BRZRKR BLOODLINES TOME 2 : UNUTE IMMORTEL ET LIBRE


 Unute est la marée, le cycle de la lune, une force cosmique soumise à des lois qui nous échappent. Comme le texte s’efforce de nous l’expliquer, le personnage du Berserker incarne une puissance inarrêtable, soumise à des cycles immuables. Il est immortel, ce qui lui permet de traverser les âges sans faiblir, mais il est aussi mû par une violence aveugle et féroce, qui doit périodiquement trouver un exutoire. Rien ne peut empêcher cette force de se déchaîner : il ne s’agit pas de la contenir, seulement de tenter de survivre à son passage. Dans ce second tome de Bloodlines — une série de récits annexes qui reviennent sur les étapes marquantes du parcours d’Unute — on remonte jusqu’au XIIIe siècle. Le Berserker se retrouve cette fois engagé aux côtés du légendaire Gengis Khan, pour participer à l’assaut de la grande cité de Pékin et ouvrir les voies du commerce en Asie. Évidemment, lorsqu’on a une telle machine de guerre à ses côtés, il devient bien plus aisé d’écraser les résistances, de remporter les batailles… et donc de gagner la guerre. On reste bien dans le ton de la série principale : une succession de scènes de violence extrême, de confrontations brutes, de moments d’abandon. Au centre de tout cela : Unute, toujours perdu, toujours sans repères, incapable de dire qui il est ni où il va. Son seul répit, il le trouve dans les plaisirs de la chair, l’alcool ou l’opium. Mais ce n’est jamais qu’un sursis : on ne met pas en laisse une créature quasi divine, et ceux qui tentent de l’utiliser pour servir leurs propres intérêts le paient systématiquement très cher. Keanu Reeves reprend ici les rênes de son personnage avec le scénariste Matt Kindt. Le dessin de Ron Garney, toujours aussi volontairement sale, nerveux et sauvage, colle parfaitement à cette ambiance de chaos (à peine) maîtrisé. Il est, comme souvent, l’homme qu’il fallait, au bon endroit, au bon moment, pour illustrer le premier des deux longs récits réunis dans ce volume, disponible chez Delcourt.




Et puis, un beau jour, Unute traversa l’Atlantique — à moins qu’il ne soit passé par le Pacifique — et rejoignit les États-Unis. C’est ainsi qu’au XIXe siècle, on le retrouve errant dans les grandes étendues du Kansas et du Missouri, là où les colts dégainent vite et crachent la poudre, que ce soit pour rendre la justice ou simplement exercer la vengeance. Le récit débute avec les tirs d’un gamin, victime d’un père violent, dont il sera débarrassé de manière expéditive. Il s’achève dans un véritable bain de sang, avec, comme d’habitude, un héros que les autres essaient d’utiliser pour faire le sale boulot — là où eux-mêmes ne pourraient s’y résoudre. Certes, on peut ici comprendre un peu mieux les motivations de la demoiselle en détresse qui sollicite ses services : son fiancé a été abattu sous ses yeux, le jour même de leur mariage, parce que son père, possesseurs d’esclaves, ne pouvait accepter que sa fille épouse un abolitionniste. Unute exerce donc son "métier" : démembrer, écarteler, laisser libre cours à une violence aveugle — mais ici canalisée au service d’une cause un peu plus noble. Jason Aaron est dans son élément : il adapte son style et ses obsessions à l’univers de BRZRKR, bien épaulé par un Salvador Larroca dont le trait sent la poudre et le soleil qui cogne sur les éperons. Un épisode touchant, bouleversant et sanglant. Que pourrait-on demander de plus ?


Tome 1 chroniqué ici

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