Avec Thor, il est de bon ton de parler Dieux, c'est d'une logique implacable. Le fils d'Odin aime qu'on le vénère, et il existe une raison simple à cela : quand il n'y a plus personne pour penser et prier un Dieu, que devient celui-ci? Il n'est plus, puisque Dieu est aussi, d'une certaine manière, une création de l'homme (n'en déplaise à ceux qui ont comme conviction que Dieu a créé l'humanité). Un peu comme l'oeuf et la poule, difficile de savoir qui est venu le premier, le cycle semble inépuisable et inéluctable.
C'est ainsi que Thor est fort surpris, en intervenant pour sauver une planète de la sécheresse qui menace. Si une des habitantes a bien pensé le convoquer dans ses prières, les autres n'ont cure des récits fantastiques qu'il leur raconte autour du feu. S'ils sont séduits par les merveilles narrées, cela reste à leurs yeux des affabulations, et ils ont bien du mal à croire que tout cela existe. Un peuple qui n'aurait personne en qui croire, un peuple sans Dieux, cela peut-il vraiment exister?
Thor a des doutes à ce sujet, et en menant son enquête, il finit par découvrir une réalité des plus angoissantes. Dans les parages d'Indigarr, il existe un lieu reculé où les anciens Dieux de la planète, aujourd'hui oubliés, auraient été massacré, pendus à des crocs de boucher, exterminés. Qui a bien pu commettre un crime aussi odieux, qui a la force pour décimer tout un panthéon? Une question qui trouve un début de réponse dans le lointain passé, dans la jeunesse de Thor, un jour où le jeune blond au marteau trouva la tête coupée d'un Dieu dans un fleuve, sans savoir que c'était là probablement le premier pas vers l'apocalypse, la fin des siens, comme semble le prouver un cliff-hanger en forme de vision du futur.
La nouvelle série de Jason Aaron avait tout les symptômes d'un titre qui allait m'ennuyer ferme, mais je reconnais m'être trompé : elle débute sous de très bons auspices, et développe un discours sur la nature même des Dieux qui mérite vraiment que le lecteur s'y attarde et s'y plonge en réflexion. Esad Ribic offre une atmosphère très particulière avec ses dessins, qui évoquent de belles peintures nordiques, et des Dieux exterminés droit sortis des oeuvres de Moebius. Bonne idée donc que de donner une chance à ce God of Thunder dont j'ai hâte de voir la suite. Ce premier arc, en cinq parties, porte déjà en soi les éléments moteurs pour un petit classique.