Quand on pense que cela fait des décennies que les plus grands super-vilains s'organisent et échafaudent les plans les plus absurdes pour se débarrasser des super-héros, alors qu'il serait si simple d'exploiter les ressources du monde moderne… C'est en tout cas la leçon que l'on peut tirer d'Absolute Power, la nouvelle grande saga qui bouleverse le microcosme de DC Comics, publiée en trois albums en ce début d'année. Dans le premier tome, déjà disponible, Amanda Waller – que vous connaissez très probablement comme une manipulatrice diabolique, prête à utiliser les pires individus pour accomplir les missions les plus inavouables au service du gouvernement – décide d'éliminer toute la communauté super-héroïque, qu'elle juge responsable d'une grande partie des maux du monde. Mais avant cela, elle doit d'abord faire basculer l'opinion publique, autrement dit, discréditer une bonne fois pour toutes ces individus dotés de super-pouvoirs. Et quoi de mieux que l'intelligence artificielle et la prolifération massive de fake news sur les réseaux sociaux et à la télévision pour y parvenir ? Il faut dire qu'Amanda a quelques atouts dans sa manche, comme Failsafe, une version robotisée du Dark Knight, créée par Batman lui-même, conçue pour l'arrêter s'il franchissait un jour les limites. Elle dispose aussi d'une armée de robots Amazo, capables de copier les pouvoirs des super-héros qu'ils affrontent. La première étape du plan ? Éliminer le plus puissant d'entre eux : Superman. Lors d'un combat en apparence anodin, l'Homme d'Acier se retrouve privé de ses pouvoirs… et reçoit une balle en pleine poitrine. Dès lors, les justiciers tombent les uns après les autres : capturés, mis hors d'état de nuire ou contraints de se cacher. Pire encore, Green Arrow, l'archer emblématique, choisit de collaborer avec Waller, apparemment convaincu que ses intentions seront, à terme, bénéfiques pour le monde. Avec Absolute Power, Mark Waid signe une grande saga ancrée dans des problématiques contemporaines, où les surhumains de DC Comics chutent violemment de leur piédestal…
C'est une véritable guerre éclair qui est menée contre les super-héros, une attaque en règle sur tous les fronts : non seulement en bloquant l'accès aux terres parallèles, mais aussi en saturant les réseaux sociaux et en neutralisant la magie. À un certain point, on estime que 80 % des super-héros de la planète succombent en quelques heures à l'offensive menée par Amanda. Pourtant, parmi les 20 % qui parviennent à s'en sortir et à prendre la poudre d'escampette, le scénariste Mark Waid regroupe une série de poids lourds qui permettent de garder espoir pour la suite des événements. Tout ce beau linge se retrouve ainsi dans la Forteresse de Solitude de Superman, un lieu qui, a priori, échappe aux radars et reste inaccessible. C'est là qu'ils vont tenter d'organiser leur riposte. Mais la tâche est loin d'être simple : Jon, le fils de Superman, fait partie de ceux que Waller utilise pour parvenir à ses fins après les avoir capturés. Elle s'est en effet entourée d'une version inédite de Brainiac, dont elle se sert pour asseoir sa suprématie. Si la saga s’étale sur trois albums, c’est parce qu’Urban Comics a choisi de nous offrir une vision quasi exhaustive du récit : en plus des épisodes de la série principale, on retrouve de nombreux titres annexes consacrés à Green Arrow, Green Lantern ou encore Absolute Power : Task Force VIII. Ainsi, le lecteur ne perd rien de l'action et profite d'une grande diversité de dessinateurs. C’est évidemment l’un des artistes du moment, Dan Mora, qui illumine de son talent le titre principal, mais d’autres pointures se démarquent également dans ce premier tome, comme Tony Daniel, Marco Santucci ou encore Fernando Pasarin. Grâce à eux, chaque page se tourne avec un plaisir certain. D’ailleurs, cette histoire résonne étrangement avec notre époque, mettant en scène un renversement des valeurs : les héros, pourtant là pour protéger l’humanité, sont mis au ban de la société sous prétexte que leur seule existence favorise l’apparition et les attaques de super-vilains. Si les objectifs d’Amanda Waller ne sont pas complètement dénués de logique sur le fond, la manière dont elle agit la place parmi les pires adversaires que les super-héros aient eu à affronter ces dernières années. Bref, nous sommes impatients de découvrir la suite, car cette saga, à la fois intelligente et politique, s’impose sans conteste parmi les meilleures productions mainstream de ces dernières années.
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