DEAD INSIDE TOME 1 : CRIME CARCERAL CHEZ DELCOURT

L'inspectrice Linda Caruso n'a pas la vie dont elle pouvait rêver. Trop de somnifères, d'alcool, un ancien petit ami qui vient lui annoncer son futur mariage... bref une existence qui ne ressemble pas à un succès franc. Reste la carrière, et à l'occasion de cette histoire, une enquête qui lui est confiée par la lieutenant Payton. La voici chargée de rendre compte d'un double meurtre dans une prison, en tant que chargée des crimes carcéraux du Comté de Mariposa. En fait, il s'agit d'un meurtre au couteau, et l'assassin s'est ensuite pendu. Assez curieusement, le tueur est bien moins impressionnant physiquement que sa victime, et on a du mal à imaginer vraiment la scène... Arthur McCoyne a été lardé au ventre, et Donald Gaffney, son bourreau, est vite évacué à la morgue avant qu'une vraie enquête sérieuse puisse être mise en place, malgré les doutes qui assaillent rapidement Linda, aiguillée par un des gardiens de la prison. Pas de bol, les caméras de sécurité sont hors service, les coupes budgétaires en Amérique (mais chez nous est-ce différent?) ne permettant pas à l'administration de faire son job correctement. Reste quelques images qui montrent Gaffney ingurgiter à la sauvette un litre de lait, avant son geste violent. Faute d'autopsie crédible autorisée, comment démontrer qu'il aurait pu se droguer, et commettre son acte ensuite? Linda comprend que sa mission avorte avant d'atteindre son terme, et noie sa déception dans l'alcool, jusqu'à ce qu'une amie la mette sur une piste décisive. Et si le secret de ce double meurtre énigmatique se trouvait encore dans l'estomac de l'assassin? Et ce qui s'y trouve risque fort de poser bien des questions!


Le point de départ de Dead Inside ressemble à ce qu'on peut imaginer de plus banal. Une enquête, un meurtre, un suicide. Des flics. Des pressions pour que toute la vérité n'éclate pas. John Arcudi n'a rien inventé. Mais voilà, page après page, on suit au corps le travail de Linda, on s'y attache, on découvre combien il n'est pas facile d'aller gratter sous les apparences, on plonge dans la crasse et la violence d'un univers carcéral qui suinte le rejet et l'aliénation. Et on avance, avec le récit, qui prend la tangente, invente, rebondit. Et surprend, et lentement s'enroule autour des tripes.
Pour ce genre de performance, il fallait un dessinateur capable de donner du coffre à ces intentions. De plonger dans la noirceur pour en explorer les recoins, nous les faire ressentir. Toni Fejzula est de ceux-là, et il y parvient avec la classe qu'on avait déjà apprécié dans Veil, toujours chez Delcourt. Ici encore le travail sur les ombres, les formes, la science de l'emploi des tons sombres pour créer une atmosphère, révèlent un artiste qui a décidément bien du talent, et surtout une touche personnelle identifiable, qui emprunte aussi bien à Mignola qu'aux fumetti classiques italiens (de la bonelli). Fejzula est en train de prouver mois après mois qu'il est encore loin d'avoir la reconnaissance qu'il mérite, et chaque planche est ici une étape vers la lumière, qui chemine pourtant à travers les ténèbres. Pas seulement chromatiques, mais aussi spirituelles, humaines, ici mises en images avec une justesse clinique. Avec une mise en couleurs de André May, respectueuse et nuancée, qui ajoute encore au cachet de l'ensemble. Une bonne pioche chez Delcourt, que ce Dead Inside, qu'on recommande fortement à celles et ceux qui ont envie d'une bonne lecture poisseuse en cette fin d'année.



Attention : le 25 novembre Toni Fejzula sera avec nous en dédicace à Nice, chez Alfa BD. Vous pourrez venir à cette occasion découvrir cet artiste, et obtenir votre exemplaire dédicacé (avec fast sketch si acheté chez Alfa Bd). Si vous ne pouvez pas venir, mais que cela vous intéresse, vous pouvez tout simplement nous solliciter avant. Pour le prix de l'album 16,95 euros + 5 euros de frais de port, nous pouvons vous envoyer votre Dead Inside Tome 1 dédicacé par l'artiste. 


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COMIC CON ET CONVENTIONS GEEK POP CULTURE : DES SUPERMARCHÉS SUPER-HEROIQUES?

Si vous lisez ces lignes, vous faites peut-être partie de celles et ceux qui fréquentent régulièrement les salons consacrés aux comics, à la culture geek et pop, au sens large du terme. Tous ces univers ne seraient pas ce qu'ils sont, n'existeraient pas, si à la base il n'y avait pas eu des artistes pour faire naître et prospérer ces personnage, ces séries ou ces films, que nous aimons tant. Pour autant, vous l'aurez remarqué, dans la plupart des cas, ces mêmes artistes (en majorité des dessinateurs, parfois des scénaristes ou éditeurs) se retrouvent cantonnés à un rôle secondaire : on leur réserve une artist alley pas toujours bien mise en valeur (en cela le Comic-Con de Paris fait des merveilles -c'est ironique je précise- et devrait s'inspirer de la PCE bien plus respectueuse), et ce sont les produits dérivés qui sont les stars du salon, qui aujourd'hui créent animation et attrait principal pour le grand public. C'est ainsi que vous pouvez voir des hordes de cosplayeurs (attention, je n'ai rien contre le cosplay, certains sont de véritables petits génies auteurs de créations fort originales, et ils font littéralement vivre notre passion) mais je trouve vraiment dommage de voir défiler encore et encore la même Harley Quinn ou Batgirl, passer devant la table de dessinateurs qui illustrent les aventures de ces mêmes personnages, sans daigner jeter un coup d'œil ou dialoguer. 
Qui est le plus important? Celui qui revêt l'apparence d'un héros de papier, ou celui qui fait vivre ce héros sur le papier? La figurine articulée d'un personnage, où les aventures au format Bd de ce même personnage? De même, la plupart du temps, ce genre de salon geek pop vous permet surtout de faire vos courses, à des prix d'ailleurs souvent supérieurs à ce que vous trouvez chaque jour sur Amazon ou en supermarché, comme s'il s'agissait d'une représentation géante de tout ce qui existe dans un espace commercial. C'est la foire aux funko pop, statuettes, T-shirts, mais derrière tout cela, qui sont vraiment les acheteurs de comics? Le marché est-il réellement en pleine expansion? Les gens se précipitent t-il sur ces bandes dessinées super-héroïques? N'importe qui fréquentant ces rendez-vous se rend bien compte que non! La troupe des connaisseurs évidemment, mais les autres, ce qui par exemple dépensent en tant que touristes occasionnels les 22 euros demandés pour une seule journée à la Comic Con (trop cher les amis)... c'est un chiffre énorme pour finalement entrer dans une sorte d'hypermarché de la culture pop, où l'essentiel ne se dévoile pas facilement, car pas assez mis en valeur.


Le prochain weekend, ce sera par exemple Lucca comics and games, le principal rendez-vous en Italie. Là encore les artistes vont être frustrés; ils se sont retrouvés cantonnés dans un espace plus petit que d'habitude, la Piazza del Giglio, de surcroît en travaux. L'impression est véritablement qu'ils ne comptent plus pour grand-chose dans cette grande messe des comics. D'ailleurs certains ont dû se plaindre sur Facebook pour obtenir une accréditation qui leur avait été refusé. Attention, je parle là d'auteurs importants, qui par exemple dessinent Daredevil pour Marvel (Matteo Buffagni a été dans un premier temps refoulé par l'organisation), pas du premier venu! 
Les comics aujourd'hui sont entrés dans les mœurs, le grand public est habitué à les identifier, les reconnaître, mais il est inexorablement poussé à le faire à travers des médias ou des modes de consommation éloignés de ce que sont vraiment ces personnages. Si le film des Avengers fait des millions d'entrées, si les produits dérivés s'arrachent à la Comic Con ou au Heros festival, les albums publiés chez Panini  obtiennent eux des scores tragiquement plus modestes. Le problème, c'est aussi bien entendu que ces salons existent désormais avant tout pour se faire le maximum d'argent, ce qui explique pourquoi ils continuent de proliférer comme des champignons. Chaque ville d'importance, grande ou moyenne, ayant désormais son propre rendez-vous, c'est une logique économique, un marché en plein essor, une vache à lait qui s'agit de traire jusqu'à la dernière goutte, tant quelle sera productive. Certes on s'y amuse parfois, certes de belles rencontres se font, mais le prix des billets continue d'augmenter et l'importance qui est réservée aux comics, aux dessinateurs et artistes, à ceux qui sont le fondement de notre passion, est à des années lumières de ce que devrait être leur véritable importance, leur rôle central dans tout ce système.
La superficialité pousse à la consommation. L'art n'est qu'une excuse pour engranger un peu d'argent, et surfer sur la vibe de ce début de siècle. Plus que jamais, il faudrait plus de salons où ce sont les artistes qui sont mis en valeur, où la distraction des produits et activités dérivés ne soient pas omniprésente au point de phagocyter la véritable nature de notre passion commune. Modestement, nous continuerons, à notre petit niveau, à défendre cette idée, cet objectif, et à vous proposer de petits plateaux comics tout au long de l'année, dans différentes manifestations spécialisées, et bien entendu, au Printemps des comics 2018, en mai, à Nice. Où là vous ne trouverez que des artistes, des comics, des lecteurs. Tous ensemble, tout simplement.



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WOLVERINE ENNEMI D'ETAT : UN CLASSIQUE DE MILLAR / ROMITA Jr

Retour ce dimanche sur une histoire qui fut très en vogue il y a quelques années, et reste un des classiques modernes du personnage, le Wolverine de Mark Millar, embrigadé et manipulé par la Main, et déchaîné contre tous les super héros et le Shield réunis. Du lourd! La saga "Ennemi d'Etat" comprend douze épisodes et pousse le mutant griffu dans les derniers retranchements de son coté animalesque et sanguinaire. Logan se rend au Japon à la demande d'Ichiro, un cousin de son grand amour défunt. Son petit garçon a été enlevé, et la police locale ne semble pas en mesure d'en retrouver la trace. Rien d'étonnant à cela, car le rapt est en réalité une ruse perfide orchestrée par la Main, et son nouveau leader invincible, un certain Gorgon, pour attirer Wolverine dans ses filets. Le plan est dramatiquement efficace : tuer le X-Man puis le ressusciter. Mais non sans l'avoir conditionné au préalable, pour qu'il se retourne contre ses amis et collègues, pour en faire une arme impitoyable et corvéable à merci, capable des pires exactions, sur commande. C'est ainsi que le mutant investit l'héliporteur du Shield, qu'il transforme en boucherie, avant de le faire se crasher. Personne n'échappe à sa version sauvage et au lavage de cerveau qu'on lui a infligé. Seule Elektra, la ninja ancienne petite amie de Mat Murdock, pourrait bien lui faire entendre raison. Elle aussi est passée par une épreuve similaire. Elle aussi est morte puis revenue grâce à la Main, dans des conditions assez similaires. Il va falloir agir vite car les vies de Daredevil, des Fantastiques, de Nick Fury, des X-Men, sont sérieusement menacées par cet ancien allié assoiffé de sang. 

Bien entendu, le simple nom de la seconde partie de cet album "Agent of Shield", en dit long sur la durée du conditionnement subi par Wolverine. Qui se reprend donc assez vite, et se range aux cotés de ceux qu'il était censé détruire, pour aller faire la fête à des ... dizaines de milliers de membres de la Main?? Fermons les yeux sur le carnage XXL et sur notre mutant immortel (ou presque, en fait...) qui se rend au Japon à dos de sentinelle. C'est la magie des comic-books, et Millar aime bien se faire plaisir en grossissant le trait. Cotés dessins, réjouissez vous (ou pas), c'est le célèbre Romita Jr qui est mis à contribution. Je vois d'ici les visages déconfis ou les mines en extase... Romita qui commence probablement, sur Ennemi d'Etat, son évolution vers l'épure, avec un trait plus grossier et caricatural, mais encore plus dynamique et fonctionnel. Il reste capable de superbes planches (Wolvie qui embroche un gros requin avec ses griffes) mais tend aussi à bâcler nombre de visages et d'anatomies, et sacrifie les scènes de combat sur l'autel du gore, au détriment d'une lisibilité plastique qui fait parfois vraiment défaut. Millar est très divertissant sur cette saga, même s'il en oublie aussi probablement d'être caustique et profond dans son scénario. Qu'à cela ne tienne, cet album est réservé aux amateurs de combats sanglants, de Wolverine savage and gritty, avec des ninjas partout et de l'action à foison. Pour ceux là, cette parution est vraiment indispensable! (Chez Panini, collection Marvel Select)



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THOR RAGNAROK LA REVIEW : MARVEL STUDIOS FONCE DROIT VERS SA PROPRE APOCALYPSE?

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Aujourd'hui c'est Clément Bastianini qui se colle à la review du film Ragnarok. Pour notre part, nous n'avons pas encore vu le film, pour cause de vacances bien méritées. Du coup on vous laisse avec l'avis d'expert de notre chroniqueur du jour, qui semble avoir vraiment du mal avec ce long métrage. D'accord ou pas, on attend vos avis, après ce bilan très incisif du travail des Marvel Studios.

Et voilà, avec Thor Ragnarok, Marvel Studios n'a plus qu'à attendre l'année prochaine avant de sortir les prochains épisodes de son univers partagé, qui fêtera par ailleurs ses dix ans (déjà) en 2018. Il faudra sans doute attendre la sortie des deux derniers Avengers pour faire un constat global de tout ce qu'à produit Marvel Studios jusqu'ici, mais nous pouvons tout de même dresser un récapitulatif plutôt inquiétant.
On l'entend de plus en plus souvent, le « grand public » en a marre des films de super-héros qui envahiraient a priori beaucoup trop le grand écran depuis bientôt deux décennies. Pour ne rien arranger à ça, Marvel Studios continue de nous vendre des produits commerciaux plus ou moins corrects. Alors là on va me dire « mais c'est fait pour être fun, faut pas se prendre la tête, faut déposer son cerveau et profiter du divertissement ». A cela je répondrais que tous les films de super-héros, bien qu'ils soient tous des produits commerciaux (on est à hollywood quand même) peuvent être intelligents, bien construits tout en étant divertissants, et tout ceci, sans avoir besoin de renoncer au cerveau pendant deux heures. Et il y en a des films de super-héros qui ont formidablement rempli cette tâche, on peut citer (encore une fois) les deux premiers Spider-Man de Sam Raimi, X-Men 2 de Bryan Singer, mais surtout la trilogie The Dark Knight de Chris Nolan, Watchmen de Zack Snyder, sans oublier les récents Iron Man de Jon Favreau, Captain America The Winter Soldier des frères Russo et surtout Logan de James Mangold (ça en fait des exemples).
Mais Marvel Studios, dont je viens pourtant de citer deux films, persiste dans sa production excessive de comédies destinées à plaire, comme des bonbons, à un plus grand nombre possible (comprenez ici, on s'en fout du style, de la vision d'un auteur, des enjeux où de cette simple idée d'adapter un comics).

Parce que, quand on prend les seize films de Marvel Studios, on en compte pas moins de douze (oui, je me suis amusé à les compter) qui ne sont au final des comédies, dont trois qui sont sortis cette année (vous suivez toujours ?). En soit, on ne peut pas cracher sur un peu d'humour, quand il est bien placé (comme dans Civil War ) il est toujours agréable, et encore faut-il qu'il soit bien trouvé. Le problème étant que chez Marvel, même le personnage le moins drôle se doit de faire des blagues, et au hasard, le personnage auquel je pense est un certain Dieu du tonnerre rustre et assez barbare.
Je vais désamorcer un reproche qu'on pourrait faire à ma critique : oui, c'est vrai, les trailers nous ont vendus un film qui se voudrait léger, drôle, coloré et plutôt orienté dans une ambiance arcade année 80. Sauf que de base, je ne pense pas que Thor soit le meilleur personnage sur lequel ces formules pourraient s'appliquer. On peut faire notre deuil du guerrier brutale amoureux d'aventures mythiques et fantastiques, Thor version Chris Hemsworth n'a définitivement jamais su se trouver, et n'a jamais su trouver son public. La seule solution est donc de le faire devenir l'opposé de ce qu'il, un personnage comique (parce que, l'univers cinématographique Marvel en manquait). Et de base je désapprouve ce parti pris. Et si ça ne me plaisait pas dans Avengers Age of Ultron, un Thor comique poussé à l'extrême me plaît encore moins. De plus, en terme d'évolution globale du personnage en regardant l'ensemble de ses apparitions, le rendre drôle est plus ou moins cohérent.
Mais bon, acceptons le concept, Thor est drôle donc, et il doit affronter Hela, déesse de la Mort pour éviter le Ragnarok. Grosse ambiance à l'horizon donc !
Mon plus gros problème avec Thor Ragnarok est finalement un ras-le-bol glorbal de la formule Marvel Studios (mais vous l'aviez déjà deviner non ?).  Le pari d'un film WTF ne me dérange pas, encore faudrait-il que Marvel ne le fasse pas dans TOUS ses films. Parce que cette année on a eu quoi, Les Gardiens de La Galaxie Vol.2 qui ne se prenait pas au sérieux, de même pour un Spider-Man Homecoming qui n'avait finalement pas grand chose à proposer, et Ragnarok qui privilégie aussi la déconne plutôt que ses enjeux. Alors forcément, les blagues sont plutôt bonnes (et il vaudrait mieux qu'elles le soient, et encore, je trouve les premiers retours trèèès gentils quant à l'humour, franchement prévisible, et parfois un peu lourd), le problème étant qu'elles nuisent totalement à toute tension possible dans le film. Un personnage secondaire meurt (non je ne spoil rien), peu importe, on enchaîne sur une blague. Un personnage fait un choix crucial et irréversible pour lui, et bien ce choix s’effectuera sur une blague bien lourde. Le film désamorce tout ce qui pourrait être tragique pour les personnages, au point de se dire que, tout ce qui arrivera dans le film n'est pas bien grave, du moment qu'on peut en rigoler. Un comble pour un film traitant du Ragnarok (j'espère qu'on gardera cette mentalité lorsque la fin du monde, la vraie, arrivera chez nous). En tout cas ça a de quoi nous inquiéter pour la suite (parce que, la prochaine histoire à raconter, c'est quand même le combat contre Thanos).

En soit Ragnarok  n'est pas un mauvais film en plus, la réalisation est correcte, on peut même y trouver quelques beaux plans (Héla contre les Valkyries déjà vu dans les bandes-annonces) et une direction des plus sympathiques, s'inspirant plus que jamais des dessins de Jack Kirby (la planète Sakaar est vraiment une orgie remplie de plusieurs créations inspirée du légendaire dessinateur de comics), ce qui rend le MCU un peu plus riche visuellement parlant. De plus, le film bénéficie des prestations solides de son casting, Cate Blanchett en tête incarnant une Hela impériale, se plaçant en tête d'un des meilleurs méchants du genre (bon, son plan est basique et rempli d'incohérences, mais Blanchett le joue assez bien pour que ça soit anecdotique, et puis en plus, il n'y pas d'enjeux donc, who cares ?). Elle peut compter sur un Jeff Goldblum en roue libre incarnant un personnage assez délirant, et une Tessa Thompson plus que correcte en Valkyrie. On retrouve à côté d'eux notre cher Chris Hemsworth en Thor comique, qui, du coup, rempli son job à la perfection, et à qui on doit quelques improvisations bien sympathiques, quand il ne montre pas ses abdos (comprenez, notre bon Chris n'a jamais été extraordinaire, mais il devient assez bon quand il exploite son potentiel comique. Ce n'est pas ce que je voulais voir sur Thor mais bon, on fait avec ce qu'on a), mais aussi Tom Hiddleston et Mark Ruffalo, très en retrait derrière tous ces personnages. Un petit mot sur Hulk d'ailleurs : le comique sert et nuit également au personnage. On a le droit à quelques scènes bien trouvées avec le Géant de Jade, mais quand il s'agit d'explorer la nature complexe de la dualité Banner/Hulk, alors là, on atteint une déception profonde. Évitons les spoilers mais encore une fois, voyez ici le manque d'enjeux au profit de l'humour.
La prochaine grande étape, c'est donc Avengers Infinity War. Ce qui est inquiétant, c'est le fait que Marvel Studios a peut-être détruit lui-même son genre avec toutes ces sucreries comiques auxquelles nous avons habitués jusque-là. Le manque de sérieux a ôté toute crédibilité au genre super-héroïques, désormais, tout le monde ne s'attend qu'à voir des films vides, sans âmes, et sur lesquelles il n'y a au final pas grand chose à dire, si ce n'est constater le gâchis d'un potentiel inexploité, et qui prend une place beaucoup trop grande et non méritée sur le devant de la scène. On peut toujours espérer le meilleur (un Infinity War aux enjeux maintenus et à la hauteur de l'attente), mais aussi préparer le pire (voir qu'il s'agit d'une blague de plus, et accepter le fait que nous voyons des histoires qui n'ont aucun intérêt d'être racontées). Si en début d'année, Logan pouvait annoncer une certaine rédemption pour le genre, Thor Ragnarok est peut-être le signe de son apocalypse (et attendez, on a pas encore vu Justice League...).



Un très grand merci à Clément Bastianini pour cette review argumentée et fort intéressante. Vraiment un excellent travail, que l'on partage ou pas cette vision des faits (en grande partie je la partage).
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OLDIES : IRON MAN #182 TONY STARK AU FOND DU GOUFFRE

Nous revenons aujourd'hui sur l'alcoolisme de Tony Stark et sa période de déchéance complète, au début des années 80. Le numéro 182 de la série régulière est non seulement exemplaire pour comprendre ce qui s'est produit alors, mais c'est aussi une des histoires les plus poignantes et intéressante que Marvel a présenté durant cette décennie.

Une tempête de neige s'est abattue sur la ville de New York, alors que les habitants s'apprêtent à fêter Noël. Stark n'a plus aucun endroit où se réfugier, son concurrent et ennemi Stane est parvenu à faire geler ses comptes en banque, à saisir ses biens et ses propriétés. L'ancien milliardaire est donc contraint de vivre dans la rue, sans aucun endroit où se réchauffer, désormais dominé par l'alcool. Il conserve un seul point d'appui bien fragile, une jeune sans abri du nom de Gretl, qui est enceinte et sur le point d'accoucher. Mais même cette relation est en danger, les deux s'étant disputé, Stark erre sous la neige, à la recherche de sa nouvelle amie, et pour oublier ses déboires il dépense ses derniers dollars pour une bouteille de bourbon, qui pourrait bien être la dernière consommation avant la mort, dans l'indifférence générale et le froid glacial.

Le moment fort de ce récit est justement l'accouchement de Gretl, alors que Tony est accroché à sa bouteille. La jeune fille meurt en couche tout en demandant à Stark de protéger son enfant. Celui-ci reste un héros, même au fond du trou. Il va protéger le nouveau-né à l'intérieur de sa veste et passer la nuit ainsi, à attendre les secours ou la mort. Au petit matin Gretl est donc décédée, son enfant miraculeusement sauvé, et Stark hospitalisé pour une cirrhose et de nombreuses engelures. Mais cette expérience extrême va lui faire prendre conscience de l'importance de toute vie humaine, y comprit la sienne, et de la nécessité d'aller demander de l'aide, plutôt que de feindre que tout va bien est-ce qu'il est encore possible de contrôler l'incontrôlable.
Et dans tout cela où se trouve son meilleur ami, James Rhodes, qui a repris l'armure d'Iron Man? Et bien il était transporté momentanément sur la planète du Beyonder pour participer aux Guerres Secrètes. À peine est-il de retour à New York qu'il se rend au chevet de Tony à l'hôpital, mais il est clair que sa personnalité commence elle aussi à flancher... il est de plus en plus accro à l'armure et craint fortement de devoir un jour la rendre à son propriétaire. Ajoutez à cela le sentiment de culpabilité de n'avoir pas été présent dans les moment de besoin de Toni... 
C'est vraiment un petit chef-d'œuvre de la part de Denny O'Neil, une histoire qui doit être lue encore et encore. Luke McDonnell signe son meilleur travail chez Marvel. Le dessin renforce l'empathie du lecteur envers le héros et offre une vision poignante et réellement tragique de sa descente aux enfers. Impossible de parler ou évoquer la dépendance à l'alcool de Tony Stark, sans connaître ces moments forts sur le bout des doigts.



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BLACK HAMMER TOME 1 : LES SUPER-HEROS BUCOLIQUES DE JEFF LEMIRE

Conséquences au combien méritées d'un talent et d'une prolixité remarquables, Jeff Lemire est actuellement partout. Chez Marvel Comics, chez DC Comics, chez Image... et désormais chez Dark Horse, avec une nouvelle série qui débarque enfin en France. Il s'agit de Black Hammer, qui met en scène un groupe de personnages à super-pouvoirs, qui a dû prendre par la force des choses une retraite de toutes activités héroïques il y a une dizaine d'années de cela. Depuis ils vivent tous ensemble dans une ferme, dans un patelin paumé des États-Unis. Il est évident que ces personnages sont tous plus ou moins des caricatures de héros que nous connaissons bien... nous trouvons ainsi un avatar de Superman, une sorte de Martian Manhunter -croisé avec une version loquace et triste de Groot- ou encore un pseudo Adam Strange et une version de Madame Xanadu et de Mary Marvel. Mais finalement les pouvoirs de ces types là, ce qu'ils savent faire, ce qu'ils ont fait, tout cela n'est pas si important; d'ailleurs Lemire ne prend pas le temps, au départ, de nous expliquer pourquoi ils en sont là, pour quelle raison ils ont dû décrocher (une dernière bataille contre l'Anti-Dieu, mais fournie sans mode d'emploi). Il se contente en introduction de nous montrer comment réagissent toutes les individualités, face à une sorte de réclusion bucolique, une vie hors du temps et de la société, passée à traire les vaches où aller boire un café au bar miteux de la ville voisine. Certains le vivent très bien et finalement c'est pour eux une bénédiction, surtout pour le "chef" Abraham Slam (le seul à ne pas avoir de vrais pouvoirs)... les autres par contre ont bien du mal à gérer tout cela, comme par exemple la petite Gail qui se retrouve enfermée dans le corps d'une fillette de 9 ans (là aussi nous n'avons pas les explications immédiatement) et qui n'apprécie pas du tout le nouveau statu quo. Bref c'est du Jeff Lemire, un monde super-héroïque est créé de toutes pièces devant nous, mais le plus important c'est le caractère humain, l'attachement viscéral et honnête aux qualités et défauts des uns et des autres, aux forces, aux attentes et aux rêves, qui permet au lecteur de se plonger dans ce Black Hammer. D'ailleurs certains épisodes s'arrêtent particulièrement sur la destinée, les origines, la personnalité d'un des membres de cette équipe, et ça en est touchant, brillant.


L'hommage au golden age est appuyé, et le contraste est fort entre les super-pouvoirs au repos forcé, et la banalité d'une existence qui ne contemple plus l'extraordinaire, quitte a devoir parfois (et ça en devient hilarant) feindre d'être une famille normale pour ne pas dérouter les visiteurs de passage, lorsque Abraham invite sa dulcinée pour un diner de famille mouvementé. Certes j'adore Jeff Lemire, donc il est possible que je ne sois pas la personne la plus objective du monde, mais nous tenons là une nouvelle série particulièrement sensible et agréable à lire, qui parvient avec ce premier tome à emporter l'adhésion, parce que les personnages sont amenés avec grâce et naturel, et qu'ils possèdent une vraie profondeur mélancolique, voire tragique. Le dessin est confié à Dean Ormston, son trait volontairement caricatural et sale colle bien avec l'ambiance poisseuse du petit village de campagne. Ce spécialiste du label Vertigo a toutefois tenté avec succès de standardiser un poil son style, tout en gardant une empreinte personnelle forte. Parfois certaines scènes nous ramènent à l'époque où ces héros étaient actifs, dans un pur esprit Golden Age qui ajoute encore à la saveur de l'ensemble. Lemire avait ce projet dans ses cartons depuis la grande époque de Essex County (son grand chef d'oeuvre) et il attendait le moment opportun où il pourrait développer cette histoire qui est l'héritière de son amour pour le genre, mais infusée à sa sauce. Une sacrée cuisine, régalez-vous!



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Sweet Tooth, série magnifique signée Jeff Lemire

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REBORN : LA NOUVELLE SERIE DE MARK MILLAR ET GREG CAPULLO CHEZ PANINI

Allez, on ne me la fait pas. Je sais bien que vous faites partie de ceux qui attendaient avec impatience la sortie de la série de Mark Millar et Greg Capullo, chez Panini, intitulée Reborn. Nous y voici donc. Millar continue le tour de force de ne travailler qu'avec des artistes d'exception, et son tableau de chasse est impressionnant. Cette fois, place à une aventure qui affronte le thème de la mortalité, de ce qu'il y a après le trépas, et en donne une version pour le moins surprenante. Foin de paradis ou d'enfer, on débarque directement dans un univers de fantasy, avec Reborn! 
Bonnie Black, l'héroïne de l'histoire, est arrivée au terme de son existence. Elle a eu une vie heureuse, s'est mariée, est devenue mère, bref rien d'exceptionnel, si ce n'est l'obtention d'un petit bonheur familial que beaucoup rêveraient d'atteindre. Mais son époux est décédé, et désormais c'est la solitude qui est devenue sa compagne, alors que son corps manifeste des signes d'épuisement terminal, et qu'elle s'endort la nuit avec la boule au ventre, en pensant que cette fois, elle pourrait bien ne plus se réveiller. Sans trop de fioritures, toute cette partie est écrite avec justesse, et c'est crédible et poignant, sans tomber dans le pathos exagéré. Y compris quand arrive l'instant fatal, qui est abordé frontalement et avec la froideur et l'honnêteté athée du scénariste. Si Bonnie ferme les yeux une ultime fois, c'est pour les rouvrir dans un corps jeune et habillée avec une sorte de tenue spatiale super-héroïque, sur le champ de bataille fantasmagorique d'un monde peuplé d'étranges créatures en guerre. Elle y retrouve son père, qui est une sorte de chef guerrier local, et de nombreuses connaissances de son existence précédente. En fait chacun parait avoir reçu ou avoir été subtilement modifié, en fonction de son caractère sur Terre. Ici aussi le mal rode, et l'arrivée de Bonnie, considérée comme la reine/messie tant attendue, tombe à pic pour sauver un royaume qui a grand besoin d'elle face à de sombres adversaires...




Millar fait donc du Millar. Dès le premier épisode l'évidence est claire. On a entre les mains le pitch parfait pour un film à venir, un succès annoncé. Rien de très nouveau, mais c'est la manière de le raconter, la facilité avec laquelle le lecteur est emporté dans le récit, qui fait la différence par rapport aux concurrents. Les révélations et les personnages s'enchaînent selon une perverse logique d'efficacité narrative éprouvée. Alors que Bonnie souhaite retrouver son mari, et que la menace des Terres Noires incombe, le lecteur habitué aux tics narratifs de Millar aura rapidement compris dans quelle direction va évoluer Reborn. Pour autant, on se laisse toujours prendre au jeu. Et on trouve de l'humour intelligent, comme le chat de Bonnie, qui furieux d'avoir été castré durant son existence sur Terre, désire se venger en devenant une créature maléfique qui maîtrise le froid. 
Coté dessin, Capullo, donc. Une référence, une garantie, d'autant plus qu'ici il peut donner sa pleine mesure, avec ce coté rétro années 90 assumé qui plaira à un peu tout le monde, car là l'artiste s'applique, et a droit à une histoire qui ressemble à un coffre à jouets, avec des créatures grotesques, de belle batailles, et du merveilleux à pleines pages. Reborn ressemble donc déjà à un classique moderne, et semble promis à une belle réussite. La Mark Millar touch est un label qui ne trompe pas, le meilleur spécialiste de la livraison d'un univers narratif prêt à l'emploi multimédia, clés en main. Déconseillé pour une thèse universitaire, mais recommandé pour une lecture fluide et agréable pour bien finir la semaine.



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OLDIES : IRON MAN #178 UN TONY STARK ALCOOLIQUE ET LES KIDS AVENGERS

Nous revenons en 1983, avec les aventures oh combien compliquées de Tony Stark.
A l'époque le milliardaire a tout perdu. Obadiah Stane est parvenu à lui voler ses entreprises, son existence, s'appuyant notamment sur sa grande faiblesse, une dépendance à l'alcool qui trouve ses origines dans l'histoire familiale et un rythme de vie trop stressant. Tony est à la rue, au sens propre, et il a établi demeure dans des cartons de fortune, avec comme seuls amis des sdf de passage.
Dans le numéro 178 de la série régulière, les lecteurs retrouvent donc une épave, qui est encore loin d'avoir touché le fond! En fait, Stark se voit proposer un étrange pari par un policier dont le père était lui aussi alcoolique. Il lui offre un don de 50 dollars (une fortune pour un sdf) contre la force de volonté de résister douze heures sans boire, de se représenter à minuit sans avoir touché la bouteille.
Durant une douzaine de pages, Tony va fatalement devoir résister, essuyer de cruelles remarques d'anciens amis, qui essaient pourtant de lui rendre service. Mais un toxicomane, souvent, ne veut entendre que ce qu'il souhaite. De bonnes pages touchantes de Denny O'Neill, avec le dessin basique mais efficace et incisif de Luke Mc Donnell.
Mais la partie la plus étonnante de ce numéro est publiée juste avant. Dans le cadre du mois des "assistant editors" qui prennent le pouvoir, Bob Harras met en scène un groupe de gamins du quartier, qui influencés par les histoires des Avengers, publiées au format comic-books, essaient d'aider les forces de l'ordre dans leurs missions.
C'est ainsi qu'ils se costument (sommairement...) et ont comme ennemi le petit voyou du quartier, qui essaie de repeindre les voitures à coups de bombe acrylique. Avengers Assembled! Seulement voilà, quand les kids excluent le Iron Man wanabee de leurs rangs c'est parce que dans les comics il en est ainsi! (Tony est devenu alcoolique, on vient de le dire). Mine de rien, on donne dans la meta bande-dessinée!
Plus fort encore, le gamin exclu s'en va s'accrocher à une bouteille (de coca cola) et son rôle en tant que Iron Man des bacs à sable est usurpé par le voyou à la peinture, qui va tenter de ruiner la bonne réputation des petits héros.
Tout ira bien qui finira bien, avec des micro rebondissements qui jouent habilement sur les codes en vigueur dans les comics des "grands", et qui font de cette histoire récréative un truc inédit et rafraîchissant. Ceci en pleine période tragique pour Iron Man, ou Stark, pour être précis.
On regrettera juste que Mc Donnell ne se soit pas foulé pour les dessins, mais bon, ça reste une vraie bonne parenthèse, qui mérite le coup d'oeil. Au passage ceci est à relire dans le volume 11 de la collection Marvel Epic Collection, au début du pavé nommé Duel of Iron.



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MARVEL ANTHOLOGIE JE SUIS THOR : LE MEILLEUR LE FILS D'ODIN CHEZ PANINI

Je suis Thor! Voilà quelque chose qu'il n'est pas aisé de dire... il faut manquer de modestie, pour se revendiquer de la puissance divine du dieu tonnerre! Tout le monde n'est pas une armoire à glace brandissant un marteau magique, et possédant un regard bleu acier.

À l'occasion de la sortie du film Thor Ragnarok, Panini propose cette anthologie, qui permet de comprendre mieux l'évolution et le parcours fascinant de ce personnage incontournable. Si au départ Stan Lee et Jack Kirby mirent un peu de temps pour exploiter le potentiel de leur créature, qui ressemble davantage, les premiers temps, à la version Marvel d'un quelconque Superman, dès lors qu'ils plongèrent les mains dans le panthéon mythologique d'Asgard, le titre devint incontournable.
Bien entendu les lecteurs pourront relire le numéro 83 de Journey into mystery, où pour la première fois les Américains découvrirent le médecin boiteux Don Blake, qui trouve par hasard un marteau magique lui permettant de devenir le puissant Thor. Face à lui des extraterrestres en pierre, qui envahissent la Terre. Avec le recul l'âge se fait sentir, et ce n'est pas non plus la meilleure performance de Jack Kirby, qui ferait beaucoup mieux par la suite. Mais c'est un témoignage historique très important, tout comme lettre la rencontre entre Thor et Hercule. Stan Lee et Jack Kirby mettent là en scène un combat riche en pathos et en intensité, où fait son apparition également Pluton, le dieu des enfers. Plus tard, ce sera le gigantesque et monstrueux Mangog, qui sera la menace du jour, avec un extraordinaire John Buscema au dessin. Le scénario est lui de Len Wein, qui nous a quittés récemment, et que les amateurs de comics vintage de qualité n'en finiront pas de regretter.

Dans les années 80, c'est au tour de Walter Simonson d'assurer le spectacle, en mettant en scène comme personne le monde fabuleux d'Asgard, lui conférant un prestige inoubliable. Thor voit un de ses pires ennemis succomber (L'Exécuteur) et il affronte le dragon Fing Fang Foom dans un épisode dantesque, constitué de planches uniques, des splash pages du plus bel effet. Inversement, Tom De Falco et Ron Frenz changent la donne et rapprochent Thor de l'influence kyrbienne, avec notamment un épisode qui présente Lorelei, la soeur diabolique de la belle Enchanteresse.
Cette dernière a t-elle déjà mis en pratique ses visées sur Thor? Oui, les deux ont même partagé des ébats qu'on devine intenses, et qui plus est écrits par Warren Ellis et illustrés par un jeune Mike Deodato. Ce sont là les années 90, la couleur et le style ne mentent pas, et Thor peut enfin passer des moments d'extase sous les couvertures.
L'anthologie permet ensuite de voir à quoi ressemble le Thor de John Romita Jr, qui est ma foi une belle surprise graphique. Puis c'est au tour de Straczynski de prendre en main la destinée du personnage, avec des débuts remarquables (mais un poil pompeux), et la présence phénoménale d'un Olivier Coipel qui allait faire encore mieux (comment est-ce possible?) en 2017 avec the Unworthy Thor
On saluera notre grand blond dans la peau d'une grande blonde, avec les débuts du Thor Jane Foster, qui a tant irrité certains lecteurs, mais qui au final est une vraie bonne inspiration de Jason Aaron.
Si après ça vous ne connaissez pas suffisamment Thor, et vous ignorez qui sont Surtur, Dame Sif ou Balder le Brave, vous méritez amplement de finir au royaume des trolls, les amis. 



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Thor Jane Foster, avec Tom Raney




DARK NIGHTS METAL : BATMAN THE DROWNED

Certains des tie-in consacrés à Dark Nights Metal sont plus paresseux que d'autres. C'est le cas de The Drowned, qui se révèle vraiment décevant, écrit en mode automatique. Cette fois, la version maléfique de Batman, issue d'une Terre parallèle du Dark Multiverse, est un croisement entre Aquaman et le Dark Knight. Ses pouvoirs sont artificiels, puisqu'elle a décidé de se soumettre à de terribles expériences et opérations ultra hig tech, pour pouvoir respirer et évoluer sous l'eau, et contrôler l'élément liquide. Comment ça j'ai dit "elle"? Oui, il s'agit de Bryce Wayne (originalité quand tu nous tiens...), qui se désespère d'avoir perdu son amour, Sylvester Kyle (originalité, bis repetita). En gros, Dan Abnett inverse le genre des personnages, raconte une origin story poussive à base de "des morts, encore des morts, tout le monde sera noyé", et le lecteur devrait s'en satisfaire.
Cet Evil Batman là à trucidé Mera, à savoir Aquawoman, sur son propre monde. Puis s'est attiré les foudres des atlantes. Ici, il est donc logique qu'elle se retrouve face à notre Arthur Curry et sa reine, qui vont en prendre pour leur(s) grade(s). Abnett n'oublie pas de nous glisser la présence du Batman who laughs, cette sorte de Joker sado-maso qui paraît avoir une grosse influence sur ses congénères déviants, et il termine comme ses prédécesseurs, par un pied de nez narratif un peu trop facile, à savoir une intervention in extremis du Docteur Fate, qui est en train de rassembler (et sauver) tous les membres de la Justice League qui ont eu affaire avec un de ces Batmen pas très gentils...
Le dessin est inégal. Normalement on ne devrait pas se plaindre d'avoir Philipp Tan et Tyler Kirkham ensemble, mais la mise en couleurs, pourtant pertinente et adaptée au ton de l'histoire, ne rend pas hommage à ce que peut faire le premier cité, alors que le second a déjà produit bien bien mieux par le passé. Certaines poses sont vraiment exagérées, on voit même une Mera qui ressemble à un reptile (un joli reptile certes) à un moment donné.
Voilà donc un one-shot qui se laisse lire sans aucune passion. La formule commence à être usée, et on n'éprouve aucune envie d'en savoir plus sur la bad guy (bad gal?) du jour, tant sa présentation est un gros passage en force en terme d'écriture, et tant cela manque de finesse et de subtilité pour s'y attacher. En gros elle est méchante, très méchante, veut noyer tout le monde, un point c'est tout. Nous avons bien conscience que Dark Nights Metal n'est pas un traité de philosophie et que c'est du mainstream très décomplexé, mais honnêtement, ici ça tombe à l'eau. Drowned.



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PLANETE HULK : RETOUR EN MARVEL DELUXE CHEZ PANINI

Parmi les sorties Panini Comics qui accompagnent l'arrivée en salle de Thor Ragnarok, il semblait évident que nous devions retrouver aussi le Planet Hulk de Greg Pak. Chose faite dans un gros Marvel Deluxe, qui va permettre aux retardataires de lire une des aventures modernes les plus marquantes du colosse de jade.
Un jour ou l'autre, il fallait bien que cela arrive. Je veux dire : comment régler la question Hulk, quand le colosse, même s'en forcément le vouloir, détruit sur un coup de sang San Francisco, le lendemain en découd avec l'armée? La question épineuse a été au centre d'un long débat chez les Illuminati (groupe secret regroupant les plus éminents héros de la Terre) qui ont opté pour une conclusion discutable : l'exil. C'est ainsi qu'ils ont piégé Hulk avec de fausses bonnes intentions, et l'ont placé à bord d'une fusée en direction d'une paisible planète où il pourra se relaxer indéfiniment sans faire de mal à personne. Ce n'est pas du goût de Bruce Banner, d'autant plus qu'un incident survient en vol, et que l'atterrissage ne se fait plus sur l'Eden promis, mais sur un monde guerrier qui ne connaît que le bruit, la fureur et le sang, et où Hulk, d'entrée de jeu, et réduit en esclavage. Certes, à bien y repenser, il est illusoire de croire qu'on peut enchaîner une telle créature, et du reste, assez rapidement, le prisonnier va se faire des amis, des compagnons d'arme, et soulever une véritable révolution (un Gladiator moderne venu d'outre-espace) qui va le placer sur le trône en compagnie de Caiera, qui va devenir sa reine et son amour de l'autre bout du cosmos. Dit comme ça c'est presque idyllique, et on pourrait penser que Hulk est enfin dans son élément et que la décision discutable des Illuminati lui a changé (en bien) la vie. C'est sans compter sans un drame final... Bienvenue sur la Planète Hulk, où ça castagne jour et nuit!

Au départ, Planet Hulk ne devait être qu'un story-arc en quatre parties, pensé par Joe Quesada pour relier les aventures du personnage à Civil War. En fait, cela deviendra vite la plus longue saga du personnage, centrée autour de quatorze numéros divisés en quatre volets, et c'est Greg Pack qui va recevoir la patate chaude : mettre en scène ce monde guerrier, Sakaar, sur lequel Hulk va vivre des aventures qui nous rappellent vaguement la Rome Antique et les gladiateurs, sur fond de paysage extra-terrestre. La nouveauté pour le géant vert, c'est que sur Sakaar, d'autres combattants ont une force similaire, et qu'il peut enfin donner libre cours à toute la rage qu'il a combattu des années durant. Au contraire, c'est seulement en laissant exploser son vrai potentiel qu'il pourra survivre et gravir les échelons sociaux, au point de devoir déterminer son avenir, sa voie. Il y a de tout là-dedans : des homme-insectes, des robots, de la violence, des monstres, des vaisseaux spatiaux, une nature alien, bref, un vrai condensé d'aventure qui prend le lecteur par la main, et le guide à travers tout un macrocosme novateur et parfois déroutant, pour qui est habitué aux aventures plus classiques de Hulk. Mais c'est indiscutablement une réussite sur la longueur, un de ces récits qui marquent leur temps et que les passionnés du personnage ne peuvent pas ne pas avoir lu. D'autant plus que la conclusion explique ce qui va se dérouler ensuite dans World War Hulk, un grand event Marvel beaucoup moins convaincant. Pour les dessins, la prestation de Carlo Pagulayan, un philippin alors à son premier grand succès pour Marvel, est relativement bonne, avec une belle galerie de héros et guerriers saisissants et touchants, tous bien mis en scène, avec une lisibilité notable et une attention certaine à l'expression des sentiments des différents intervenants. Ce n'est guère une surprise, finalement, de constater que cet arc narratif a été utilisé pour étoffer le troisième film consacré à Thor, qui est aussi, vous l'aurez compris, le meilleur moyen pour faire exister Hulk à l'écran, sans en passer par un long métrage en solo, après le relatif insuccès des précédents. 



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COSMOPIRATES TOME 1 : CAPTIF DE L'OUBLI (JODOROWSKY / WOODS)

 Xar-Cero est typiquement le genre de mercenaire sur lequel on peut compter. Si vous avez une mission à exécuter, soyez certain qu'il ir...