Difficile de déterminer les raisons pour lesquelles le duo Superman Batman fonctionne aussi bien. Parfois présentés comme les deux meilleurs amis du monde, parfois antagonistes d'une rivalité malsaine, nous les avons vus à travers les époques marquer certains récits fondamentaux de l'univers DC Comics. La nouvelle mouture de World's Finest écrite par Mark Waid nous replonge, au niveau de l'ambiance, dans l'âge d'argent des comics , lorsque c'étaient l'aventure, la succession de combats, les situations baroques et explosives qui faisaient le sel du récit plutôt qu'une introspection générale et étalée dans le temps, qui caractérise aujourd'hui ce qu'on appelle "les arc narratifs décompressés". L'histoire commence alors que plusieurs super vilains attaquent Batman et Superman : Poison Ivy fait des siennes à Metropolis, alors que le kryptonien est lourdement confronté à Metalo, dont le cœur de kryptonite s'avère être une arme redoutable. Il parvient à mettre à terre l'Homme d'acier et à le neutraliser presque définitivement en lui injectant de la Kryptonite rouge directement dans le cœur. Tout ceci provoque une réaction en chaîne mortifère dans l'organisme de notre héros qui va carrément frôler la mort. Pour le guérir, mais aussi pour comprendre ce qui se joue et venir à bout de ces criminels qui pointent le bout du nez, il va falloir l'union des forces surhumaines de Superman (à condition qu'il se remette bien entendu) et les capacités déductives du meilleur détective du monde, pour remonter la piste d'un certain Nezha, un diable issu de la Chine antique, qui après avoir été emprisonné durant des siècles, est parvenu à se libérer et réclame la domination sur le monde entier, rien que ça. Et comme ses pouvoirs sont en effet impressionnants, et que rien n'a de prise sur lui, on se prend à penser que ses désirs pourraient aussi devenir réalité.
Du coup, Superman et Batman ont beau former une fine équipe, ça ne suffira pas pour venir à bout de la menace magique (et vous le savez, Superman a une seule limite évidente, les pouvoirs mystiques qui échappent aux lois de la nature). En renfort, il faudra qu'interviennent Robin (forcément, Dick Grayson est ici le side-kick de Batman) ou Supergirl, sans oublier la Doom Patrol, des outsiders que le grand public a appris à connaître aussi à la télévision, avec une série aussi inventive que sous estimée. Waid s'amuse et nous amuse. Les épisodes défilent très vite, ils baignent dans cette irréalité temporelle qui en font de petits bijoux du passé mais parfaitement actuels, truffés de petites touches humoristiques dans les dialogues. Aucun temps mort, aucune raison de s'ennuyer dans cette confrontation face à Nezha, qui occupe les cinq premiers numéros, et qui sont illustrés par un de ceux que nous adorons et que nous considérons comme un des talents les plus intéressants actuellement, c'est à dire Dan Mora. Le type joue à l'économie, n'abuse jamais dans la surcharge graphique, possède une capacité à aller à l'évidence, avec un parfum presque cartoony, tout en assurant un travail de grande beauté, des planches jamais banales ou bâclées. C'est beau, quoi dire de plus ? Le dernier épisode, qui est concentré en particulier sur Robin et ses mésaventures temporelles, est lui l'œuvre de Travis Moore, et il n'a rien à envier à ce qui précède. On attendait peu de cette nouvelle série, on a reçu beaucoup. Des combats orchestrés au millimètre, des légendes orientales et un saut dans un lointain passé, un adversaire digne de ce nom qui pousse les héros dans leurs derniers retranchements, de l'action, pure et dure, old school mais jamais démodée. Quand vous entendrez parler des comics comme un divertissement décomplexé et qui file la banane, vous pourrez désormais citer World's Finest en exemple, car c'est bien de cela dont il s'agit !
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