OMNIBUS SILVER SURFER PAR DAN SLOTT ET MIKE ALLRED : LE SURFER COMME ON L'AIME


 Il pleut des Omnibus chez Panini Comics, depuis plusieurs mois déjà. Le rythme de parution s'est accéléré sans crier garde, et parmi les différentes propositions éditoriales, on notes de véritables pépites, que la plupart d'entre vous connaissent ou désirent acquérir. Le Silver Surfer de Dan Slott fait partie du dessus du panier, assurément. Le Surfeur d'Argent a beau être un véritable personnage iconique, identifiable même par un public pas toujours initié aux comic-books américains, il n'en reste pas moins un des héros les moins vernis pour ce qui est de sa trajectoire sous forme de parution mensuelle. D'ailleurs, Norrin Radd est longtemps resté sans une série on-going attitrée, jusqu'à ce que l'opération All New Marvel Now finisse par se pencher sur son cas. C'est Dan Slott, le démiurge du vingt-et-unième siècle d'aventures de Spider-Man, qui s'y colle. Tragédie, drames, introspections à la limite de la dépression, tout ceci est le quotidien de ce voyageur cosmique, qui pour une fois part sur d'autres bases, plus enlevées, fort bien accompagné par les dessins de Michael Allred, qui contribue à alléger le propos avec des planches fraîches et naïves. Il y a peu de place pour la torture mentale au départ, avec cinq premiers épisodes truffés de nouveautés, pour faire bouger les lignes. De nouveaux personnages aussi bien sur Terre (deux sœurs au destin dissemblable, qui douze ans auparavant confondirent la venue sur Terre du Surfer avec une simple étoile filante propice à un vœu qui décidera de leurs carrières) que dans l'espace, où nous découvrons une nouvelle cité cosmique en péril, dont le secret de l'existence a été si bien gardé jusque là que même Norrin en ignore la présence. L'Impericon est une idée fantasque et bourrée de petits clins d'œil au style épique et inventif de Jack Kirby, que digère et assimile à sa façon un Allred contaminé également par la ligne franco-belge. On passe allégrement de la quotidienneté répétitive de Anchor Bay, aux merveilles des tréfonds de l'espace, avec deux personnages aux antipodes, en apparence. Le Silver, donc, mais aussi Dawn Greenwood, dont le destin se retrouve bizarrement mêlé à celui de notre Surfeur cosmique, après avoir été enlevée par des aliens souhaitant "motiver" l'ancien héraut de Galactus. C'est le point de départ d'un rapport qui projette la série au pinacle du genre. 


Dawn (casanière à l'excès, dont l'horizon est fermé, par choix personnel) a en effet été kidnappée par un certain Zed, qui espère ainsi s'assurer les services du Surfer pour contrer la menace de la Reine des Jamais. Slott met en scène toute une panoplie de personnages et de situations cosmiques qui oscillent entre le grotesque, l'humour, et le fantasmagorique. La dualité entre les préoccupations terriennes de Dawn et l'universalité cosmique du Surfer donne lieu à des échanges assez drôles (la jeune fille pense que le héros a baptisé sa planche Amoi, en raison des premiers mots qu'ils emploie avant d'utiliser cette dernière…), aussi bien pour ce qui est des répliques que des situations. A ce sujet, les épisodes 4 et 5, qui marquent le retour de l'ancien héraut de Galactus sur Terre sont les plus pétillants. Le Surfer abandonne momentanément sa carapace (au sens propre et figuré) pour s'immiscer dans le quotidien d'une famille mortelle, du repas en commun à la sieste réparatrice. Pour le coup on confine au burlesque, avant de se lancer dans un rebondissement inattendu qui implique Cauchemar, et l'humanité qui dort. Mais il ne faut pas s'y tromper. Derrière tout ce qui sépare Dawn du Surfer, on découvre également tout ce qui les rapproche. Qui est de l'ordre de l'aspiration universelle, du besoin et des désirs de choses simples, de paix, de beauté, de sérénité. Sauf que tout cela peut emprunter bien des voies différentes, et se retrouver uni par la grâce de l'amour, sous la forme de liens subits et inattendus. Cette innocence recherchée est bien entendu parfaite pour que le style de Mike Allred puisse s'épanouir et faire mouche. On le voit en héritier de Jack Kirby, surtout pour les trouvailles fantasmagoriques ou pour les couleurs (son épouse Laura s'occupe de cet aspect), mais c'est principalement une belle leçon qu'il assène aux amateurs de musculatures toujours tendues et aux comics grimaçants. Chaque page confine à la poésie, et ne se contente pas de raconter en images, mais se donne carrément l'ambition de faire ressentir quelque chose au lecteur. Soyons fous ! Du cosmique à plein poumons, du romantisme et de l'aventure, un run solaire et indispensable, qu'on aime ou pas le Silver Surfer. Nous sommes au-delà des préférences de chacun, nous sommes dans l'art. 




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