A quoi peut bien être utile le concept de la série des Season One, que Marvel nous sert depuis quelques mois? Pour la énième fois, les origines des principaux héros sont révisées, et corrigées, de manière à les rendre plus modernes et adaptée au lectorat d'aujourd'hui. Les anciens lecteurs n'ont aucun intérêt à se procurer ce type de récit, qui n'est qu'une version reprise et nettement inférieure de ce qu'ils ont déjà lu à de multiples reprises. Les non initiés, les débutants les plus jeunes sont par contre le coeur de cible de ces albums, comme Hulk Season One, publié par Panini le mois dernier.
Tout le monde connaît le drame du Docteur Banner : inventeur d'une bombe propre, aux rayons gamma, il est aussi la victime de sa création. En voulant sauver un jeune imprudent qui traînait par là, au moment de l'explosion, il se sacrifie et subit une irradiation massive, qui le transforme, sans que personne ne s'en doute, en cette chose monstrueuse et surpuissante que nous connaissons sous le nom de Hulk. Dans cette version moderne du mythe, la créature qui résulte de l'explosion est loin d'être aussi sauvage et bestiale que l'originale. Tout en maintenant la dualité avec le scientifique Banner, Hulk est d'emblée un poil plus éveillé et conscient de ce qui se passe autour de lui. Il est ainsi impliqué, dès sa création, dans un complot technologique orchestré par une secte de scientifique sans foi ni loi. Tout le coté pathétique et dramatique, la découverte de ses nouveaux pouvoirs et la mise au ban de la société qui en résulte, tout ceci est assez rapidement évacué au profit d'un récit qui mise sur l'aventure et donne à voir en accéléré, sur quelques planches, des années de carrière de l'incroyable Hulk. Le meilleur moment est probablement quand le monstre vert tente d'éliminer la conscience de Bruce, en le rendant coupable de faiblesse et de pusillanimité, alors que ce dernier apparaît finalement comme le véritable homme fort dans leur dualité, puisqu'il est parvenu à dépasser une enfance malheureuse, avec un père violent qui le rouait de coups. Banner en a conservé une atention, une clémence particulière vis à vis des jeunes enfants, qui explique pourquoi il s'attache à Rick Jones, ici présenté dans une incarnation totalement sans saveur, à laquelle il est bien difficile de prêter attention.
Les personnages secondaires sont ébauchés mais facilement oubliables. Il en est ainsi des deux femmes qui gravitent autour de Banner. Betty Ross n'a pas de rôle décisif, et la scientifique italienne qui est chargé de superviser ses travaux (Monica Rappaccini) et le trahir n'apporte pas grand chose en terme de pathos. Sans ennemi crédible, sans une personnalité clairement définie, ce Hulk des temps modernes naît, détruit, et évolue, en un minimum de pages, très vite, mais sans jamais emporter l'adhésion. Van Lente signe là ce que je qualifierai de What If long et développé, mais rien de plus. N'est pas Peter David qui veut. Tom Fowler fournit une prestation agréable aux dessins, dans un style qui voudrait peut être être du Darwin Cooke, sans en avoir l'audace formelle. Fort heureusement, ces albums n'ont pas pour vocation de devenir la nouvelle version acceptée par tous, et se substituer à ce que nous savons de l'origine des personnages Marvel. Ce ne sont que de simples parenthèses mercantiles, qui pourraient dans le meilleur des cas, convaincre un nouveau public jusque là réticent à se pencher sur la question super-héroïque. De la bd en cape et collant sans prétention ni objectif défini, que tout lecteur de ce blog, habitué aux héros de Stan Le depuis des années, peut facilement mettre de coté sans rien y perdre de décisif. Vite lu, vite oublié.