Wilson Nebula est un sacré gazier. Un type à part, une sorte de croisement improbable entre Peter Quill des Gardiens de la Galaxie et le mythique Cobra de Terasawa, avec lesquels il partage une coolitude à toute épreuve. Le genre de personnage capable d’affronter les situations les plus absurdes et les plus périlleuses avec un sourire désinvolte et un détachement total. D’ailleurs, il ne se prive pas de savourer un bon pétard cosmique, roulé avec des substances hallucinogènes aussi particulières qu’exotiques — l’une de ces trouvailles graphiques qui donnent tout leur charme à une bande dessinée décalée et attachante. Le lecteur fait sa connaissance alors qu’il débarque sur une planète à la végétation luxuriante… et psychédélique. Cette jungle étrange regorge d’une plante appelée Divinia, sorte de cannabis spatial puissance mille, qui offre à Wilson l’occasion rêvée de démontrer son talent pour mater la faune locale, de manière aussi expéditive qu’hilarante. Car oui, on va sourire, souvent, et même franchement rire au fil des pages. L’humour, parfois situé en dessous de la ceinture, n’en reste pas moins léger, coquin, jamais vulgaire — et surtout diablement efficace. À un moment, nous voilà même face à une sorte de parasite spatial, qui s’attaque directement aux parties intimes de ses hôtes pour se reproduire… Et le traitement que Wilson va imaginer pour s’en débarrasser est, disons-le franchement, quelque chose que vous n’avez probablement jamais lu ailleurs. Mais l’album ne se résume pas à un simple délire bubble gum. Il y a aussi une quête. Une vraie. Notre aventurier cosmique est en effet lancé à la recherche de sa fille, mystérieusement disparue. Une mission qu’il accepte à la demande — expresse et pressante — de sa mère : rien de moins que la reine plantureuse des Amazones rouges. Quitte à défier le gouvernement intergalactique.
Il y a des quêtes mythiques qui défient le temps, l’espace et la logique : Ulysse voulait rentrer chez lui, Dante descendait aux Enfers, et Wilson Nebula... cherche sa fille paumée quelque part dans le cosmos, accompagné d’une IA qui semble sortie d’une version futuriste sous acide de ce cher Chat GPT. Fred Mansour, au scénario, nous livre un récit qui joue joyeusement à saute-mouton avec les genres : c’est de la SF, oui, mais aussi un western déglingué, un thriller familial, et parfois même une pub déguisée pour les champignons hallucinogènes. On pourra juste regretter que le dernier tiers de l'album ait un aspect un peu plus brouillon que ce qui a précédé, ou en tous les cas moins fluide pour le lecteur curieux. Côté dessin, Gianenrico Bonacorsi balance la gomme : c’est dense, détaillé, parfois baroque, souvent déjanté. Les planètes ont l’air de cauchemars peints sous champi (la couleur de Claudio Palescandolo fonctionne à merveille), les aliens semblent avoir été imaginés par un enfant de six ans et un biologiste aviné, et les vaisseaux obéissent à une physique qui n'est pas à votre portée. Mais ça fonctionne. L’univers visuel déborde de personnalité, et on est séduits par le boulot abattu. Bonacorsi s'est déjà fait remarqué dans des registres différents chez Glénat (des adaptations de mythes grecs) et pour sa capacité aussi à représenter des scènes érotiques ou qui interpellent. En tous les cas, cet italien désormais bien installé à Paris est de ceux qu'il faut garder à l'oeil, assurément. Le récit file à toute allure, comme s’il cherchait à glaner une amende pour excès de vitesse intergalactique. Au point qu'on arrive vite à son terme, avec la promesse d'un tome 2 qui passe d'abord par la case du financement participatif (un QR code vous y mènera). C'est avec Wilson Nebula que j'ai découvert l'éditeur Uppercut, dont je n'avais encore jamais eu un ouvrage entre les mains, et la certitude est que j'y reviendrai à l'avenir. Et vous ?
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