AQUAMAN ET LE ROYAUME PERDU (DE JAMES WAN) : ADIEU LE DCVERSE


 Se moquer ouvertement du second Aquaman, c'est un peu comme frapper à coup de tatane un homme à terre, qui aurait les deux membres inférieurs brisés. C'est un peu facile et vous avez la certitude qu'il ne va pas s'enfuir. Un peu d'humanité en ce bas monde, laissons donc mourir l'univers DC Warner première mouture, qui s'achève dans le chaos, le remontage à la hâte, le grand n'importe quoi. Aquaman par Jason Momoa, c'est en fait le bassiste d'un groupe de hard rock qui aurait reçu un peu par hasard la couronne de l'Atlantide et qui aurait décidé de jouer au super-héros, tout en se murgeant la gueule chaque week-end à la Guinness. C'est hautement improbable et ça n'a rien à voir avec le personnage tel qu'il existe sur papier. C'est d'ailleurs le frangin, Orm, c'est-à-dire Ocean Master, qui incarne physiquement (et même dans l'attitude) le mieux ce qu'aurait pu et dû être Arthur Curry sur grand écran. Un paradoxe de plus. Ajoutez à tout cela une grande débauche d'effets spéciaux pas toujours de très bon goût, des créatures marines effrayantes ou attachiantes (le gros poulpe) à foison, la sempiternelle litanie des bons sentiments qui vous explique que la famille, il n'y a pas plus important (ici, l'amour fraternel est capable de briser la pire des malédictions)… et vous obtenez un bon gros divertissement que le plus grand nombre trouvera indigeste et indigne, tandis que d'autres, les plus jeunes, les plus naïfs, les derniers stipendiés (Y en a-t-il encore, je ne pense pas, puisqu'il n'y avait pas de projection presse et de cadeaux à offrir aux influenceurs) vous vendront des vessies au prix de lanternes. Du côté des enjeux, la trame est assez simple. Le fils du premier Black Manta (est-il encore nécessaire en 2023, d'user et abuser de cet adjectif pour définir l'antagoniste mauvais du héros?) a mis la main sur un trident maudit, puis être possédé par l'esprit du souverain du Royaume Perdu, que les Atlantes ont choisi de faire disparaître de leur histoire et d'emprisonner dans la glace, pour une bonne raison. Seulement voilà, quand vous emprisonnez quelque chose ou quelqu'un dans la glace, il faut aussi tenir compte du réchauffement climatique. 



L'écologie va donc venir au secours du second film d'Aquaman ? En tous les cas, c'est un sujet d'actualité brûlant et une façon d'ancrer l'ensemble dans une vision contemporaine des enjeux super-héroïques. Sauf qu'en réalité, la trouvaille en restera au niveau du gadget scénaristique, rien de plus. Le Royaume Perdu sera retrouvé, malheureusement, puis ce sera la lutte finale, terrible, maléfique, avec le sort de l'humanité en jeu (où sont donc passés les autres membres de la Justice League ? En vacances, ils ont piscine?).Voilà, c’en est donc terminé pour la première grande phase des adaptations modernes des comic books DC sur grand écran. C'est peut-être cela le véritable sens du "royaume perdu" : cette poule aux œufs d'or qui s'est faite littéralement plumer et violenter pendant des années, qu'on a poussé à pondre les pires insanités, juste pour quelques dollars de plus. Mais le volatile a fini par se rebeller et dorénavant, chaque sortie rapporte à peine de quoi couvrir les frais engagés pour réaliser des nanars à 2/300 millions l'unité. Adieu les grosses omelettes. Aquaman a beau être le trait d'union parfait entre la Terre et les eaux, il n'aura pas non plus su surnager. Le voir en papa gâteau un peu demeuré aux côtés d'un mioche braillard et d'une épouse (Amber Heard) cantonnée à son rôle de génitrice féconde, après avoir échappé aux fourches caudines d'un procès médiatique et navrant, ce sera la dernière image que nous garderons d'une longue chevauchée qui a sombré, in fine, dans la Fosse des Mariannes de l'histoire du septième art. Un Aquaman qui se fait uriner dessus, en plein visage, par son enfant (est-ce là encore très utile?), qui est le souverain d'un royaume fabuleux et sous-marin mais rentre dormir sur la terre-ferme, dans un ignoble foutoir, qui semble tout heureux de ses propres limites intellectuelles et culturelles, comme si ce n'était là qu'une galéjade, que l'important résidait uniquement dans une musculature de premier ordre, seule arme pertinente quand il s'agit de taper sur tout ce qui bouge et de discuter après ? Ce sont là des mots forts et très sarcastiques, aussi nous semble t-il important de finir par une note plus légère : si l'objectif est celui d'un simple divertissement de début de soirée, sans aucune volonté de comparer avec la production des comic books ou imaginer ce que pourrait être un vrai film abouti sur le sujet, il est possible de sourire tout en mâchonnant une bonne boite de pop-corns. Il est juste dommage que ce soit désormais l'ambition maximale réservée à ce type de long-métrage. Les super-héros méritent d'être un peu plus « super » que cela, vous savez ?


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