Civil War. Encore et encore. Pas la première du nom (de Mark Millar) ni celle plus récente de Bendis. Il s'agit ici de la version proposée dans le cadre des nouvelles Secret Wars de l'an passé. Pour rappel, dans la saga de départ, deux camps sont opposés et se tapent allégrement dessus. Celui de Tony Stark, qui considère que tout individu doté de pouvoirs doit se faire recenser par l'état, et entrer à son service, s'il veut rendre la justice dans les rues, et celui de Steve Rogers, pour qui la liberté fondamentale des citoyens va au delà de leurs capacités, formidables ou non. Imaginons un instant que cette guerre n'ait pas connu la fin que nous savons, mais qu'elle ait duré bien plus, au point de s'envenimer et d'atteindre un point de non retour, avec une série de sacrifices et de morts telle qu'il n'est plus possible, plus jamais, de faire marche arrière. Voici la toile de fond de notre aventure, qui se rapproche finalement davantage d'un long What if? que d'une série à classer parmi les conséquences des Secret Wars. Ici l'Amérique a fini par se diviser en deux factions, avec le Blue, territoire de Captain America, Spider-Man et consorts, et l'Iron, gouverné par Iron Man d'une main de ... fer. Désolé, c'était trop facile. Chez Tony, la société est militarisée et une gamine qui découvre ses pouvoirs et vole pour la première fois est vite encadrée par la milice agissante. Chez Steve, c'est ambiance détente et permissivité. Sois responsable, et éclate toi, c'est le mot d'ordre des héros avec des dons particuliers. Cette incroyable dissension, source de morts et de drames, pourrait peut-être connaître une issue positive, enfin... à condition qu'une conférence de paix, réunion au sommet entre les deux frères ennemis, parvienne à aboutir autrement que dans un bain se sang. Une zone neutre, à la frontière entre les deux territoires, a été choisi pour cet entretien historique. Seulement voilà, vous vous en doutez, il suffit de peu pour que le brasier ne reprenne de plus belle; alors quand un sniper isolé provoque un incident regrettable, c'est de nouveau l'escalade, la méfiance, les faux semblants, et l'inéluctable course vers l'anéantissement qui reprend.
Cette version de Civil War, signée Charles Soule, se lit un peu comme une parabole sur l'équilibre de la terreur, et donne à voir une leçon fondamentale : le jusqu'au boutisme ne donne rien, si ce n'est mort et destruction. Il est superbement épaulé par L.F.Yu qui poursuit son travail de maître de ces dernières années (ses débuts de carrière étaient plus laborieux), avec des planches hyper bien construites et fort soignées. C'est un plaisir de voir qui est dans quel camp, et pour quelle(s) raison(s) et d'essayer de deviner la tournure que vont prendre les événements. Au niveau des enjeux sociaux-politiques, c'est un beau tour de force, et un titre qui se fait respecter. Si le niveau qualitatif moyen des Secret Wars secondes du nom fut fort variable, il s'agit ici d'une des histoires les plus abouties et hautement recommandables. La leçon qui clôture les cinq épisodes vient renforcer ce que plus ou moins de nombreuses histoires Marvel, à travers les décennies, ont tenté de définir en filigranes. A savoir que les super-pouvoirs, loin d'être une solution, peuvent être en réalité une grande partie du problème. Bien entendu, cette Civil War là est aussi l'occasion d'assister à des retournements de situations, des actes de traîtrise fomentés dans l'ombre, et de revoir certains personnages dans un contexte inédit, comme Peter Parker, qui a choisi de se séparer de Mary-Jane et son enfant, pour officier dans l'autre camp (celui de Captain america) ou bien Jennifer Walters, avocate et Miss Hulk, qui est l'amante de Tony Stark, avec ou sans charpente verte ultra musclée. Si vous deviez n'acheter que trois quatre albums liés à la période Secret Wars (et personne ne vous en voudrait de vous arrêter là) celui-ci aurait toutes les chances d'être du lot.
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