NEW SUPER-MAN #1 : LES PREMIERS PAS DU SUPER-MAN CHINOIS

Tiens, un nouveau Superman chinois. A première vue, ça sent l'opportunisme, la démarche mercantile, et ça donne quelques frissons. Et puis on se penche un peu mieux sur la question, et on se rend compte qu'il ne s'agit pas de Superman, mais de Super-Man, avec le tiret. Bref, une imitation à l'orientale, une émulation, un produit copié sans autorisation préalable. Après tout ce ne serait pas la première fois qu'une marque déposée occidentale déplore sa contrefaçon. Blague à part, on s'y plonge, et avec plaisir. On l'avait récemment vu dans une des séries régulières de notre héros kryptonien, le voyage en Chine de Superman s'était soldé par la récupération de son Adn, qu'une scientifique locale n'allait pas tarder à faire fructifier. Et c'est le cas ici, dans un titre qui d'emblée se la joue très second degré, pervertit les codes du mythe pour en faire quelque chose de fort drôle, et frais. Le personnage central est le fils d'un mécanicien, grande gueule et frimeur, mais aussi limite voyou sur les bords. Son souffre douleur préféré est le gamin du principal responsable d'une grande compagnie aérienne chinoise, qu'il rançonne tous les jours, pour venger la mémoire de sa mère, morte accidentellement dans un crash aérien. Kenan Kong, c'est son nom, est assez peu "héroïque" mais le jour où sa victime est malmenée par un super vilain local, le Blue Condor, il prend instinctivement sa défense, devenant ainsi aux yeux des médias (ah ces smartphones qui filment notre quotidien en permanence) l'emblème de la jeunesse courageuse et qui rend fière la Chine moderne. La popularité est immédiate, au point même qu'une jolie journaliste (Lan Lane, c'est assez transparent...) tente de brosser son portrait. Mais rien à faire pour Kenan, son paternel n'y croit pas un instant, et sait quel rejeton il a mis au monde... Peu importe, l'imprévu surgit alors en la personne de cette scientifique évoquée plus haut, qui lui propose de participer à une expérience secrète et dangereuse, mais intrigante : devenir une sorte de Superman chinois, artificiellement élaboré en laboratoire. Là oui que la vie de Kenan va changer, et pas qu'un peu.
Gene Luen Yang va vite et s'amuse beaucoup avec ce premier numéro. En 22 pages il nous raconte tout ce qu'il faut savoir de ce nouveau venu, de ses défauts à sa famille, de sa transformation à ses amis/ennemis (une version fort singulière de Batman et de Wonder Woman vous attend...). Le ton est décalé, on est à la lisière de l'hommage potache, mais qui fonctionne car très sympathique. Richard Friend et Victor Bogdanovic sont au taquet aux dessins, avec une histoire propre, mise en scène avec brio et dynamisme, qui colle parfaitement avec le ton et la direction choisie. Attention, ce grand début est indéniablement réussi, mais la série est casse-gueule par excellence. Nous lirons de la parodie, de la satire, quelque chose de totalement différent, un récit adolescent ou un vrai titre qui va interagir avec l'univers Dc? Tout ceci est fort intrigant. Pour le moment, on a le sourire. 


A lire aussi : 


Rejoignez la communauté sur Facebook!


SUICIDE SQUAD : LA REVIEW DU FILM (SANS GROS SPOILER NI DC BASHING)

Si les Marvel Studios caracolent loin devant, en terme de rentabilité et de succès critique, c'est en partie parce que les Avengers constituent une formidable carte de visite, à présenter comme pinacle d'un univers partagé cohérent. Dc Comics (Warner) est à la peine en ce sens. Le film longtemps attendu sur la Justice League est enfin annoncé à l'horizon 2017, alors que la première confrontation entre poids lourds (Batman V Superman) a connu un accueil franchement mitigé, comparé aux attentes. C'est donc à cette étrange Suicide Squad que revient l'honneur peu enviable d'incarner la première super équipe de la distinguée concurrence, avec un distingo d'importance : point de héros sans peur et sans reproches, mais place à un gang de criminels, psychopathes et autres outsiders, chargés par une branche secrète du gouvernement américain de missions délicates, pour ne pas dire suicidaires. Les membres de cette escouade n'ont guère le choix; ou ils obtempèrent, ou une bombe explose dans leurs petites cervelles. Une mesure assortie d'une remise de peine, voilà qui devrait être suffisant pour convaincre les plus réticents à jouer le jeu... La Suicide Squad est dirigée par Amanda Waller, qu'on se prise de détester. C'est une femme cynique et peu regardante, campée avec justesse par Viola Davis. Parlons un peu de ceux qui composent cette formation. Les deux noms sur toutes les lèvres sont bien sur Harley Quinn et Deadshot (Will Smith, quand même) et ils phagocytent le reste de l'équipe. C'est bien eux qui vont faire vivre le long métrage, les autres ne sont que la salade qu'on sert à coté du croque-monsieur, pour faire joli ou diététique, mais que personne ne vous oblige à manger. La première citée porte sur ses frêles épaules la plus grande partie des moments humoristiques disséminés ça et là. On sent par endroits les ajoux last minute en phase de montage, et il faut bien admettre qu'on sort de la salle en ayant pu admirer Margot Robbie sous toutes ses coutures intimes, tant la caméra prend le soin de la filmer dans les poses les plus provocantes. On sait plus ou moins tout d'elle, de ses origines (avec le Joker, on y viendra) à ses blessures secrètes, sans oublier la cambrure de ses reins. L'autre star, c'est Will Smith. Pardon, Deadshot. Certains redoutaient que ce monument de coolitude se contente de surjouer quelques scènes afin d'empocher un cachet, pour s'excuser dans quelques années d'avoir pris part à l'aventure. Que nenni, le tireur d'élite de la Squad occupe une fonction fondamentale, en tant que boussole morale des siens, et personnage envers lequel le public ressentira le plus d'empathie. Il est père de famille, aime sa fille, et vire rapidement au combattant altruiste qui n'est pas si mauvais, en fin de compte. Le reste envoyé en mission? Cela oscille de l'anecdotique (Slipknot, on appelera ça un caméo) à la caricature (Captain Boomerang en tant que gros idiot cupide, ou Killer Croc le monstre attachant) en passant par l'indéfinissable (El Diablo, qui gagne ses galons en cours de route, avant de sombrer dans la mièvrerie en fin de pellicule). Pour compléter l'ensemble, ajoutons un militaire droit dans ses bottes (Rick Flag en meneur d'hommes un peu coincé), une garde du corps qui fait potiche (mais avec un sabre, alors n'allez pas lui répéter. Katana ne parle que japonais, peut-être ne vous comprendrait-elle pas), et bien sur ... en tant que trublion extérieur, que menace se greffant sur la menace, que sous-trame au fort potentiel marketing ... le Joker de Jared Leto.  


On vous l'a promis et bien vendu dans la presse, à coups de rumeurs inquiétantes (il aurait balafré un acteur sur le plateau, aurait du mal à "sortir de son rôle") Jared Leto est un Joker digne de ce nom. Sauf que... on quitte la salle sans parvenir à se faire un avis franc. En fait, il n'est pas assez souvent à l'écran, et surtout n'a pas assez de scènes éloquentes, pour apparaître autrement que comme le parangon du mal cool, des ténèbres nihilistes mais si à la mode, zeitgeist diabolique comme notre société aime en produire ces dernières années. Il sert à justifier en partie l'existence d'Harley Quinn, à amorcer de futurs films où il sera le pôle d'attraction, à bâtir une sous-trame qui finalement prend l'eau et ne résiste pas aux vrais enjeux. Le look me fait furieusement penser à un Martin Gore (membre de Depeche Mode) droit sorti des années 80 et reconverti au satanisme, perverti par l'imagerie pop moderne. Un Joker plus apte à donner un concert de metal progressif dans un festival en plain air, qu'à aller cambrioler les banques de Gotham. Autres apparitions fugaces dans ce film, Batman (moins crispé et crispant) le temps de deux arrestations musclées et Flash, qui reste à l'écran aussi longtemps que son patronyme le promet. David Ayer a pris un parti simple pour nous présenter et introduire sa troupe. Pas de longues explications qui ralentissent le propos, mais toute une série de "portraits en mode training" comme on pourrait vous les balancer dans un jeu vidéo ou en exergue d'un programme de télé réalité. Ma foi pourquoi pas, au moins on gagne de précieuses minutes pour la suite. Sauf que la bande son explose en mode pompier, et que ces grands génies du mal, qu'on annonçaient sombres et sans remords, finissent immanquablement par bénéficier d'un traitement de faveur qui les rend plus sympathiques que la logique voudrait. Le réalisateur est un grand fan d'armes à feu, de préparation militaire (il s'engagea à 18 ans dans la Navy ) et d'explosions diverses et variées, et c'est ce qui va servir de cadre de référence à ce film. L'étalage de pouvoirs et la lutte entre le bien et le mal n'est pas le centre du sujet. Tout d'abord le bien est absent, ou à ce point relatif qu'un tueur à gages sort de ces presque deux heures comme le justicier le plus attachant du lot; ensuite ça nanarde et défouraille tellement qu'il reste peu de place pour les démonstrations super-héroïques, ce qui est un comble quand on réalise que la vraie menace qui plane sur les têtes, et provoque l'envoi sur le terrain de la Squad, est d'ordre ésotérique et démoniaque. On ressent aussi cette obsession moderne du terrorisme, d'une troisième guerre mondiale en cours et impossible à vaincre, car dont les acteurs se révèlent insaisissables (et si Superman avait décidé de s'emparer de la Maison blanche? Et que souhaitera faire le prochain Superman?) à moins d'employer le feu pour combattre le feu. Une vision jusqu'au boutiste qui est ici assez sommairement étalée, nullement approfondie. Les méchants au pouvoir complotent et cachent la vérité, les autres méchants sur le terrain font le sale boulot. Au fait, ils étaient où pendant ce temps, Batman, Flash et consorts? Ils ne pouvaient pas venir donner un coup de main? 


Pour mener à bien un projet de la sorte, pour qu'il soit pleinement réussi, il faut lui donner une voix plus qu'une voie. Un ton. Marvel l'a compris avec les Gardiens de la Galaxie et Ant-Man, et a placé sa mise sur la case "coolitude et second degré". Dc et Warner ont pensé décrocher la lune avec les Batman de Nolan, en optant résolument pour "noirceur et premier degré". Le problème, c'est que Dc/Warner a insisté dans cette direction, en sortant des films de plus en plus monolithiques et indigestes, où on oublie de sourire, même fugacement. Suicide Squad a bénéficié de "reshoot" en ce sens, suite à l'accueil très froid de Batman V Superman. L'équipe du film nie la théorie, mais l'évidence se fait jour dans un montage qui égrène les petites blagues, les punch lines qui se rêvent sarcastiques, ne respectant pas toujours ce qui a été promis dans la bande annonce. La cohésion de la Squad est à revoir, les motivations des uns et des autres, la résignation face à la mission qu'on leur impose, tout ceci diminue la portée de ces vilains appelés à sauver le monde, qui semblent par moments évoluer dans un long clip de hip hop bling bling diffusé en boucle sur Mtv. Le grand défi était la synthèse entre les intentions badass, et la capacité à dégager une légèreté sympathique des personnages principaux. Dans les deux cas de figure, on parlera de demie réussite, ou début d'échec. Harley Quinn finie par être une pimbêche cinglée et creuse dans son modus operandi (en a t-elle un d'ailleurs?), le Joker déconcerte plus qu'il n'effraie, et Deadshot est bon pour la médaille militaire du mérite. Mais amis lecteurs, qu'attendions nous en réalité de ce Suicide Squad? Un groupe de losers qui a du mal à trouver son public même sous forme de comic-book (les séries New 52 n'ont pas franchement soulevé les montagnes...) et que le grand public ignorait royalement, jusqu'à ce que la campagne marketing menée tambour battant n'annonce l'arrivée de cet ovni violent et calé sur l'air de son temps... C'est déjà un petit miracle de les voir ensemble, au cinéma, dans un long métrage qui est loin de tenir ses promeses initiales, mais ne ressemble pas non plus à cet accident industriel que le Dc bashing de la presse spécialisée voudrait imposer comme seul mètre de jugement. La vérité est quelque part vers le centre, à prendre et considérer avec plus de mesure. Reste le véritable drame de fond : Warner attend toujours son premier vrai grand succès massif et fondateur depuis The Dark Knight Rises, et la patate chaude passe maintenant à la belle Gal Gadot qui a tout intêret à bien gérer la pression qui va dramatiquement accompagner l'arrivée prochaine de Wonder Woman, en 2017. 


Avec tous nos remerciements à la direction du cinéma le Pathé Gaumont de Nice Masséna pour l'accueil et l'intérêt démontrés lors de l'avant première, mardi soir.




A lire aussi : 

Batman V Superman, notre critique

Rejoignez la communauté sur Facebook!

OLDIES : SPIDER-MAN L'EMPIRE (THE REIGN) DE KAARE ANDREWS

Commençons par la fin : il y avait une grande attente autour de cette mini série dessinée par l’artiste aux multiples facettes, Kaare Andrews, et comme chacun le sait, à grandes attentes, grands risques également de se casser la figure. Cela dit, ne vous laissez pas égarer par cet incipit : The Reign (L'Empire en Vf) est une bonne histoire et bien illustrée (les couvertures sont aussi très belles) et vaut probablement le prix de l’album, mais ce n'est pas non plus le chef d’œuvre annoncé, à tort. Le pitch? Dans un futur proche, Spiderman a fini par raccrocher ses toiles, et la ville de New York est sous le joug d’une direction fascisante où le contrôle est aux mains des mass médias et de politiques qui exacerbent les peurs des habitants. Peter Parker, comme à son habitude, survit d’un petit boulot à l’autre, d’une crise existentielle à l’autre. On le retrouve même humble fleuriste, bien loin du héros qu'il fut, au service des new-yorkais. La population finit par se soulever et tente d’améliorer son quotidien, par le biais de petites émeutes rapidement et durement réprimées. Parker n’a aucunement l’intention de se laisser emporter par ce problème, jusqu’à ce qu’un de ses fans les plus improbables vienne frapper à sa porte. On découvre ainsi que certaines vieilles connaissances sont elles toujours en activité (JJJ, un acronyme comme indice), ce qui contraindra progressivement le tisseur de toile à reprendre du service, pour le bien de la ville, et à affronter ses démons issus du passé. Il était temps, car le pauvre se fait même tabasser sans réagir dans une ruelle, et il semble devenu l'ombre de lui même, de celui qu'il était à ses grandes heures.

Andrews se lance, avec cet ouvrage, dans un gigantesque What if... (cette série qui s’interroge sur des scénari alternatifs à notre réalité ; du genre Et si Peter Parker n’avait pas été mordu par une araignée mais par une méduse ?) peuplé d’une multitude de personnages, au risque de sembler par moments un peu brouillon. Evidemment les amateurs de comics l’auront compris : il s’agit d’une tentative d’émuler le chef d’œuvre de Frank Miller, Dark Knight Returns, mettant en scène un Batman vieillissant, dans des circonstances presque analogues. Mais cette imitation stylistique, qui arrive 20 ans après son modèle, n’a pas le même impact ni le même panache. Autre point négatif : la volonté (probablement imposée par Marvel) de reprendre certains points et personnages tels que présentés dans la série des films de Spider-man avec Maguire, tout particulièrement le troisième (comme le costume noir). La puissance du cinéma ne date pas d'aujourd'hui. Toutefois cette aventure reste appréciable et appréciée, un bon divertissement typique des affres de notre cher Homme Araignée, qui sans être révolutionnaire ou destiné à l’Olympe du comics, vous fera probablement passer une agréable heure de lecture. Avec un artiste complet à la barre, qui pose des questions pertinentes comme ce qui se produit lorsqu'un homme, par fatigue, lâcheté ou douleur, tourne le dos aux valeurs qui ont toujours été les siennes, ou bien les conséquences pour une femme de vivre sa vie avec un mari dont les pouvoirs dérivent d'une morsure radioactive. En effet, Andrews nous explique clairement que Mary-Jane est morte car empoisonnée par les fluides corporels de Peter, à savoir, pour être clair, le sperme de ce dernier, qui s'est révélé fatal au fil des ans. Un récit qui est aussi tout particulièrement notable à une époque où le mouvement des "indignés"  a récemment fait tâche d'huile, et où on ressort les vieux masques-sourires de "V For Vendetta" pour éprouver le frisson de la rébellion, sans pour autant aller jusqu'au bout des actes ou des idées. 

Album sorti dans la collection Spider-Man 100% Marvel 5tome 7) et Marvel Collector en kiosque (le #4)





A lire aussi : 


Rejoignez la communauté sur Facebook!

RED HOOD & THE OUTLAWS REBIRTH : VOUS SAUREZ TOUT SUR JASON TODD

Si vous avez encore quelques problèmes pour bien situer Jason Todd, et vous rappeler les origines et la biographie du personnage, ce numéro Rebirth est fait pour vous. Les étapes principales sont réactivées, que ce soit la première rencontre capitale avec Batman, dans une ruelle de Crime Alley, alors que le gamin est en train d'emprunter une roue de la Bat-Mobile, ou bien la trégédie de sa mort (depuis cela va beaucoup mieux) des mains du Joker, qui le dévaste à coups de barre de fer. Jason fut donc le second Robin, le successeur de Dick Grayson, et il a une particularité, celle d'être bien moins docile que l'acrobate auquel il succéda. Rebelle, enfant terrible élevé à la dure, capable de larcins et de crises de colère, ce n'est pas à proprement parler une figure qui a tout du futur super-héros propre sur lui. Scott Lobdell a donc la tâche de remettre tout cela au goût du jour, pour enfin poser les jalons d'une série à venir, ce qui n'est pas joué d'avance. Soyons sérieux, en général les titres Dc qui gravitent dans l'atmosphère Red Hood sont dispensables, et ce qui s'y passe relève du foutoir improvisé. Pour le coup, le héros phare est présenté sous son jour le plus badass. Batman ne lui pas confiance? Ce n'est pas grave, il l'electrocute et le met minable devant la presse, tout en plaçant un pruneau dans la tête du maire et en s'échappant impuni. Bon, certes, les apparences sont trompeuses, le Red Hood n'est pas un meurtrier, et les rapports avec le Dark Knight n'ont rien d'irrécupérables ou de trop tendus. Magie des comics, il faut gratter derrière la toile des apparences pour dévoiler la réalité des faits. Tout de même, on le sait, voilà un personnage qui n'a pas peur de se salir les mains si besoin est, et pour qui tricher fait partie des règles, quand l'enjeu est la victoire, et juste la victoire. 
Coté dessins, on a parfois l'impression d'être dans les années 90, avec le parfum Image Comics qui flotte lourdement dans la pièce. Les scènes d'action, l'apparition impromptue d'un Batman avec une cape géante qui flotte autour de sa silhouette, comme dans un des premiers épisodes de Spawn, voilà qui est parlant, révélateur. Dexter Soy ne fait pas dans la finesse, pour autant si vous appréciez ce type de mise en page vous ne serez pas deçus, car c'est efficace, suggestif, et ça colle assez bien à l'ambiance générale que cette série souhaite générer. C'est même assez intéressant de noter les détails des visages, les expressions, qui sont variés et crédibles. Bonne pioche, donc. Par contre, si vous me demandez où sont passés les Outlaws, je vous demanderais de bien vouloir patienter et de changer de question, car je n'ai pas encore de réponse à vous donner. Red Hood Rebirth pour le moment, avec une suite qu'on devine centré autour d'un regain de criminalité oculte dans Gotham, et un Jason qui se la joue "infiltration". Ma foi, on a vu bien pire comme promesses initiales. 


A lire aussi : 

Nightwing Rebirth. Un autre ex Robin dans la course

Rejoignez la communauté sur Facebook!

MIRACLEMAN : DECONSTRUCTION D'UNE ICONE AVEC ALAN MOORE

Pour ce qui est de la vraie genèse de Miracleman, il faut faire un sacré bond en arrière, dans les années 50. C'était alors la mode des super-héros tout puissants, reporters dans le civil (vous avez dit Superman) ou bien capable de se "transformer" suivant un mot magique (Kimota, qui signifie, à l'envers Atomik. C'est subtil). Après quelques années de bons et loyaux services et une plongée dans l'oubli collectif, Miracleman gagne ses lettres de noblesses lors d'un retour remarqué dans les années 80, sous la plume inspirée d'Alan Moore (puis Neil Gaiman, quelle chance) et les crayons de Alan Davis, Garry Leach ou Chuck Austen. C'est un tout autre personnage qui nait de l'association de cet aréopage de talents. Michael Moran est un individu torturé, blessé, meurtri. Il n'a plus aucuin souvenir de la vie héroïque qu'il menait autrefois, si ce n'est des cauchemars récurrents qui pourraient bien être la clé pour un retour des souvenirs perdus. Et même s'il parvient un beau jour à retrouver le mot magique qui le transcende à nouveau, c'est pour affronter une réalité bien différente. Entre le besoin de se réadapter à cette puissance incroyable, et une opposition inattendue et perverse, les difficultés ne manquent pas. Les bribes qui reviennent peu à peu sont douloureuses, et suintent la mort, avec une bombe mortifère qui parait avoir éliminer de l'équation les side-kicks qu'étaient Young Miracleman et Kid Miracleman. Car vous l'aurez compris, la "famille" Miracleman est copiée en tous points sur la "Marvel Family", celle qui comprend notamment Shazam, ou Mary Marvel. D'un coté nous avons donc un humain, faillible, marié et anonyme, de l'autre une créature qui réalise tous les fantasmes de l'Ubermensch, et dont les dons sont à priori illimités. Les deux ne font qu'un, mais ne sont pas pour autant exactement la copie conforme de l'autre. Ils ont une sorte de conscience ommune, mais ce sont deux entités séparées. Et surtout, c'est le secret de la génese de Miracleman qui va alimenter tous les premiers épisodes. comment une telle créature a pu voir le jour? Vient-elle d'une autre planète? Est-elle artificielle? La réponse englobe un peu tout cela, et puise ses racines chez l'archi ennemi du héros, un certain Docteur Gargunza. 


Pour Michael Moran l'accession à ce statut quasi divin n'est pas un cadeau du sort, ou une bénédiction. C'est une profonde mutation qui vient mettre en péril son quotidien de mari et de futur père. Nous sommes bien dans les prémices du travail de déconstruction entrepris par Moore, et qui aboutira au chef d'oeuvre qu'est Watchmen. Le super-héros n'est pas cet être insouciant qui combat le crime dans un costumes aux couleurs criardes, et jouit de sa réputation. C'est un être qui ne trouve pas sa place, n'a pas choisi ce qui lui arrive, et subit un sort enviable en théorie, mais qui devient vite un boulet qu'il doit traîner jour après jour, sans pouvoir s'en débarrasser. Emblématique la grossesse de l'épouse de Michael, qui est en fait imputable à Miracleman, alors que le mari semblait incapable d'assurer une progéniture. Le surhomme est tout ce que l'homme n'est pas et ne sera jamais, il est son alter ego idéalisé, inaccessible, et en cela d'avantage non-humain que plus qu'humain. Marvel (et Panini dans la foulée) a donc eu la très bonne idée de reproposer au public ce comic-book aussi intelligent que dérangeant, tout en optant pour la recolorisation des planches. Ce n'est pas une mauvaise idée, dans la mesure où les originales étaient bien entendu marquées à jamais par une époque, au risque de piquer les yeux des nouvelles générations qui n'ont pas connu les eighties. Croquis ou variant covers complètent les différents tomes, et vous le verrez, il y a en a une grande variété (certes réduites au format de quatre covers par page, c'est assez frustrants par endroits). Présenté dans la revue anglaise Warrior, Miracleman a donc enfin trouvé un public moderne et connaisseur, et propose aux textes le scénariste originel (Alan Moore, qui n'a jamais trop accepté que Marvel fourre son nez dans les droits d'édition de la série, et on sait le bonhomme assez antipathique quand il le souhaite) et aux dessins des artistes comme Garry Leach (très réaliste et raffiné, avec des personnages qui portent gravés sur les visages les tourments de l'être intérieur), Alan Davis (plus souple) ou Chuck Austen (qui n'est pas que scénariste, en voici la preuve). Icone surpuissante mais au destin maudit, Miracleman vous séduira (ou vous a déjà séduit) par l'intelligence et la maturité du propos. Hautement conseillé. 

Chez Panini pour le moment : Quatre tomes de publiés





A lire aussi : 



Rejoignez la communauté sur Facebook !



ROM #1 : LE GRAND RETOUR DU CHEVALIER DE L'ESPACE CHEZ IDW

Au début des années 80, Parker Brothers, une compagnie qui n'allait pas tarder à être rachetée par Hasbro, lance une sorte de robot de l'espace, une action figure assez rudimentaire, sans points d'articulation, appelée Rom. C'est loin d'être un chef-d'œuvre mais les créateurs ont la bonne idée d'aller taper à la porte de Marvel, pour proposer d'en faire une série mensuelle. A partir de là c'est le succès, et le personnage devient pour la génération des quadras d'aujourd'hui, l'exemple type de ce qu'on peut appeler une série culte. Les aventures de Rom, en provenance de la planète Galador, et face à la menace pernicieuse des Spectres Noirs reste emblématique de la génération Lug. Le Spaceknight a fini par disparaître, victime d'une baisse de sa popularité et de la censure (en France, les pouvoirs décisionnels pensaient que le titre était devenu trop horrifique), aujourd'hui voici Rom de retour; cela se passe chez IDW, qui a récupéré les droits et qui relance la légende, dans des tons plus modernes et adaptés au jeune public du nouveau siècle. Le premier numéro à la bonne idée de représenter également les 11 premières pages offertes lors du dernier free comic book day, que tout le monde n'avait pas eu l'opportunité de lire. Nous voici donc plongés au moment de l'arrivée du personnage sur Terre. Il passe à l'action d'emblée, à la recherche de ses ennemis de toujours, qu'il parvient à identifier grâce à sa célèbre arme de poing, qui les démasque dans un premier temps, avant de les exterminer. Bien sûr, comme les Spectres se dissimulent sous des traits humains aux yeux de l'opinion publique, Rom est un extraterrestre assassin, une créature diabolique débarquée à l'improviste chez nous pour nous décimer. L'utilisation des réseaux sociaux, des smartphones, amplifie encore davantage le côté menaçant du Chevalier, dont l'arrivée et les agissements se retrouvent sur la toile rapidement. 


Les Spectres Noirs on été relooké pour les rendre plus menaçants,  plus crédibles. C'est là que le travail de David Messina, le dessinateur italien, est appréciable. Son trait et sa technique intègrent parfaitement l'utilisation de la conception graphique et de la colorisation modernes, et il associe design traditionnel et trouvailles originales avec naturel. Tout comme la série de Christos Gage et Chris Ryall parvient à associer technologie et magie, avec des envahisseurs dotés de nouveaux pouvoirs, qui parviennent même à manipuler et utiliser la faune et la flore locale, pour arriver à leurs fins. Des débuts assez classiques donc, mais qui remplissent parfaitement leurs fonctions et qui s'inscrivent dans un plan plus vaste, avec une tentative de la part de IDW de créer une grande saga qui interconnecte ses différentes séries (comme Transformers G.I.Joe ou les Micronauts par exemple) avec un crossover en septembre (Revolution). Résolument plus à la page, mais respectant les codes classiques de la série des années 80, cette nouvelle version de Rom est donc une surprise plaisante. 


A lire aussi : 


Rejoignez la communauté sur Facebook!


THE KILLING JOKE : UNE VERSION ANIMEE SANS GRANDE SURPRISE

The Killing Joke, oeuvre de Alan Moore et Brian Bolland, qui remonte à 1988, est adaptée cet été sous forme de dessin animé. La sortie était très attendue car il s'agit d'une histoire qui n'épargne rien au spectateur en termes de violence, de sous-entendus sexuels, et qui possède une véritable réflexion de fond sur la santé mentale d'un justicier déguisé en chauve-souris, mis en présence d'un criminel dingo et sans aucune retenue ou déontologie. Première constatation, il faut attendre une petite demi-heure pour que l'action commence vraiment : toute la première partie est en effet consacrée à Batgirl, un moyen habile pour que le spectateur ressente ensuite tout le pathos du drame qui survient. C'est pourquoi de simple coéquipière de Batman, la jeune Barbara Gordon finit par entretenir une véritable liaison avec son maître, dont le point d'orgue est une scène de sexe en costume, rapidement évacuée. Si les fans de comics considèrent la chose comme une véritable profanation, c'est toutefois une conséquence logique, se diront les autres, qui ne connaissent pas véritablement l'univers de Gotham. Le vrai problème selon moi c'est que cette première partie est sans saveur, elle se traîne en longueur et l'opposition entre Batgirl et le prétendu nouveau chef de la pègre locale, qui se déploie selon un axe séduction-fascination-répulsion est mal présentée et déclenche quelques bâillements.  La petite rouquine n'en sort pas grandie et l'ensemble est presque misogyne. Et puis à un certain moment, étant donné qu'ils se sont un peu trop rapprochés physiquement, les deux héros de la ville se séparent, et c'est alors que Barbara retourne vivre seule, et que l'enfer va pouvoir commencer, en respectant les canons classiques du Killing Joke des comics. Inutile de vous rappeler quand et où la tragédie débute... le commissaire Gordon est venu rendre visite à sa jolie petite fille et les deux devisent allègrement autour d'un verre, lorsqu'on frappe à la porte. Barbara se lève et va ouvrir... il est trop tard désormais. Bang.


De l'instant où le Joker fait irruption, l'histoire commence à être fidèle, voire servile, à ce que Moore et Bolland ont pu produire par le passé. Coté graphisme, on sent bien une tentative de coller au style du dessinateur, en respectant l'esprit de départ, mais ajouter une ride de ci, une ride de là ne suffit pas à donner le caractère nécessaire pour rivaliser avec le gaufrier stylé du grand Brian. On recommandera bien entendu le visionage en Vo pour ne pas perdre la performance de Mark Hamill, qui est le grand spécialiste dès lors qu'il faut donner voix au dingo de service, au rire si agaçant. J'employais le mot servile car tout est fait pour respecter, trop même, The Killing Joke format papier. Y compris le doute du viol/pas viol que beaucoup ont en tête, lorsque Barbara est blessée grièvement et sans défense, avec ici un Joker qui dégraphe lentement son petit haut. Sûrement pas pour porter les premiers secours... La bonne nouvelle vient de tout ce qui concerne l'évocation du passé de l'ennemi majeur de Batman. Dans des tons sépias réussis et convaincants, le dessin animé sait traduire à l'écran toute cette généalogie officieuse du personnage, et explicite clairement le lien qui pourrait unir le Dark Knight et la création de ce meurtrier sans scrupules. Ce qui ert nécessaire pour bien comprendre la fin, et la volonté ferme et définitive de Batman de tendre la main à sa némésis, après qu'il ait secouru un Commissaire Gordon humilié et blessé dans sa chair, mais pas dans sa déontologie et sa rectitude. Les héros plient mais ils ne rompent pas, et ce sera bien ça la grande leçon de The Killing Joke, qui va loin dans l'abject et l'horreur, mais dont les victimes parviennent malgré tout à garder leur équilibre mental, alors que le vilain de l'histoire, lui, n'en retire, au delà de l'échec final, qu'une amère constatation de solitude, de vacuité. Cette adaptation réalisée par Sam Liu et écrite par Brian Azzarello est donc plaisante à regarder, mais sans génie, dès lors qu'on parvient à échapper à la narcolepsie induite par la première partie. En fait les lecteurs de comics peuvent directement sauter à la 28 ème minute, et s'épargner le prologue sans rien perdre au change.




A lire aussi : 



Rejoignez la communauté sur Facebook ! 

PEACEMAKER TRIES HARD : BOUFFONNERIE, SATIRE ET SOLITUDE

Le super-héros ringard et super violent Christopher Smith (alias Peacemaker) sauve un chien errant après avoir neutralisé un groupe de terro...