L'esprit de la vengeance est de retour, et cette fois il sillonne l'espace et il est investi du pouvoir cosmique. Oui, Donny Cates se lâche vraiment, pour ce qui constitue une des séries les plus frapadingues que Marvel a pu produire ces dernières années.
Le personnage est né de la créativité débridée de Donny Cates et Geoff Shaw, lors de leur passage sur Thanos. Le succès fut écrasant, à tel point que Marvel dédia une mini-série en cinq épisodes écrite par le golden boy de la bande dessinée américaine, et magnifiquement conçue par Dylan Burnett, à la version future et cosmique... de Frank Castle.
L’histoire peut être considérée comme une sorte de conséquence directe de Thanos wins! car elle reprend le récit là où nous avions salué ce Ghost Rider : tué par un Silver Surfer digne de brandir Mjolnir. Au début de cet album, nous retrouvons celui qui doit être mort au Valhalla, désireux de remonter sur sa moto aux roues enflammées, pour essayer de créer un univers meilleur, en éliminant la menace de Thanos avant qu'elle ne détruise tout.
Dans les cinq chapitres composant la mini série, nous ne trouvons pas de temps morts ou de passages plus faibles: de la première à la dernière page, le coeur bat la chamade, accélérant toujours plus; dans les brefs moments où l'action passe au second plan, Cates la remplace par des rebondissements et des trouvailles qui donnent une certaine intensité à l'ensemble. Oui, parce que l'auteur du très bon God Country ne se limite pas à nous envoûter avec sa capacité à revisiter le style des comics des années 90, et il caractérise avec une grande profondeur les personnages de cette histoire, en nous les présentant d'un point de vue sans précédent: une version qui s'appuie sur les "récits canoniques" mais qui vise à exagérer certaines particularités, et à en tirer une nouvelle mythologie.
En gros, remonter le temps pour tuer Hitler au berceau, vous en seriez capables? Si la réponse est oui, alors je suppose que vous pourriez en faire de même pour Thanos? Et si vous flanchez, il vous reste une solution alternative, celle de prendre sous votre coupe le jeune gamin, de l'élever, de lui proposer un autre modèle que l'amour inconditionnel pour la mort et le nihilisme. Le pire étant que vouloir n'est pas nécessairement pouvoir, et que Castle/Ghost Rider a beau tenter de se démener, la violence n'est jamais loin, au contraire, et que le baby Thanos n'est pas aussi innocent qu'il en a l'air.
La prose de Cates se mesure en barres de rire et en émotions fortes. Tout est rendu encore plus captivant par les crayons de Dylan Burnett. Batailles cosmiques avec un style cartoony sauvage et anguleux, qui s'attarde plus finement sur l'expression des visages, l'artiste donne libre cours à sa folie créatrice, rendue encore plus fascinante par les couleurs vives d’Antonio Fabela.
Bien entendu, toute velléité de lire un comic-book sérieux et respectueux des grands classiques comme Thanos Rising, par exemple, peut être considérée comme du temps perdu. Cates est l'homme qui incarne cette nouvelle vague d'auteur Marvel, propres à désacraliser les héros de toujours, à les réinventer avec sarcasme et fulgurances décalées. On aime, ou pas, mais si on se laisse prendre au jeu, on ne s'ennuie pas une seconde.
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