HARLEY QUINN REBIRTH TOME 1 : BIENVENUE CHEZ LES KEUPONS

Il n'existe pas une seule et unique interprétation du personnage de Harley Quinn; ceci est valable à travers le temps, depuis sa création, mais aussi dans l'instant présent, avec ce qu'elle est aujourd'hui dans la réalité éditoriale chez DC Comics. Par exemple, l'incarnation en psychopathe cynique et sans sens moral, que nous trouvons au cinéma dans Suicide Squad, est mitigée par la Harley plus loufoque et humaine, que nous lisons dans sa série régulière. Cette dernière est arrivée à son terme, mais elle est relancée tout de suite avec l'étiquette Rebirth, sans pour autant que le scénario ou l'équipe artistique justifient un tel subterfuge. Il s'agit là clairement d'une démarche marketing, pour vendre le plus possible de numéros 1. Amanda Conner et Jimmy Palmiotti en profitent au passage pour retoucher subtilement les origines de la promise du Joker; celles-ci ne sont pas complètement chamboulées mais comme vous pourrez le lire, elles sont en partie modifiées, sans pour autant trahir les intentions de départ . Je ne vous cache pas que je suis franchement déçu par ce qui se trouve dans ce que nous vend la version Rebirth de la petite amie du Joker. Harley nous présente sa vie quotidienne, son amie et compagne (Poison Ivy) avec qui la relation saphique est toujours assumée par les auteurs, ainsi que la galerie de partenaires, amis, collègues, rôles secondaires de la série, qui sont les mêmes que ceux que nous avons rencontrés ces mois derniers. L'humour est par moments un peu frelaté et on a l'impression que les blagues fusent, mais avec une insoutenable lourdeur, et ne sont pas de première fraîcheur... on se croirait dans un mauvais Deadpool. D'ailleurs nous notons également le retour du personnage de Red Tool, qui est plus qu'un clin d'œil appuyé au mercenaire de chez Marvel. La Maison des Idées est parodiée aussi par le truchement d'événements déjà vus et revus des centaines de fois dans les comics, avec une invasion zombie provoquée par une contamination, qui fera immanquablement penser aux plus anciens à la guerre Kree-Skrull des Avengers, version vintage. Vous comprendrez de quoi je parle en feuilletant ces pages un jour prochain (et en voyant ces vaches extra-terrestres, ensuite passées à la moulinette, avant d'arriver dans la chaîne alimentaire). 

Des zombies certes, mais aussi des punks (qui sont un peu les zombies de la musique, non?). Harley qui infiltre un groupe punk et se grime de manière assez convaincante, c'est aussi au menu de ce premier tome de Rebirth. Une bonne excuse pour érotiser à fond pas mal de moments, et tenter de petits parallèles avec les Sex Pistols et la légende du punk. Mais on se  demande tout de même pourquoi ces choix, pourquoi cet humour lourd et qui finit la plupart du temps à plat. Pourquoi ne pas plus exploiter ces instants où le passé de Harley ressurgit et pourrait donner plus d'épaisseur à un personnage, emporté dans un tourbillon d'inconséquences et de vaine pochade, comme cet épisode avec un robot géant, qu'il vaut mieux taire sous peine de devenir méchant?
Pour le reste le dessinateur Chad Hardin (confirmé sur le titre) est un bon choix car il parvient à traduire avec son trait burlesque et inspiré le côté déjanté et peu sérieux que les scénaristes entendent insuffler à cette histoire, mais ne nous y trompons pas, il n'y a absolument aucun fond là-dedans, ni aucune idée directrice intéressante, qui pourrait justifier que Harley Quinn s'apprête à profiter de Rebirth, pour aller défricher de nouvelles voies et gagner en profondeur. Bret Blevins et Joseph Michael Linsner sont aussi de la partie, là encore c'est fort honnête et apprécié.
Pour l'instant Harley Quinn se contente de sourire, à condition d'avoir l'humour facile, et de cuisiner avec encore et toujours les mêmes recettes. Bref rien de surprenant si certains décideront de changer de crémerie. 


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