Le scénariste qui a pris le plus de galon ces deux dernières années chez Marvel? Ne cherchez pas, la place est occupée par Donny Cates, qui a replasmé à sa manière l'univers cosmique local, ainsi que le personnage de Venom, tout en tissant des liens évidents entre ses créations, pour une sorte de Catesverse qui séduit le plus grand nombre de lecteurs. Preuve en est une fois de plus, avec le bon vieux Surfeur d'Argent.
Silver Surfer Black est une mini série en cinq volets réalisée en la compagnie de Tradd Moore, déjà repéré sur la trilogie de Luther Strod ou sur les pages de Ghost Rider. Elle prend son essor suite aux événements survenus quelques jours auparavant dans Guardians of the Galaxy. Dans le premier numéro des Gardiens de Cates, après avoir découvert le testament de Thanos devant certaines des figures les plus puissantes de l'univers Marvel, nous avons en outre assisté à l'embuscade de l'Ordre Noir pour récupérer les restes de leurs cinglé de modèle. L'attaque surprise des adeptes de Thanos provoque l'ouverture d'un trou noir à l'intérieur duquel Norrin Radd, Beta Ray Bill et d'autres personnages du cosmos Marvel sont aspirés. Dans les toutes premières pages Cates nous montre comment le héraut de Galactus utilise sa puissance cosmique pour pouvoir sauver les autres héros aspirés par le trou spatio-temporel, leur sauvant la vie, mais restant piégé à l'intérieur. Dans la solitude de l'oubli infini, le surfeur épuisé tombe, s'enfonçant de plus en plus profondément dans l'obscurité froide et insondable. Après des années de solitude, perdue dans l'obscurité, une lumière soudaine capte le regard de Norrin Radd, disparaissant cependant en quelques instants, englobée par une force obscure, avant que le héros ne puisse l'atteindre. S'appuyant sur le peu de pouvoir cosmique lui restant, le Silver Surfer, droit sur sa planche, parvient au point ultime où la lumière est apparue, pour clarifier ce qui s'est passé et trouver un moyen d'échapper au vide dans lequel il est aspiré. Ainsi commençe un nouveau voyage du Surfeur le plus mélancolique des comics, un voyage d'espoir et de rédemption aux confins de la galaxie, qui poussera le héros cosmique à réfléchir sur son histoire, son oeuvre et, avant tout, sur la nature de son être.
Cates le rappelle dès l'ouverture, ce Surfer là est un héros, mais il est tourmenté, et son âme doit portrer le lourd poids des exactions de Galactus, qui s'est baffré de planètes entières, ingurgitant des civilisations, sans que son "éclaireur" ne lève le petit doigt pour l'en empêcher. Cates met en scène la tristesse et la solitude et nous montre comment cela peut mettre en cause la nature même d'un héros comme le Surfer, dont les ans qui passsent font place à l'acceptation et au changement, après la torture mentale des débuts. Le personnage remonte le temps, se retrouve sur la planète des symbiotes, qui est en fait une cage pour Knull, leur dieu tout puissant, et entame un parcours qui s'attaque à son pouvoir, et le rapproche aussi de l'obscurité... Conçu comme une lettre d'amour et un hommage à son créateur Stan Lee juste après sa mort soudaine à l'automne 2018, le voyage du héros argenté pour échapper à la noirceur qui le dévore devient une allégorie du replis intime à la recherche de soi-même. Dans le contexte d'une odyssée cosmique délirante, l'enfant prodige de la Maison des idées est couvert de louanges, une fois de plus, pour avoir réussi à insérer une autre pièce dans la grande mosaïque qu'il a construite, élargissant sa cosmographie personnelle et ajoutant des éléments à sa mythologie. Avec lui, Tradd Moore réalise de petit prodiges graphiques de mise en page, avec une interprétation très personnelle des tourments métaphysiques du protagoniste, qui rejaillissent de manière très symbolique et délirante dans des dessins qui s'affranchissent de toute réalité objective, et explosent d'inventivité. Certes, les amoureux du "Marvel Style "des premiers temps pourront être déconcertés, voire scandalisés, mais dans le cas du Silver Surfer, et de sa dualité intérieure, on peut pleinement justifier ces libertés artistiques, bien plus audacieuses que nombre de planches "sages" d'artistes classiques du moment. Une expérience à tenter, assurément.
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