LE DAREDEVIL DE CHIP ZDARSKY : LA FIN EST PROCHE CHEZ PANINI


 Avec le prochain album à paraître début janvier chez Panini, c'est carrément le run de Chip Zdarsky qui trouvera sa conclusion. L'heure est donc venue de résumer, avant de passer à autre chose. Il s'agit en fait de ce que l'on pourrait appeler la bataille ultime qui oppose Daredevil et Elektra contre la secte de ninjas de la Main, chère à Frank Miller. Quarante ans plus tard, elle est toujours une épine dans le pied de notre diable en costume rouge. Si le scénariste avait débuté son long run en respectant fidèlement les atmosphères de la série, c'est-à-dire des histoires urbaines, un sentiment de culpabilité dévorant et une chute programmée pour le héros, destiné tôt ou tard à se relever, nous basculons désormais vers la magie, l'ésotérisme, ce qui est assez naturel dès lors qu'il est question de la Main. Daredevil et ses alliés (certains d'ailleurs assez surprenants) se retrouvent sur une île du Pacifique, où ils vont constituer une sorte de camp d'entraînement, une base retranchée, qui va leur permettre d'atteindre le maximum de leurs capacités et de porter un coup définitif à leurs ennemis. On trouve plusieurs anciens détenus de la prison de haute sécurité du Myrmidon, car c'est bien connu, la fin justifie les moyens, ne faisons pas la fine bouche sur le recrutement. Si les méchants forment la Main, les gentils contre-attaquent avec le Poing : tout cela était indiqué dans une espèce de prophétie disponible dans un livre sacré. C'est un petit peu tiré par les cheveux, mais bon, nous ne sommes plus à cela près… et ceux qui sont étonnés de voir Daredevil affronter la Main avec ses propres armes doivent aussi comprendre qu'en face, le camp opposé se retrouve confié carrément à Frank Castle, un Punisher bien embarrassant pour Marvel, qui n'a pas trouvé mieux que cette histoire assez abracadabrante pour se débarrasser de lui. Merci Jason Aaron. On était vraiment impatient de retrouver les deux héros face à face, on s'attendait à un combat dantesque qui allait vraisemblablement laisser des traces durables dans l'existence des deux personnages, mais il faut bien admettre qu'on est un peu déçus et qu'à chaque fois que la bonne vieille lutte terre à terre se retrouve reléguée au second plan, au bénéfice d'histoires de foi, de manifestation surnaturelle et de pouvoirs inattendus à la place du bon vieux bourre-pif traditionnel, ça finit en eau de boudin.



 C'est bien là que se situe le problème. Ce que j'aime chez Daredevil, ce qui fait la force du personnage, ce sont ses problèmes intimes, sa tendance à chuter, finir au fond du caniveau, avant de retrouver le droit chemin. Bref, une tension permanente et qui fait de son titre l'espace idéal pour un mélange entre super-héros et noir classique, un genre dans lequel Miller excellait et où il avait réussi à introduire avec brio le paranormal, avec la Main. Mais après lui, beaucoup de scénaristes s'y sont cassés les dents. On se rappelle encore l'horrible Shadowland totalement sans inspiration. Ici, le grand final voudrait être poignant, voudrait être chargé en émotion, une sorte de sacrifice spirituel, de salut définitif (rires de l'assistance) à un héros qui nous accompagne depuis des décennies. Mais en réalité, le tout est nimbé d'un mysticisme exacerbé qui fait qu'on n'y croit pas un instant et qu'on guette à chaque case, à chaque page, le truc qui viendra annuler le drame du moment. On passera aussi sur le nouveau look du personnage, barbu, transformé en une sorte de moine shaolin à la tunique rouge, ainsi que d'Elektra, qui est officiellement une Daredevilette de rechange. Ne croyez pas que je me moque, d'autant plus que le dessinateur Marco Checchetto est une fois encore capable de sortir une prestation magistrale et de magnifier même des moments assez statiques, où c'est l'ambiance, l'atmosphère, les paysages qui prennent le dessus sur les personnages. Dans les combats, bien entendu, il est brillant. Alors oui, probablement qu'il est difficile d'écrire quelque chose de nouveau avec Daredevil aujourd'hui et lorsque on tente de le faire, l'écueil à éviter est celui d'aller rechercher tout ce qui a fait le sel de la série, dans les années 1980, en pensant pouvoir le réadapter, en jouant la surenchère. Il manque dans ce run un peu de l'âme de ce qu'était autrefois Daredevil. C'est souvent plastiquement beau mais on a du mal à vibrer, probablement aussi parce que nous ne sommes plus aussi naïfs qu'avant.


Daredevil, Le Poing Rouge, troisième partie, prévu le 4 janvier chez Panini.

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