BATMAN : DARK NIGHT UNE HISTOIRE VRAIE (VERTIGO DELUXE CHEZ URBAN COMICS EN FEVRIER)

De même que pour beaucoup de personnes la rédaction d'un journal intime peut permettre de prendre du recul sur les aspects les plus sombres de l'existence, de donner aux choses une juste perspective, le comic-book peut aussi avoir valeur de thérapie, d'introspection thaumaturge. C'est le cas de cette histoire aussi poignante qu'édifiante, que nous a concocté Paul Dini. Au début des années 90 l'auteur était presque arrivé au sommet de la gloire, notamment grâce à la série animée Batman chez Warner Bros. Mais un soir, sur le chemin du retour à la maison, la rencontre fortuite avec deux agresseurs ultra violents allait changer le cours des événements. Un passage à tabac qui allait pousser le scénariste dans la spirale de la dépression, du renoncement. C'est alors que l'écriture vint au secours de Paul Dini. Ici, le processus de création du graphic novel (Dark Night) est présenté sous forme de story-boards, et il croise les blessures physiques et psychologiques causées par l'agression. Le point de départ est l'enfance de l'auteur, gamin anonyme comme beaucoup d'autres, qui aiment trouver dans les livres, la fiction, ce merveilleux qui n'habite pas forcément la réalité prosaïque. Jusqu'au moment où son parcours se brise, où plus rien n'a plus de sens, encore moins continuer à raconter les éternels combats entre le Joker et un super-héros grimé en chauve-souris. Dini est rattrapé par la réalité, qui se présente avec le visage de ses deux assaillants, et c'est toute l'oeuvre dessinée qui est démasquée. Il n'y a plus de justice qui triomphe, de Batman qui arrive à temps pour sauver la veuve et l'orphelin, et de triomphe du bien sur le mal en débandade. Batman reste caché dans l'obscurité du comic-book, et il ne peut rien contre une fracture du crâne, des cotes cassées, des os brisés. Dans ce voyage fascinant et éloquent qu'est sa propre vie, Paul Dini utilise les méchants de papier pour donner corps à ces démons intérieurs qui lui ruine la vie, le maintiennent lié à son lit, bouteille ou anti-dépresseurs à portée de main. Son travail devient une véritable analyse, lucide, sans concession.




Dini a un atout dans sa manche, savoir raconter avec concision et sans s'éloigner trop du sujet, alterner les tons, passer de l'humour à la violence brute. Le plus intéressant, c'est bien les personnages de fiction qui apparaissent. Ici on comprend mieux que ce ne sont pas seulement des héros ou des vilains imaginaires, mais que chacun, selon ses caractéristiques, les idées qu'il représente, a une fonction, une importance particulière, ce qui permet de varier les angles d'attaque, et d'apporter une multitude d'éclairages sur le sens à donner à cette tragédie inattendue. Lui même ne donne pas dans la complaisance, mais interroge aussi l'intérêt de sa démarche, son coté égocentrique par exemple, et la difficulté de s'atteler à la violence urbaine et à ses agresseurs sans prendre le risque de tomber dans la caricature sociale voire raciale. Tout est maîtrisé et en même temps coule de source. Un tour de force narratif qui impressionne, comme cela n'avait plus était le cas depuis C'est un oiseau, autre ovni entre littérature et comic-book super héroïque, de Steven Seagle.
Eduardo Risso est bluffant au dessin, car il se coule à merveille dans les intentions du scénariste. Il assure ici tout le travail, encrage et colorisation compris, et saisit chacune des nuances voulues par Paul Dini, affinant son propre style pour qu'il adopte la teneur, le propos juste. Une économie de lignes et de détails qui est la marque des grands, avec des pages au premier abord plus colorées et enlevées, mais qui s'assombrissent, se replient sur le lecteur, au fur et à mesure que le propos se dramatise, et que Paul Dini compose avec sa solitude et son statut de victime. Somptueux et hautement intelligent, à ne manquer sous aucun prétexte. Sortie début février chez Urban Comics. 




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SUPERMAN WONDER WOMAN : COUPLE MYTHIQUE (DC COMICS LE MEILLEUR DES SUPER-HEROS TOME 37 CHEZ EAGLEMOSS)

Un couple à l'honneur chez Eaglemoss. Et pas n'importe lesquel, dans ce volume 37!
Finalement quoi de plus logique que de voir ces deux-là se mettre ensemble? Après tout il s'agit du couple le plus puissant de l'univers DC Comics; d'un côté nous avons Superman, un extraterrestre adopté par notre planète, dont la force est incommensurable et qui est le super-héros par excellence. De l'autre nous avons une amazone guerrière redoutable, descendante directe de la mythologie grecque. Ce couple surpuissant, en apparence complémentaire, a de quoi inquiéter les observateurs les plus pusillanimes (ou lucides); certains en viennent en effet à se demander ce qui pourrait se produire si deux êtres aussi formidables venaient à avoir une descendance, ou tout simplement quelles seraient les conséquences d'une rupture ou de problèmes relationnels entre les deux tourtereaux. Tant de pouvoir concentré entre un homme et une femme attire logiquement la crainte et la méfiance. Les deux amants se posent également des questions toutes personnelles, à savoir si se préoccuper l'un pour l'autre en plein combat ne finit pas par devenir un handicap pénalisant, plutôt que de constituer un atout. Bref la somme des parties est-elle supérieure aux individualités prises à part? La question se pose lorsque Superman et Wonder Woman se retrouvent aux prises avec des fugitifs en provenance de la zone fantôme; c'est tout d'abord la terrible machine de destruction Doomsday qui malmène sérieusement l'Amazone. C'est ensuite le général Zod qui débarque sur terre. Lui aussi est un kryptonien mais ses objectifs et sa moralité sont bien différentes de ceux de Superman et il représente très vite un danger potentiel de très grande envergure pour la Terre. Heureusement depuis qu'il est en couple Superman a donc un renfort de charme et de choc pour faire face aux crises les plus importantes.

La nouveauté, c'est donc que cette fois, Dc assume le couple Superman/Wonder Woman. Parfois ébauché sous forme de flirt anodin, ou présenté dans des réalités alternatives ou futuristes, il est là au centre du nouvel univers sentimental de l'homme d'acier. Exit donc Lois Lane, journaliste qui n'a pas froid aux yeux mais reste bien humaine. Place à une compagne déesse. Et les sentiments sont avoués, franchement. Les mots comptent, et Clark Kent laisse parler son coeur et avoue ce qu'il ressent. Chose toute aussi significative, si Diana peut avoir des doutes par endroits, elle aussi se laisse prendre au jeu et communique sur ce qu'elle ressent. Mais aussi forts et puissants soient-ils, les deux amants ont aussi des limites, qui peuvent par ailleurs être exacerbées par l'intervention sournoise de créatures divines (comme Apollon) qui viennent en aide à leurs ennemis. Du coup, si vous voulez voir Superman poussé dans ses derniers retranchements, terrassé et capable de renverser la vapeur en prenant des risques incroyables, plaçant dans la balance sa propre survie et celle de Wonder Woman, voilà un album qui devrait vous satisfaire. Le général Zod et sa compagne sont des créatures elles aussi presque invincibles, et avec Doomsday qui rôde dans l'ombre et attend pour se déchaîner, on en plaindrait presque Superman, que Charles Soule humanise tout en soulignant ses extraordinaires facultés. Le dessin est signé Tony Daniel, un de ces artistes appréciés ou détestés, selon que le style réaliste et plastiquement dynamique vous intéresse ou pas. Pas de prétention arty ici, mais des planches iconiques, voire (pas toujours mais cela arrive) somptueuses, certes nimbées d'une froideur esthétisante, mais qui sont d'un assez bel effet. On le préfère sur les splah-pages ou les cases de grande envergure, beaucoup moins quand il s'agit de fignoler les vignettes secondaires. En tous les cas, voilà une romance qui sort l'artillerie lourde, et a un sens quand on réalise à quel point ces deux héros sont finalement au dessus du commun des mortels, avec de telles facultés, et un tel potentiel salvateur ou destructeur. 


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GEOFF JOHNS PRÉSENTE FLASH TOME 1 : SANG À L'HEURE

Si vous avez découvert les comics à l'occasion des New 52 chez Dc, il est fort probable que pour vous, Flash c'est avant tout Barry Allen, et personne d'autre. Mais ceux qui lisent les comics depuis un certain temps savent bien que la notion de transmission, d'héritage, est fondamentale chez cet éditeur. Et lorsque Barry a disparu -tragique conséquence de la grande saga Crisis on Infinite Earths- Wally West lui succéda, pendant de longues années. Urban Comics nous propose de découvrir les aventures de ce speedster remplaçant, écrites par le scénariste Geoff Johns. Ce dernier est désormais une signature fortement identifiable pour le public, et l'heure est venue d'aller repêcher ce qu'il a fait, avant d'avoir redonner du sang neuf à Green Lantern, par exemple. Malheureusement ce premier tome à tendance à s'ouvrir sur une histoire assez brouillonne : Notre nouveau Flash se retrouve prisonnier d'une sorte de monde miroir, ces univers qu'affectionne tout particulièrement un de ses ennemis, le Maître des miroirs, justement. Wally est en prison, ses pouvoirs paraissent avoir disparus, et il ne reconnaît pas le monde dans lequel il évolue. Ainsi Barry n'est pas mort, la police se comporte comme une milice fasciste, et il est accusé d'avoir abattu un gardien de la paix... du coup rien d'étonnant à ce qu'il reçoive et accepte l'aide de Captain Cold, qui fait pourtant partie des Lascars, ses pires ennemis. Difficile de s'attacher à tous ces personnages quand on ne les connais pas bien; ils sont ici servis un peu abruptement, et le lecteur qui n'est pas habitué à l'univers normal de Flash aura bien entendu des problèmes pour apprécier cette version distordue et énigmatique. Autre point noir, le dessin d'Angel Unzueta n'est pas particulièrement soigneux. Le trait est très gras, et il abuse de contre-plongées disgracieuses, avec des mâchoires trop lourdement appuyées, et des premiers plans assez banals et exagérés dans l'expression. Reste que cette aventure réserve des surprises, notamment lorsqu'on pense qu'elle est sur le point de se terminer, et qu'elle ne fait que rebondir, vers une direction inattendue, pour deux épisodes supplémentaires. Une trame à tiroirs donc, mais qui plaira plus à ceux qui ont déjà lu du Flash auparavant. 

Le second arc narratif, Sang à l'heure, est plus abordable et structuré. On comprend mieux la vie quotidienne de Flash, alors que Wally West est marié à Linda Park, une journaliste, qu'il réside dans l'une des cités jumelles, la ville de Keystone City, et a révélé son identité secrète au grand jour. Il y a encore peu, notre héros était un coureur de jupons un peu lâche, qui larguait ses petites amies sans avoir le courage de leur dire en face. Ce qui explique que sa relation aujourd'hui, avec la super-vilaine Magenta, est des plus tendues. D'autant plus que la pauvre est schizophrène et que ses pouvoirs sur le magnétisme sont redoutables. Elle s'est retrouvée, pour ne rien arrangée, embrigadée dans la secte de Cicada, qui prétend rendre hommage au Flash, d'une bien curieuse façon : il assassine toutes les personnes que le bolide a récemment sauvé! Parmi les victimes, une autre des anciennes fiancées de Wally, qui a eu un enfant né juste au terme de leur histoire bancale. Un bambin qui manifeste des dons particuliers, avec des sortes d'éclairs qui lui jaillissent des yeux, en situation de stress. Du coup Johns s'amuse à nous laisser croire que...
Skott Kolins aux dessins, c'est du classique, avec le recul, pour les lecteurs de Flash. Son style est énergique, mise sur l'action et le mouvement, et donc le choix est logique. Si parfois ça manque de grâce ou de finesse, il faut admettre que ça colle à la série. Cette seconde partie de ce tome 1 est plus attachante. Wally West y apparaît comme un homme encore très perfectible, en pleine phase de maturation (plus que de maturité), qui apprend chaque jour, de ses échecs, de ses succès, à devenir le héros ultime qu'il est censé être. Du coup, ceux qui l'ont découvert pour la première fois, dans le numéro déjà culte "Rebirth" vont se poser des questions... Oui, Wally West fut en son temps un Flash digne de ce patronyme, oui il avait su se mettre nombre de lecteurs dans la poche, et Geoff Johns vous le prouvera, le long d'une série de six volumes publiés par Urban Comics. En gros, prévoyez tout de même un certain budget, pour la collection complète.




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JUSTICE LEAGUE/MIGHTY MORPHIN POWER RANGERS #1 : LA REVIEW DE L'IMPROBABLE

L'idée semble totalement farfelue sur le papier, mais il fallait bien que cela arrive un jour, d'autant plus qu'il s'agit d'un mash-up qui suit l'actualité du grand écran. Voici donc venir une mini-série en 6 parties, qui va faire se rencontrer la Justice League et les Power Rangers. C'est Tom Taylor qui se retrouve avec le devoir d'écrire une histoire qui tienne debout, ce qui n'est pas gagné d'avance, quand on imagine la difficulté de faire interagir ces deux univers. Je vous donne tout de suite dans le mille le moyen utilisé : une affaire de teleportation à travers les dimensions! C'est bien facile, et ça ne mange pas de pain. Je vais être honnête avec vous, je n'ai jamais vraiment apprécié les Power Rangers, je ne regardais pas lorsqu'ils passaient à la télévision régulièrement (depuis 1993) et je n'ai bien entendu jamais feuilleté un comic book les mettant en scène. Je suis donc comme beaucoup d'entre vous, totalement novice en la matière, et j'ai découvert la formation avec ce premier numéro. La bonne nouvelle, c'est qu'on se rend compte très vite de qui est qui, aussi bien au niveau des Rangers, qu'à celui de leur ennemi principal, qui leur a tendu un piège, en substituant leur petit robot domestique par une copie conforme, mais contenant une bombe. Un scénario assez académique, qui à aucun moment ne plonge dans l'introspection, ou bien la caractérisation des personnages, et se contente de jouer la carte de l'action et du drame. Tant mieux finalement, car c'est ce coté qu'attendent les lecteurs de ce type de produit, à mon avis. Superman fait une très brève apparition en début d'épisode, puis nous repartons en arrière dans le temps, et les supers-héros de la Justice League vont être présents, par l'intermédiaire de Batman (la dernière planche est d'ailleurs assez amusante, et propose une situation cocasse avec le Dark Knight), et également Flash.
Un mot sur le dessin pour conclure :  c'est un irlandais, Stephen Byrne, plus habitué à l'animation et aux jeux vidéos, qui orchestre l'ensemble. On sent tout de suite le travail sur ordinateur, la patte digitale qui est identifiable d'emblée au niveau des visages, des expressions, la texture des corps. La mise en couleur est sympathique et s'accorde bien au ton global, les pages sont étoffées et présentent un certain nombre de personnages, sans pour autant être surchargées. Bref c'est assez lisible; reste que bien évidemment, même si vous trouvez cela sympathique, cette mini-série n'a aucune chance d'entrer dans le panthéon du genre. Kids wanna have fun.


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THEY'RE NOT LIKE US : LA SERIE DE ERIC STEPHENSON ARRIVE CHEZ JUNGLE

Ils ne sont pas comme nous. C'est ce qu'affirme le titre de cette nouvelle série. mais en quoi sont-ils différents, et de qui s'agit-il? La réponse est simple : une bande d'adolescents dotés de super-pouvoirs. et qui n'a pas peur de les utiliser, dans un parfait égoïsme, comme pour perpétrer la survivance de l'espèce. Ne nous y trompons pas, le discours de fond se rattache à toute cette mouvance qui voudrait nous montrer à quel point la jeunesse d'aujourd'hui est différente des générations précédentes, et qu'elle baigne dans un sentiment d'aliénation, de mise à l'index volontaire, reposant sur des comportements, des habitudes, qui sont difficilement bien perçus en dehors du groupe. La jeune héroïne de cette histoire n'a pas de nom, cela importe peu : elle est en grande souffrance, puisqu'elle entend une foule de voix dans sa tête, lui rendant l'existence invivable. Au point de souhaiter en finir, en se jetant du haut d'un toit d'immeuble. La chute n'est pas fatale, et elle se réveille dans un lit d'hôpital, avec à son chevet l'énigmatique Voix, qui affirme savoir ce qui se produisait chez elle, et comment lui apporter paix et sérénité. En effet, les voix (avec la minuscule) semblent s'être tues, et elle se découvre... télépathe! Son interlocuteur aussi est quelqu'un de particulier, et il est à la tête d'une bande d'autres ados à pouvoirs, qui après avoir été rejetés par leurs aînés, ont décidé de s'unir et de profiter pleinement de leurs dons. Leurs parents n'ont pas fait l'effort de les comprendre, n'ont pas su les accepter? Et bien eux auront leur revanche, iront se servir là où se trouve la richesse, le confort, pour vivre à l'aise dans une grande propriété abusive. La violence fait partie de leur quotidien, c'est un moyen d'expression immédiat, et qui permet aussi de s'assurer toutes les commodités nécessaires. Une esthétique presque Orange Mécanique, qui dérape franchement lorsque la jeune Syd (le nom de code de la nouvelle) apprend que pour intégrer la bande une bonne fois pour toutes, il va lui falloir changer d'identité, et ... tuer ses propres parents. Comme l'ont fait les autres avant elle.

Est-il juste et sain de s'adonner à la violence débridée pour une paire d'écouteurs, ou des gadgets de hipsters qui n'ont de valeur que commercialement parlant? Oui, dans un monde marqué du sceau du matérialisme, où l'humain passe au second plan, et où la force et le fait de pouvoir sont suffisant pour justifier l'action. Non, si la violence en question déborde sur le meurtre, encore que la perte complète de repères amènent le mépris du prochain, du vivant. Bref, ce n'est pas seulement l'adolescence en temps que phase délicate de transition, qui est ici mise en question, mais c'est toute notre société, où l'aveuglement du voisin contribue à l'envie de ne plus s'en soucier, de le dominer par la force, qui est mise en lumière dans ce comic-book parfois un peu pontifiant, maladroit, mais qui réserve aussi de belles trouvailles, des moments forts.
Eric Stephenson choisit de nous présenter une bande de jeunes qui pourraient bien être aussi des criminels dangereux et fanatiques. Tout se joue au départ (quand ils se présentent sur une page simple mais immédiate) sur des expressions faciales, un regard, une attitude, qui en dit long sur ce qu'ils (s)ont au fond d'eux. Ce ne sont pas les pouvoirs (qu'ils possèdent, et sont clairement énoncés) qui les définissent mais ce qu'ils peuvent faire avec, dans quel état d'esprit. Simon Gane, le dessinateur, opte pour la carte de l'essentiel, de l'émotion, et son travail est fort bien mis en valeur par la couleur de Jordie Bellaire, référence s'il en est dans la profession. Ce premier tome est publié chez l'éditeur Jungle Comics, qui continue de tenter de se faire un nom dans un marché sauvage et saturé. Nous aurions bien tenté de les contacter, pour vous proposer un petit concours, par exemple, histoire de faire découvrir la série plus efficacement, mais déjà à l'époque de Air-Boy (par ailleurs très recommandé!) nous n'avions pas eu la moindre réponse, et insister n'est pas dans nos habitudes. Dommage, vraiment. Qu'à cela ne tienne, bonne chance avec cet ouvrage, qui mérite que vous y jetiez un oeil, ou les deux. 



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SHAZAM (DC COMICS LE MEILLEUR DES SUPER-HEROS TOME 36 CHEZ EAGLEMOSS)

Si certains regretteront que la collection Eaglemoss se concentre avant tout sur les héros les plus connus de l'univers Dc (ce qui est logique), voici venir un album qui échappe à cette règle, tout en se révélant vraiment d'excellente facture. Shazam!
Quand il s'agit de redorer le blason d'un personnage tombé dans l'oubli, ou d'appliquer une patine de coolitude sur un héros assez ringard, Geoff Johns est l'homme qu'il faut au bon moment. Après Aquaman tout récemment, cette fois c'est Shazam qui bénéficie du lifting du Sieur Johns, pour le plus grand plaisir des lecteurs nouveaux ou anciens. Exit le super-héros en pyjama rouge, Superman aux couleurs et origines différentes, place à un personnage attachant, puissant mais innocent, un colosse naif et attendrissant, qui a tout à découvrir de ses pouvoirs, mais aussi de la vie. Car derrière l'identité de Shazam se cache en fait un enfant, un ado orphelin qui a passé sa jeunesse d'une famille d'acceuil à une autre, et qui finit enfin par se trouver de la manière le plus improbable, et par la meme occasion accède au titre de justicier protégé par la magie, en un éclair. Un simple mot suffit, un enchantement qui permet à Billy Batson d'endosser la cape de Shazam, mais qui lui apporte ausi vite un paquet d'ennuis embarrassants, et un ennemi mortel qui n'aura de cesse de l'éliminer. Une genèse narrée sur les pages de Justice League Saga, Chez Urban Comics pour la Vf, et en tant que récits complémentaires (back-up) aux numéros mensuels de la Justice League, en Vo. Puis proposé en librairie, avant que la collection Eaglemoss ne rebondisse sur le personnage, et en propose une version abordable et conseillée.

Vous auriez tort de vous en priver, d'autant plus qu'il s'agit en fait d'une porte d'entrée sympathique sur le monde des héros costumés de Dc. Une vague d'enlèvements survient, où les victimes se retrouvent nez à nez avec un vieil homme sans comprendre pourquoi, ni le sens de ses paroles (Shazam). Le jeune Billy traverse aussi cette épreuve, lors d'un banal trajet dans le métro. Récemment adopté par une nouvelle famille aimante et confronté à un groupe de ses semblables, qui l'ont fraternellement acceuilli, Billy a tout de même bien du mal à canaliser son caractère fugueux et fougueux. Mais une grande part de bien réside en lui, une part de bien qui le rend digne d'être celui que le dernier représentant du conseil des sorciers choisira pour incarner le nouveau Shazam. Une fonction nouvelle, des pouvoirs inédits, qui ont de quoi faire tourner la tête d'un adolescent, qui réagit et se comporte en conséquence. L'occasion de scènes cocasses, de belles trouvailles signées Johns, qui humanisent fortement le personnage et le rendent si touchant. Hélas, Black Adam, le pendant maléfique et impitoyable de Shazam est lui aussi de retour, et il a l'intention de ramener les sept péchés capitaux sur Terre, et d'absorber le pouvoir de Shazam, quitte à trucider Billy Batson. Le tout est mis en image avec un soin du détail, un talent réaliste assez bluffant, par un Gary Frank des grands soirs. Le merveileux fonctionne pleinement, avec cette couche de candeur qui apparaît parfois encore dans les comics modernes (comme dans le très bon Superior De Mark Millar) si sombres et torturés, et offrent de belles bouffées d'oxygène salutaires qui font un bien fou à tout le monde. Si vous ne connaissez pas du tout Shazam et que vous avez l'opportunité de dénicher ce volume de la collection Eaglemos, n'hésitez pas une seconde. 


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HAIL HYDRA : LES DEUX VISAGES D'HYDRA (ALL-NEW ALL-DIFFERENT IRON MAN & THE AVENGERS 8)

Au départ, l'organisation criminelle (nous dirons aujourd'hui, terroriste) Hydra était une allégorie évidente des pouvoirs mafieux. Le symbole, l'hydre (la pieuvre et ses tentacules) est éloquent. Une sorte de contre pouvoir, motivé par une idéologie, certes déviée, mais existante. Son but était la domination du monde (et pas son extermination), avec l'ajout dans son Adn d'un discours fascisant, voire lorgnant ouvertement sur le post nazisme, puisque le Baron Von Strucker, à la tête de l'Hydra originel, est un des cinglés se revendiquant de cette mouvance "brune". Je parle de système mafieux, car outre la volonté de se substituer aux pouvoirs en place (la mafia constitue un pouvoir parallèle qui parasite l'Etat, où le remplace là où il n'existe pas ou est défaillant), le silence et le secret favorisent son ascension, et à chaque défaite, chaque "tête coupée", très vite il en repousse d'autres, encore plus nombreuses, rendant bien ardue l'éradication de l'organisation, qui prospère sur les contradictions de notre société, ses échecs, pour en proposer une vision radicale où ne subsistent que les (prétendus) plus forts, plus purs.
Avec la montée en puissance de la menace terroriste de matrice islamiste sur le sol américain, l'Hydra semble avoir abordé, sous la plume de Nick Spencer, un virage éloquent. Pour être exacte, il semblerait qu'il y ait deux directions différentes à ce jour. Une (avec le Baron Zemo en tant que leader potentiel) qui se revendique de l'Hydra classique, des origines. Avec une idéologie (aussi répugnante soit-elle), un plan élaboré de longue date pour accéder au pouvoir. Une autre, celle que le Crâne Rouge parvient à embrigader rapidement, pousse sur les décombres d'une Amérique sans plus la moindre idéologie, justement. Cette Hydra là ressemble fort à l'Etat Islamique, par exemple, et pousse rapidement ses recrues à l'attentat suicide, à l'acte nihiliste, qui en soi ne peut amener l'organisation à se subsistuer aux pouvoirs en place, mais uniquement à générer un chaos total, une sorte de poussée irréfrénable vers la mort, le néant, comme punition divine à la corruption environnante. Quelques dialogues extraits des épisodes de Captain America : Sam Wilson publiés en Vf ce mois de janvier, dans All-New Iron Man & the Avengers, sont lumineux à ce sujet.


C'est Captain America qui s'exprime : Cette nouvelle Hydra, c'est autre chose, comme un virus qui attaque notre système, qui veut pervertir notre mode de vie. L'Hydra fait passer un message d'intolérance et de cruauté, à une génération perdue de jeunes gens, cherchant un sens à leur vie, n'importe lequel. L'Hydra encourage la violence et la sauvagerie, au détriment de la loi. L'Hydra est un affront direct à nos valeurs, en tant que peuple.
Cette nouvelle forme de terrorisme semble donc plus intéressée par la destruction de ce qui constitue notre mode de vie, et nos valeurs, que par la prise de pouvoir en elle-même, et l'accession à un certain degré de l'exercice de celui-ci : le nihilisme, donc.

Dans le première épisode de la nouvelle série Captain America : Steve Rogers, celui qui a fait couler tant d'encre en raison de la terrible révélation finale, nous avons un jeune terroriste qui décide de se faire sauter à bord d'un train. Le héros ne parviendra pas à l'arrêter, même s'il empêchera la mort de nombreuses victimes. Le parcours de ce terroriste, la manière dont il a été recruté, embrigadé, cela fait immanquablement penser à ce qui se produit en ce moment avec l'État islamiste. Certes vous avons encore un discours racial sur le fond, avec une suprématie blanche, et des propos haineux lorgnant vers le nazisme et l'eugénisme, mais à la différence d'auparavant, il n'y a pas de plan longuement mûri, de prise de pouvoir dans l'ombre, et de machination visant à un objectif complexe. Il y a volonté de faire le plus de victimes, et de semer le chaos, sans que le geste puisse avoir une portée immédiate en termes d'action politique. C'est de la violence et de la sauvagerie, une nouvelle forme d'Hydra. Intéressant donc, de voir cette dernière page -vous le savez aujourd'hui- où Steve Rogers prononce les mots fatidiques (Heil Hydra) tentant de faire ainsi croire au lecteur qu'il est depuis toujours dans le giron de cette organisation. Si c'était le cas, il s'agirait là bien sûr de la vieille Hydra, celle qui s'oppose à cette nouvelle version nihiliste, et qui repose sur un système d'idéologies, pervers et détestable, mais idéologiquement défini. C'est en cela aussi que cette révélation, ce cliffhanger, a autant choqué; car à une époque où le fondamentalisme islamique représente désormais le pire spectre possible pour l'Amérique et nos sociétés occidentales, avec ces attentats aveugles qui nous frappent sans autre but que de semer mort et destruction immédiate, voir Captain America rallier la cause des terroristes est le tabou ultime qui ne pouvait être franchi dans les comics moderne. Et si finalement c'était Steve Rogers qui était chargé de redonner du sens à l'Hydra? Le sens étant le seul recours existant aujourd'hui contre le nihilisme absolu?
Ne perdez surtout pas ces épisodes qui vont marqué l'histoire de Captain america et des comics Marvel, et embarquez avec Nick Spencer, Paul Renaud, Jesus Saiz, et les autres auteurs qui vous réservent bien des surprises...




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