La Légion des super-héros, c'est encore pire que les Pokemon. Difficile de tous les compter et de tous les connaître, surtout si en prend en compte les différentes incernations du groupe, à travers les âges. Ceci est très important, car en dépit des efforts de simplification apportés à la continuity de l'univers DC, en 1986 (avec Crisis on InfiniteEarths), la Légion est vite revenue sur le devant de la scène, entérinée avec Infinite Crisis, puis Final Crisis notamment. Car oui, Superman a été jeune, et il fut un temps où on l'appelait Superboy, et c'est sous cette identité qu'il a été appelé au XXXI° siècle, où il s'est fait une joyeuse bande de potes inspirés par son exemple héroïque. Le problème c'est qu'un coup la Légion existe, un coup elle n'a jamais existé, une autre fois les revoici tous, mais pas vraiment les mêmes... Bref, il fallait mettre de l'ordre dans tout ça, apporter une justification aux différentes moutures. C'est Geoff Johns qui s'y colle en 2004, avec cette mini série en cinq parties publiée par Eaglemoss, dans sa collection en kiosque. Un mot tout de suite sur la chose en soi. C'est du bon comic-book qui part dans tous les sens, avec un nombre incalculable de personnages, et de vrais enjeux forts (et en bonus une fin qui brise le mur entre lecteur et bande-dessinée, et introduit un comic dans le comic qui est bien vu et réjouissant).
Mais que c'est difficile, pour le novice, de reconnaître ses ouailles. En gros, le Time-Trapper est allé repêcher Superboy dans les couloirs du temps et de l'oubli, et il projette le héros (qui est devenu ultra méchant) au XXXI° siècle, là où la Légion vénère la carrière de Superman, devenu une icône absolue, avec son propre musée, un messie symbole du meilleur de l'humanité. Dur à avaler pour Superboy qui nourrit un fort complexe d'abandon et possède une vision assez extrémiste des choses, qui ferait passer Staline pour un démocrate compréhensif. Du coup le voilà qui s'énerve et détruit tout, et va chercher du renfort sur la planète prison, Takron Galto, pour en finir avec Superman et son héritage. Baston générale à toutes les pages.
Car oui, les évadés entrent dans la danse, voici venir la Légion des super-vilains, avec en face trois versions différentes de la Légion des super-héros, et notre Superman classique. Là, pour tout suivre, rebondissements et relations entre les personnages, il faut avoir à portée de la main une connexion 5G et un accès illimité à Wikipedia, car honnêtement le récit mettra à rude épreuve votre connaissance de l'univers Dc. Si vous ne rencontrez aucun problème de clarté, alors vous pouvez probablement postuler pour une maîtrise en "sociologie de la continuity DC comics" telle qu'on l'enseigne à l'université de Harvard et de Princetown.
Pour dessiner tout ceci, avec une densité de 50 héros et vilains par vignette, seul George Perez pouvait relever le défi. Et comme souvent, il ne déçoit pas, et on se prend à rêver. Comment est-il possible de mettre en scène un tel aréopage, de remplir des planches jusqu'à l'overdose, sans perdre en lisibilité, sans tomber dans le cafouillage? C'est du grand art, le trait est raffiné, chacun a droit à une caractérisation soignée, y compris dans ses différentes variations. Perez donne un cours magistral, et ce serait dommage de ne pas en profiter.
On referme l'ouvrage avec le sentiment d'avoir lu quelque chose de dense, fort, poignant, et en même temps, si on est encore peu habitué à la Légion ou aux angles morts de l'univers Dc, avec un gros mal de crâne et le besoin de s'enfiler une boîte d'aspirines.
Plus sérieusement, c'est chouette. Mais pas pour le premier venu.
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