RIP : LE TOME 6 POUR CONCLURE (EUGENE - TOUTES LES BONNES CHOSES ONT UNE FIN)


 RIP, 3 lettres en forme d'hommage, une manière pour souhaiter au défunt de reposer en paix. Sauf que cette série très particulière et qui est devenue (au fil des tomes) un réel succès est beaucoup plus sarcastique et désenchantée que cela. On ne parlera pas de "héros" par exemple, mais plutôt de personnages paumés, une sorte de brigade hétéroclite dont la mission est de vider la demeure de tous ceux qui sont morts dans la solitude. La vie matérielle des défunts est ainsi emportée, classée, cataloguée et parfois les interventions sont terribles, puisque la mort peut avoir frappé depuis fort longtemps, au point qu'il ne reste plus qu'un cadavre momifié, ce qu'ils appellent les "collés', bien au-delà de la putréfaction et de la décomposition. Comme un leitmotiv des six tomes de la série, nous trouvons des insectes qui pullulent autour de la chair putréfiée, a commencer par les mouches, bien entendu. Chaque tome est consacré à un personnage en particulier, par exemple Derrick pour débuter, un type abandonné et malheureux en ménage, qui plonge dans une spirale infernale à partir du moment où il décide de dérober une bague (il l'avale) qu'il aurait normalement dû cataloguer comme le reste, sur son lieu de travail. En partant de cette mésaventure, ce larcin somme toute banal, RIP part ensuite dans de nombreuses directions assez surprenantes, principalement le polar classique et stratifié, mâtiné de récit social glaçant qui systématiquement se termine mal. Chaque album est divisé en petits chapitres qui s'annoncent avec une citation extraite de la littérature ou de la pop culture, qui vient mettre en lumière une étape de l'histoire, le plus clair du temps en apportant une touche très sombre à l'ensemble. Gaet's, le scénariste de cette série, est en fait Gaëtan Petit. Comme quoi, c'est tout de même pratique d'avoir un père qui est le directeur d'une maison d'édition en France. Cela dit, attention, ne croyez pas qu'il s'agit juste de népotisme gratuit ! En réalité, le travail du fiston est remarquable. Plus on avance dans le récit, plus on ouvre de nouveaux tiroirs et on est surpris par la manière avec laquelle des événements présents dans le premier tome sont par la suite retravaillés, élucidés ou au contraire, détournés de leur sens, pour jeter en lumière d'autres personnages ou ouvrir et baliser de nouvelles pistes. C'est un travail saisissant, quasiment vertigineux. Nous avions donc hâte de voir arriver le dernier tome, tout en redoutant de devoir saluer une fois pour toute la petite compagnie.




J'ai personnellement découvert RIP avec un peu de retard. Du coup, j'ai pu dévoré les six tomes en une douzaine de jours. Et on finit en beauté. Eugene, c'est le gros raciste bourrin qu'on se plait à détester. Toujours prêt à s'enflammer, en apparence sans la moindre once de jugeotte, un type paumé, frustré, pathétique. Comme tous les autres avant lui, le dernier album va illuminer son protagoniste de manière à le rendre plus attachant, ou en tous les cas crédibiliser sa position au sein d'un récit complexe, dont tous les petits détails en suspens (que ce soit une interrogation au sujet d'un comportement passé, ou d'un détail visuel qui peut vous avoir échappé) finissent par trouver une résolution. RIP s'attarde plus sur des destins cabossés, brisés par le hasard ou l'absurdité, que sur l'histoire en soi. Elle, elle nécessite un regard d'ensemble, une sextuple confrontation, pour se dévoiler complétement au lecteur. Julien Monier maintient un niveau qualitatif excellent depuis le début de la série. On flirte avec la grosse caricature, mais toujours avec une expressivité et une humanité dans les personnages, ce qui permet de parfaitement les différencier et de les rendre crédibles. L'emploi de la couleur est aussi très pertinente et permet d'alterner les ambiances et les enjeux de façon très intelligente. RIP c'est aussi une partie dialoguée de haute volée, qui embrasse la vulgarité sans rougir et trouve toujours le ton juste, même quand il s'agit de passages dramatiques ou "choquants". Toutes les bonnes choses ont une fin, récite le titre de ce sixième effort, et force est de constater que c'est une des meilleures productions françaises du XXI° siècle qui vient de trouver sa conclusion. Sans faute de parcours, sans hésitation ou baisse de régime. Un tour de force remarquable, chez Petit à Petit. 





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