ANIMAL MAN : PAR PETER MILLIGAN

Nous avons déjà eu l'occasion de traiter sur ce blog du long run de Grant Morrison sur Animal Man (lire ici). L'écossais réalisa les 26 premiers épisodes de la série régulière, dans les années 90, avant de quitter son poste, et être remplacé par Peter Milligan. Aujourd'hui, nous abordons donc cette nouvelle existence pour Buddy Baker, qui ne commence pas sous les meilleurs auspices pour le personnage. En effet, notre héros est à l'hôpital, et il sort à peine d'un long coma de plusieurs mois. Durant celui-ci, il a eu des visions singulières, qui mettent en scène des animaux sauvages en dévorant d'autres, la loi du plus fort au milieu de la savane. A son retour à la conscience, le monde semble subtilement différend, sans qu'il puisse comprendre en quoi, et surtout pourquoi. Sa femme est devenue froide, distante, agressive, et le trompe même avec un simple professeur d'anglais. Maxine, la fille, semble avoir peur du père et ne lui adresse plus la parole, trop timide ou effrayée. Certains événements historiques ne correspondent plus à la réalité, puisque Hitler aurait été jugé à Nuremberg, puis exécuté, ou que Marvin Gaye, le chanteur soul, est encore vivant et entame son come-back. Pire encore, une jungle luxuriante apparaît à Buddy à chaque fois qu'il ouvre la porte de la salle de bain, et ses pouvoirs d'Animal Man semble être devenus fous. Dominés par ceux-ci, incapable de se contrôler, Buddy renifle le derrière d'une amie de sa femme, urine tranquillement sur le perron de sa résidence, ou dévore à pleine dents un cheval devant une assistance médusée, lors d'un meeting organisé par une association de végétariens. Pour ne rien gâcher, et compliquer encore la situation, la CIA vient demander à Animal Man d'assurer la sécurité du président des Etats-Unis, contre un gang de trois enfants aux pouvoirs terrifiants (ils ont terrassé Batman) et associe le héros à Nowhere Man, un être disloqué dans le temps et l'espace, plus loufoque qu'impressionnant. Mais que se passe t-il donc dans la tête de Buddy Baker, et pourquoi le monde entier semble marcher sur la tête, au point que la folie parait guetter son heure, dans les coulisses? 


Soyons honnêtes : ce n'est pas le meilleur travail de Milligan (Shade The Changing Man, X-Statix, Enigma, The Extremist...) mais cela reste fort intéressant et potentiellement ambitieux. Sauf qu'il faut faire de beaux efforts pour suivre et tout métaboliser, et que l'auteur se perd parfois lui même dans les effets et les trucs qu'il apprête pour le lecteur. Notamment sa passion pour William Burroughs et le cut-up (assemblage arbitraire de textes d'origines différentes), mais aussi les formes étranges de la nature comme les mille pattes, par exemple. Le personnage de Nowhere Man et ses dialogues parfois incompréhensibles en sont une preuve éclatante. Mais à la longue, ce petit jeu finit par lasser, d'autant plus qu'il n'amène pas grand chose à la dynamique du récit, qui lorgne du coté du cauchemar éveillé, de la folie pure, et de la manipulation mentale. Milligan parsème son run de situations extravagantes, absconses, et réussit en partie à créer de bons effets de suspens, avec des cliffhangers prenants en fin de numéros. Mais le résultat final est moins abouti et pertinent que ce que Morrison a mis patiemment en place avant lui. Coté dessin, Chas Truog est bien épaulé par Mark Farmer à l'encrage, et c'est tant mieux, car sans être mauvais, il est souvent peu inspiré, et se contente de planches sans grande personnalité. Tout ceci est bien dommage car Animal Man, après l'avalanche Morrison, avait déclenché une grande vague d'enthousiasme, en partie canalisée puis désamorcée par le scénario tordu et déroutant de Milligan. Les couvertures, elles, sont de Bolland, et elles sont tout simplement magnifiques. Ah le plaisir de collectionner avant tout les single issues...



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Vous nous lisez? Nous aussi on va vous lire!

L'APPEL À CTHULHU : LE TALENT DE NORM KONYU CHEZ BLACK RIVER

 Croyez-moi, écrire une critique conventionnelle sur cet album relève de l’exploit. Pourquoi ? Parce qu’il ne s’agit pas d’une histoire trad...