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UTOPIE TOME 2 : CAUCHEMAR TOTALITAIRE AVEC RODOLPHE ET GRIFFO


 L'utopie développée par Rodolphe et Griffo dans leur série publiée chez Delcourt, prévue en trois volumes normalement, c'est un véritable cauchemar totalitaire qui n'est pas sans rappeler l'univers de 1984 et qui fait forcément écho à la manière dont évolue notre société, qui se rapproche dangereusement d'un totalitarisme qu'on croyait oublié, à tort. Le protagoniste de cette bande dessinée s'appelle Will et c'est un fonctionnaire, simple rouage d'une gigantesque machine à récrire l'histoire et à tromper la population, en lui présentant un cadre de vie idyllique (à condition d'appartenir à la classe dominante) qui repose en réalité sur le mensonge, la modification des perceptions et le respect servile de deux entités appelées Carla et Andy, dont nous ne savons toujours pas grand-chose, au terme de ce second volume. L'existence de Will a basculé depuis qu'une mystérieuse inconnue lui a mis des livres entre les mains. Lire, c'est-à-dire s'évader, c'est-à-dire faire fonctionner son imagination pour briser les carcans d'un réel castrateur, voilà un crime pour lequel il n'y a pas de peine assez élevée ! Alors Will n'est pas devenu qu'un lecteur, il est devenu un hors-la-loi, il a dû fuir et fatalement, il a même dû subir une arrestation. La seule personne chez qui il pourrait trouver un peu de répit, c'est cet antiquaire qui lui avait ouvert les yeux, dans le premier tome, et qu'il s'en va retrouver pour échapper à ses poursuivants. Mais même là, ce n'est pas une grande réussite et il doit désormais compter avec un statut de fugitif, dont les jours d'homme relativement libre sont comptés.


Dès lors, impossible de faire marche arrière. Une fois que vous tombez entre les mains de la police, dans le monde de Utopie, il n'est plus question de reprendre votre vie d'avant, ni même d'ailleurs de retrouver votre identité d'avant. Vous êtes tout simplement reprogrammés, de la même manière qu'il serait possible de reformater un ordinateur, un disque dur dont on souhaiterait effacer les données, pour s'en servir d'une nouvelle façon, les êtres humains sont spoliés de leurs souvenirs, de leurs expériences. On leur attribue à un nouveau nom et les voici jetés dans la société, pour un nouveau départ. Cette opération de lavage de cerveau se fait relié à une machine, qui entraîne les malheureux cobayes dans des scénarios stratifiés, au cours desquels ils finissent par perdre toute notion de ce qui est réel et de ce qui ne l'est pas. L'anéantissement de la révolte, la répression de l'individu, à tout point de vue ! Seule bouée de sauvetage, l'amour, une femme, un visage aimé ? Le dessin de Griffo en apparence simple et direct, qui s'attarde particulièrement sur les expressions, les visages, les petits détails d'un quotidien qui permettent de crédibiliser l'ensemble, rend la lecture aussi plaisante visuellement que scénaristiquement. Nous avions déjà eu l'occasion de le dire, à l'occasion de la sortie du premier volume, mais Utopie est ce genre de petite série qui sans tambour trompette est exactement ce que nous attendions, pour peu que nous ayons envie de lire une œuvre d'anticipation glaçante. À découvrir au plus vite.


Critique du Tome 1 ici

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UTOPIE VOLUME 1 : UN MONDE TROP PARFAIT AVEC RODOLPHE ET GRIFFO


 Nous avons tous une idée personnelle de ce que pourrait être un monde parfait, dégagé de ses problèmes, de ses incertitudes. Cette utopie peut faire froid dans le dos à certains ou au contraire être appelée de tous leurs vœux, par bien des rêveurs, qui ne comprennent pas que leur songe est un géant aux pieds d'argile. Car la perfection, ça n'existe pas, même dans cet univers mis sur pied par Rodolphe, qui est un peu un des spécialistes du genre. Ici, le personnage principal autour duquel gravite ce volume 1 s'appelle Will Jones : il travaille dans une institut qui a pour ambition de proposer une version cohérente de tous les faits historiques jamais advenus. Clairement, il s'agit en fait d'un exercice de réécriture, pour que tout devienne "lisse", quitte à perdre complètement le sens de notre héritage commun (il est ainsi question - et c'est assez drôle - du communiste au lieu de communisme et d'une certaine Stala, à la place de Staline. Et à un certain point , un des employés prétend qu'il existe des sources qui affirment que le dictateur soviétique était un homme, cela fait rire ses collègues!). Dans cette société aseptisée, les rapports personnels et tout particulièrement sexuels entre les êtres humains n'ont plus court, tout du moins dans la caste des plus nantis que l'on appelle les "plus plus". Eux ont à la maison une sorte de robot qui les attend pour satisfaire tout leur désirs. Les hommes ont une babe (amante et cuisinière soumise), les femmes ont un boy et lorsque le modèle ne correspond plus au goût du moment, il est remplacé par un nouvel androïde ou gynoïde encore plus fonctionnel et désirable. Bref, pourquoi regretter l'ancien monde, celui où les gens se fréquentaient, où on parlait politique, où on avait des débats de famille, où on lisait des livres ?


Il y a donc un petit côté Fahrenheit 451 dans cette histoire. Le livre en tant que dépositaire de l'ordre ancien, dont le contenu est capable de perturber la fable du présent, capable aussi de remuer les esprits, de les ouvrir vers quelque chose d'autre, la contestation de l'ordre établi. C'est un acte révolutionnaire alors, de tourner les pages d'un bouquin, au point qu'ils sont systématiquement interdits et brûlés et que le chemin de croix du protagoniste va commencer dès l'instant où une mystérieuse étrangère commence à lui transmettre des ouvrages, jour après jour, dont il ne parvient pas à se défaire. Cette société utopique semble en réalité annihiler  les individus et leurs instincts naturels, pour offrir en échange des cages de verre, l'illusion d'un paradis aseptisé et dirigé par "Carla et Andy". Ils ont construit ce monde en apparence merveilleux et se révèlent à la foule sous forme d'hologrammes, pour inciter les masses des travailleurs à vivre soumis et accepter passivement les efforts de guerre, dont on parle à certains moments, mais qui ne sont jamais concrètement définis. Probablement en saurons-nous plus dans le prochain tome, à sortir en avril. Le troisième étant lui à paraître au mois de septembre 2024. Même si la facture de l'ensemble est assez classique et qu'il s'agit d'une histoire qui trouve un écho dans bien d'autres choses déjà lues précédemment, il faut admettre que tout coule de source, que c'est très agréable d'aller de l'avant dans cette aventure et qu'il se dégage une cohérence et une unité assez remarquables. Le dessin de Griffo est capable d'unir suffisamment de réalisme et d'avoir une patte personnelle clairement axée sur les sentiments et les émotions, pour rendre la lecture fascinante, voire à certains endroits touchantes. C'est donc un premier volume qui remplit parfaitement son rôle et dont on aimerait avoir déjà la suite, tant on devine le potentiel évident d'Utopie.



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