Réédition dans la collection Marvel Poche
Parfois, un simple "Et si...?" suffit à déclencher un cataclysme dans l’univers Marvel. Prenez Deadpool, par exemple : derrière son humour décapant et sa conscience méta qui a tant séduit les lecteurs, se cache aussi un potentiel de destruction illimité. Cullen Bunn et Dalibor Talajić l’ont bien compris en imaginant Deadpool massacre Marvel, une œuvre aussi sanglante qu’irrévérencieuse, qui dépouille le "mercenaire disert" de son ironie habituelle pour se pencher sur son côté le plus sombre. Tout commence dans un des nombreux Multivers. Wade Wilson, devenu incontrôlable, est enfermé par les X-Men dans l'asile de Ravencroft. Mais l'établissement n'est pas aussi sûr qu’il y paraît : le Dr. Benjamin Brighton, censé soigner Wade, n'est autre que Psycho-Man déguisé. En tentant de reprogrammer l’esprit du mercenaire, il ne fait qu'aggraver la situation : Deadpool sombre alors dans une folie froide et méthodique. Sa nouvelle mission ? Sauver l’univers… en exterminant chaque être doté de superpouvoirs. Pas de jaloux : super-héros et super-vilains tombent les uns après les autres sous ses coups. Thor, Thanos, les figures les plus iconiques de Marvel, aucun n’échappe au massacre, parfois en à peine quelques cases. Les cinq épisodes de cette folie furieuse sont ainsi un véritable déluge d’hémoglobine, où l'humour noir habituel cède la place à une violence brute, presque nihiliste. Talajić illustre ce carnage avec un style dynamique et tendu, qui traduit à merveille l'urgence et la brutalité des événements.
Si le rythme effréné de l'album séduit par son énergie destructrice, il souffre aussi de certaines faiblesses : affrontements bâclés, incohérences, et une écriture qui sacrifie profondeur et émotions sur l'autel du spectaculaire. On regrette par exemple que la bromance légendaire entre Deadpool et Spider-Man soit balayée d’un revers de crayon, Spidey étant expédié aussi vite que n'importe quel second couteau. Cette œuvre s’inscrit d’ailleurs dans la tradition des "What If...?", ces récits hors-continuité que Marvel publie depuis 1977 pour explorer toutes sortes de scénarios délirants, sans conséquences sur son cher univers principal. Une idée séduisante sur le papier, mais qui, comme souvent, donne des résultats inégaux. Deadpool massacre Marvel en est la preuve éclatante : ambitieux dans son concept, jouissif dans son exécution, mais qui n'a pas d'autre ambition que d'être un pur divertissement. Faut-il pour autant bouder son plaisir ? Certainement pas, surtout pour les amateurs de défouloir ultra-violent et de déconstruction sauvage des mythes super-héroïques. Mais ceux qui espèrent retrouver l’esprit satirique d’un Deadpool "classique" risquent de ressortir de cette lecture avec un goût de sang — et peut-être d’inachevé — dans la bouche. Pour ma part, je ne suis pas un fan du personnage, si ce n'est les débuts de la période Duggan et Posehn, que j'avais trouvés très pertinents. Mais bon, après tout, Deadpool reste Deadpool : imprévisible, excessif, et prêt à dynamiter tout ce qu’il touche, y compris ses propres histoires. Et je ne sais pas si je vous l'ai déjà dit, mais j'adore Dalibor Talajić, le dessinateur mais aussi le bonhomme, tout simplement.
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