C'EST UN OISEAU (DE STEVEN T. SEAGLE) : NON, C'EST UN CHEF D'OEUVRE

Il est possible que vous connaissiez déjà bien le protagoniste de cet album. Il s'appelle Steven Seagal, et c'est un scénariste de comic books. Sa carrière connaît un tournant majeur lorsque son éditeur le contacte, pour lui confier une nouvelle tâche : écrire une histoire de Superman. On en connaît beaucoup qui déboucheraient le champagne pour moins que ça... pour l'artiste c'est par contre un petit cauchemar qui débute. Steven n'a jamais aimé Superman, un par un il entreprend de démythifier les pouvoirs, le costume, et d'autres morceaux de la légende, à travers des planches analytiques, poétiques, et didactiques, qui étayent sa thèse et sa répulsion, dont les origines sont fort plus personnelles. Ceci pour la partie concernant le travail d'écriture, car le reste c'est la débandade personnelle. Son père a disparu et sa mère l'a chargé de le retrouver. Une maladie génétique que traîne sa famille de génération en génération refait surface, et lui pourrit la vie. Enfin sa petite amie le quitte. Bref, difficile de se concentrer et d'aboutir à un résultat satisfaisant, quand on ne met pas de cœur à l'ouvrage, et qu'en plus tout autour de soi le château de cartes s'écroule. C'est un oiseau est tout simplement formidable! Cette histoire dépasse le cadre super-héroïque classique, très largement. Ne vous attendez pas à y trouver une aventure du Kryptonien en collants, ou un énième combat entre supers types à pouvoirs. Nous sommes ici dans un univers complètement différent, une œuvre totalement aboutie réservée à un public adulte et exigeant. Une leçon de narration. 



La réflexion de l'auteur le pousse la plupart du temps à assumer un rôle qui ressemble vaguement à celui de Lex Luthor, l'ennemi juré dans les aventures de Superman. Très souvent il développe un discours axé sur la faiblesse et la fragilité du genre humain, contraposée aux pouvoirs exceptionnels et presque illimités d'un héros, qui n'est pas de notre planète, et qui somme toute logique ne devrait pas se contenter de sauver la veuve et l'orphelin, ou de la monogamie routinière avec Loïs Lane; mais pourrait après tout se servir et exiger tout ce qu'il désire. La réflexion est profonde et particulièrement émouvante. Le mythe de l'Homme d'Acier est décortiqué sous tous les angles; la plupart du temps avec une justesse extraordinaire, de nombreuses questions existentielles sont abordées, et le scénariste fait le grand écart entre les micros événements qui rythment sa vie de couple ou de famille, et l'histoire universelle de Superman, avec le caractère mythologique quelle sous-entend. C'est un joli pied de nez que l'odyssée de cet homme incapable de pondre le moindre récit du kryptonien, que lui a pourtant demandé son éditeur, et qui dans le même temps, en nous racontant ses échecs et ses atermoiements, tisse peu à peu un chef-d'œuvre intemporel. Teddy Kristiansen réussi une prouesse remarquable au dessin, avec un trait qui reste la plupart du temps caricatural, simple et immédiat. Une économie de détails et des personnages qui vivent dans le vague parviennent à instaurer une ambiance poignante et minimaliste, qui ne mérite qu'un seul adjectif : magnifique. Il essaie également de donner un style propre à chaque micro récit inséré dans la grande œuvre; ainsi chaque parenthèse que Seagle nous offre sur les pouvoirs ou les caractéristiques de Superman est mise en images différemment, selon le thème où le sujet abordés. Que dire d'autre? Absolument rien, si ce n'est que le réalisme et le symbolisme sont ici mariés comme jamais, et qu'on referme cet ouvrage avec le sentiment d'avoir acheté une des parutions les plus marquantes de ces 20 dernières années. C'est une réussite totale qui mérite absolument de finir sur les étagères.





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SPIDER-MEN (MARVEL DELUXE) : LA PREMIERE RENCONTRE HISTORIQUE ENTRE PETER PARKER ET MILES MORALES

En dépit des promesses initiales, vint le jour où l'univers Marvel classique (Terre 616) rencontra celui des héros à la sauce Ultimate. Pour notre plus grand plaisir, admettons-le, tant la surprise est agréable. D'un coté, Peter Parker, super-héros aux 50 ans de carrière, que l'on ne présente plus. De l'autre, Miles Morales, adolescent d'origine latino, qui a pris la succession depuis la mort de son aîné. Tout commence à cause de Mysterio, qui a installé ses appareils et sa machinerie dans un building de New-York, pour se livrer à des expériences pas très catholiques sur les mondes parallèles. Spidey est de passage, et il va par inadvertance passer au travers du portail, et se retrouver propulsé dans un univers qui ne ressemble pas vraiment au sien. Avec des similitudes, mais aussi tellement de points divergents. Là-bas, tout le monde a fini par connaître la double identité de Peter, qui est mort en héros. Gwen Stacy est toujours vivante, par contre... Les deux versions différentes du Tisseur se retrouvent face à face, et vont devoir apprendre à se faire confiance, à accepter l'existence d'un double, avec les bons et aussi les mauvais cotés. La mini série comporte en tout cinq parties, et une suite a été annoncé dans la foulée, et devait initialement répondre aux questions soulevées par les dernières pages de cette très bonne aventure, qui ont fait s'interroger nombre de lecteurs. Mais tout ceci appartient bien sur au passé, car désormais, Secret Wars étant passé par là (mais aussi la débandade de l'univers Ultimate qui a fini par péricliter victime des mêmes erreurs grossières qu'il était pourtant censé éviter) Peter Et Miles cohabitent dans le même monde. Le premier est un industriel richissime qui a des faux airs assumés de Tony Stark, le second est le gardien de la tradition, dans des aventures à l'esprit plus "classique" qui nous ramènent des décennies en arrière, mais avec le savoir-faire et une narration adaptés à notre ère. 

Parue initialement dans une revue kiosque (Spider-Man hors-série 1 en 2013) au prix modeste de moins de six euros, Spider-Men a droit a une édition librairie Deluxe, pour satisfaire les collectionneurs exigeants. Vous n'allez probablement pas regretter l'achat, car Spider-Men est l'exemple presque parfait de ce que devrait offrir un bon comic-book mainstream (pas d'exigence formelle et artistique démesurée hormis un plaisir à la lecture immédiat) aujourd'hui. Bendis est en pleine forme, et ses dialogues sonnent justes, naturels, coulent de source, et font la part belle à l'humour. Sara Pichelli, la dessinatrice italienne, livre un de ses meilleurs travaux à ce jour. D'une clarté et d'une lisibilité exemplaires, ses planches sont un régal pour les yeux, et gardent l'humilité des artistes qui se mettent au service de l'histoire, plutôt que le contraire. Il n'y a pas de temps morts dans cette aventure, où vous pourrez découvrir comment Peter et Miles vont apprendre à se connaître, comment Peter va réagir face à sa Ultimate Tante May et surtout, face à Gwen Stacy, et les rapports qui vont le lier au Shield local, à Nick Fury et Tony Stark en particulier. A vouloir chicaner on peut être surpris de voir Mysterio choisi comme antagoniste principal, et responsable d'un portail qui permet la communication entre deux univers narratifs distincts. Après tout il s'agit d'un spécialiste des effets spéciaux, pas d'un savant fou, et on le verrait plus à son aise dans un récit teinté de trucages et d'illusions, que dans ce genre de team-up tout ce qu'il y a de plus réel. Notons également que lorsque Peter et Miles se voient pour la première fois, la découverte les amène, selon la tradition, à s'empoigner au dessus des buildings, avec un résultat surprenant à cette bataille. Le second cité en est encore à découvrir ses dons, et Parker a l'expérience et le talent pour moucher son jeune "ami". Mais que nenni... Une bonne lecture saine et rafraîchissante, qui n'envisage pas de remporter un Eisner Award, juste de vous faire passer un bon moment. 





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SUPERMAN UNIVERS HS 2 : 184 PAGES DE SUPERMAN POUR MOINS DE SIX EUROS

La revue Superman Univers hors-série, disponible en kiosque chez Urban Comics à tout du bon plan. Rendez-vous compte, ce numéro 2 contient plus de 180 pages, pour moins de 6 €. Comme la quantité ne fait pas tout, intéressons-nous aussi à la qualité, et globalement vous allez pouvoir réaliser que c'est fort satisfaisant. Nous entamons une plongée en arrière, à l'aube du 21e siècle, avec les différentes séries mensuelles consacrées au plus grand super héros de l'univers DC. A l'époque Superman traverse une phase de reconstruction; un de ses ennemis venait de prendre son apparence pour s'emparer du pouvoir sur Terre, et l'Homme de demain doit donc s'efforcer de restaurer la confiance, reconstruire des rapports plus humains avec ceux qu'il a décidé de protéger. La reconstruction, le renouveau, c'est le concept le plus important... c'est ce qui se passe aussi au Daily Planet, que Lex Luthor vient de revendre à ses anciens propriétaires, pour une somme symbolique, en échange d'un pacte faustien avec la journaliste Loïs Lane. La vie retrouve son cours à la rédaction du quotidien, les personnages secondaires eux aussi sont de retour, et ils occupent comme avant leur rôle au sein du microcosme de Superman. Toutefois la routine ne va pas tarder à être brisée. Tout d'accord avec l'arrivée de Mongul, le fils de l'extra-terrestre surpuissant qui a rasé la ville de Coast City, et tué tous ses habitants. C'est normalement un ennemi juré de Superman, mais là il débarque sur notre planète, non pas pour l'anéantir, mais pour demander de l'aide au Kryptonien, face à un péril encore plus grand. Ce dernier a encore quelques difficultés avec l'héritage de sa planète natale, et les vestiges qu'il conserve parmi les ruines de sa forteresse de solitude sont tout autant des souvenirs précieux, que des artefacts qui menacent la sécurité de la Terre. A un moment donné il va falloir pour Superman choisir laquelle de ses identité préserver. Clark Kent le terrien et "immigré" américain, ou le dernier rescapé d'une lointaine planète, à jamais seul dans un monde qui l'héberge mais n'est pas sien. 


C'est une bonne surprise que de lire ces épisodes, où la dualité -ou plutôt la complémentarité- entre Clark Kent et le super-héros Superman est bien présentée. On pense notamment à sa femme Loïs Lane, qui a épousé l'être le plus formidable de la planète, mais ne peut partager ce secret avec personne. Tout ceci a une importance car lorsque Superman est distrait et que Jimmy Olsen prend une photo de lui, avec un gros plan sur l'anneau nuptial qu'il porte au doigt, vous pouvez imaginer le tam-tam médiatique des journaux et du quidam moyen, qui se lancent à la recherche de l'identité de l'heureuse élue. La pauvre Loïs se pose parfois des questions; après tout si elle est l'épouse de Clark Kent, c'est-à-dire l'homme, quelle serait la compagne idéale et désirable pour un super héros aux pouvoirs aussi fantastiques que ceux de son mari tout puissant? Certes celui-ci lui est fidèle, et il a des valeurs fortes et durables, mais par exemple que compte une simple femme aussi indépendante et jolie soit-elle, face à une déesse comme Wonder Woman, quand elle vient taper à votre vitre le matin, au petit déjeuner, pour embarquer son conjoint dans une aventure extraordinaire au pays des dieux nordiques? C'est cela qui fait la force des épisodes présentés dans ce hors-série, la juxtaposition de l'humain et du super héroïque. Il se passe finalement beaucoup de choses en quelques mois, juste avant que nous pénétrions dans le 21e siècle avec Superman. Les différentes séries mensuelles ont toutes une approche et un style graphique différents; pour ce qui me concerne j'ai apprécié particulièrement le travail de Jeph Loeb et Mike McKone, mais vous serez sûrement aussi intéressés de savoir que quelques épisodes sont réalisés par un Doug Mahnke encore jeune et en devenir, et un numéro de Adventures of Superman est scénarisé par Stuart Immonen et Mark Millar. Oui tout cela paraît un gros pot pourri, mais du genre qui fait bonne figure sur votre table, et qui dégage un parfum assez avantageux. Et puis je le répète, le prix est fort avanatageux et constitue une incitation forte à l'achat. Enfin si la grande menace évoquée par l'arrivée de Mongul vous intrigue, sachez qu'il s'agit des prémices d'un énorme cataclysme cosmique, qui allait rapidement suivre, provoqué par un certain Imperiex, et résumé dans la saga Our Worlds at war. On en reparlera une autre fois.




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CONCOURS QUANTUM ET WOODY AVEC BLISS COMICS

Nous ne cessons de le répéter depuis quelques mois, Valiant, c'est maintenant ou jamais. Cette maison d'édition américaine est une excellente alternative aux colosses traditionnels que sont Marvel ou Dc Comics, et leurs séries et personnages ont un charme évident, et se révèlent attachants, et bien écrits. Ce n'est pas un hasard si des artistes comme Jeff Lemire, Tom Fowler, ou encore Paolo Rivera sont de la partie...
En France, Valiant a bien failli disparaître, mais c'est alors que Bliss Comics est arrivé, et que tout a changé. Véritable entreprise de sauvetage, l'apparition de Bliss est aussi le moment que vous attendiez sans oser l'avouer : un starting-point idéal pour découvrir Valiant et son univers, avec des albums accessibles (inutile de lire trente ans de continuity avant) et au coût modeste (10 euros pour le premier tome de chaque série, avec une foule de bonus sympa en cadeau). Bref, Valiant et Bliss Comics, un mariage qui fonctionne. 
Et aujourd'hui, Bliss Comics vous permet de remporter deux albums (un chacun, bien sur, petits malins...) dédicacés par Tom Fowler. Vous n'avez pas encore votre tome 1 de Quantum et Woody? L'heure est venue de tenter votre chance.


Vous avez jusqu'à mercredi 6 juillet 20 heures pour participer. Rien de plus simple, vous devez juste laisser un commentaire à cet article, en nous disant pourquoi vous souhaitez être un des deux heureux élus. Et pour "doper" vos chances, rendez-vous sur notre page FB où vous aurez le droit de jouer à nouveau. On vous gâte. Merci Bliss Comics.

En librairie ou comic-shop, Bliss Comics vous propose :





A venir à la rentrée : Ninjak Tome 1

Ce ne sont pas des liens commerciaux, ce sont les review, bien sur.





LE PUNISHER : VETERAN DU VIETNAM OU DE LA GUERRE DU GOLFE ?

Au fait, il a quel âge notre ami Frank Castle? Je pose la question, car il est admis, dans la plupart des versions proposées du personnage, qu'il fut un des soldats américains les plus actifs et remarquables (si l'adjectif s'applique...) durant la guerre du Vietnam. Mais cette dernière remonte aux années 60, et Frank a tout l'air d'être encore pimpant, un demi siècle plus tard...
Les origines sont clairement définies dès 1973 sur les pages de Amazing Spider-Man #129 avec Gerry Conway, Ross Andru et Mike Esposito. Un peu plus tard Gerry Conway s'attelle d'ailleurs à un récit qui évoque directement cette période, tandis que voit le jour un mensuel au titre parlant, The 'Nam, dans lequel le Punisher fait des apparitions. Bien plus tard encore, et après des dizaines d'allusions semées à travers tout ce qui existe chez Marvel, c'est au tour de Garth Ennis de nous raconter les aventures de Castle dans la jungle asiatique, dans la mini série Born, petit chef d'oeuvre du genre. Alors comment se fait-il que ces dernières années Greg Rucka dans Punisher #4 nous apprend que le héros est en réalité un soldat ayant combattu durant la Guerre du Golfe, et dont la famille a été exterminé par des criminels à son retour? Besoin d'actualisation du personnage, c'est évident, mais comment faire passer la pilule aux fans du Punisher, qui savent tout autre chose depuis les années 70? Faut-il se contenter de ce pseudo article de la journaliste Norah Winters, qui enquête (dans le comic-book) sur le passé de Castle, et raconte aux lecteurs cette opération de révisionnisme super-héroïque éhontée? C'est donc Greg Rucka et Greg Wacker (editor sur la série) qui s'expliquent, et nous donnent les clés pour valider (ou pas) cette décision audacieuse.






Nous en avons beaucoup discuté avec Greg Wacker, car celui ci disait que si Frank Castle avait combattu au Vietnam, il devait avoir au moins 70 ans, ce qui ne colle pas avec les 40 ans maximum du personnage. Pour ma part je pense que ce changement ne modifie en rien l'histoire du Punisher, qui revient d'un conflit sanglant, voit la société le mettre de coté ou le trahir, alors que sa famille est abattue sous ses yeux. La "guerre" reste la "guerre" ce qui est primordial pour la genèse de l'anti-héros.

Nathan Edmondson lui, est encore plus évasif. Il est établi que Frank Castle est un vétéran des marines, mais on ne mentionne pas expressément quels sont les conflits où il a combattu. Du reste ce n'est pas la première ni la plus éclatante opération de ret-con du genre, il suffit de penser à Tony Stark et la manière dont sa vie a pris un tournant décisif, pour devenir Iron Man. Elle est loin la jungle asiatique, là aussi. A défaut de sérum ou fontaine de jouvence (Steve Rogers ou Nick Fury ont eu droit à ce subterfuge), les scénaristes se doivent d'être pragmatiques.  



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SHE WOLF #1 : CAUCHEMARS ET LOUPS GAROUS CHEZ IMAGE

Ce mardi nous allons faire un tour du coté d'un véritable Ovni impossible à identifier. Une nouvelle série publiée chez Image, dont le premier numéro remonte à mercredi dernier. Il s'agit de She Wolf, entièrement réalisée par Rich Tommaso, seul aux commandes et libre de créer en toute liberté, ce qui donne au final une bande-dessinée impossible à caser dans le moindre tiroir à facilité. Il s'agit d'un récit "pour lecteurs adultes" qui puise son inspiration dans l'horreur, et la fable du loup garou. Première remarque du lecteur distrait et paresseux, un coup d'oeil aux planches avec une remarque laconique : Je pourrais faire la même chose chez moi avec quelques feutres et du temps à tuer. Ce n'est pas faux, mais uniquement en apparence. La désinvolture et l'amateurisme de surface ne sont que des artifices au service de la narration, simple et immédiate, et qui alterne entre tonalités pastelles et légères, suivies d'explosions de couleurs plus fortes, agressives, lorsque le drame pointe le bout de la queue. Gabby, l'héroïne de cette histoire, est encore une teen-ager, en pleine phase rebelle. Tout dans son attitude, ses vêtements, sa démarche, font d'elle une ado en pleine croissance personnelle, en pleine recherche de soi. A ce point de son existence, voilà qu'elle se persuade d'avoir été attaquée et mordue par un loup-garou. Une rencontre sauvage qui finit par lui provoquer des cauchemars, des hallucinations, qui eux mêmes influencent et parasitent la réalité, la vie éveillée, au point qu'il devient malaisée pour elle, et pour nous lecteurs, de discerner ce qui est de l'ordre de l'onirique, de ce qui se produit vraiment, et comment. Plus Gabby tente de comprendre ce qui se passe, plus les pages se chargent de sang, de peur, de confusion, et amènent un questionnement confus sur ce que nous sommes en train de vraiment lire. Une dualité qui prend corps et sens lorsque la lycéenne est convoquée chez son proviseur. D'un coté ce dernier lui apporte des nouvelles rassurantes sur son avenir dans l'établissement, de l'autre une version réprimée et clairement néfaste semble la punir, la condamner, et c'est cette dernière qui prend le dessus, et que perçoit la jeune fille. Ou bien lorsque nous la découvrons à la plage, dérangée par un chien de passage. La voici qui se rebiffe et assume aussi bien dans la posture que le faciès une attitude de louve, alors que ses amis paniquent et ne comprennent pas cette violence animalière qui explose. 
On s'y perdrait presque, avec en permanence une interrogation, un doute. Où commence le cauchemar et où naît la science-fiction d'épouvante? She Wolf se garde de répondre mais envoie le lecteur sur des pistes immatérielles et changeantes, selon le point d'horizon fixé où le coup d'oeil instantané sur la réalité. C'est troublant, et c'est intéressant. Publié chez Image, sorti en Vo mercredi dernier. 


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DIVINITY : LA SCIENCE FICTION ET L'UNIVERS VALIANT

Envie de découvrir un nouveau personnage dans l'univers Valiant? N'hésitez pas et procurez-vous le nouvel album sorti chez Bliss Comics, intitulé Divinity. Il s'agit de l'histoire de Abram Adams, un cosmonaute russe qui s'est porté volontaire pour une mission secrète dans l'espace, qui a duré plus de 30 ans, à l'insu de tous; Il a assisté du fond du cosmos au délitement du monde qu'il a quitté, de l'assassinat de JFK à la chute du mur de Berlin, et lorsqu'il fait son retour sur Terre, il est nanti de pouvoirs extraordinaires, qui en font un être divin. L'album est introduit par une narration froide et distanciée, qui nous raconte tout ce qui s'est passé avant, de l'adoption de Abram et sa prise en charge par le gouvernement soviétique, jusqu'à sa mission si particulière, où il passe le plus clair de son temps dans un état proche de l'hibernation, afin de vieillir le moins vite possible. Le sujet a été choisi car étant orphelin, il ne présente pas d'attaches humaines, du moins en apparence. Poussé par une soif de connaissance, un désir profond de percer les secrets de l'univers, il accepte de devenir le cobaye d'un saut dans l'inconnu invraisemblable, et lorsqu'il revient sur Terre, dans le désert australien, c'est pour émerger en tant qu'être capable d'exaucer les désirs profonds de tous ceux qui s'approchent, de modeler la réalité et l'espace. Bien entendu de telles capacités finissent pas éveiller la suspicion et la crainte, et il n'est pas étonnant de voir que l'équipe Unity, composée des principaux héros de l'univers Valiant finit par être envoyée sur les lieux pour enquêter, et donner un avis circonstancié. Rassurez-vous toutefois, si vous ne connaissez pas ces personnages, vous ne perdez pas grand-chose, car cette lecture peut-être abordée de façon tout à fait autonome.


La narration de Matt Kindt demande aux lecteurs beaucoup d'attention et d'engagement, il ne s'agit pas ici d'un album construit de manière superficielle, mais d'une histoire qui gagne en profondeur, au fur et à mesure des pages, et qu'il faut lire en connaissance de cause. Ce n'est par exemple que dans la seconde partie que les interrogations trouvent un début de réponse, comme qui est vraiment Abram, qui est le narrateur, quels sont ses véritables dons. Au dessin Trevor Hairsine est dans une forme extraordinaire. Les visages, les expressions, la manière avec laquelle il insuffle de la vie est en tout point remarquable. Vous pourrez d'ailleurs le remarquer dans les bonus en fin d'album, l'encrage de Ryan Winn et la mise en couleur de David Baron contribuent grandement à un traitement graphique de premier choix. Certains motifs reviennent en boucle tout au long de Divinity, que ce soient les vignettes horizontales allongées utilisées pour souligner la distorsion du temps, ou la forme circulaire qui traverse les 4 épisodes, de la navette soviétique envoyée dans l'espace, à la cellule de confinement qui permet au groupe Unity d'avoir le dessus.  A mon sens, une des grandes qualités de Divinity c'est la capacité d'aborder dans un même temps l'infini du cosmos et l'intimité de l'individu, les grands mystères de l'univers et les peines et les joies d'un homme privé de ses affects. Une bien belle surprise en somme que je vous recommande chaudement, pour prolonger l'aventure Valiant, décidément impliqué dans un renouveau fort sympathique.
Petit aparté pour finir qui n'a rien à voir avec cet album mais qui concerne la maison d'édition Bliss Comics. (edit 29 juin) Ici nous abordions l'absence de communication avec l'éditeur, mais comme vous pouvez le comprendre, les premiers mois d'existence pour Bliss sont aussi des mois de travail acharné. Au final nous avons eu le plaisir d'avoir l'opportunité de vous proposer deux albums à gagner (de Quantum et Woody, dédicacés par Tom Fowler) très gentillement mis à disposition par Bliss Comics. Un geste que vous lecteurs apprécierez forcément, et qui est aussi une bonne manière pour donner une chance à cette série qui le mérite. Tentez l'expérience Valiant, c'est le moment, et vous ne le regretterez pas, promis. 




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