Quelques semaines se sont écoulées depuis la sortie du film consacré à Black Panther. L'occasion de porter un jugement plus calculé, à tête reposée, sur ce que beaucoup considèrent comme l'un des tout meilleurs films de super-héros au cinéma. Ce serait aussi notre jugement global, s'il s'agissait là du second ou troisième film des studios Marvel, mais nous sommes loin du compte, et force est de constater que malheureusement, ce sont encore et toujours les mêmes recette qui sont appliquées, aussi bien dans l'identité visuelle du long-métrage, que dans la manière de présenter les événements, jusqu'aux enjeux de fin (les gentils qui s'imposent, les méchants sont punis, il y a peu de conséquences en terme de vies humaines). Pourtant, ne croyez pas que nous sommes négatifs face à cette version de la Panthère sur grand écran. Au contraire, on applaudit des deux mains la capacité de présenter une Afrique qui parvient à allier modernité et tradition, sans pour autant tomber dans la caricature, l'exagération où le troisième degré.
C'est la manière de positionner le Wakanda qui nous a le plus séduit, avec toute sa complexité, sa raison d'être même. De plus Black Panther fonctionne, car il y a un antagoniste crédible, bien amené, avec un background solide et nuancé, qui permet d'en faire un méchant suscitant par moment l'empathie, et pas uniquement un dingue guidé par une folie furieuse homicide. Nous parlons bien sûr de Killmonger, qui est une des grandes révélations du film; plus que ce Ulysse Klaue (Klaw), en fait presque sympathique dans son rôle de boucher à la cool, une petite demi-heure durant. Certes il est normal que pour une première fois ce soient les origines du personnage qui constituent l'essentiel de la trame du travail de Ryan Coogler, mais il n'oublie pas pour autant de densifier et stratifier le propos, avec un vrai regard sur ce que peut représenter et apporter l'Afrique sur l'échiquier mondial. Ce Black Panther là possède une justification évidente.
On apprécie aussi le fait que l'humour, qui d'habitude inonde les films Marvel et finit par noyer le propos, est ici plus intelligemment distillé, même si globalement presque toujours présent. Si on sourit fréquemment, on n'en oublie pas une certaine gravité de fond, qui évoque tour à tour le racisme, la géopolitique mondiale, la volonté de se retrancher derrière des barrières en cas de crise, alors qu'il faudrait plutôt jeter des ponts vers le monde de demain.
Les scènes d'action et de combats sont par contre un peu lourdingues; l'utilisation de la CG ne permet pas de faire de miracles, et nous avons parfois l'impression de voir Spider-Man bondir d'un toit à l'autre, plutôt que Black Panther... et lorsque les personnages sont remplacés par des imitations digitales, cela saute aux yeux, au point qu'on dirait assister à un simple affrontement tiré de jeux vidéos... où sont passés les joystick dans la salle? Reste que les acteurs, eux, sont globalement justes.
Chadwick Boseman incarne un chef d'État digne et pondéré, qui sait devenir le héros de tout un peuple, tandis que Danai Gurira quitte ses les zombies de Walking Dead pour une prestation rigoureuse et incisive, en tant que chef des Dora Milaje, la milice féminine, garde rapprochée du souverain. Forest Whitaker aussi pointe le bout de son nez, pour apparaître par moments, sans être vraiment central dans ce film, ce qui est un euphémisme.
Ce long métrage réussit en plus à éviter l'écueil de la bande-son attendue; on échappe à la sempiternelle litanie de morceaux rap éculés, et on est bercés, à travers tout le film, par une variété bien plus intéressante et riche d'extraits musicaux. The Black Panther fonctionne, sans originalité extraordinaire, sans bouleverser les codes, sans concourir à la palme du meilleur film de super-héros de tous les temps. Il obtient tout de même une reconnaissance évidente, celle d'être une production qui ne déçoit pas, capable de parler au plus grand nombre, et de justifier un petit tour dans les salles obscures, pour une énième rencontre avec un type en collants (ou en armure, c'est selon).
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