Il n'est pas déraisonnable de penser que personne n'ignore qui est Spider-Man, et connaît plus ou moins le drame liminaire qui a porté le jeune et timide Peter Parker à devenir un des super-héros les plus iconiques de l'univers de la Bd. Jusque dans les cours de récré les plus reculées, Spider-Man s'affiche, sous forme de comics, pyjamas, toys, stickers, ou figurines. Tout est bon dans le cochon. La mort de l'oncle Ben, l'amour un peu collant de la Tante May, la rhétorique de Stan Lee associée au style rétro de Steve Ditko qui dessine la légende en marche, tout ceci est bien sûr présent en ouverture de l'anthologie qui revient sur les étagères de vos libraires, dans une nouvelle édition Panini, possédant un effet métallisé en couverture.
Pas facile d'être un super-héros. On le comprend avec le #50 de la série régulière, où apparaît le célèbre Kingpin, roi de la pègre new-yorkaise, et où Peter prend une décision bouleversante, abandonner cette double identité qui lui colle à la peau, et le rend bien malheureux. En 2017, on constate facilement que cette résolution a fait long feu... En tous les cas on ne refuse jamais une dose de John Romita (senior).
Les #121 et #122 signés Jerry Conway et Gil Kane sont émouvants et marquent à jamais l'histoire du médium. La mort de Gwen Stacy, première fiancée sérieuse de Parker, qui est jetée d'un pont par le Green Goblin, et que le héros parvient à rattraper maladroitement avec sa toile, au point qu'il participe (involontairement) au drame qui se joue. Tout ceci sera clairement expliqué par la suite, reste sur l'instant une perte terrible, et un Spider-Man touché au coeur.
Plus on avance, plus les récits deviennent mûrs, modernes (c'est logique). On en passe à Roger Stern, et aussi Todd McFarlane (et Michelinie) qui convoque l'anti Spider-Man par excellence, sa version pleine de noirceur et de méchanceté (aigreur), Venom, à savoir l'ancien journaliste Eddie Brock, associé au symbiote extra-terrestre qui fut un temps le costume du tisseur. La haine et l'amour trahis font de ces deux là un binome ultra dangereux, et que les fans vont vite adopter.
Le #477 écrit par Straczynski est un épisode qui a frappé les esprits, malheureusement. Il survient après les attentats du onze septembre 2001, et c'est une manière pour Marvel et l'auteur de mettre en images (certains diront verbaliser) l'horreur et l'indicible. Romita Jr est dans un des meilleurs jours de sa carrière, pour des pages qui suintent la rhétorique, mais restent curieusement solennelles, et laissent peu de lecteurs indifférents.
Le même scénariste utilise le #500 pour transformer un anniversaire en bonne occasion pour revisiter les grandes étapes de la vie du héros (parfait pour une anthologie) alors que nous trouvons aussi des traces du passage de Mark Waid sur le titre Amazing Spider-Man, qui ne sont pas non plus parmi les temps forts de la longue aventure éditoriale de Spider-Man.
Coté récits issus d'autres mensuels, nous avons un épisode de Spider-Man Unlimited, de Tom DeFalco et Ron Lim, assez convenu et peu inspiré, et le #200 de Spectacular Spider-Man, qui est l'épilogue d'une saga inoubliable, somptueuse, L'enfant Intérieur, qui vient de ressortir en album intégral chez Panini. Une lecture qu'il n'est pas possible d'avoir négligé, je vous le signale, et vous trouverez le lien pour notre chronique en fin d'article.
Enfin en 2015, Dan Slott relance la série avec un nouveau numéro un (la manie récurrente de ces dernières années chez Marvel), aidé par Giuseppe Camuncoli au dessin, qui laisse mois après mois une belle et forte empreinte graphique sur le héros. Slott est vraiment celui qui a poussé Parker vers les directions les plus inattendues au XXI° siècle. Entre une ville où tout le monde a les pouvoirs de Spidey (Spider-Island), le switch des corps entre Peter et Octopus, et la version Superior de Spider-Man, la folie furieuse du Spider-Verse ou le retour de Ben Reilly et la conspiration des clones, ça fuse dans tous les sens, signe d'une vitalité admirable, à la limite du coup de génie et du "wtf" permanent.
En tous les cas quelle richesse, quelle existence, quel succès pour un modeste tisseur de quartier. Une anthologie à offrir à celles et ceux qui vont bientôt découvrir Parker au cinéma, sous les traits de Tom Holland, et souhaitent approfondir le sujet, sur le papier.
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