BATMAN ANNEE UN (DC COMICS LE MEILLEUR DES SUPER-HEROS TOME 14 CHEZ EAGLEMOSS) ET UNE NOUVELLE COLLECTION DE FIGURINES

Chez Eaglemoss cette semaine, on remonte le temps et s'intéresse aux premiers exploits du Dark Knight, sous la plume inspirée d'un certain Frank Miller.
Si Batman fut offert aux lecteurs pour la première fois sur les pages de Detective Comics 27 (1939), c'est dans le numéro 33 que ses origines sont enfin narrées. Le travail de Frank Miller, avec Batman Year One, a un impact aussi fort et important sur le personnage que ces prémices historiques qui remontent à de nombreuses décennies. Lorsque les pontes de DcComics décident, en 1986, de dépoussiérer les origines de leurs figures iconiques, ils sont bien plus circonspects avec le justicier de Gotham qu'avec Superman ou Wonder Woman, par exemple. C'est que la légende fondatrice de Batman fonctionne encore et toujours à merveille, et qu'il ne saurait être question de confondre chirurgie réparatrice et amputation à la hâte. Plutôt que de modifier la trame des grands débuts du héros, Frank Miller s'attache à lui conférer une profondeur, une gravité, pour ne pas dire une majestuosité, en rendant les premiers pas de Batman crédibles, maladroits, impitoyables, et en faisant de Gotham un personnage à part entière. 
Bruce Wayne est de retour dans sa ville après bien des années d'exil. Ses parents ont été assassiné dans les ruelles sombre de Gotham, et sa quête de vengeance mûrit lentement, à l'ombre de son manoir hanté par les chauves-souris. Le commissaire James Gordon est lui muté de Chicago à Gotham. Avec sa femme, il découvre un nouveau territoire où le vice, la corruption, l'immoralité, sont un cancer pour le tissu urbain. Les deux hommes vont apprendre à se connaître, se respecter, se nourrir l'un de l'autre. Tout comme David Mazzuchelli aux dessins, se nourrit du scénario noir de Frank Miller, pour signer des planches parfaites, où chaque détail, chaque ombre, est au service du drame qui attend son heure, caché au détour de la moindre ruelle malfamée de la cité sombre. Un classique moderne et intemporel, dont le pouvoir évocateur et ensorceleur ne peut que vous faire aimer ce justicier névrosé à la carrière bien remplie.

Grande partie de ce succès est donc à attribuer au récit de Miller, minutieux et fonctionnel, qui prend le temps de suivre le commissaire Gordon aux prises avec ses impératifs moraux, et sa conscience mise à l'épreuve des faits. Le respect de la loi et le justice sont-elles deux choses qui ne peuvent exister séparément, sont-elles indissociables? Le rapport conjugal de Gordon se délite au fur et à mesure des doutes qu'il nourrit sur Batman. Voilà un homme, un bon flic, qui se croyait intègre, infaillible, au dessus de toutes les bassesses du quotidien, et qui se retrouve face à un héros qu'il considérait un criminel, mais dont les agissements et la croisade l'amène à revoir son propre mode de pensée, et ses convictions. Au fond, qui est Batman? Vous pensez que Bruce Wayne le sait? Pas même, tout occupé que le milliardaire-redresseur de torts peut-être à observer la créature qu'il a conçu se fondre dans les méandres de la ville, pour en devenir partie prenante. Symptôme ou cure, le Dark Knight agit à la frontière de deux notions fort différentes, à savoir être celui qui nettoie Gotham et la rend présentable, ou pire encore il participe à ce climat de folie éternelle qui suinte de chaque ruelle et colle à la peau des habitants et des monstres familiers. Alfred l'homme à tout faire de Bruce l'a bien remarqué : absence d'un rythme sain du sommeil, augmentation de la paranoïa, Batman s'empare corps et âme de l'homme sous la capuche, et le digère pour le recréer à son image distordue. La justice en somme, est une chimère, ou une amante exigeante. Un commissaire est prêt à renoncer à l'amour, la famille, la stabilité, pour qu'elle puisse régner souveraine à Gotham. Un super-héros costumé et névrosé est disposé à tout abandonner pour en faire son grand objectif, à la mémoire d'un drame qui est autant l'élément déclencheur qu'une parfaite excuse pour vivre cette existence malsaine. Year One, la première année d'une tragédie qui se joue encore de nos jours, sans jamais démentir son succès fabuleux. 



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Et ce n'est pas tout. Car à partir de ce mercredi, Eaglemoss vous propose aussi une nouvelle collection, cette fois de figurines en plomb. Voici le communiqué de presse :

Retrouvez les plus grands héros et vilains de l’Univers Cinématographique Marvel tels qu’ils
apparaissent à l’écran dans cette collection inédite de figurines lancée par Eaglemoss !
Depuis Iron Man en 2008 jusqu’à Ant-Man en 2015, les plus grands personnages des films des Studios Marvel sont reproduits dans les moindres détails, à l’échelle 1/16. De nouveaux
personnages seront ajoutés à mesure que les films sortent. Toutes les figurines ont été sculptées numériquement par des spécialistes puis moulées en résine métallique de haute qualité et peintes à la main. Elles sont le fruit d’un long processus alliant recherche approfondie, savoir-faire artistique et dialogue permanent avec les Studios Marvel – et, souvent, avec les acteurs eux-mêmes. Le réalisme est saisissant !


Chaque figurine est accompagnée de son fascicule pour tout savoir sur le personnage et l’acteur qui l’incarne. Vous plongerez également dans l’univers des Studios Marvel grâce aux
témoignages des stars, des scénaristes, des producteurs et des réalisateurs.



Abonnez-vous en ligne dès aujourd’hui sur www.eaglemoss.fr/figurines-films-marvel ou rendez vous chez votre marchand de journaux dès ce 17 février !
Le premier numéro Iron Man est au prix de  3,99 € seulement.

En bonus pour ceux qui s'abonnent




AMAZING SPIDER-MAN #1.1 : LA REVIEW ALL-NEW ALL-DIFFERENT

Comme vous le savez, dans l'univers Marvel, les super-héros qui tombent au combat ne restent morts guère longtemps. Très vite on les revoit gambader en pleine forme, comme s'il s'agissait juste d'une mauvaise maladie qui se soigne très bien, avec quelques antibiotiques. Alors les new-yorkais ne devraient finalement pas trop s'émerveiller du retour d'un père de famille qu'on disait condamné et rongé par la maladie, puis régulièrement décédé et enterré. Depuis, c'est le mutisme, et le refus de parler à la presse qui caractérise ce miraculé bien discret. Dans ce numéro 1.1 commence donc une série dans la série, écrite par Jose Molina. On est un peu surpris par ce qu'on lit, et la façon dont évolue l'action, car depuis le lancement de l'opération All-New All-Different, la vie de Peter Parker a véritablement évolué. A la tête d'un conglomérat international, le jeune homme a un emploi du temps ultra chargé, et de nouvelles obligations qui ne devraient pas lui permettre de virevolter tranquillement en ville, plus encore de s'intéresser de près à ce genre de cas absurde, qui ne requiert par ailleurs aucune urgence immédiate. Le mystère s'épaissit lorsque Parker enquête sur les soins reçus par l'ancien malade en phase terminale, ce qui le mène à rencontrer le groupe des Santerians. Nous parlons là d'une formation apparue sur les pages de la mini série Daredevil:Father, de Joe Quesada. Il s'agit à la base d'un groupe de super-héros latinos, emmenés par un certain Nestor Rodriguez, et qui pratiquent une religion étrange à la croisée des chemins du catholicisme et d'une forme d'animisme africain. Ils opèrent à New-York et patrouillent particulièrement dans le quartier porto-ricain de la ville, qui est de la sorte sous leur protection effective. Cette histoire est dessinée par Simone Bianchi, qui reste un artiste hautement spectaculaire, et raffiné, dès lors qu'il s'agit de mettre en place des anatomies confondantes de travail et de méticulosité. Mais ses planches ont parfois une tentation à la surcharge, et la mise en couleurs un peu étrange (criarde?) notamment sur le costume new-look du tisseur de toile produit un effet final que je qualifierai de décevant, quand on voit ce qu'il est capable d'offrir par ailleurs. J'ai beaucoup plus apprécié les preview en noir et blanc où son trait d'orfèvre est bien mieux mis en valeur. Son soin du détail finit par être parfois trop évident pour des comics grand public comme celui-ci, et cela se fait au détriment du dynamisme et de la lisibilité des planches incriminées. Bien sur, Amazing Spider-Man #1.1 est une parution qui devrait parler aux amateurs de jolis dessins, mais la trame convenue et le manque d'ambition (pour le moment, avec ce premier numéro) n'en font pas un incontournable de ce début d'année. On attend de voir la suite, pour savoir s'il se cache derrière quelque chose de novateur et fort, ou s'il s'agit simplement d'une récréation arachnéenne sans grosses conséquences.



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MARVEL'S DAREDEVIL - SAISON 2 - Bande-annonce officielle - Netflix

Hasard du calendrier, alors que ce matin nous vous proposions, à l'heure du petit-déjeuner, de lire notre critique du Daredevil de Bendis et Maleev (de retour, pour celles et ceux qui ne l'ont jamais lu, dans la collection Marvel Select) voici qu'arrive le trailer officiel de la saison two de Marvel's Daredevil, chez Netflix. Bref, la série qui nous a le plus marqué en 2015, avec en cadeau bonus le Punisher, et aussi Elektra. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais nous sommes déjà impatients d'être à la mi-mars pour découvrir cette nouvelle livraison d'épisodes qui vont faire date!




LE DAREDEVIL DE BENDIS ET MALEEV REVIENT EN MARVEL SELECT (Tome 1 : LE SCOOP)

Il est totalement légitime de penser que le cycle d'histoires réalisées par Brian Bendis et Alex Maleev est entré de plein-pied dans le Panthéon du comic-book mondial. Nous avons là en effet un run de qualité excellente, crédible, et ultra intelligent que Panini propose à nouveau à partir de ce mois-ci dans la collection Marvel Select à un prix fort raisonnable. Il s'agit simplement d'une sorte d'extraordinaire roman graphique urbain et divisé en 51 épisodes; il est tout à fait logique de placer ce cycle sur un pied d'égalité avec des monuments comme les X-Men de Chris Claremont John Byrne, le Thor de Walter Simonson où le Daredevil de Frank Miller par exemple. Miller (puisque nous l'évoquons) avait choisi de plonger le personnage dans un univers hard boiled assemblé autour d'histoires désespérées, de pourriture urbaine, d'une violence omniprésente et de frontières mal définies entre le bien et le mal. Lorsque Bendis démarre son travail sur Daredevil au numéro 16, avec David Mack au dessin, il choisit comme idée directrice une trame inspirée du genre noir, et puise son inspiration dans le rythme nerveux et ultra sombre de James Ellroy, avec quelques clins d'œil à Quentin Tarantino et le style cru et réaliste d'une série comme les Sopranos. Le premier véritable arc narratif est ainsi un chef-d'œuvre en tous points parfaits; il permet de regrouper tous les personnages de la série, de jouer intelligemment avec les interactions entre tous ces intervenants, dont les caractéristiques sont mises violemment à nu. L'histoire oscille entre le présent et le passé et finit par assumer un ton qui la fait ressembler à une tragédie shakespearienne. Daredevil, Matt Murdock, Foggy Nelson, les hommes de main du Caïd et la famille Fisk tout entière se retrouvent pris au piège de la machine de précision diabolique de Brian Bendis. Le fragile équilibre qui permet à la structure en place de se maintenir cahin caha explose lorsque quelqu'un tente d'assassiner Murdock à la sortie du tribunal, et lorsque Wilson Fisk est victime d'une basse trahison, et poignardé sauvagement. Hell's Kitchen s'enflamme et devient plus que jamais les cuisines de l'enfer, où tout le monde s'apprête à rôtir. 


Le pire des dangers, pour Daredevil, ne provient pas forcément des types en costumes et aux super-pouvoirs, mais se niche plutôt dans les bas fonds de la ville, les gangs et les petits truands, la guerre de succession qui risque d'exploser si le Caïd est évincé. Le héros, tache écarlate qui déchire la grisaille et l'étouffante noirceur mise en place par Matt Hollingsworth (complice aux couleurs de Maleev) bondit d'une page à l'autre, et se retrouve coincé entre le marteau et l'enclume, sa vie privée mise à jamais en danger par un "scoop", une révélation aussi inattendue qu'inéluctable, qui a pour conséquence de faire voler en éclat son existence, son équilibre déjà précaire. Bien sur, cette exploration de l'intime violé et d'une vie foulée aux pieds est magnifié par le boulot irréprochable d'un artiste de la trempe d'Alex Maleev. Observez donc l'économie de mouvement et la précision des expressions, dans certaines planches quasi photographiques, qui s'accordent à merveille avec le style tout à tour taiseux (beaucoup de moments silencieux) et frétillant (Bendis écrit des dialogues fort naturels qui empruntent beaucoup aux codes en vigueur dans les séries télévisées modernes) du scénariste. La pertinence des angles de vue, le découpage racé et dynamique qui plonge le lecteur dans l'urgence et le désespoir de Matt, tout cela c'est la marque de fabrique de Maleev, qui crédibilise au maximum ce récit incontournable dans la vie du Diable de Hells Kitchen. Récit qui dès le départ ne s'offre pas sans un minimum d'efforts. Bendis choisit d'effectuer des allers retour temporels, des ellipses, de se focaliser sur les personnages qui d'habitude ne mériteraient pas plus d'une vignette de la part des autres artistes; ou encore il ralentit et dilate l'action  par de menus détails insignifiants sur le moment mais qui ont pour effet de renforcer l'immersion du lecteur dans ce polar sombre et impitoyable. Au fil des épisodes l'évidence est là : Bendis signe ce qui est le chef d'oeuvre de toute une (riche) carrière, et chaque regard (Ben Urich, Vanessa Fisk ...) est une fenêtre grande ouverte sur le microcosme névrosé de Daredevil, qui réussit le tour de force d'explorer cet univers encore plus en profondeur que ne le fit Miller en son temps. Ceux d'entre vous qui n'ont jamais lu cette tranche de vie absolue de Matt Murdock, ou ne la possèdent pas dans leurs bibliothèques, ont donc une nouvelle chance de combler cette lacune. Cette fois pas de doute ou d'hésitation : le cycle de Bendis et Maleev est in-con-tour-na-ble. 




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LA COVER DE LA SEMAINE (semaine 10)

Comme chaque dimanche, l'heure est venue de voir un peu ce que les sorties de mercredi dernier nous ont apportés, au niveau de la couverture. Des covers de toute beauté, avec à la clé une question existentielle : quelle est la plus réussie? C'est parti donc avec un assortiment qui vaut le détour, illustrée par une sélection riche et nourrie.

Au menu : 

All-New Hawkeye #4 de Ramon Perez
All-New Wolverine #5 de Bengal et Michael Cho
All-New X-Men #4 de Mark Bagley
Batman #49 de Yanick Paquette
Catwoman #49 de Joshua Middleton
Constantine: The Hellblazer #9 de Riley Rossmo
Darth Vader #16 de Mark Brooks
DC Comics Bombshells #9 de Ant Lucia
Deadpool #7 variant de Skottie Young
Gotham Academy #15 de Mingjue Helen Chen
Low #11 de Greg Tocchini
Ms. Marvel #4 de David Lopez
New Romancer #3 de Brett Parson
Old Man Logan #2 variant de Michael Cho
Red Wolf #3 de Julian Totino Tedesco
Silk #4 de Helen Chen
Spider-Gwen #5 variant de Michael Cho
The Legend of Wonder Woman #2 de Renae De Liz
Weirdworld #3 de Mike Del Mundo





















MARVEL UNIVERSE HS 1 : DEADPOOL Vs THANOS

Après avoir éliminé le Marvel Universe au complet, et s'être frotté à des zombies et des versions de lui-même, Deadpool est aux prises avec Thanos, et passe un sale quart d'heure d'emblée, bien qu'on devine que pour s'en débarrasser, ce n'est pas chose aisée. Dans cette mini-série, on a droit à un peut tout et n'importe quoi. Une sorte de relation à trois qui va impliquer le mercenaire disert, Thanos, et la Mort en personne. Le péril est l'impossibilité désormais de mourir dans tout l'univers, qui dérègle fortement la balance cosmique, et éloigne le péril suprême qui plane au dessus de la tête de toutes les créatures, à savoir la fin de leurs existences. Au milieu de tout cela, des blagues pas forcément heureuses, un humour pas très subtil et surtout sans grand sens de la profondeur et sans grande inspiration. Bien que ce ne soit finalement pas si important dans l'économie de ce titre potache, et en pleines Secret Wars (en Vf), c'est le flashback face à Fatalis (en tenue de détente, petit shorty et masque en fer, jambes loin d'être épilés) qui est le plus drôle dans cette affaire. Passé ce face à face qui fait sourire, le reste est en panne sèche. Le duel entre Deadpool et Thanos se justifier par le fait que ce dernier a lancé une malédiction à l'encontre de son adversaire, voilà quelques temps, lui interdisant les portes de la mort, en le rendant immortel. Il faut dire que Wade Wilson avait également manifesté des vues intéressées sur la personne royale de sa Majesté Death, qui est, comme chaque lecteur de comics Marvel le sait, la seule et unique flamme du Titan fou, pour qui il a déjà eu l'idée saugrenue de sacrifier la moitié de la population de l'univers (Infinity Gauntlet). Cette fois Thanos n'a pas le choix, car celle qu'il désire s'est manifestée uniquement à Deadpool, pour lui faire part de sa captivité, et demander de l'aide. Qui a bien pu avoir l'audace et le pouvoir pour emprisonner la mort elle-même. Les deux larrons improbables mènent l'enquête. 

Au départ, ça ressemble à un hit annoncé, avec d'un coté un mercenaire déjanté qui affole souvent les chiffres de vente et bénéficie de l'effet cinématographique, et de l'autre le grand méchant le plus hype du moment, et futur star du prochain film des Avengers. Et puis en fait, pas grand chose. La rencontre tant attendue de l'univers loufoque du premier cité, avec la majesté sinistre du second accouche d'un produit hybride qui ne se prend pas au sérieux, mais ne prend pas non plus très au sérieux ses lecteurs.  Tim Seeley a commis une grosse faute en écrivant ce titre, à mon avis. Celle de faire descendre Thanos de son piédestal pour l'abaisser au même statut que Deadpool. Du mauvais Deadpool, c'est à dire ce personnage parfois utilisé et usé jusqu'à la corde, pour soutirer quelques ventes de plus, avec des vannes approximatives pour maintenir un fragile édifice qui autrement s'effondrerait sur le néant.  Certaines scènes ne sont plus de l'ordre du divertissement, ou du clin d'oeil aux lecteurs avides de références pop-culture, mais tout simplement un étalage de mauvais goûts, sans grand intérêt. Par exemple, quand Deadpool roule un patin, toute langue dehors, au cadavre de Charon, dans les enfers. Elmo Bondoc fait de son mieux pour rehausser l'ensemble avec des dessins que j'estime globalement réussis, suffisamment détaillés et cohérents, même si nous notons ça et là de petites baisses de régime dans quelques cases un peu plus rapidement expédiées. Deadpool Vs Thanos est au milieu du gué et refuse de faire la traversée : Ce n'est pas une vraie comédie avec une tonne de jokes assénées avec un timing redoutable (Duggan & Posehn par exemple, qui ont en plus le mérite de rendre humain et attachant Wade, avant d'aborder Deadpool, le héros), ce n'est pas non plus ce face à face grandiloquent et redouté, avec Thanos dans les parages. C'est juste une récréation qui met les plats dans le plat, et profite des caractéristiques du mercenaire disert pour raconter tout et n'importe quoi. A peu près n'importe comment. 



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JUPITER'S LEGACY TOME 1 : LUTTE DE POUVOIRS

Que ce soit avec The Authority, Civil War ou bien les Ultimates Mark Millar a toujours pris plaisir à mélanger le monde fantastique du super héroïsme avec celui beaucoup plus réaliste et cynique de la politique américaine et internationale. Ce style particulièrement acide et qui donne de l'urticaire est la marque de fabrique d'un scénariste incontournable, qui a choisi ces dernières années de fonder son propre label pour tisser un univers en marge des grosses compagnies du comic-book. Avec Jupiter's Legacy Mark Millar ne se dément pas et va même encore plus loin si cela est possible dans le concept de méta-humains qu'il a mis sur pied. Ici les super-héros existent depuis les années 30 (le récit démarre en 1932, année où est apparu le Superman de Siegel et Shuster) et ils ont aidé l'humanité à venir à bout des plus grands ennemis de l'Histoire, à savoir la Grande Dépression en 1929 puis la Seconde Guerre mondiale. L'Utopien et sa femme Lady Liberty ont pris en main le monde entier et ce sont leurs exploits qui ont guidé l'humanité jusqu'au 21e siècle; puis ils ont eu deux fils, Chloé et Brandon, les co-protagonistes de cette histoire, qui doivent assumer l'héritage de leurs parents et accepter d'être bien malgré eux d'être les stars du moment, à une heure ou une nouvelle crise financière est en train de détruire l'économie et ou des nouveaux théâtres de guerre apparaissent chaque jour sur le globe. Mais est-ce bien quelque chose qui les intéresse..? Ces deux-là ont tout un tas de problèmes, ce sont des enfants gâtés et malmenés, ils cherchent la célébrité et versent dans les excès. En gros c'est un peu comme si vous aviez confié des supers pouvoirs à Lady Gaga ou Paris Hilton... ils manquent de cet esprit altruiste et de cette éthique morale qui sont nécessaires lorsqu'on revêt un costume de super-héros et qu'on a pour mission de protéger les plus faibles contre les super-vilains. On retrouve la fille en situation d'overdose et avec une grossesse inattendue, alors que le fiston fréquente les boîtes branchés et branchent les filles dans les toilettes. Les pauvres n'ont rien demandé, après tout!

La relation entre parents et fils ressemble parfois à une tragédie shakespearienne aux accents oedipiens. Difficile de grandir sainement quand les modèles parentaux sont des parangons de vertu, des êtres aux super-pouvoirs toujours parfait, gentils, efficaces, serviables. La mère de Chloe, à presque cent ans, reste une femme belle et entourée de soupirants qui fait de l'ombre à sa fille, par exemple. Reste un cas d'école, l'oncle Walter, doté d'un cerveau super développé et capable de manipuler les esprits, féru d'économie, qui souhaite redresser les finances de la planète par le biais d'un système qui lui est propre, sans scrupules, tel un apprenti sorcier. Millar s'en donne à cœur joie et ne cesse de surprendre le lecteur avec de nombreux coups de théâtre et un changement imprévu de direction en cours de route. Ses personnages sont intéressants car non seulement ils incarnent le révisionnisme super-heroique, à savoir cette nouvelle génération de héros plus réalistes et modernes, qui supplantent les anciens, mais ils sont aussi l'essence même de ce qui permet au lecteur de s'évader de la réalité et de se fondre dans un récit en bande dessinée. Chloé et Brandon en réalité les créatures putatives d'auteurs comme Alan Moore et Frank Miller, et cet album est chargé en clin d'œil et citations de Hamlet à King Kong en passant par la série Lost ou Star Wars. L'héroïsme est passé à la moulinette post-moderne de la praticité, de la réalité géo-politique et de ses enjeux, puis digéré et assimilé par l'esprit nihiliste des temps qui rend toute chose, tout espoir, aussi vain qu'illusoire. Frank Quitely se charge d'illustrer l'ensemble avec le style particulier qui lui est propre, délaissant les fonds de case et le détail réaliste pour se concentrer sur les personnages, leurs luttes intestines, leurs déboires. Un parti pris vers l'humanisation de super humains. Dans Jupiter's Legacy Millar réussit même à se citer lui-même à plusieurs reprises; une oeuvre dérangeante véritablement intrigante qui fonctionne à plusieurs niveaux et qui vient nous rappeler combien le génial écossais est un auteur de grand talent qui manque cruellement au grandes majors du comic-book américain, qui n'ont ni les moyens ni la verve nécessaire, la plupart du temps, pour se libérer des carcans et produire des oeuvres aussi originales et marquantes. 


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