Le troisième numéro de Batman Saga HS
est en kiosque depuis plusieurs jours. Au menu, la suite de la série Batman
Incorporated, le joujou de Grant Morrison, qui y développe le concept d'un
Dark Knight ouvrant une "franchise" dans de nombreux pays du globe,
afin de mettre sur pieds une véritable internationale des hommes chauve-souris,
financée par Bruce Wayne, et prête à lutter contre le Léviathan, l'organisation
criminelle dirigée par Talia Al Ghul. Celle-ci est aussi la mère du jeune
Damian (Bruce est le père), qui est un peu la "mascotte" du titre,
qui le met en avant mois après mois, jusqu'à ce que l'inévitable se produise,
dans ce hors-série. Batman est bien décidé à laisser son Robin de fils sur la
touche, car sa mère a placé un contrat mirobolant sur la tête du gamin, qui
attire bien des convoitises. Mais comment rester en retrait lorsque les
"grands" se font malmener (L'Ecuyère, Le Chevalier, Wingman...) par
un bédouin super costaud et super méchant? Batman a de son coté eu une vision
de ce que pourrait devenir Gotham si son fiston le supplante un jour sous la
cape et la manteau gris de héros, et ce n'est pas réjouissant. La ville semble
tombée aux mains du Joker et de ses toxines, et vouée à disparaître dans un
orage nucléaire. La lutte contre le Léviathan devient donc sinistre et
frénétique, et Morrison déploie toute sa créativité et ses envies pour étoffer
un scénario à multiples tiroirs, qui aboutit à la mort d'un personnage majeur
(enfin, façon de parler car il est mineur pour ce qui est de l'âge), qui risque
fort de plonger Bruce Wayne dans une colère noire, et une mélancolie sans
fonds. Il faut souligner que les dessins de Chris Burnham sont toujours aussi
bons, j'aime beaucoup ce style qui mêle avec élégance pseudo réalisme et
nuances cartoony. Cela ressemble à du Jose Ryp, parfois même ça en devient
supérieur, qualitativement parlant. Urban fait encore une fois du bon boulot
(hormis quelques coquilles de ci-de là, et la relecture alors?) avec une partie
éditoriale pertinente et fournie, et un prix ultra raisonnable (moins de six
euros) pour presque 130 pages. Bref, les amateurs de Batman ont de bonnes
raisons d'aller faire un tour en kiosque et d'en repartir content.
THOR THE DARK WORLD : LA REVIEW EN RETARD (Cinécomics)
Du danger d'aller voir ce genre de
film juste après un plat de rigatoni assez copieux. Car disons le franchement,
la première demie-heure a de quoi endormir le pire des insomniaques sous
perfusion de café. Les paupières lourdes, et en phase de digestion, je découvre
ainsi un univers pacifié (les neuf mondes ont fini par enterrer la hache de
guerre grâce aux efforts de Thor) et une Jane Foster qui tente d'oublier Thor
en s'organisant des rencards transparents, avant de mettre la main, Dieu sait
comment (le hasard fait bien les choses) sur une puissance infinie, l'Ether,
qui est également convoitée par et ses forces du mal. A partir de là, tout
s'enchaîne et le film décolle enfin. Infectée et incapable de détenir ce
nouveau pouvoir, Jane est transportée sur Asgard par Thor, et rencontre ainsi
toute sa "belle famille", mais attire par la même Malekith et sa horde au
royaume de son compagnon. Asgard est mise à sac et menace de tomber, mais au
final, la seule vraie perte sera celle de la mère de Thor, sans oublier la
libération de Loki, jusque là détenu dans les geôles asgardiennes, et qui sera
une des clés du plan de Thor pour une vengeance salutaire et sanglante.
Voilà, le pitch est élaboré, vous
savez l'essentiel. Les acteurs? Hemsworth est égal à lui même, c'est à dire que
Thor, campé par ce grand blond, est une version porno chic des Ases nordiques
(une scène torse nu totalement inutile si ce n'est pour souligner sa
musculature huilée). Sif semble belliqueuse, mais ne fait guère naître de pensées
brûlantes. Jane Foster reste évanescente, et on se dit qu'avec le choix qui
devrait lui échoir, Thor pourrait quand même viser plus haut, plus
"piquant". C'est Loki qui tient le haut du pavé, comme souvent avec
les méchants à double tranchant. Plus fouillé et complexe que son demi-frère,
c'est le roi des fourbes qui contient en lui les enjeux les plus dramatiques,
les moins prévisibles. Pour le reste, on se fend souvent la poire. Une comédie,
je vous dis. De l'humour au troisième degré, qui tombe parfois comme un cheveu
sur la soupe ou sonne faux (le dialogue Thor/Loki lors de l'évasion d'Asgard),
ou qui confine au génie (Thor qui prend le métro pour aller combattre Malekith à
Greenwich). Ce Dark World contient plus de moments cocasses que la
plupart des films avec Christian Clavier. Il se laisse regarder, sans jamais
passionner. Mais surtout, si vous avez appris à aimer Thor avec Simonson,
Kirby, ou même Straczynski, plus récemment (je ne parle pas d'Aaron en ce
moment), vous allez encore mesurer la distance sidérale qui sépare la qualité
des comic-books aux prétentions creuses du cinéma, même en 3D. Les chiffres de
vente sont trompeurs.
MAXIMUM SECURITY de Kurt Busiek et Jerry Ordway : LA TERRE EST UNE PRISON
Comment une simple petite planète
peut-elle tenir en échec l'univers tout entier? Lorsque les races du cosmos se
rencontrent pour débattre du commerce et de la sécurité intergalactiques, sous
la houlette de Lilandra, impératrice Shi-Ar (et amante de Charles Xavier, un
terrien, donc), c'est la même crainte qui revient sur toutes les lèvres. Les
humains sont mauvais, ils se mêlent de tout, sont un danger pour l'univers. Peu
importe si tout ceci est fomenté en douce par de dangereux agitateurs aliens,
l'assistance finit par se laisser convaincre qu'il faut agir, et couper l'herbe
sous le pieds de cette race belliqueuse et arriérée, que personne cependant n'a
jamais pu soumettre. Ce sont les Ruul qui manipulent l'assistance, pour
parvenir à leurs fins. Et les Ruul, en réalité, ne sont rien d'autres que des
Kree dont le métabolisme a subi une évolution rapide, ce qui explique qu'ils
soient secrètement au service de l'Intelligence Suprême. La Terre est
condamnée, mais la sentence est originale : tous les criminels de l'univers et
autres individus de mauvaise vie, sont incarcérés sur notre planète, alors
qu'un écran de force empêche toute communication entre notre système solaire et
le reste du cosmos. La Terre devient donc une geôle de dimension formidable, ce
qui risque fort d'occuper tous les super-héros recensés, qui vont avoir fort à
faire pour empêcher les inévitables débordements qui vont se présenter.
Le plat de résistance, c'est Ego, la
Planète vivante, qui se retrouve sur Terre, sous forme de spores, qui en se
développant inexorablement menace d'engloutir toute la surface du globe. Ego
n'est pas seulement sur Terre, il va englober et assimiler la Terre! Les
Avengers sont bien surs les premiers à se démener pour venir à bout de ce
nouveau défi, mais nous retrouvons aussi les X-Men, Us Agent (dans un nouveau
costume très "Judge Dredd") et bien d'autres connaissances. Kurt
Busiek a trouvé un moyen novateur et intéressant pour captiver le lecteur. Au
lieu de la destruction habituelle, de l'engeance alien, cette fois c'est une
habile manoeuvre judiciaire, qui met la Terre en danger et la mène vers un
funeste destin. Toutefois, si les prémices méritent réflexion la suite de l'histoire
tourne trop vite au pugilat général pour mériter d'être reconnue comme une saga
pleinement réussie et déterminante. Les dessins sont de Jerry Ordway, un
habitué de ce type de récit, longtemps à l'oeuvre sur Superman, par
exemple. Un trait classique et dynamique, qui à défaut d'être ultra soigné et
riche en détails, correspond parfaitement aux attentes du lecteur lambda de
comic-books américains. Panini proposa Maximum
Security dans la collection Marvel Mega Hors série, en 2001 , ce qui
permet aux lecteurs novices de vite retrouver ces pages sans se ruiner, en
fouinant sur les étalages des vendeurs d'occasion, ou sur le net. A noter que
ce crossover en trois parties plus un prologue eut de nombreuses répercussions,
avec des tie-in dans les titres Thunderbolts, Thor, Uncanny X-Men, Amazing
Spider-Man, Black Panther, Iron Man, et d'autres encore... Une bonne idée
de départ, pour une aventure qui sort un peu des sentiers battus et ne
nécessite pas dix tomes de 200 pages pour être lue et comprise.
(Par contre le temps a beau passer,
je trouve que l'idée de placer le Professeur Xavier à la tête d'un petit groupe
de mutants skrulls, avec qui le mentor des X-Men partage "son rêve"
de cohabitation pacifique, ça reste toujours aussi peu crédible et saugrenu)
LOST DOGS : CHEF D'OEUVRE PRECOCE DE JEFF LEMIRE
Retour ce mercredi sur la première oeuvre majeure de Jeff Lemire, toujours en attente d'une édition française digne de ce nom. Lost Dogs, sublime.
On a tous des auteurs de prédilection. Depuis son arrivée sur Animal Man, je ne peux plus me passer de Jeff Lemire, par exemple. Et j'ai eu la chance et la bonne idée de mettre la main sur un graphic novel auto publié en 2005 chez Ashtray Press : Lost Dogs. Cet ouvrage a décroché une récompense dans la catégorie "comic-books indépendants" et on comprend vite pourquoi. Le récit se concentre sur trois personnes, une famille soudée et aimante, composée d'un grand gaillard, une sorte de géant disproportionné par rapport aux siens, qu'on devine limité intellectuellement, mais doté d'un grand coeur et d'une âme pure. Mais aussi de sa femme, et de sa petite fille, qui rêve de devenir marin, et parvient à convaincre le paternel d'aller voir le départ des bateaux sur le port malfamé de la ville. Mais mettre les pieds la bas, au mauvais endroit, au mauvais moment, provoque une tragédie. L'épouse est violée et battue à mort, la fillette assassinée. Le mari est poignardé et jeté à l'eau, mais il est d'une trempe comme on n'en fait plus, et il survit. Pris en charge par un navire qui passait par là, il revient sur la terre ferme, se soigne, et part à la recherche de sa femme. Un vieil homme semble avoir des informations, mais en échange, il va soutirer les services de notre héros malheureux pour une sombre histoire de combats clandestins.
C'est dans les imperfections, l'apparence négligée de certaines cases, que toute la beauté poétique du monde de Jeff Lemire explose. Son héros tragique est émouvant, une force de la nature qui se méconnaît, conduite vers le bien par essence, et pourtant capable de vengeance atroce s'il le souhaiterait. Pas question ici de transformer un père de famille mortellement touché en un Punisher glacial, mais bien de mettre à nu la noirceur, la petitesse, qui fourmille dans les bas-fonds de ce que le genre humain compte de plus sordide. Un hymne à l'échec, car tout est corrompu, et rien ne peut perdurer. Le T-shirt du protagoniste est blanc rayé de rouge, des bandes de couleur qui sont les seules à se manifester, dans un monde autrement en noir et blanc, glauque, calciné. Une histoire qui choisit de suivre les pas d'un loser, destiné à perdre car trop bon, trop humain, trop touchant, au milieu de cette engeance grouillante, de cette violence gratuite. Les bons ne gagnent pas toujours, et souvent, ils sont même les victimes innocentes des événements, nous rappelle Jeff Lemire. Avec un talent fou, encore à l'état brut, qui tout d'un coup explose aux yeux du lecteur. Ultra recommandé, cela va sans dire.
THOR SEASON ONE

SPIDER-MAN 5 EN KIOSQUE : LA REVIEW
Le Superior Spider-Man n'est pas
forcément si méchant que cela, au contraire. Ce mois-ci, Octopus, dans le corps
de Peter Parker, joue au chirurgien et sauve la vie d'une petite fille, dans
l'hôpital secret du docteur Wirtham (Cardiac), en utilisant une de ses
inventions volées. Un micro événement dans la saga de Spidey, mais qui confirme
que l'essence même de la série reste la même : Spidey est un héros, et un
changement d'hôte au sein du corps physique ne change rien à cette évidence.
Certes, tout ceci est possible car il subsiste la "conscience" de
Parker au fonds de l'esprit de Dock Ock. C'est le grand enjeu du second épisode
de novembre. Lorsque notre héros supérieur se rend compte de la présence d'un
intrus niché dans sa psyché (lors d'un contrôle chez les Avengers, bien décidés
à comprendre le pourquoi de la violence récente dans les actes de Spider-Man),
il décide de s'en débarrasser. Une confrontation toute virtuelle, entre deux esprits
qui entrent en contradiction. Un seul des deux va survivre, et effacer à jamais
(allez, on y croit) jusqu'à la mémoire de l'autre. Si Parker perd, est-ce donc
la fin des espoirs de retour du neveu de May Parker, et le plus grand tournant
de l'histoire des comic-books mainstream? Chacun se fera son idée la-dessus,
grâce à Dan Slott aux textes, et à Humberto Ramos, puis Ryan Stegman aux
dessins. Ce dernier semble né pour dessiner le titre, tant il est plein
d'aisance et convaincant dans cette tâche. Notons tout de même que l'adjectif
"superior" n'est pas tellement galvaudé. Octopus parvient à accomplir
des choses, à pousser la logique et les capacités de son intellect bien plus
loin que là où osait Parker. Les barrières éthiques et morales de ce dernier sont-elles
finalement des freins à la réalisation de son destin de super-héros? Slott
semble nous prévenir : si Spider-Man redevient lui même, attendez-vous à ce que
ses méthodes changent à jamais, un peu plus radicales et moins naïves
qu'autrefois. Ce ne serait pas un mal.
La série Avenging Spider-Man,
dessinée par Marco Checchetto (qu'on aime beaucoup ici) poursuit son parcours,
qui ne sera plus très long. Sans être mauvais, les deux épisodes de ce mois-ci
restent assez anecdotiques. Le premier met en scène un team-up entre l'Araignée
et Sleepwalker, un héros qui se manifeste lorsque son hôte terrestre s'endort,
et qui a connu ses (brèves) heures de gloire voilà vingt ans. Panini choisit de
le rebaptiser Somnambule, pourquoi pas. Dans le second, Spidey s'introduit dans
l'héliporteur du Shield, pour une mission que nous devinons hors-la-loi.
L'occasion de retrouver le Caméléon, incarcéré par les fédéraux. Je le répète,
tout ceci se laisse lire facilement, mais n'apporte guère à l'histoire du
personnage. Pour conclure, l'épilogue de la confrontation entre Scarlet Spider
et les frères Lobo. Kaine n'est plus tout à fait lui même car il est mort, et
revenu à la vie sous sa forme arachnéenne, suivant l'exemple de ce qui est
arrivé à Peter Parker voilà quelques années. Un bon point pour cette idée, qui
permet de radicalement modifier le ton de la série, sauf que ... ça va être de
très brève durée. Chris Yost trouve le moyen de mettre le lecteur en appétit,
et de lui refuser le repas en l'espace d'une vingtaine de pages. A l'image de
ce qu'est devenu Marvel ces temps-ci ; une compagnie truffée de bons plans,
d'ambitions louables, mais incapables de s'y tenir, de les concrétiser, et qui
se noie dans le consensus et souvent l'ennui. Wake up!
FANTASTIC FOUR, WOLVERINE, LE VIRUS DU RELAUNCH SAUVAGE
Une des choses les plus irritantes, pour un lecteur de comic-book chevronné, c'est de voir sa série préférée subir un "relaunch" tous les 30 du mois, juste parce que les scénaristes du moment n'ont plus aucune idée, pour vendre plus de copies mensuelles (un numéro 1 vend systématiquement plus que les autres), ou tout simplement parce que la maison d'édition n'a pas le courage d'éliminer un titre et lui donne à chaque fois une nouvelle chance, en vain. Fantastic Four ne va pas si bien que ça, puisque la cure Fraction/Bagley va déjà prendre fin (en janvier) pour laisser place au duo James Robinson et Leonard Kirk. Comme toujours, pour être vendeur, il faut placer les héros dans les situations les plus glauques ou dramatiques. A cet effet, nous savons déjà que le thème central sera l'ascension et la chute de la famille des FF, et principalement Johnny Storm. Morts, crimes, trahisons, il y aura de quoi se réjouir. Le même sort attend Wolverine, qui depuis quelque temps est placé sous la houlette de Paul Cornell. Une gestion bien terne, et qui ne laissera aucun souvenir dans quelques années. Le problème, c'est que Cornell reste aux manettes après le nouveau relaunch à venir, qui placera Logan dans une nouvelle (?) situation. Le griffu va abandonner son institut pour jeunes mutants (la meilleure idée de ces dernières années...) puis rejoindre un cartel du crime. Sur la cover du premier numéro, un flingue accompagne les griffes, probablement car Wolverine est un peu moins efficace sans son facteur auto-guérissant. Bref, chez Marvel, l'idée d'une navigation à vue est de plus en plus évidente, et la grogne chez les lecteurs de plus en plus justifiée. Ne reste plus à Panini qu'à relauncher certains mensuels, et ce sera le comble pour les Marvel Fans français. Encore que cette dernière hypothèse semble quand même bien peu probable.
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