Ça vous dirait, qu'on vous raconte une histoire de princesse ? Helia, fille du roi Arthmel, que nous l'appellerions. C'est bien de ça dont il s'agit dans SangDragon ! Au début de l'histoire, le souverain meurt et celui qui lui succède sur le trône, c'est le grand frère de notre princesse, un certain augure, dans le passe-temps principal est la chasse et dont la sensibilité politique et familiale semble au ras des pâquerettes. En fait, on peut même dire qu'il déteste cordialement sa sœur, car il lui attribue la responsabilité de la mort de leur mère, à la naissance de la petite. Et surtout, ça ne va pas s'arranger, lorsque le médecin de la maison royale débarque avec un constat inquiétant : le roi n'a pas succombé à une mort naturelle, mais il a été empoisonné. Pour se débarrasser de la princesse, quoi de plus simple en réalité que de l'accuser de cet horrible méfait ? Cependant, elle va trouver un peu de solidarité auprès du médecin du roi, qui possède aussi des connaissances assez poussées dans les arts magiques et qui va la soumettre au test de la pierre de dragon, une sorte de joyau capable de diffuser une lumière scintillante, à l'annonce du réveil prochain d'un dragon. Oh surprise, la Pyrise ne se contente pas d'annoncer qu'un dragon est sorti de sa léthargie en concomitance avec la mort du roi, mais surtout elle semble désigner Helia comme l'origine du mal, ou au contraire celle qui saura y mettre fin. En tous les cas, la jeune fille n'a pas trop le temps de gamberger ni de se défendre, puisqu'elle est saisie par les gardes et emportée au cachot. Pendant ce temps-là, le scénario du pire est envisagé : le réveil du dragon Kraâhn, un des plus destructeurs que le royaume n'a jamais eu à affronter…
Attention cependant, cette bande dessinée évite l'écueil de la fantasy bon marché et des personnages monolithiques et caricaturaux. Peu à peu, tous les protagonistes évoluent, de façon crédible. On fait aussi des rencontres attachantes et fort sympathiques en cours de route. Les Ktholls forment un peuple bien particulier et même leur langage affecté et faussement moyenâgeux ajoute au plaisir de la lecture. On se retrouve ensuite pour un grand final à dos de dragon, qui permet aux dessinateur Bédu de laisser éclater tout son talent, avec des planches réellement superbes et d'une précision diabolique. L'artiste en a terminé avec la série "Les psy" (je mentirais si je disais que je suis un fan du genre) et pour aborder SangDragon, il a clairement dû modifier sa manière de dessiner, notamment avec des corps beaucoup plus anguleux et massifs, des planches au réalisme médiéval très réussi, que ce soit dans la succession de petites cases présentant des personnages en train d'interagir, que dans ces grandes vignettes où le paysage peut respirer, où les dragons peuvent prendre leur envol et virevolter. Ce que l'on apprécie le plus dans cet album, c'est sa simplicité apparente et son honnêteté foncière, qui en font un divertissement très efficace, avec une héroïne forte. Les couleurs de Cerise sont également importantes et savent alterner les tons bruns sépias du château ou de la prison, avec la couleur des grands espaces, quand ces derniers occupent le devant de la scène. Une très belle réussite donc, publiée chez Dupuis, après une pré publication dans les pages de l'hebdomadaire Spirou. Particulièrement soigné, jusque dans sa couverture grand format du plus bel effet (une des plus réussies de ces dernières années, pour ce genre de bande dessinée), SangDragon fait partie de nos coups de cœur des premiers mois de l'année.
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