MAGNETO LE TESTAMENT : VERSION "GIANT SIZE" CHEZ PANINI


Réapparition dans un splendide écrin, chez  Panini, de l'un des albums les plus "adultes" et qualitativement intéressants de ces dix quinze dernières années, pour ce qui est de l'univers des mutants. Magneto, incarné avec brio au cinéma par Michael Fassbender, est la figure centrale d'un récit qui revient sur les origines de cet anti-héros, en plongeant dans les méandres du drame de l'Histoire avec une majuscule. Le coup de génie de Chris Claremont, avec le personnage de Magneto, fut de donner une épaisseur, une profondeur inattendue à l’homme, plus qu’au criminel. Derrière le masque du terroriste réside ainsi un être meurtri par l’histoire. Erik Lehnserr est un rescapé des camps de la mort, et il a vécu les pogroms, la chasse et l’élimination systématique des juifs par les nazis, ce qui lui a coûté sa famille et une bonne partie de son humanité. En tant que mutant, il s’est juré de protéger les siens, et de leur éviter un destin semblable. Et comme pour lui il n’existe pas de meilleure défense que l’attaque, il prend alors l’initiative en faisant régner la terreur, dès ses premières apparitions dans la série Uncanny X-men . Nous retrouvons Magneto, qui entre temps a vu ses mobiles et sa psychologie maintes fois retouchés en quarante ans de carrière (il a même guidé momentanément les X-men !), dans cette aventure controversée, qui abandonne clairement l'habituelle sarabande des super pouvoirs. Ici, rien de toute cette fantasmagorie, juste l'horreur. On a droit pour le coup à des supers méchants en uniformes (les allemands) et des victimes désignées qui luttent pour leur survie, partagées entre un besoin et une envie de fuite, et une résistance acharnée et pratiquement utopique. Encore une œuvre autour de la Shoah, s’exclameront les lecteurs blasés, après le Maus de Spiegelman, La vita è bella de Roberto Benigni ou le récent documentaire colorisé, Apocalypse diffusé sur France 2 (entres autres, la liste serait longue comme un bras)! Et bien oui, encore une, qui forcément, puisque qu’elle colle véritablement à la réalité historique, n’apporte guère de nouvelles révélations sur cette sombre période de l’Histoire, mais qui touche au but par la justesse du ton et l’émouvante sincérité du récit.


Là où Spiegelman utilise des souris et des chats, Di Giandomenico, un italien aussi sympathique que prolifique, déjà vu et apprécié sur de multiples séries Marvel ou encore chez Dc avec Flash ou Batman (et auteur d'un magnifique récit qui fait se télescoper comicbook et jazz, dans Leone, encore en attente de traduction vf), mise sur le réalisme de planches soignées et puissantes, jusque dans le regard effaré, indigné, désespéré, des différents personnages qui traversent un album fort différent des autres déjà publiés et mettant en scène les X-Men, ou les mutants, même si ces derniers sont depuis toujours le miroir offert à toutes les formes d'exclusion ou d'ostracisme qui caractérisent la folie humaine. De ci de là sont disséminés des indices sur les futurs pouvoirs de Magneto, mais jamais il ne peut les utiliser pour aider les siens, même quand on peut supposer que ce serait enfin le moment (juste avant la fusillade de ses parents, ou lors d'un lancer de javelot qui laisse planer le doute... ); c’est l’impuissance d’un jeune adolescent face à une tragédie absurde qui répond à nos attentes de lectures super héroïques. Un coup de chapeau à Greg Pack pour ce récit mature et rondement mené (de sa part c’est assez surprenant pour être noté) que vous pouvez vous procurer en toute tranquillité, si vous ne l'avez pas déjà fait, depuis sa sortie : du bel ouvrage, dans un format inhabituel et qui magnifie l'ouvrage de Carmine, et une piqûre de rappel salutaire en ces temps où le révisionnisme décomplexé de certains donne froid dans le dos. 


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LE PODCAST LE BULLEUR PRESENTE : ET L'HOMME CREA LES DIEUX (CHEZ FUTUROPOLIS)

 


Dans le 78e épisode de son podcast, Le bulleur vous présente la bande dessinée Et l'homme créa les dieux que l'on doit à Joseph Béhé qui adapte l'essai de l'anthropologue Pascal Boyer, l'album est édité chez Futuropolis. Cette semaine aussi, le podcast revient sur l’actualité de la bande dessinée et des sorties avec :

- La disparition de Jean Graton à l'âge de 97 ans

- La sortie du deuxième tome de Thérapie de groupe intitulé Ce qui se conçoit bien que l'on doit à Manu Larcenet et aux éditions Dargaud

- La sortie de Le labo, un one shot que l'on doit à Hervé Bouhris pour le scénario et Lucas Varela pour le dessin et c'est édité chez Dargaud

- La sortie de l'album Sur un air de Fado, un one shot que l'on doit à Nicolas Barral et aux éditions Dargaud

- La sortie de Chroniques de jeunesse que l'on doit à Guy Delisle et aux éditions Delcourt dans la collection Shampoing

- La sortie de Vendredi noir, cinquième tome de la série Zombillénium que l'on doit à Arthur De Pins et aux éditions Dupuis

- La sortie du premier tome d'Adventurman baptisé La fin et tout ce qui s'ensuit que l'on doit au scénario de Matt Fraction et au dessin de Terry Dodson et c'est édité chez Glénat




UNDISCOVERED COUNTRY : LA (RE)DECOUVERTE DE L'AMERIQUE CHEZ DELCOURT

 


Il arrive parfois que la lecture du premier numéro d'une nouvelle série se révèle être une évidence artistique et commerciale. Undiscovered Country, c'est cela avant tout. La certitude de tenir une lecture foisonnante, intelligente, qui n'a probablement pas encore tiré ses meilleures cartouches, loin de là. Mais commençons par le commencement. La nation en question, dans le titre, ce sont les Etats-Unis, qui ont choisi de "disparaître" de la carte du monde, au sens métaphorique. Plus aucune communication, impossibilité totale d'entrer ou de sortir, le monde entier ignore ce qu'il s'est produit sur le sol américain depuis plus de trente ans. Une autarcie qui vire au mystère ésotérique, une interrogation immense sur le destin de ce pays qui autrefois s'immisçait dans les affaires intérieures des autres peuples, sans leur demander leur avis. Pendant ce temps le reste du monde est au bord d'un chaos définitif. L'Europe et l'Afrique font partie d'une vaste confédération, et affrontent la menace d'un virus qui décime tous les habitants. Encore six mois, au mieux, et ce sera le baisser de rideau. Olivier Véran n'est pas de l'aventure, cet univers là est donc condamné. L'autre bloc, c'est l'Asie dans son ensemble, une superpuissance qui se prépare à la guerre, à la domination complète de ce qui reste, mais qui choisit pourtant une alliance diplomatique de circonstance, le jour où un mystérieux appel en provenance des States parvient outre Atlantique. Pour cette première communication officielle en plusieurs décennies, un dénommé Sam Elgin promet le remède contre le virus qui dépeuple l'Europe. Reste à venir le chercher, avec une délégation hétéroclite et prétendument prête à tout. C'est ainsi que partent à bord d'un hélicoptère un pilote chevronné, deux diplomates, une journaliste high-tech, une spécialiste de la médecine, un historien de l'Amérique et un aventurier badass. Les deux derniers sont frère et sœur, et au centre de l'intrigue, car dans leur prime jeunesse, eux et Elgin se sont déjà rencontrés, et le souvenir qu'ils en gardent ne correspond pas tout à fait à ce qu'ils vont découvrir...


Plutôt que de faire face aux pandémies et à la guerre ouverte avec la Chine (au niveau commercial tout d'abord) les Etats-Unis ont donc choisi de s'isoler, totalement. Y compris en érigeant de hauts murs impénétrables, donnant au continent un aspect de forteresse imprenable, caractérisant un repli sur soi définitif. Ce sont Scott Snyder et Charles Soule, deux des noms les plus ronflants du comicworld américain de ces dernières années, qui écrivent ce récit baroque qui fonctionne comme un oignon. Chaque épisode est une couche que l'on retire, avant d'atteindre le centre, et l'impression est qu'il va falloir beaucoup émonder, chercher, tatonner, avant d'aboutir à l'issue de cette quête. Tout est fantasmagorique dans ce premier tome, avec une vision fort pessimiste et une esthétique proche de la saga Mad Max, rehaussée par des créatures animales mutantes, et une violence sauvage. La trahison aussi est un élément essentiel, et l'ambiguïté de certains des personnages, les décisions nécessaires pour atteindre un objectif personnel, ont bien entendu un impact sur le destin et le dessein collectifs du groupe chargé de ramener un remède au virus. Des individus qui par ailleurs n'ont guère de sympathie les uns pour les autres. Pourquoi les avoir réunis, eux, et pas d'autres plus compétents ou solidaires? C'est encore une des réponses que se posera le lecteur, attendant que les scénaristes lui donnent les clés de compréhension en main.  Pour le dessin, il y a de quoi se réjouir. Giuseppe Camuncoli n'est pas uniquement d'une grande gentillesse, c'est aussi un maître artificier qui sans y sembler, fait exploser chaque page, chaque concept, comme autant de petits feux d'artifice. Il y a beaucoup d'inventivité, de la folie, et pour autant ça reste lisible et clair, avec une attention portée aux détails qui est fort louable. Undiscovered Country démarre sous de très bons auspices, le voyage sera long et fabuleux, alors embarquez! 


 
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AVENGERS WEST COAST EPIC COLLECTION : VISION QUEST

 La Vision n'est pas exactement humain, parlons plutôt de prodige de la science, de robot très avancé. Du coup, quand il devient un danger potentiellement public et international, pas besoin de prendre de gants et d'en arriver à un meurtre, il suffit de s'en emparer, et de le démonter! Pardi, il fallait y penser. Bon, ce n'est pas exactement du goût de son épouse, la Sorcière Rouge, qui un beau matin se réveille seule dans un grand lit vide (son mari a t-il aussi la fonction radio réveil, en temps normal?) et part à la recherche de l'androïde qui semble avoir mis les voiles. Les deux amants sont alors membre des Avengers West Coast, une équipe et une série qui viennent de subir un sérieux lifting avec l'arrivée de John Byrne. Scénariste et dessinateur de grand talent, ultra prolifique au point de gérer en parallèle des tas de titres, dans les années 80/90, Byrne imprime sa marque tout de suite, avec une saga qui frappe les esprits. La Vision en pièces détachées! Certes, il est possible de le reconstruire (Hank Pym est très fort avec un tournevis) mais un virus a été introduit dans tous les ordinateurs du monde, y compris ceux des Vengeurs, et toute trace de la Vision a été effacée. Techniquement donc, il est possible de rafistoler l'animal, de le rendre intègre et sur pieds à la charmante Wanda. Mais pour ce qui est de ce "supplément d'âme" qui en faisait plus qu'un super grille pain futuriste, rien à faire. La Vision peut même retrouver ses souvenirs et ses bases de données grâce à de récentes sauvegardes, mais pas ces sentiments, cette humanité, qui lui étaient propre, et qui l'avait amené à tomber amoureux de la Sorcière Rouge. Au passage, même ces caractéristiques n'étaient pas siennes, mais une copie de la personnalité de Simon Williams, aka Wonder Man, alors considéré décédé, par erreur. 


La nouvelle vision fait froid dans le dos. Même reconstruit, le synthézoïde est à nouveau une machine avant tout. Pas de sentiments, une froideur métallique jusque dans le timbre de la voix, aspect extérieur spectral et privé de la moindre couleur, impossible de partager une relation commune avec ce genre de robot. La situation est d'autant plus pesante que Wonder Man refuse de se prêter au jeu du transfert de personnalité, lui qui est de surcroît amoureux de Wanda Maximof. Un amour logique puisque si la Vision, guidée par la personnalité de Simon, avait fini par désirer la belle Sorcière, son modèle de départ risquait fort d'éprouver la même passion. Wanda prend très mal la chose et commence à manifester une instabilité préoccupante, jetant même toute une falaise sur les épaules de son prétendant, qui a l'audace de se soustraire à ce qu'elle estime quelque chose de naturel. Pour corser le tout, elle est enlevée par une mystérieuse organisation eugéniste, noyautée par des forces primordiales mutantes, qui lui lave le cerveau et la persuade de la nécessité de la disparition de l'homo sapiens, au profit du mutant "superior". John Byrne alterne scène de soap opéra avec le superhéroïsme le plus pur et dur, et ça marche. Les sous-trames abondent, les coups de théâtre se succèdent, pas un seul instant de répit, ni de décompression extrême, c'est un train lancé à vive allure, qui file vers la catastrophe, le délitement d'un mariage, et la folie d'un personnage qui risque de tout perdre, y compris ses deux enfants qui n'en sont pas vraiment... Byrne gère aussi le dessin, avec une clarté et une souplesse dans le trait qui en font un excellent représentant du mainstream des années 80. C'est agréable, percutant, mouvementé, c'est du comic-book, c'est la vie. Tout ceci est à retrouver (entres autres possibilités) dans le récent volume de la Epic Collection, en Vo, intitulé West Coast Avengers : Vision Quest. Totalement indispensable. 


 
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BLANC AUTOUR : RACISME ET PREJUGES CHEZ DARGAUD (AVEC LE PODCAST LE BULLEUR)

 


C’est en 1832 dans la petite ville de Canterbury, dans le Connecticut, que nous entraine l’album coup de cœur de la semaine. Dans une société américaine qui n’a pas encore aboli l’esclavage, nous allons suivre le destin de cette petite bourgade dont l’école des jeunes filles s’est ouverte à une élève de couleur, la jeune Sarah Harris Fayerweather. Nous devons cette initiative à une enseignante dévouée et tolérante, Prudence Crandall, qui ira plus loin encore face à l’hostilité d’une ville qui voit cette ouverture d’un mauvais œil. C’est bien de lutte contre le racisme et les préjugés dont il est question ici, d’une lutte qui se teinte aussi d’une coloration féministe puisque c’est aussi de l’instruction des filles qu’il est question. Basée sur une histoire réelle, le scénario intelligent et passionnant de Wilfrid Lupano et parfaitement bien servi par un dessin tout en rondeur et coloré de Stéphane Fert . Véritable coup de cœur qu’il ne faut absolument pas manquer, cet album est édité chez Dargaud . Si vous voulez tout savoir sur Blanc autour, titre de cette très bonne bande dessinée, rendez-vous dans le 77e épisode du podcast Le bulleur, à écouter ci dessous.


LA VISION : UN PEU MOINS QU'UN HOMME (WANDAVISION)


Retour chez Panini, avec le bel album complet de la maxi série de Tom King, qui a su plaire au plus grand nombre, et donc concilier œcuménisme et exigence artistique réelle. Vite, on s'y replonge.

La Vision n'est pas fait(e) de chair et de sang. Ce n'est pas non plus une simple créature mécanique, plutôt un synthézoïde, c'est à dire un androïde doté de circuits cybernétiques si complexes qu'il semble être aussi humain que vous et moi, en certaines occasions. D'ailleurs au long de sa carrière, la Vision a connu l'amour et le mariage avec Wanda Maximoff, puis est devenu père de deux enfants. Hélas, les choses ont vite dégénéré (il serait trop long de tout vous expliquer ici, et on l'a fait lundi dernier) et le voici à nouveau sur le chemin de la maîtrise totale des émotions, à travers une expérience paradoxale : s'installer dans une petite bourgade paisible de Virginie, pour y vivre avec sa famille. Car oui, l'Avenger est désormais en couple, avec deux nouveaux jumeaux pour progéniture. Tous les quatre sont des synthézoïdes, les deux petits des croisements des schémas cérébraux de papa/maman, encore en développement, comme de vrais adolescents. Un mystérieux narrateur annonce d'emblée l'arrivée de personnages sur la scène, et leur mort tragique dans les flammes, alors que l'ambiance paisible et caricaturale de la petite maisonnette, avec jardin et american way of life rassurante, s'oppose totalement à la prophétie énoncée, celle de la fin des Avengers et même de notre monde, au terme de cette aventure! La Vision a sauvé la planète environ 37 fois, comme cela sera énuméré dans un épisode, mais pourra t-il sauver sa propre famille, Virginia, Viv et Vin, lorsque les événements tragiques vont commencer à se succéder, comme un terrible effet domino? Tout commence alors que le Moissonneur rend visite à l'épouse synthézoïde et la menace, ainsi que ses enfants. Il s'agit là du frère de Simon Williams, dont les schémas cérébraux ont été employés pour bâtir la personnalité de Vision. Le vilain ressent une haine viscérale, et souhaite faire disparaître ces aberrations de la nature, mais il n'est pas de taille, bien qu'en mesure de produire des dégâts notables, comme envoyer la petite Viv sur la touche, en salle de réparation intense. Illusions, incertitudes, logique et illogisme, c'est autour de ces concepts que la vie quotidienne est rythmée au foyer, avec les discussions des époux synthétiques, et les micro-événements de tous les jours, de la visite de courtoisie entre voisins méfiants, à l'adaptation des "enfants" dans un milieu scolaire "hostile".

Une évidence s'impose : cet album ne ressemble en rien à aucune autre parution super-héroïque de ces dernières années. Ici la Vision est au centre d'un récit qui parle certes de meurtre, mais surtout des petits mensonges qui sont les fondations du bonheur, du besoin de cacher tout ou partie de la réalité pour ne pas souffrir, du sentiment d'aliénation que le quotidien des résidences pavillonnaires américaines finit par exercer sur ces familles, prises au piège de la recherche de la perfection apparente. C'est à dire proposer une image lisse et respectable pour l'extérieur, quitte à ce que lorsque la porte se ferme, les choses soient bien différentes au foyer. Tom King sépare subtilement la trame en trois pistes distinctes. Les errances de la femme de Vision, qui ne se contrôle pas et se laisse gagner par les émotions (même synthétiques) et doit en payer le prix, remords compris. Le mari super-héros, qui pour vivre pleinement cette nouvelle expérience opte pour des choix sans retours, et les enfants, qui se heurtent à une adolescence compliquée, où les interrogations restent la plupart du temps sans réponse précise. En prime, la référence littéraire constante dans cet album est le Marchand de Venise, de William Shakespeare, qui interroge le sens et l'existence du sentiment de vengeance, et de l'amour si absolu qu'il engendre forcément le sacrifice. Nous sautons allégrement des considérations philosophiques à la science-fiction chère à Isaac Asimov, tout en gardant le format et les automatismes d'un comic-book, et si je peux me permettre, d'un extraordinaire comic-book.

Si ce thriller fonctionne aussi bien, c'est grâce à Gabriel Hernandez Walta, dont le style épuré et immédiat cherche avant tout à capter l'essence des émotions sans surcharger ses planches, et les couleurs toujours pertinentes de Jordie Bellaire, qui assombrit le propos et parvient à miner la sécurité du foyer par le simple jeu des teintes choisies, qui évoluent au fil des pages. Indispensable, ça va sans dire. 




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WANDAVISION : HISTOIRE D'AMOUR ENTRE UNE SORCIERE ET UN ANDROIDE SUR DISNEY +

 


Les Marvel Studios sont de retour aux affaires. Cette fois ça se passe sur le "petit écran" avec une première série chez Disney +, la plateforme qui va produire et proposer les nouvelles créations made in Marvel dans les prochains mois. WandaVision pour commencer, donc, avec le sort de deux des personnages les plus touchés par l'orgie récente, Avengers: Infinity War et Avengers: Endgame.

Wanda et la Vision s'aiment. Un couple fort étrange. Improbable. Voyons ce qu'il en est , du coté des comics, pour mieux appréhender la série. Nous sommes au milieu des années soixante-dix lorsque Wanda et la Vision sont coéquipiers au sein des Avengers. Les deux ont fait leurs débuts en tant qu'adversaires féroces des héros les plus puissants de la Terre, avant de changer de camp et de rejoindre le groupe. Apparemment, ils ne pourraient pas être plus éloignés l'un de l'autre: elle est une femme compromise avec le monde de l'occultisme et de la magie, lui est un être synthétique, le fils de la science, mais doté d'une technologie basée sur une personnalité humaine.

Une "vraie personne" peut-elle tomber amoureuse d'une machine et d'une intelligence artificielle? Quelques décennies avant le film Her, l'univers Marvel répond oui. Depuis des années, Wanda et Vision forment un couple heureux de superhéros, et cela malgré la nature étrange de leur ménage. Nous savons que le bizarre est du pain béni pour la Maison des idées, alors Wanda et son bien-aimé finissent par se marier. Nous sommes en 1975 quand ça arrive, sur les pages de Giant-Size Avengers # 4. C'est un scénariste de grand talent comme Steve Englehart qui officie, un auteur avec une sensibilité et une capacité réelle d'utiliser des superhéros et leurs contradictions morales et personnelles comme thème de ses histoires. Il n'est pas surprenant que le récit qui mène au mariage entre la sorcière et l'androïde anticipe de beaucoup des thèmes qui caractériseront plus tard leur amour: la passion de la sorcière en contraste avec la nature de la machine de Vision, la magie qui s'en mêle (pour le pire) avec le perfide Dormammu qui prend le contrôle de Wanda, l'effort du syntezoïde pour se voir comme un homme à tous égards... ce sont autant de thèmes présents dans cette aventure, qui voit pourtant les deux amants triompher . Les héros sont désormais liés et entament une vie assez complexe: se diviser entre "famille" et missions et, en plus, trouver un équilibre et une forme de normalité dans une relation insolite entre femme et machine.

L'élément qui complique tout, c'est le personnage de Wonder Man. Le superhéros et star hollywoodienne est en fait celui qui donne une personnalité à Vision, dont les comportements sont essentiellement empruntés à ceux de Simon Williams. On pourrait dire que les deux partagent la même personnalité. De fait, ils vont aussi se retrouver amoureux de Wanda en même temps. Imaginez la confusion: vous aimez une machine pour sa personnalité et vous constatez qu'elle habite également une personne réelle. Certainement pas une pensée qui permet de choisir facilement l'amour du robot, et de garder de la sérénité. Wanda sera le pivot d'un triangle amoureux plutôt complexe flirtant même avec le scabreux, à bien y penser. Bien que difficile, cependant, la relation entre Vision et Scarlet se poursuit longtemps et survit jusqu'aux années 80, lorsque l'androïde devient essentiellement le chef des Avengers et décide ensuite de fonder un deuxième super groupe: les Avengers de la côte ouest. Les deux ont également eu deux enfants depuis un certain temps. Jumeaux, les nouveau-nés ont été accueillis par le couple avec joie, mais ils sont aussi une source d'inquiétude pour leurs amis héros: puisque Vision est un être artificiel, qui est le père des deux enfants? Insémination artificielle ou entourloupe?

Durant cette période l'étrangeté de la relation entre les deux, et les contradictions qu'elle entraîne, remontent à la surface de la manière la plus tragique. Au cours d'une mission, la Vision perd considérablement la capacité de ressentir et d'exprimer des sentiments. Wanda, peinée et de moins en moins stable, se retrouve à révéler à ses compagnons que les jumeaux ont été créés grâce à des pouvoirs magiques et innés, qui lui permettent d'altérer les probabilités des événements, et par extension, la réalité autour d'elle. De plus, il s'avère que la création des enfants a eu lieu grâce à la soustraction de deux âmes au contrôle de Méphisto, essentiellement le diable lui-même dans l'univers Marvel, ce qui fait de la progéniture du couple très étrange l'objet du désir des démons et des occultistes. Nous trouvons le superbe John Byrne pour écrire et dessiner les histoires des Avengers à l'époque, et la famille de Vision et Scarlet ne trouve pas la paix. Mephisto a l'intention de se venger du vol des âmes par une Wanda de moins en moins capable de se contrôler d'elle-même. Le démon défie la sorcière et semble être en mesure de détruire les deux enfants, dont les âmes finiront par se réincarner dans d'autres corps et grandir en tant que superhéros connus sous le nom de Wiccan et Speed. Le traumatisme est énorme, rendu encore plus douloureux par l'absence substantielle, même innocente, de son mari.

Scarlet est en proie à la dépression. Pour tenter de l'aider, la sorcière Agatha Harkness efface de son esprit le souvenir de ses enfants perdus, qui n'abandonne pourtant pas l'âme de Wanda; elle finira bientôt par retrouver la mémoire en raison de la fluctuation de ses pouvoirs et des plans d'Immortus. Le terrible traumatisme est cependant à nouveau enterré et les difficultés semblent même surmontées. La Vision retrouve sa personnalité et les deux époux semblent faire la paix et trouver un nouvel équilibre... sauf que les choses sont destinées à exploser à nouveau. En raison d'un commentaire malheureux de son amie Janet Van Dyne, également connue sous le nom de la Guêpe, Wanda récupère soudainement et de manière traumatisante le souvenir de la perte de ses enfants. La douleur et la frustration de ne pas pouvoir être mère, la manipulation qu'elle a subie de la part de ses propres alliés, même bien intentionnés, les blessures d'un passé tragique et d'un amour apparemment impossible, contrarié par une réalité qu'elle ne veut pas accepter, la rendent folle et l'amènent à modifier terriblement la réalité. Wanda se souille, plus ou moins consciemment, des terribles décisions qui mèneront à Avengers Disassembled. Ses alliés seront contraints de faire des choix traumatisants afin de mettre fin à la menace qu'elle représente et qu'elle représentera également, plus encore, à l'occasion de House of M, lorsque son instabilité sera exploitée pour effacer toute la race mutante de la surface de la Terre.

Pour Wanda et Vision, les années vont passer, bien qu'à distance, ce qui renforce leur stabilité respective. Leur amour est apparemment terminé. Mais si Brian Michael Bendis, au début des années 2000, montrait aux lecteurs de Marvel les terribles conséquences du désir de maternité et de normalité de la sorcière, ce sera un autre grand scénariste, Tom King, qui nous montrera l'autre côté de la médaille en 2016, c'est-à-dire la personnalité de Vision. Dans la célèbre maxi-série éponyme, que King signe avec Gabriel Hernandez Walta, on voit le syntezoïde, de nouveau membre des Avengers, gérer à sa manière la perte de Wanda et de son amour, ainsi que le désir ardent d'être un véritable être humain, d'être perçu comme telle. Une nécessité qui le conduit à créer une famille apparemment parfaite, une épouse serviable et adorante, deux enfants syntezoïdes qui vont à l'école et tentent de vivre une vie normale, au milieu de la confusion des voisins méfiants et effrayés. Le spectre de Wanda et sa mémoire ne sont pas loin et se manifesteront à nouveau de manière tragique. Ce dernier cycle d'histoires, récompensé par un Harvey Award et un Eisner Award, semble être en partie l'inspiration de WandaVision. La recherche obsessionnelle d'une normalité niée dès le début, l'apparence artificiellement parfaite superposée à la réalité douloureuse et impossible à accepter, la folie d'une situation qui s'étend à celle de l'esprit, tout ceci est suggéré dans les bande-annonces de la série, qui se veut aussi un hommage, sur le plan formel, aux grandes heures de la télévision américaine, quitte à pasticher des sitcoms comme Ma Sorcière bien aimée, comme cela est évident dans les deux premiers épisodes, déjà diffusés. 




Le récit indispensable de Tom King, c'est celui-ci :



UNIVERSCOMICS LE MAG' #7 : UNITED STATES OF COMICS

 




UNIVERSCOMICS LE MAG'



Mensuel et gratuit. Format Webzine et PDF

Chaque mois, la revue s'articule autour d'un thème précis, évoque l'actualité des comics et du cinéma, propose des interviews avec des artistes internationaux, et un portfolio. 





Le numéro en cours (#7 janvier 2021)


UniversComics Le Mag' #7 janvier 2021. Mensuel comics gratuit. 60 pages.
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Sommaire:
UNITED STATES OF COMICS
*Le dossier : USA et comics. L'Histoire des Etats-Unis et les histoires de nos comics sont souvent liées.
* SIMON & KIRBY aux sources du mythe de #CaptainAmerica
* THE HOMELANDER portrait "psy" d'un good boy, pas sans reproche... De Anthony Huard
* ELLIS ISLAND le rêve pour tant d'immigrés, la Terre Promise vue par Philippe Charlot et Miras, chez
Bamboo Édition
* UNCLE SAM le rêve américain incarné de Steve Darnall et #AlexRoss par Alexandre Chierchia
* INTERVIEW : à la rencontre de #VincenzoFederici avant la sortie VF de son Kabuki Fight chez #ReflexionsEditions
* COMICS STORY : Petit guide pour lire et découvrir de bonnes histoires de #CaptainAmerica
* LE PORTFOLIO de janvier 2021
* NOTRE SELECTION des sorties librairies VF du moment



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COSMOPIRATES TOME 1 : CAPTIF DE L'OUBLI (JODOROWSKY / WOODS)

 Xar-Cero est typiquement le genre de mercenaire sur lequel on peut compter. Si vous avez une mission à exécuter, soyez certain qu'il ir...