DEADPOOL TOME 3 : LE BON, LA BRUTE ET LE TRUAND

Deadpool n'a jamais été un modèle de stabilité psychologique mais c'est encore pire depuis qu'il abrite dans son esprit celui de l'ancien agent du SHIELD Émilie Preston. Celle-ci est morte dans le tome 1 de la série actuelle et depuis c'est le mercenaire le plus bavard de la planète qui héberge ce qui reste d'elle. Conséquences imprévues de cette cohabitation, Deadpool s'est rendu compte qu'il est est régulièrement kidnappé et anesthésié par une mystérieuse organisation, qui en profite pour lui prélever des organes. Bien entendu il se doute que son facteur auto guérisseur a quelque chose à voir dans cette affaire des plus sordides... Ce tome 3 joue sur plusieurs niveaux et se relève très intelligent; il démarre avec un récit situé dans les années 70 où Deadpool fait équipe avec les héros à louer de l'époque, à savoir Iron Fist et Luke Cage (version tiare sur le front). L'épisode est intégralement écrit et dessiné dans le style de l'époque, c'est-à-dire avec un vocabulaire, des tics de narration et un look graphique totalement convaincant, comme si vous y étiez à nouveau. Le méchant de l'histoire s'appelle L'Homme blanc, doté d'une sorte de pistolet capable de pétrifier les victimes. Il s'en prend à une commerçante dont la fille particulièrement avenante et séduisante fais tourner la tête de Wade Wilson. A l'issue d'un combat aussi rocambolesque que délirant l'homme blanc est à son tour pétrifié, et il va passer plusieurs décennies dans cet état immobile jusqu'à ce que malencontreusement il soit réveillé à notre époque. Cette parenthèse faussement tirée des seventies débouche donc ensuite sur une aventure totalement contemporaine dont les origines ont été inventées de toutes pièces et ont des conséquences directes sur l'avenir proche du personnage. si l'Homme blanc fini par être neutralisé Deadpool en apprend plus sur les ennemis qui l'utilisent comme un cobaye chargé de pièces de rechange; à partir de là l'humour se crispe et l'aventure devient plus tragique qu'à l'accoutumée. 

C'est tout le run de Duggan et Posehn qui s'illumine de la sorte, et se révèle pour ce qu'il est vraiment. Non pas une énième blague potache avec des références pop et des blagues sous la ceinture, mais une oeuvre beaucoup plus sensible, où Deadpool n'apparaît plus comme ce mercenaire cinglé qui n'en fait qu'à ses têtes, et devient une victime tragique et pathétique, dont les sentiments affleurent de manière si évidente qu'il ne parvient plus à les dissimuler. Nous allons donc revenir en détail sur les tortures subies durant son traitement du cancer, qui s'est transformé en expériences tordues et illégales. Un parallèle fort intéressant est tracé avec ce qui est arrivé à Wolverine (dans la saga Weapon X de Windsor Smith), et notamment la peur à combattre quand l'individu renoue avec la liberté (chacun gère cela à sa façon, qui par la violence animale, qui par l'humour et l'absurde, voire la folie). Les auteurs offrent aussi une descendance au héros, ce qui permet clairement de voir poindre l'homme derrière le personnage. De plus, cette fille présumée qui est insérée dans un contexte des plus tragiques, accentue davantage la fragilité de Deadpool, qui par la grâce de ces épisodes a la possibilité formidable de devenir quelqu'un d'autre, tout en gardant bien entendu les caractéristiques qui font du personnage un des chouchous des lecteurs. Deadpool peut enfin être Wade Wilson, en se débarrassant d'une épreuve, d'une menace permanente dont nous ignorions tout mais que les auteurs sont parvenus à rendre crédible en quelques mois, et par la grâce de moments forts en émotions (qui eut pensé écrire ce genre de choses sur cette série?) qui nous prouve qu'il est toujours possible, avec de bonnes idées et un talent inné pour la narration, de surprendre le lecteur et de lui mitonner l'impensable, pour son plus grand bien. A peine s'il me reste la place pour ajouter que le dessin de Declan Shalvey, ici dans un style plus conventionnel que celui adopté dans Moon Knight, permet une lisibilité agréable de l'ensemble, que je vous recommande chaudement. ce que j'ai lu de mieux au sujet de Deadpool depuis... la création de Deadpool. Promis juré. 


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OLDIES : NAMOR DANS LES ANNEES 90 (JOHN BYRNE ET JAE LEE)

Namor, le Prince des mers, c'était avant tout une série régulière de qualité (publiée dans Strange) avec deux énormes artistes, fort différents, qui se sont succédés. 
Bien qu'étant un des doyens de l'univers Marvel, bien qu'ayant connu un "golden age" des plus florissants et étant le tout premier mutant à avoir eu les honneurs d'une série mensuelle, le personnage de Namor n'a pas pour autant un nombre d'estimateurs à la hauteur de son curriculum. Il faut dire que coté crédibilité, le héros se prête facilement au persiflage : nous avons affaire à un souverain soupe au laid, toujours prêt à péter un câble à la moindre contrariété, qui passe le plus clair de son temps à déambuler dans un slibard moulant et qui doit, forcément, dégager une certaine odeur de poissonnerie, ce qui n'est jamais un atout pour les relations sociales. Rendre Namor glamour, mission improbable? Demandez donc à John Byrne, il vous répondra qu'à l'impossible, nul n'est tenu. En 1990, il décide de proposer sa version du Sub-mariner, revue et corrigée pour le public de la fin du siècle. Exit le super héros incompris et rageur, place à un mutant enfin libéré de ses angoisses, plus posé, qui se lance dans le monde de la haute finance pour protéger efficacement les mers dont il est le gardien écologiste implacable. Scénario et dessins, on n'est jamais aussi bien servi que par soi même, surtout lorsqu'on a du talent.
Première mesure, expliquer les sautes d'humeur d'un Namor irritable. Pour ce faire, notre héros rencontre dès les premières pages Cab Alexander, un vieux scientifique amateur, et sa fille, dont il va même tomber amoureux. Cab lui explique avoir deviné la source du problème : un déséquilibre sanguin occasionné par le trop plein, ou la carence en oxygène, consécutive à la dualité terrestre/amphibienne du prince des mers. Dès lors, Namor décide de profiter de sa nouvelle stabilité caractérielle pour investir la finance, via une compagnie écran, la Oracle incorporated. C'est en puisant dans les innombrables trésors qui jonchent les fonds marins qu'il va lever les fonds et lancer sa nouvelle croisade. Qui va lui valoir de perfides nouveaux ennemis, comme les jumeaux Marrs, rivaux à la bourse. Ce qui ne l'empêchera pas de tomber amoureux de la soeurette. Car oui, le Sub Mariner est un chaud lapin. Byrne met ensuite le mutant aux prises avec une créature engendrée par la pollution ambiante, un certain Slug, et lui fait éviter une catastrophe écologique provoquée par des fanatiques de l'environnement. Suivront les créatures végétales de K'un Lun (les H'yltris) et le retour sur scène de Iron Fist, que tout le monde croyait mort. Une visite en Allemagne, à peine réunifiée, pour un mano a mano contre les restes du III° Reich, guidé par Master Man le super soldat vert de gris. Le tout avec brio, humour, un sens certain de la narration fluide, et des dessins lumineux et toujours d'une lisibilité appréciable. Byrne restera 25 numéros durant, afin de céder le flambeau à un artiste alors quasi inconnu.

Le run de Byrne a donc été un très grand moment de lecture, pour beaucoup de jeunes Marvel fans de l'époque. Difficile de faire mieux, en arrivant derrière. On avait atteint un véritable pic de qualité qui faisait craindre le pire pour son successeur. Sauf que ce dernier, à la surprise générale releva le défi avec brio. Place donc à Jae Lee, un coréen d'origine de dix neuf ans à l'époque, avec à son actif une simple pige chez Marvel, pour la revue anthologique Marvel comics presents. Mais quand on a du talent, on peut compenser aisément le manque d'expérience. Le Namor de Jae Lee est radicalement différent de celui de Byrne, il n'essaie pas de singer ou de rendre hommage à son aîné, mais bien d'imposer une nouvelle direction artistique au titre, en le gratifiant de pages ultra expressionnistes, sombres et paroxystiques. Le Prince des mers y apparait massif, doté d'un physique dopé aux anabolisants et noueux, une force sauvage de la nature aux veines saillantes. Les différents personnages n'ont de cesse de se lover dans l'ombre et en sortir brièvement, alors que les cases implosent, saignent, fondent ou se mêlent. Le classicisme de Byrne est foulé aux pieds par un vent de modernité, une déferlante technique impressionnante, qui va redynamiser un comic-book plutôt gâté par le sort, avec de tels artistes à sa tête. Pour le scénario, Byrne prolonge quelques mois, le temps de dénouer les fils de l'intrigue précédente : Namor est devenu amnésique, privé de ses souvenirs (il ignore même son identité) par Master Khan, et il erre dans le midwest américain ou il prête main forte à des activistes écologistes, avant de tomber nez à nez avec Fatalis himself, à bord d'un chalutier de nouvelle génération, qui menace de porter atteinte à la faune marine. C'est ensuite Bob Harras qui prend la relève dans l'écriture, le temps de ramener le Prince des mers à Altantis, où une lourde menace pèse sur son peuple, celle de légendes et de mythes oubliés et craints, qui reviennent à la vie pour détruire le royaume fabuleux de Namor. De biens beaux épisodes qui furent publiés à l'époque sur les pages de Strange (pour les allergiques à la VO) qui méritent absolument toute votre considération. C'est aussi l'occasion de voir naître un dessinateur inspiré, encore limité par une folle envie d'épater, et en recherche d'une maturité artistique, mais qui va laisser une empreinte substantielle dans les années suivantes. A la suite de Jae Lee, le titre va passer entre d'autres crayons moins experts (Geoff Isherwood notamment) qui tenteront sans succès de lorgner vers une synthèse maline du travail de John et Jae. Rien à faire, c'est la panne sèche, un scénario faiblard, et le déclin. 


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SUPERMAN : DOOMED (AVEC DOOMSDAY)

Doomsday n'est pas un personnage comme les autres, puisque cette force de la nature extra-terrestre est parvenue à terrasser Superman. Une mort surprenante, des mains de cet ennemi ultra redoutable, qui est devenu de la sorte la menace ultime, capable d'instiller la peur chez l'Homme d'Acier, de le faire trembler et douter. Avec l'arrivée des New 52, tout ceci a été modifié, mais globalement la base est restée peu ou prou la même. Doomsday est un produit kryptonien, le résultat de folles expériences génétiques. C'est un monstre surpuissant qui n'a qu'un seul but dans l'existence, à savoir annihiler toute vie qu'il croise sur son chemin vers l'anéantissement complet. Confiné dans la zone fantôme, il est pourtant parvenu à en sortir, et voici ce fléau lâché sur notre planète. Dès ses premiers pas sur une île du Pacifique, tout est calciné, détruit, pulvérisé. Doomsday n'est pas qu'une colossale bête dotée d'une force inimaginable, c'est aussi une sorte de virus sur pieds, et rien sur Terre ne peut s'y opposer. Rien, ou presque, car Superman n'écoute que son courage, et se jette dans la bataille. Voici donc enfin, dans l'univers Dc rebooté récemment, le moment où les deux antagonistes se tapent dessus. Cette fois Superman ne va pas mourir, et l'affrontement dantesque est aussi l'occasion pour le héros de compter sur sa nouvelle compagne, Wonder Woman, qui est à ses cotés lorsqu'il s'agit de faire étalage de force et de détermination. Oubliez le choc du passé, dans notre présent Superman parvient à pulvériser Doomsday dès le départ, on le voit d'ailleurs littéralement déchirer en deux son adversaire, dans un accès de rage. Un épisode plus expéditif que prévu, narré par Scott Lobdell, Greg Pack, et Charles Soule (Doomed #1) et dessiné avec brio (des planches très spectaculaires) par un Ken Lashley qui est un choix logique quand il faut mettre en scène un cataclysme de la sorte. Cela dit, vous l'aurez compris, l'album en librairie est un petit pavé, et l'histoire ne peut s'arrêter ainsi... Avant de mourir Doomsday a relâché une sorte de toxine malveillante et Superman a du, pour contrecarrer la menace, utiliser son super souffle pour en aspirer la totalité. Au contact de son organisme, celle-ci va avoir de bien curieux effets, sur le physique et le caractère du kryptonien. Vous avez dit "Superman méchant" ? 


Si Doomsday n'a pas eu raison de Superman grâce à la force brute, la toxine opère de bien étranges changements. Pour résumer la situation en une phrase laconique, voilà que Superman devient Doomsday. Sur son corps apparaissent des excroissances osseuses qui en font un monstre. Dans l'esprit c'est encore pire. Une rage folle le pousse à commettre des atrocités, et il est de plus en plus difficile pour lui de garder un semblent de contrôle sur ses actes et décisions. Wonder Woman est une alliée précieuse car elle fait tout ce qu'elle peut pour aider l'homme dans le costume. Clark Kent est un parangon de bonté et de volonté, aussi est-elle persuadée qu'elle peut aider son amant à maîtriser cette menace insidieuse. Mais c'est pratiquement une illusion, car plus Superman lutte, plus il sent dans un recoin de l'esprit que Doomsday et lui finiront par ne faire qu'un. La catastrophe se produit lorsqu'une fine poussière radioactive, issue de fragments de kryptonite, est relâchée dans l'atmosphère terrestre. Elle parasite les pouvoirs de ceux qui viennent de Krypton, et sur Superman l'effet est immédiat : il ne parvient plus à dominer la bête, et le seul recours qui lui reste est de filer droit dans l'espace et abandonner la Terre, sur laquelle il ne peut plus vivre désormais autrement que sous la forme d'une créature sanguinaire et avide de massacre, comme le Doomsday qu'il a combattu. La saga finit tout de même par traîner un peu en longueur, il faut bien l'admettre, et pour ma part j'aurais préféré que le vrai Doomsday subsiste plus longtemps et que le combat mano a mano soit plus dramatique. Je vous laisse toutefois aller jusqu'au bout du récit pour vous faire une opinion concernant l'épilogue. Globalement on pointera du doigt le niveau fort plaisant des dessinateurs, avec entre autres Aaron Kuder, qui fait un boulot remarquable avec le personnage, et Tony Daniel, un des maîtres du comics réaliste, même si ses planches sont un poil figées. Doomed est une excellente idée pour ceux qui aiment les confrontations bourrins, les Bd où le cataclysme semble toujours sur le point d'exploser, où le désespoir guette devant l'anéantissement final. Explosif, violent, spectaculaire, pas philosophique pour un sou, mais certainement calibré pour atteindre sa cible et ne plus la lâcher. A noter que tous les épisodes présents ici ont bien sur été publiés précédemment dans Superman Saga, au premier trimestre 2015. 



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LA COVER DE LA SEMAINE (semaine 9)

Le dimanche, c'est le jour des covers. Voici donc notre sélection des couvertures de comics publiés (ou republiés) cette semaine, avec beaucoup de petits chefs d'oeuvre qui méritent le détour. Vous avez noté, au passage, que David Aja est vraiment en train de devenir un des grands spécialistes du genre, et que son travail sur Scarlet Witch, par exemple, flirte avec le génie total? Allez, c'est parti pour la rafale de covers du dimanche.

Au menu : 

Amazing Spider-Man #`de Alex Ross
Doctor Strange #5 de Chris Bachalo
Invincible Iron Man #6 variant de Skottie Young
Nova #4 de Humberto Ramos
Spider-Gwen #3 (2nd printing) de Robbie Rodriguez
Scarlet Witch #3 de David Aja
Batman & Robin Eternal #18 de Tony Daniel
Batman Europa #4 de Gerald Parel
Action Comics #49 de aaron Kuder
Axcend #4 de Shane Davis
Pretty Deadly #8 de Emma Rios
X-O Manowar #44 variant de Stephen Segovia













JE SUIS DEADPOOL : L'ANTHOLOGIE DE DEADPOOL

Comme tout bon personnage Marvel qui se respecte, Deadpool est le produit de la vision de nombreux auteurs qui se sont relayés pour tenir en main le destin du personnage. Le mercenaire est né grâce au dessinateur et scénariste Rob Liefeld qui a admis dans une interview avoir été un temps jaloux de la réussite de Todd MacFarlane, car celui-ci pouvait dessiner à loisir le splendide costume de Spider-Man dans les années 90. D'ailleurs Deadpool partage avec Peter Parker non seulement les yeux du masque mais également une certaine approche désinvolte, l'habitude de faire de nombreuses blagues dans le feu de l'action, l'envie perpétuelle de blaguer avec des remarques excentriques et avec une dose de folie furieuse qui ne fait qu'empirer au fil des ans. Sauf que le sens de l'humour de Wade Wilson est bien plus cynique, et dès ses premières apparitions sous la plume de Fabian Nicieza nous nous rendons compte qu'il s'agit là d'un des princes du non-sens et du calembour. C'est ce même scénariste qui a l'idée d'insérer de nombreux éléments de la culture pop à l'intérieur des dialogues avec des références à certaines séries télévisées, des acteurs ou des films; c'est ce qui fait une partie du charme de Deadpool, ces clins d'oeil continus au lecteur qui renvoie à des références partagées. Joe Kelly, le scénariste chargé d'écrire la première série officielle consacrée à Deadpool, a complété la transformation du mercenaire qui passe du statut de criminel à celui de anti-héros tout en conservant une ambiguïté morale qui fait partie du code génétique de Wade. C'est Joe Kelly qui parvient aussi à faire comprendre au lecteur la souffrance que traverse le personnage; souffrance physique et émotionnelle avec une histoire terrible de guérison du cancer, pouvoir mutant et corps horriblement ravagé. Kelly à l'intuition aussi de pousser Deadpool vers une veine parodique rendant le protagoniste conscient qu'il est avant tout un personnage de bande dessinée, lui permettant de rompre le fameux quatrième mur et de dialoguer directement avec les lecteurs. Ce que fera plus tard Daniel Way, qui s'amusera beaucoup avec la schizophrénie de Wade en introduisant plusieurs voix dans la tête du personnage, chacune identifiée par une couleur et une police de caractère différente, qui servent à résumer les personnalités discordantes qui cohabitent dans la tête du mercenaire. Ce dernier parle parle et parle encore, sans jamais s'arrêter, depuis des décennies. Maintenant que nous sommes sur le point de le découvrir en action sur grand écran, l'heure était venue de lui consacrer une anthologie chez Panini!


Comme à l'occasion de chaque sortie cinématographique, Panini nous propose logiquement une anthologie permettant de se familiariser avec, ou de redécouvrir, les moments forts du ou des personnages qui débarquent sur grand écran. Place  à Deadpool, qui par ailleurs fait l'objet d'une promotion incroyable chez l'éditeur, avec une belle brochette d'ouvrages dédiés à Wade Wilson dans vos librairies. Cette anthologie s'ouvre bien entendu avec la première apparition du personnage, dans la série New Mutants, au numéro 98. Il débarque sur scène pour éliminer Cable, après avoir été richement payé (comme le veut la tradition des mercenaires) par un certain Tolliver. Un premier affrontement qui tourne court puisque Domino lui plante des couteaux dans le dos. Mais il y a une astuce derrière ce face à face, car Tolliver a profité de la confusion pour introduire dans la place un sosie de Domino (ce n'est donc pas encore la vraie, dans ce récit) et rendre son entrée en scène plus crédible. Fabian Nicieza et surtout Rob Liefeld sont les artisans de cette toute première fois qui s'inscrit pleinement dans les travers (mais aussi les qualités, allez soyons gentils) des comics de l'époque. Le dessin se gausse des perspectives et des proportions et fait la part belle au spectaculaire, à l'envie d'en jeter à la figure du lecteur, alors que Deadpool est encore bien loin (forcément) d'avoir le charisme qu'il aura par la suite. On aborde l'humour déjanté et les caractéristiques de l'anti-héros qui commencent à se dessiner avec des épisodes de sa première série régulière (un qui singe le pouvoir et les responsabilités de Spider-Man, puis un diptyque avec le Punisher) grâce à Joe Kelly ou Jimmy Palmiotti, puis on file vers la série Cable & Deadpool où ces deux-là sont associés, comme le voudra une longue tradition qui nous rapportera les team-up souvent brouillons et loin d'être inoubliables. Dans X-Men Origins : Deadpool, on retrouve Wade Wilson en phase d'écriture de son autobiographie, à sa manière déjantée, avec Duane Swierczynski. On lira aussi tout unn florilège d'aventures brèves plus récentes, tirées de Prelude to Deadpool Corps (une tentative de variations sur le thème avec des avatars loufoques) ou encore une jolie cérémonie totalement inattendue, puisque la célébration du mariage entre Deadpool et Shiklah, pourtant la promise de Dracula. Un petit pavé de 300 pages qui devrait donner des idées à ceux qui vont au cinéma pour apprendre à aimer le personnage, et donne un aperçu loin d'être complet, mais assez intrigant, sur la créature la plus incontrôlable de l'univers Marvel. Bientôt la plus bankable





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MARVEL DELUXE : ANNIHILATORS

Les Annihilateurs sont de sortie. Rien qu'avec un tel nom, il s'agit de leur présenter un peu de respect. Ce sont tous des êtres dotés d'une puissance de feu redoutable, au point même qu'ils restent bien souvent sur la réserve, afin de ne pas déchirer le tissu de l'espace temps, lors de leurs missions d'intervention. Le groupe est composé du Silver Surfer, qu'on ne présente plus, et de Quasar, un terrien investi des pouvoirs quantiques que lui confèrent ses bracelets. Il est mort durant la saga Annihilation puis est revenu parmi nous, ce qui a passablement ébranlé la confiance qu'il pouvait avoir en lui même. On trouve également Gladiator, guerrier suprême de l'empire Shi-Ar, Beta Ray-Bill, une version équestre de Thor le Dieu du Tonnerre, et Ronan L'accusateur, pour la faction Kree. Ils reçoivent le soutien momentané d'un des chevaliers de l'espace, en la personne d'Ikon, qui vient leur exposer la menace des spectres Noirs, guidés par l'infâme Docteur Dredd. Pour en savoir plus, avoir lu la série mythique Rom, le Chevalier de l'espace, parue dans Strange à la grande époque du mensuel Lug, n'est pas une mauvaise idée. Cela fait bien longtemps que les lecteurs réclament à corps et à cris une réédition de ces épisodes de légende. Le problème étant que Rom est un héros basé sur une ligne de jouet, et que Marvel, qui détenait les droits sous licence pour en faire un comic-book, a fini par les perdre naturellement. Du coup, Rom était porté disparu, et les lecteurs pouvaient se gratter. Jusqu'à la récente nouvelle du retour de Rom, en 2016 chez IDW, et dont les premières pages seront à dévorer gratuitement lors du Free Comic-Book Day. Mais je m'égare, et j'oublie Cosmo le chien qui parle, expérience soviétique dans l'espace, et télépathe. Un personnage truculent, à n'en pas douter. 
Mais il faut bien l'admettre, le conflit entre les spectres et les Galadoriens (les Chevaliers de l'espace) n'est guère passionnant, ni porté par des figures imposantes. Même Dredd est assez creux, et d'ailleurs on apprendra que derrière ses traits se cache quelqu'un d'autre, et c'est un subterfuge banal. Les dessins de Tan Eng Huat ne sont pas mauvais, mais ils manquent de caractère. Sa version du Surfer, par exemple, tombe à plat. Les planches sont dynamiques, il y a de la bonne volonté, mais ça s'arrête là. C'est la partie de cet album qui met en scène l'Église Universelle de la Vérité qui nous semble la plus lisible et intéressante. L'occasion de revoir cette organisation malsaine, liée au perfide Magus, qui n'est autre que la face négative d'Adam Warlock, créature ésotérique chère à Jim Starlin. On n'échappe pas aux affrontements classiques héros contre héros, équivoque parfait pour faire échouer une mission et ajouter un peu de drame dans l'aventure (ici les Avengers sont induits en erreur), le genre de stratagème narratif qui sent bon les années 60 et 70. Les Annihilators font de leur mieux pour transformer leur impressionnante force de frappe en un titre qui envoie du lourd et se veut ultra cosmique, mais au final il fait pâle figure si comparé à ce que nous avons pu lire d'autre de la part du couple (aujourd'hui implosé) Abnett et Lanning. En bonus, vous retrouverez de chouettes (car drôles) back-up avec Rocket Raccoon et Groot. Le raton laveur le plus dangereux du cosmos est devenu employé dans un service postal cosmique, depuis la dissolution des Gardiens de la Galaxie. De retour aux affaires, il part à la recherche de Groot, son coéquipier avare de paroles, après avoir été attaqué par un Clown végétal. Voilà pour le plot. Un Marvel Deluxe assez moyen, en somme. 

L'INTEGRALE HAGAR DUNOR (URBAN STRIPS) TOME 1 (1973-1974)

La collection Urban Strips est un excellent prétexte pour la publication de bande-dessinées sortant des sentiers battus, en marge complètement du genre super-héroïque qui fait le plaisir quotidien de nous autres, dévoreurs de comics en série. Voici donc venir Hägar Dünor (jeu de mot basique mais qui fait mouche) traduction française de Hägar The Horrible, le viking inventé par Dick Browne au début des années 70. Comme tout bon viking le protagoniste est un guerrier qui ne rechigne pas aux combats et aux pillages avec son équipage dévoué (dont Eddie, qui est un peu son souffre-douleur personnel, et aide de camp principal) mais qui a gros problèmes qui l'attendent à la maison : sa femme Hildegarde est encore plus féroce que lui, et c'est elle qui mène le mari à la baguette, dans le foyer conjugal! Les deux enfants sont eux aussi loin d'être en phase avec ce que les parents s'attendent pour cette progéniture. Homlet est trop penché sur la culture et la science pour suivre les pas de son père, alors que Ingrid, la fille, est elle aussi dans une situation à contre emploi, trop belliqueuse dans l'âme pour jouer les heureuses épouses à la maison.
Hägar est petit, trapu, grossier. C'est tout sauf un athlète et un poète. Sa passion c'est la razzia et sa cible de prédilection est l'Angleterre, mais il ne lui déplaît pas non plus de se tourner vers un autre ennemi atavique, à savoir la France. Le percepteur des impôts, inversement, n'est pas trop sa tasse de thé! Mais comme vous pouvez le deviner, le combat, ça donne faim! Du coup on le retrouve également attablé dans une taverne, ou à s'empiffrer à la maison. Militairement parlant, Hägar est loin de toujours remporter la victoire, mais ce qui compte c'est aussi de quitter le champ de bataille la tête haute. On pourrait lui reprocher de ne pas savoir s'entourer, avec ce Eddie trop imbécile pour servir de stratège en cas de besoin, mais qui reste ce qui ressemble le plus à un vrai ami. Et quand il pousse son cri de bataille pour inciter ses hommes à atteindre la victoire ou la mort... c'est souvent pour se retrouver seul, ses troupes régulièrement défaites à plates coutures.


Bien entendu, nous avons là un strip humoristique truculent, qui joue habilement sur les idées reçues et nos croyances imprécises en terme de barbares et de vikings. Habitués à concevoir les héros nordiques comme de fiers guerriers sans peur, des hordes de combattants féroces et sans pitiés, les lecteurs s'aperçoivent en 1973, lorsque débute la publication de Hägar The Terrible, que la culture et les hauts faits de ces légendes d'autrefois sont loin d'être aussi formidables que narrés régulièrement. Bien sur cette bande-dessinée rencontre un franc succès dans le nord de l'Europe, mais elle conserve toujours aujourd'hui son noyau dur de fan, en France, ce qui incite probablement Urban à publier cette intégrale inattendue et bienvenue. C'est dans le Journal de Mickey que vous avez peut être découvert ce drôle de petit bonhomme, dès 1973, et ceci jusque la fin des années 90. Hägar est attachant, car sa force et sa faiblesse sont apparentes rien que dans sa représentation graphique. Le casque à cornes, la barbe, l'impression sauvage qui se dégage du trait naïf et essentiel de Dick Browne est contrebalancée par la silhouette peu flatteuse, l'air dépenaillé, et l'incapacité à être le maître chez soi, au foyer, ce qui en fait un petit homme pathétique et comique à bien des égards. On sourit très souvent avec ce petit monde intégralement coiffé à la viking, et qui pointe du doigt nos préjugés, les idées reçus, caressant à rebrousse poil les idées et les croyances qui sont les nôtres sur le bon ordonnancement de la société, de toute société, du foyer conjugal à la bonne conduite de l'état. 



PEACEMAKER TRIES HARD : BOUFFONNERIE, SATIRE ET SOLITUDE

Le super-héros ringard et super violent Christopher Smith (alias Peacemaker) sauve un chien errant après avoir neutralisé un groupe de terro...