Nous sommes en 1995, et pour lire des comics en Vf, le plus simple est de miser sur Semic, principal pourvoyeur de nos lectures kiosque. Voici donc venir un album comprenant deux aventures complètes d'une quarantaine de pages chacune, deux "team-up" improbables, puisque concernant deux univers narratifs distincts. Batman et le Punisher se retrouvent en tandem, le temps d'un projet fascinant et plein d'affinité. Dans le premier récit, Frank Castle est à Gotham pour déjouer les plans machiavéliques de l'un de ses ennemis de toujours, Jigsaw le bien nommé (son visage est un vrai puzzle fait de cicatrices), qui a décidé de répandre une substance capable de faire s'enflammer l'eau, dans les réservoirs hydrauliques de Gotham. Dennis O'Neil est au scénario (des deux parties d'ailleurs) et il oppose le Punisher à la version violente de Batman, c'es à dire Jean-Paul Valley, alias Azrael. Les méthodes de ce dernier sont finalement assez proches de celle de l'anti-héros Marvel, mais sa folie dévorante (il parle tout seul, se réveille en poussant des hurlements, a des visions moyenâgeuses) en fait un justicier encore plus déséquilibré et dangereux pour la criminalité et le bon sens urbain. Les dessins de Barry Kitson sont plutôt plaisants, anatomiquement ils dégagent une puissance notable qui n'est pas sans évoquer celle d'un Jim Lee, par exemple. Le rythme est soutenu, et l'ensemble fonctionne bien. Du coup, on passe à la seconde aventure...
Encore une fois, nous sommes à Gotham. Mais ce coup-ci, le Punisher se retrouve face à Batman, l'original, c'est à dire Bruce Wayne. Hors de question de trucider les malfrats, ou même d'apliquer une correction ultra violente, il s'agit ici de justice, de réponse graduée et mesurée. Bref, ce que Castle a toujours méprisé chez Matt Murdock, alias Daredevil, qu'il fréquente souvent chez Marvel. Le Joker est de sortie dans ces pages, ainsi que la famille mafieuse des Navarone, qui sert ici d'exemple classique du genre, pour illustrer les ravages de la pègre sur Gotham. On retrouve également Jigsaw, qui s'est fait refaire le visage, mais n'aura pas vraiment le temps de s'en réjouir. Le vrai moment fort, c'est bien sur quand le Punisher, qui n'est pas adepte des secondes chances, se retrouve face au Joker, habitué à la clémence de Batman, qui est finalement responsable, dans une certaine mesure, des crimes continuels qui le caractérisent. Une scène fort bien écrite et totalement dans le ton de ce que nous savons et attendons des deux super-héros. Je ne vous cache pas que je finis par comprendre et presque partager le point de vue de Castle. Le Joker est vraiment irrécupérable, et les murs capitonnés d'Arkham ne le retiennent guère longtemps, puisqu'en évader semble être un de ses passe-temps préférés. C'est Romita Jr qui illustre le tout, et c'est superbe, en dehors de quelques silhouettes tordues ou déformées. Tout le dynamisme de JrJr est magnifié dans des pages explosives, notamment quand les personnages sont saisis en plein bond, en contre-plongée. Avant d'exagérer dans l'abstraction et l'emporte-pièce, Romita Jr avait vraiment un talent fou, croyez-moi (bon il en a toujours hein...). Batman/Punisher, 30 francs à l'époque (comme quoi les comics ce n'est pas plus chers aujourd'hui qu'avant, en France), est le type de saine lecture que tout amateur de Batman ou du Punisher se doit d'avoir dans sa collection. Les deux pour le prix d'un, et bien dessinés, ce n'est pas tous les jours que ça se trouve en kiosque, non?
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