Je ne vais rien vous apprendre, lorsqu'une série de comics a droit à son adaptation télévisuelle, il y a de fortes chances pour que de nombreux nouveaux lecteurs se ruent dessus, ou tout du moins découvrent son univers propre. Netflix proposant donc Locke and Key, un projet maintes fois annoncé, retoqué, modifié, il est donc probable que celles et ceux qui n'ont jamais ouvert un volume de la série (publiée chez Milady, puis chez HI Comics) ressentiront l'envie, ou tout du moins la curiosité, de voir de quoi il retourne.
En gros, il s'agit d'une famille, les Locke, qui part s'installer, de force, dans une élégante et mystérieuse demeure de la Nouvelle-Angleterre, à Lovecraft (le nom est déjà un indice en soi...). De force, car le déméngement intervient suite au meurtre brutal du père, et le viol de la mère, par un adolescent complétement dingo, camarade de lycée de l'ainé des Locke. Ce dernier, Tyler, l'a neutralisé et défiguré, et il a tué son complice, ce qui fait qu'il rumine malgrè tout un fort sentiment de culpabilité, amplifié par les rapports cahotiques qu'il entretenait avec son géniteur décédé (il souhaitait même parfois sa mort!). Kinsey fait de son coté tout ce qu'elle peut pour se rendre transparente et ne pas devenir "la victime dont on a pitié" alors que le petit dernier, Bode, va vivre une expérience métaphysique en franchissant une des portes du manoir, sortant de son corps, pour errer sous forme de fantome, à la rencontre de ceux et ce à qui ou quoi il pense. Le manoir, donc. Il porte le nom de Keyhouse, la maison des clés. Car de clés il va être question dans cette série (ça n'importe quel novice pouvait y arriver...)
Bon, il s'avère que le père, Rendell Locke, n'avait pas forcément dit toute la vérité à ses enfants... Que le lieu où il a grandi recèle bien des mystères, et pas des plus ragoûtants. Locke and Key, écrit par le romancier Joe Hill, c'est un titre qui joue beaucoup sur l'horreur, le suspens, qui prend assez vite aux tripes, car la narration est fluide, intelligente, dévoile tout autant qu'elle attise de nouvelles pistes, pour composer une mosaïque vertigineuse où les révélations succèdent aux écrans de fumée.
Les personnages sont tous parcourus de failles et de doutes qui les humanisent. La mère touche trop souvent à la bouteille, l'ainé réprime une violence qui le dégoûte en même temps, Kinsey est paumée, et le petit dernier trop jeune pour être pris au sérieux quand il découvre les prémices d'un insondable mystère. Et dans le fond d'un puits du manoir, se trouve une étrange créature qu'on imagine être dans un premier temps une sorcière, et qui va utiliser à la fois l'assassin des Locke, et le benjamin de la famille, pour arriver à ses fins et entamer la reconquête d'une série de clés, de passes-partout, qui ouvrent des portes sur ailleurs, sur partout.
Gabriel Rodriguez au dessin est vraiment très bon. Tout d'abord, sa composition des planches laisse parfois poindre quelques saillies franchement bluffantes, et le style propre et assez réaliste est un bon choix pour fidéliser le plus de lecteurs possibles. Le manoir de Keyhouse devient une toile de fond crédible, minutieusement représentée, et tous les jeunes héros sont attachants et caractérisées de belle manière. Locke and Key est vite addictif, fait frissoner, s'interroger. C'est une de ces séries encore trop méconnues du vrai grand public, qui dépasse largement le cadre des "comics" traditionnels, pour aller séduire au sens large les amateurs de bd.
Essayez donc le tome 1, chez HI Comics
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