Trois couleurs, pas une de plus. Ce n'est donc pas une mince affaire que de réaliser 19 petits récits indépendants, qui mettent en scène Harley Quinn, tout en respectant cette idée de départ, qui est le fil conducteur de l'album publié chez Urban Comics. Du coup, vous n'en serez pas étonnés, c'est avant tout par son aspect graphique que l'objet attire l'attention. Il y a à l'intérieur une longue kyrielle d'artistes invités, dont les styles peuvent différer du tout au tout, allant du réalisme léché (Stjepan Sejic) au croisement entre le manga et le comics traditionnel (Mirka Andolfo), sans négliger les territoires rassurants de la série régulière (Chad Hardin) ou l'expérimentation minimaliste. Bref, de quoi se rincer les yeux, à condition bien entendu qu'on soit adepte de la découverte, de la pluralité des dessins, et qu'on ne cherche pas encore et toujours la sempiternelle répétition d'une seule et unique façon de faire. Du coté du scénario maintenant, il faut être honnête, tous les récits sont loin de se valoir. Le personnage de Harley se prête idéalement à des délires cocasses, tordus, féministes, irrévérencieux, mais est aussi particulièrement casse-gueule si on prétend insuffler un peu de sérieux et de réflexion dans l'ensemble. Sejic est placé en ouverture, et c'est très bien ainsi, car lui ne caricature pas la belle bouffonne, mais il s'arrête sur une évidence trop souvent oubliée, Harleen Quinzel est avant tout une psychologue/psychothérapeute qui aurait pu mener une brillante carrière, si elle n'avait pas croisé la route du Joker, dont elle est tombée amoureuse. Un rapport toxique où la jeune praticienne est humiliée et exploitée, jusqu'à une rupture longue à décanter, et un sentiment de haine, de revanche, qui couve sous les cendres. Juste après, grand écart total, avec Andolfo qui propose de rire un peu, en parodiant les réseaux sociaux, et l'importance que prend aujourd'hui l'image dans les vie des gens. Harley Quinn et Catwoman sont ainsi embarqués dans une histoire où il est question de la nouvelle reine de Gotham, et on le voit d'emblée, Black+White+Red ce sera véritablement le patchwork de tous les dangers, où tout est possible, ça part dans tous les sens!
Le bref récit que j'ai trouvé le plus intelligent, c'est celui de Patrick Schumacker, et dessiné par Eleonora Carlini. Harley décide de rejoindre la Légion Fatale menée par Lex Luthor, et celui-ci se lance dans des délire verbaux et verbeux sur la manière dont fonctionne aujourd'hui une entreprise vouée au mal. Les commentaires de Bane, les réactions des autres grands méchants, la pertinence et la drôlerie des textes, font de l'ensemble un petit bijou qui fonctionne très bien, et qui est vraiment d'actualité. Simon Spurrier et Otto Schmidt réussissent également à nous intéresser avec la même scène racontée par plusieurs petites frappes, qui décrivent la façon dont Harley Quinn intervient et laisse exploser sa violence dingue dans un bar. Mais en d'autres occasions on flirte avec l'anecdotique, comme lorsque David Mandel et Adam Hughes nous transportent en période Noël / Hanouka, sans que ça nous fasse vibrer plus que ça. Cela dit même si le scénario est souvent faiblard, c'est un plaisir de voir des artistes du calibre de Matteo Scalera, Greg Smallwood ou encore Stephen Byrne (décidemment très intéressant et en progrès constant) offrir leurs interprétations des élucubrations de la bouffonne au marteau, très souvent associée à Poison Ivy, dont elle est désormais une partenaire dans la vie et dans les "affaires" constante. Un pot pourri, en définitive, un hommage et un défi formel relevé largement, mais qui manque un peu d'originalité et de classe dans l'écriture.
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