que personne ne sait, ou bien ce que les autres on définitivement oublié, c'est qu'elle était autrefois agente sur le terrain, et pas une agente quelconque; probablement la plus efficace, la plus meurtrière, la plus entraînée de toutes celles qui ont jamais fréquenté le milieu de l'espionnage. Vingt ans se sont écoulées, mais tout change à nouveau le jour où un ex de notre "héroïne" est assassiné par un inconnu. C'est le point de départ d'une remise en question, d'un retour vers le passé, qui va replonger Velvet dans cet univers ultra-violent et paranoïaque où elle a autrefois évolué, de la seconde guerre mondiale aux années 70 (l'action se déroule présentement en 1973, ce qui explique que nous ne sommes pas plongés dans une société hyper connectée et que donc l'espionnage à l'ancienne a encore un sens et une raison d'être). Si vous n'avez jamais lu Velvet et vous apprenez la nature de la trame principale de ce comic book en lisant ces lignes, il est fort possible que vous pensiez tout de suite à une énième resucé d'un thème aperçu et éculé aussi bien au cinéma, que sous forme de roman, et même de bandes dessinée. Un James Bond en jupons concluriez-vous, et vous n'aurez pas complètement tort... sauf que ce James Bond au féminin ferait pâlir d'envie l'original, qui ressemble, si on le compare à Velvet, a un petit débutant sans envergure. De toute manière, Velvet écrit par Ed Brubaker, un de ces scénaristes qui maîtrisent tellement leur art que vous pouvez directement acheter les yeux fermés chaque nouvel album qu'il produit. Cette fois encore l'idée de déplacer le curseur sur une femme, une de celles qui ont accepté de vivre dans l'ombre et la banalité, après avoir porté sur leurs épaules les secrets de la géopolitique mondiale, se révèle être fichtrement intéressant, d'autant plus que Brubaker caractérise à merveille son héroïne et tout ceux qu'elle côtoie dans sa course poursuite. Il y a 15 épisode en tout dans Velvet, et à chacun des numéros qui s'achève, le mystère ne fait que s'épaissir. Nous sommes immergés dans un film d'action "seventies" d'excellente facture, à aucun moment l'attention du lecteur ne se relâche, et on progresse dans le complot, que ce soit avec ces hommes qui autrefois ont croisé la vie de Velvet, ou avec ceux qui aujourd'hui pensent tenir les fils du pouvoir. Haletant est un mot bien faible. 


L'histoire est racontée par Velvet en personne, et si le présent narratif est situé dans les années 70, les nombreux retours dans le passé étoffent une trame à tiroirs, qui met beaucoup de temps avant de révéler ses secrets les plus intimes. Pour une fois c'est une femme qui est au centre des débats et les hommes ici occupent un rôle mineur. La plupart du temps ce sont des anciennes conquêtes, des compagnons de passage ou d'aventure(s), ce qui renverse le point de vue du héros masculin qui fait tomber ces demoiselles. Bien entendu le récit comporte de nombreux points saillants et des événements choc, comme lorsque le lecteur apprend que l'héroïne a dû éliminer celui qu'elle avait épousé, puisque soupçonné de double-jeu, dans le cadre de ce qui s'avèrera une machination cruelle. C'est un personnage de femme forte habituée à rester dans l'ombre, et qui tout à coup se retrouve contrainte d'en sortie, alors que c'est justement là que réside son unique chance de survie. Velvet reprend tous les codes d'action du genre et parvient à les rendre passionnants aussi grâce aux dessins de Steve Epting. C'est un sans-faute évident de la première à la dernière page, une maîtrise totale du storytelling, la capacité de jouer avec la lumière, les contrastes, et avec l'aide bienvenue des couleurs de Elizabeth Breitweiser qui se marient à merveille avec l'ambiance du récit. L'attention minutieuse aux détailx est fort appréciable, que ce soit pour les fonds de case ou même pour les vêtements; tout ici possède une classe folle. Cette édition intégrale proposée par Delcourt regroupe les 15 épisodes de la série, ainsi que quelques articles et bonus, à la fin d'un pavé qui mérite de se poser tout droit en bonne position sur vos étagères. A tous ceux qui pensent encore que les comics sont uniquement des histoires de types en costume qui passent leurs journées à se taper dessus, nous ne pouvons que recommander Velvet, qui est une des choses les plus intelligentes et les mieux bâties que vous aurez l'occasion de croiser, pour peu que que vous acceptiez de tenter l'aventure.



UNIVERSCOMICS LE MAG4 #18 DE DECEMBRE 2021 : NEW GENERATION

 


🔥🔥🔥 UniversComics Le Mag' #18 de décembre
Mensuel comics BD gratuit.
Votre PDF ici :
Lire en ligne :
NEW GENERATION!
Sommaire :
🦸‍♂️ La nouvelle génération de super-héros
🦹‍ Lire les aventures de la "new generation". Une petite sélection.
🥇 Les Champions. Une super jeune équipe au crible avec Anthony Huard
👶 Les Young Avengers, la relève est assurée avec #AlexandreChierchia
🎤 Interview de #MarvWolfman avec Filippo Marzo de Comics Reporter
📕 Le cahier critique. avec Eternals (#MarvelStudios) Monstres chez Éditions Delcourt Van Helsing vs Robyn Hood chez Editions Reflexions Onslaught omnibus chez Panini Comics France No Zombies chez Éditions Soleil Next Men intégrale chez Delirium et Hard Boiled chez Futuropolis
📘 Les review BD avec le podcast #LeBulleur de Eddy Maniette qui nous parle du dernier #EnricoMarini chez Dargaud, mais aussi du dernier #Asterix de #RyadSattouf aux Editions du Futur, et de ce qui se passe chez Gallimard Grand Angle et Editions Anspach
🖍 Le portfolio du mois de décembre
👀 Preview : Nocterra chez Éditions Delcourt, de #ScottSnyder et #TonyDaniel
🧐 Focus sur le superbe Eerie & Creepy Richard Corben, intégrale dispo chez Delirium
📚 Sélection VF du mois de décembre, quoi lire et acheter
Cover sublime (Kamala!) pour laquelle on remercie infiniment Fred Ian
Le graphiste est toujours le mighty Benjamin Carret Art Page inégalable et inégalé
Merci à toutes et à tous pour votre fidélité, le Mag' est arrivé, bonne lecture! Pour nous aider? C'est très simple. Partagez cette publication, sur vos réseaux sociaux, sur les forums, partout où vous le souhaitez. Parlez-en, taguez vos amis en commentaire! Si vous souhaitez nous laisser un petit mot, avec grand plaisir! Rendez-vous tout début janvier pour la suite avec le premier numéro de 2022.

COSMOPIRATES TOME 1 : CAPTIF DE L'OUBLI (JODOROWSKY / WOODS)

 Xar-Cero est typiquement le genre de mercenaire sur lequel on peut compter. Si vous avez une mission à exécuter, soyez certain qu'il ir...