Il a fallu la sortie de la série d'animation Creatures Commando, qui vient enrichir le nouvel univers cinématographique de DC cher à James Gunn, pour qu'Urban Comics repêche dans les limbes des années passées certaines des aventures de Frankenstein, écrites par des auteurs de renom, puisque nous avons au scénario l'écossais Grant Morrison puis le canadien Jeff Lemire. Dans un premier temps, Morrison, épaulé par le dessinateur Doug Mahnke, nous propose Seven Soldiers : Frankenstein, une histoire articulée en quatre parties. C'est l'occasion de réécrire un peu le mythe du personnage, de le présenter sous un nouveau jour, avec une bonne part de coolitude mais aussi une diction et un langage Shakespearien, qui font de lui une sorte de monstre savant et inflexible. Dès le premier épisode, on le retrouve dans la cour d'un lycée où un jeune homme mal dans sa peau et acnéique va devenir le centre d'un terrible changement, provoquant chez tout ses camarades une forme de suicide parasitaire, les faisant tous devenir des adolescents adorateurs mal dans leur peau, à sacrifier pour des créatures qui vont se nourrir de leur déchéance. Frankenstein est ensuite envoyé sur Mars où là aussi il va devoir affronter des créatures horribles et aux visées hégémoniques, avant de redescendre sur Terre ou l'attend une sombre histoire d'eau contaminée, qui transforme les cellules des humains et les rend cancéreuses. Comme toujours dans les récits de Morrison, il faut lire attentivement si on veut y comprendre quelque chose. Le scénariste a des goûts littéraires assumés et il ne tombe jamais dans la facilité, au risque même de sembler parfois hermétique et de passer du coq à l'âne d'un épisode à l'autre, dans des césures marquées. Mahnke est en tous les cas un excellent choix pour seconder toute l'étrangeté et la monstruosité qu'il peut convoquer dans ces histoires.
Pour la seconde partie de cet album, Jeff Lemire emmène Frankenstein directement au QG du S.H.A.D.E. une de ces organisations top secrète que l'on trouve dans l'univers des comic books. Celle-ci a décidé de regrouper toute une armée de "monstres", dont fait partie Frankenstein, mais aussi son (ancienne) épouse par exemple et une nouvelle mouture d'un loup-garou et d'un vampire. L'ensemble a comme quartier général la Fourmilière, un globe indestructible qui ne fait que 8 cm de diamètre, grâce à la technologie réductrice du docteur Palmer, et qui contient un univers fantasmagorique à l'intérieur, où ont lieu des expériences folles et des prouesses technologiques. Tout ceci va être bien utile pour contrer l'arrivée d'une planète monstre, puis ensuite affronter la créature connue sous le nom de OMAC, avant de devoir se mesurer à la révolution des humanides, des êtres artificiels employés comme main d'œuvre et dont l'existence de vie ne dépasse pas 24 heures à l'intérieur de la fourmilière. C'est l'italien Alberto Ponticelli qui dessine ces épisodes qui fonctionnent plutôt bien et jouent la carte de l'humour pour unir tous les personnages monstrueux. Nous sommes là en 2012 et ces aventures qui étaient restées jusqu'ici inédites sont incontestablement déjà un peu datées, mais elles ont le mérite d'être suffisamment pétillantes pour retenir l'attention du lecteur. Globalement, une parution qui fait le job mais qui risque d'avoir bien du mal à se démarquer, au milieu de toutes les propositions de la rentrée.
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