Repus et désenchantés, nous ne
parvenons plus aujourd'hui à capter la magie qui a présidé à ce
premier grand crossover de l'histoire, entre les deux majors des
comics que sont Marvel et Dc. Spider-Man et Superman qui s'affrontent
pour ce qui devrait être le combat du siècle, voilà une affiche
peu commune. En fait de combat, les deux icônes vont s'associer pour
déjouer les plans de deux de leurs ennemis attitrés respectifs. Lex
Luthor a été une nouvelle fois incarcéré, après un énième
larcin qui a échoué, et ce malgré l'utilisation d'un robot géant
pour venir à bout de Superman. Coté tisseur de toile, c'est le
Docteur Octopus qui connait à nouveau les joies de la prison. Ces
deux criminels vont se retrouver ensemble, dans le même pénitencier,
par le plus grand des hasards. Ils ne vont pas y rester longtemps car
Luthor a déjà tout prévu pour une évasion rapide. Ensemble, ils
vont associer leurs ressources pour terrasser Superman et Spider-Man,
sans grande réussite il faut bien le dire. Mauvaise idée du binome
: se rendre à New-York pour le lancement d'un satellite qu'ils
comptent bien pirater, et surtout enlever la journaliste Loïs Lane,
mais aussi Mary-Jane Watson qui se trouvait au mauvais endroit au
mauvais moment (une mini scène de jalousie venait d'opposer les deux
femmes). Superman et Spider-Man ont donc des raisons toutes
personnelles de s'impliquer dans cette affaire, et ils ne vont pas
avoir trop de mal à retrouver la piste de Luthor et Octopus. Quitte
à aller jusqu'au mont Kilimandjaro, et intervenir à temps pour
sauver la planète d'un désastre climatique.
En fait, on se rend bien compte que
Superman est si puissant qu'il aurait pratiquement pu se passer de
l'aide du Tisseur pour mener à bien cette aventure. Même chose coté
vilain : Luthor est d'une autre catégorie qu'Octopus, et c'est lui
qui mène la danse. Bref, les personnages Mavel n'en sortent pas
forcément grandis. Gerry Conway, qui avait travaillé pour les deux
maisons d'édition, signe un scénario très old school qui fleure
bon les seventies. On trouve tout au long de ce récit de petits
détails forts amusants : quand Luthor emporte Octopus sur son
astronef, on remarque que l'emblème du gang of injustice est apposé
sur la carlingue, comme s'il y avait besoin de faire savoir à tout
le monde qu'il appartient à cette association étrange et
malfaisante. Ou encore l'horrible pull-over de Peter Parker, bien
dans les goûts de l'époque, déjà apprécié dans des épisodes
d'Amazing Spider-Man. Ross Andru est l'excellent dessinateur de cette
histoire. Dans un style merveilleusement classique et fluide, il
imprime un mouvement, un dynamisme qui coule de source et émerveille
facilement par sa grâce et son sens du storytelling. Pas d'effets de
style exagéré, juste une capacité hors norme à narrer une
histoire, en y insufflant vie et action. En Vf, vous trouverez une
traduction proposée en 1979 par Sagédition intitulée Le combat du
siècle. Sur Internet, elle se négocie environ une
bonne trentaine d'euros, ce qui n'est pas encore excessif, compte
tenu de l'ancienneté de l'album. Il existe aussi une autre possibilité : le Superman HS 5 chez Semic, en 2003, vendu en kiosque. Nous attendons avec impatience une
nouvelle version, un jour prochain, qui viendrait raviver nos
souvenirs et nous rappeler qu'il y avait parfois du bon dans la
simplicité de ces aventures ingénues mais efficaces, qui sont
souvent à la base de notre passion commune, à nous les vieux
quadras du comic-book.