SUPERMAN CHRONICLES 1987 VOLUME 2 : QUI EST SUPERMAN ?


 Il est parfois légitime de se poser la question : qui est vraiment l'Homme d'acier ? Est-ce Superman, qui par moments se déguise en Clark Kent pour avoir un semblant de vie quotidienne, ou est-ce Clark Kent, un être humain sensible et désireux d'aider les autres, capable de devenir lorsque le besoin l'impose le plus grand super-héros de tous les temps ? La question commence à se poser sérieusement dans le volume 2 des Chronicles de 1987. Le journaliste Kent n'arrive pas forcément à rendre à temps tous les articles que lui demande son directeur en chef; de plus, le fait de devoir jouer au justicier encapé l'empêche d'avoir une vie normale, d'être présent pour l'anniversaire de ses parents adoptifs, ou tout simplement pour répondre à un rencard amoureux. Ce dernier point est très important car une relation sentimentale multiple commence à voir le jour dans les pages des trois différentes séries de Superman. Bien entendu, celle que Clark préfère est probablement la journaliste Loïs Lane, mais comment résister longtemps à la drague éhontée de Catherine (Kate) Grant, une nouvelle venue au Quotidien où travail notre journaliste et qui lui fait du rentre-dedans dès les premiers instants. Ce personnage assez fade, voire carrément peu intéressant de prime abord, va rapidement s'étoffer lorsque le scénariste Marv Wolfman évoque son récent divorce, ainsi que l'enfant qu'elle a eu quelques années auparavant et qu'elle n'a plus le droit de voir aujourd'hui, en raison de sa conduite réprouvée par la morale. Superman va d'ailleurs mettre son grain de sel dans cette histoire et se rendre vite compte qu'il s'agit d'une erreur : là où l'homme peut-être utile, le super-héros peut faire bien des dégâts. Enfin, n'oublions pas Wonder Woman. Depuis que Superman l'a rencontrée pour la première fois, il en fait même des rêves érotiques. Y a-t-il un avenir possible pour le héros aux côtés de celle qui semble son égal du point de vue de la force, du potentiel et du courage ? Encore faudrait-il être en mesure de la contacter pour lui parler vraiment… bref, super-héros mais aussi super imbroglio sentimental pour un homme qui n'a de temps pour personne, pas même pour lui-même.



Le problème quand on décide de rafraîchir un personnage et de reprendre ses origines pratiquement du début, c'est qu'on risque fort de verser dans l'incohérence, étant donnée la longue continuité qui s'était établi durant plusieurs décennies. Un cas d'école, celui de la Légion des Super-Héros, ces jeunes justiciers qui viennent du 30e siècle et qui ont un membre d'honneur très particulier en la personne de Superboy. Oui, mais voilà, lorsque John Byrne décide de réécrire l'histoire de Superman, ce dernier n'a jamais endossé le rôle de l'adolescent à super pouvoirs qui sauve la veuve et l'orphelin à Smallville. Et du coup, comment expliquer que des siècles plus tard, les membres de la Légion vont s'acoquiner avec Superboy pour vivre des aventures fabuleuses ? Ma foi, c'est impossible, sauf qu'il est toujours envisageable pour un scénariste de comic books de mettre sur pied une histoire invraisemblable qui convoque manipulation temporelle, réalités parallèles et plusieurs séries mélangées entre elles; c'est ce qu'on appelle un crossover. Ici, Byrne va donc être responsable d'une rencontre entre la Légion, Superman et Superboy (et le Piégeur du Temps). Les deux faces de la même pièce vont même finir par se taper dessus dans ce qui va être le meilleur moyen d'apporter une explication plausible à un dilemme éditorial. Pour autant que les explications que donnent les comics puissent être plausibles, ça va de soi. Sinon, pour être complet, signalons aussi que le second volume de l'an 1987 propose un petit crossover avec Hawkman, qui est l'occasion aussi de se rendre compte qu'à l'époque nous assistions également aux évolutions aériennes de Hawkwoman, dans des histoires fortement datées, qui font partie des temps faibles de notre gros volume. Le récit est un peu plus intéressant quand juste par la suite Superman rencontre le Green Lantern Corps, au fin fond de la galaxie. Signalons aussi la présence du premier annual de Superman, à la toute fin. Avec Titano (nouvelle mouture elle aussi réécrite), un singe victime d'expériences scientifiques dingues et qui va vivre une aventure particulièrement tragique, qui donnera l'occasion au lecteur d'apprécier le dessin toujours aussi classique et raffiné de Ron Frenz. Défense de la condition animale mais aussi triste plaisanterie du destin, ce sont des pages beaucoup plus intelligentes qu'on ne pourrait penser au premier abord. Avec une Lois Lane et un gros quadrumane qui nous rejoint une sorte de fausse partition de King Kong. 1987 est donc une année capitale dans la carrière de Superman; elle permet non seulement la redéfinition du personnage, mais se permet d'associer modernité et tradition, de réveiller l'intérêt jusque-là assoupi de nombreux lecteurs au long cours et d'en attirer dans ses filets toute une série de nouveaux. Comme j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire, mais ces épisodes fondamentaux sont très bien complétés et enrichis par un appareil critique et rédactionnel de qualité, dans chacun des volumes de la collection Chronicles. Prochaine étape (et nous serons là pour vous en parler) Batman 1988 (volume 2) et The Flash, qui fera ses débuts au mois de juin. 





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