THE AMBASSADORS : MARK MILLAR DISTRIBUE DES SUPER-POUVOIRS


 Comprenez bien, on ne peut tout de même pas donner des super-pouvoirs à tout le monde, alors qui choisir ? La question est pertinente puisqu'une scientifique sud-coréenne semble avoir découvert comment faire obtenir des dons fabuleux sur demande, à peu près à n'importe qui. Cinquante facultés exceptionnelles, un réservoir dans lequel en choisir trois utilisables simultanément pour chaque possesseur, qui peuvent ensuite les alterner. Choon-He est une richissime femme d'affaires qui a été trompée par son mari; celui-ci est parvenu à mettre la main sur toute la fortune du couple et à l'accuser de malversations, de manière à ce qu'elle finisse par croupir en prison. Mais c'est mal connaître son esprit de résilience et son génie ! Lors d'une conférence de presse hautement spectaculaire, elle annonce donc au monde médusé qu'elle va mettre au point un nouveau programme appelé 'les Ambassadeurs" : six personnes venues de pays différents vont être choisies parmi des centaines de millions de candidatures spontanées. Chaque nation aura bientôt son représentant, qui sera bien évidemment revêtu d'un costume reflétant les couleurs du drapeau national. Dans un premier temps, le récit va donc se concentrer sur ces individus, leur parcours, les motivations qui les poussent à désirer ou au contraire refuser d'obtenir des super-pouvoirs et la manière dont ils vont voir leurs objectifs aboutir. L'occasion pour Mark Millar de nous promener un peu partout sur le globe; ça commence avec notre scientifique coréenne, mais ensuite nous partons en Inde où un humble vendeur en téléphonie va devenir le héros du jour, puis nous faisons un saut à Paris avec une mère célibataire et son fils, avant de rejoindre le Brésil et ses favelas, l'Australie et un personnage aussi curieux que truculent. S'il y a une qualité qu'il faut reconnaître au scénariste écossais, c'est la faculté indéniable de trouver un pitch qui résonne en chacun de nous, qui à première vue n'a rien d'extrêmement original mais qui n'a jamais été couché sur papier avec autant de facilité et de modernité dans l'écriture. Là encore, ça fait mouche, avec en toile de fond le mari de Choon-He qui attend de sortir de l'ombre et un autre personnage mystère, qui pourrait bien être la carte joker du récit.



Mark Millar renoue avec le grand super-héroïsme, celui qui n'est pas motivé par l'argent ou par l'envie de dominer le monde, mais tout simplement l'altruisme, la capacité de se sacrifier, d'avoir envie d'aider les autres. L'idée est simple, elle est probablement très naïve dans un monde comme le nôtre, mais cela fonctionne très bien et ça permet de proposer une histoire qui est à la fois très old school dans sa philosophie, mais affrontée avec une vision moderne du monde dans lequel nous évoluons. Ce n'est pas faute de tenter de corrompre ces "ambassadeurs" mais rien n'y fait, ils sont au service de la planète. Et même si certains d'entre eux utilisent des menus mensonges pour intégrer l'équipe, il n'empêche qu'ils sont efficaces, courageux et méritent bien le cadeau qu'on leur a fait. Au passage, notons que la partie graphique est absolument splendide. Certes, il s'agit pour une fois d'un travail qui manque d'unité car chaque partie est confiée à un dessinateur différent, mais comme ça concerne de grands noms des comics et des talents incontestables, on ne va pas se plaindre. Dans l'ordre nous allons ainsi admirer Quitely, Kerschl, Charest, Coipel, Buffagni et Scalera. C'est peut-être le dernier cité qui réalise la prestation la plus remarquable; en tous les cas, nous sommes devenus totalement fans de son style, lui qui dans un premier temps semblait suivre les pas de Sean Murphy, mais qui à notre avis l'a maintenant même dépassé. Notons que l'association Quitely/Millar est toujours aussi efficace et semble couler de source, tandis que Coipel, qui s'occupe de l'épisode se déroulant au Brésil, est une fois de plus irréprochable. Alors certes, The Ambassadors souffre des défauts habituels des comic books de Millar. On lui reprochera une conclusion hâtive et un manque de développement général, mais c'est tout à fait normal car l'écossais est capable à chaque fois de faire apparaître en un claquement de doigts un univers qui pourrait être développé et creusé pendant des années. Alors, si vous voulez en (s)avoir plus, ne vous inquiétez pas, il faut s'attendre assez rapidement à un second volume de cette série, sans oublier, c'est inéluctable, une version sur Netflix. On n'a pas fini d'entendre parler de nos "ambassadeurs".



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HOTELL CHEZ BLACK RIVER : UN SECOND SÉJOUR DANS L'HORREUR


 Ne disposant pas des chiffres de vente officiels sur le marché français, je ne pourrai pas vous parler de triomphe. Toujours est-il que Hotell, aux États-Unis, a rencontré un succès mérité, au point que les lecteurs ont convaincu les créateurs d'investir pour une seconde saison de cette série horrifique, aussi malaisante que bien ficelée. Pour rappel, le Pierrot Courts est un hôtel en apparence miteux, situé au bord de la route 66, dans un coin perdu de l'Amérique, où presque personne ne passe et encore moins d'infortunés s'arrêtent pour la nuit. Et ceux qui le font, en règle générale, ne vivent pas assez longtemps pour le regretter. Comme dans le premier volume, mais d'une manière plus organique, différentes trajectoires vont se télescoper et les destins individuels développés dans chaque épisode former un tout cohérent. Ainsi, il est fait mention dès le départ d'un gang de motards ultra violents, qui va occuper le devant de la scène dans le dernier épisode. En attendant, on fait la découverte d'une famille en pleine décomposition, expulsée de son domicile et qui tente de fuir l'inévitable, en refusant qu'elle n'a plus aucun avenir devant elle. On fait aussi la rencontre d'un dessinateur qui cherche l'inspiration et qui va la trouver, en contemplant et recopiant le tableau de Pierrot qui se trouve à l'entrée de l'hôtel. Ce dessinateur, c'est bien entendu Dalibor Talajic lui-même, qui se met en scène avec un joli clin d'œil, dans une réflexion sur le rôle de l'artiste et même une petite critique acerbe de ceux qui font une distinction très snob, entre véritable travail artistique et bande dessinée. Dalibor Talajic est d'ailleurs pour beaucoup dans le succès de Hotell; quand vous essayez de mettre sur pied un comic book d'horreur, l'écueil principal à éviter c'est celui d'en faire de trop, de vouloir absolument choquer le quidam sans se rendre compte que tout est dans le dosage et la manière de représenter l'innommable. Talajic s'en tire à merveille, avec une pointe d'humour et de distanciation, tout en osant saisir l'insupportable dans les moments clés. Le rythme qu'il donne à cette histoire correspond parfaitement aux intentions du scénariste John Lees et au final, ce sont nous les lecteurs qui en profitons clairement.


Bien évidemment, les clients qui s'arrêtent pour passer la nuit au Pierrot Courts ont en général des choses à cacher, une face sombre qui va par ailleurs causer leur perte. Et puis, on rencontre quelqu'un de très différent, un voyageur et son chien, qui depuis toujours lui a été fidèle mais qui est désormais très malade, et qu'aucun vétérinaire n'est parvenu à guérir. Dans l'espoir d'un traitement, l'homme se met en route et s'acharne à trouver une solution là où il n'y en a plus; et c'est intéressant, car c'est probablement un des aspects de ce second volume de Hotell, à savoir le lâcher prise, être capable à un moment donné de comprendre qu'il n'y a plus rien à faire, si ce n'est payer le prix, l'addition, avant de sortir de table. Impossible de s'enfuir, la vie (ou la mort) finit toujours par vous rattraper, même quand elle se présente à vous sous l'apparence horrible et démoniaque d'un clown, dans un tableau, ou de manifestation surnaturelles dans un hôtel pratiquement abandonné. John Lees réussit donc le tour de force de nous convaincre une seconde fois, dans ce second volume peut-être même encore plus réussi, car mieux ficelé que le premier. Qui est assurément tout aussi malsain et dérangeant et capable d'atteindre son lectorat sans faire de concession, ou tomber dans la facilité. On retrouve aussi des personnages du premier tome, dont la belle Muriel Stansfield, qui est en train d'acquérir une importance presque semblable à celle de notre cher réceptionniste, Amphitryon de ces épisodes et on l'espère, des prochains, si un troisième volume venait à voir le jour.

La chronique de Hotell volume 1 : lire ici


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LE PODCAST LE BULLEUR PRÉSENTE : DEUX BD POUR TOUT SAVOIR DE MISSAK MANOUCHIAN


Dans le 170e épisode de son podcast, Le bulleur on vous présente le parcours de Missak Manouchian, récemment entré au Panthéon, à travers deux bandes dessinées sorties récemment chez Les Arènes BD et Dupuis. Cette semaine aussi, on revient sur l’actualité de la bande dessinée et des sorties avec :

- La sortie de l’album Copenhague que l’on doit au duo Anne-Caroline Pandolfo et Terkel Rijsberg, publié aux éditions Dargaud

- La sortie de l’album Le champ des possibles que l’on doit au scénario de Véro Cazot, au dessin d’Anaïs Bernabé et c’est édité chez Dupuis

- La sortie de l’album L’homme miroir que l’on doit à Simon Lamouret et aux éditions Sarbacane

- La sortie de l’album The Velvet underground, dans l’effervescence de la Warhol factory que l’on doit à Koren Shadmi et aux éditions La boite à bulles

- La sortie de l’album Sept vies à vivre que l’on doit à Charles Masson et aux éditions Delcourt dans la collection Mirages

- La réédition de l’album Mauvaises herbes que l’on doit à Keum Suk Gendry-Kim et aux éditions Futuropolis



 
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BLOOD MOON : HORREUR SUR LA LUNE AVEC LE LABEL 619


 Pour qu'un thriller soit bon et angoissant, il faut savoir planter le décor. Ici, c'est (bien) fait dès les toutes premières pages, avec une colonie minière sur la Lune, au tout début du 22e siècle. Il faut avoir un sacré courage pour aller bosser sur notre satellite, alors que les conditions de travail sont désastreuses et particulièrement dangereuses; mais c'est très bien payé et du coup les candidats continuent d'affluer, même si le taux de mortalité est beaucoup plus élevé que la moyenne. Une fois sur place, il n'y a pas grand-chose à faire, si ce n'est bosser, s'enfiler des shots de tequila et de whisky pour résister et fréquenter les filles de joie, dans des bordels rétro high-tech.  Mais cette morosité mâtinée de science-fiction sociale vole en éclat le jour où un premier meurtre est découvert sur cette colonie minière, appartenant à la société E-Mining. Le type assassiné a été mis en scène, un peu à la façon du Christ sur sa croix, mais pire encore, puisque il a été énucléé et éventré. Bref, quelque chose d'absolument horrible, qui ne laisse aucun doute sur le caractère malsain de ce qui s'est produit. Dès lors, nous entrons dans une forme de thriller scientifique assez efficace et sans concession. Qui dit thriller dit bien entendu quelqu'un chargé de l'enquête, qui va assumer, bien malgré lui, le rôle du héros, celui qui est chargé de faire émerger la vérité dans notre récit. Il s'agit d'un certain Benjamin, chef de la sécurité, qui va devoir comprendre qui est l'assassin et quelles sont ses motivations. Autre élément important qui pourrait le mener sur la piste des coupables, un tatouage avec deux initiales laconiques : BM. Pour ne rien arranger, le bodycount ne fait que commencer.


Une des particularités du Label 619, c'est de privilégier clairement la qualité à la quantité. Ne vous attendez pas à une inflation de sorties (dorénavant chez Rue de Sèvres) mais plutôt à des albums pleinement maîtrisés et longuement attendus, distillés avec parcimonie. Pour Blood Moon, qui est inspiré par le film de science-fiction Outland (sorti en 1981 et lui-même dérivé de Le train sifflera trois fois), le label accueille Fred Bones, qui constitue une recrue de choix, s'il en est. Vous lirez un peu partout que son trait anguleux, un poil caricatural et âpre n'est pas sans évoquer du Mignola, mais surtout (à nos yeux de profanes) du Phil Hester, illustrateur très talentueux qui nous a encore gratifiés d'un beau Family Tree avec Jeff Lemire, il y a deux ans. Bones gère tout comme un maître, y-compris la couleur, ce qui permet de restituer une ambiance très sombre, poussiéreuse, minérale ou métallique, jusqu'à la révélation finale qui est peut-être un poil au dessus de ce vers quoi le scénario semblait tendre. D'une enquête qui verse dans une forme de mysticisme glauque et horrifique, on aboutit à une illumination presque métaphysique et universelle, qui a elle seule aurait justifié une autre histoire ou un autre tome. Disons que les dernières pages dépassent, de loin, ce qu'on pouvait avoir en tête pour échafauder une hypothèse dans la compréhension du récit. Pour le reste, les codes du genre sont bien employés et assimilés, le dynamisme et la tranchant du dessin servent à merveille une histoire qui n'a rien de tendre ou de poétique mais transpire la frustration et la claustrophobie dès la première planche. On étouffe; respirer est un atout majeur sur ce genre de théâtre d'opération, d'où l'importance, comme il est rappelé à un certain point, de ne pas vomir dans son scaphandre au risque d'être condamné. L'air est vicié dans chaque case, la tension monte progressivement avec la certitude d'un complot qui gagne en ampleur, qui part sur la piste d'un délire sectaire et politique. Blood Moon ressemble admirablement bien à ce qu'on voudrait trouver et qu'on est habitués à lire avec le Label 619. Un "LowReader présente" qui fait le job et le fait bien. 

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DAWN OF TITANS TOME 1 : SORTIS DES OMBRES


 Que vous les appeliez les Teen Titans ou tout simplement les Titans, le fait est que notre joyeuse bande de super-héros joue un peu les seconds couteaux post-adolescents depuis des décennies. L'heure est peut-être venue de grandir et c'est exactement ce que Dawn of Titans propose, avec une formation qui devient en tout point l'équipe réserve de la Justice League : non plus des sidekicks enthousiastes qui apprennent le métier, mais des supers héros qui ont fait leurs preuves et qui sont prêts à suppléer les aînés plus connus. Du côté de la formation, guère de surprise puisqu'on retrouve les principaux membres des Titans, menés par un Nightwing toujours aussi positif et capable de motiver ses troupes. Le membre le plus abscons, c'est peut-être Wally West, car contrairement aux autres, il est marié, a deux enfants et il semble beaucoup plus adulte et mature (au moins sur la carte d'identité, plus que sur son comportement). C'est avec lui que nous ouvrons le premier arc narratif du titre, puisque quelqu'un lui a tiré dessus à bout portant et est parvenu à l'abattre. Wally consacre ces derniers instants à faire la seule chose qui lui est possible à pleine vitesse, des adieux à ses proches, avant de remonter le temps dans l'espoir d'empêcher l'inévitable. En parallèle, les Titans doivent intervenir à Bornéo lors d'un feu de forêt gigantesque et se frotter à Titano, une sorte de King Kong encore plus gros et dingue, assez facilement maîtrisé. Le lecteur a à peine le temps de s'habituer au récit de Tom Taylor et de profiter des planches toujours très soignées et d'une lisibilité exemplaire de Nicola Scott qu'il se retrouve avec un interlude en deux parties, extrait du crossover de l'été dernier, Knights Terror. Il s'agit d'explorer les cauchemars de tous les héros et vilains de l'univers DC, pendant que l'humanité est endormie. Les Titans sont prisonniers des mauvais rêves de… la Tour des Titans, l'édifice dans lequel ils ont établi leur quartier général, anciennement le terrible pénitencier de Blüdhaven, qui est en plein délire cauchemardesque et a embarqué les héros dans son univers onirique. Sur le papier, c'est loin de faire rêver (justement), mais en réalité, Andrew Constant et Scott Godlowski ne s'en sortent pas trop mal, sachant qu'il s'agit évidemment d'une histoire de commande, pour coller avec les ambitions globale de DC comics.




La nouvelle série des Titans démarre sur un faux rythme, mais qui n'est pas du tout désagréable. C'est aussi l'occasion de rencontrer un parasite extraterrestre et de se confronter à la nouvelle mouture de la secte du sang, qui est parvenue, en apparence du moins, à enrôler Garth dans ses rang. Mais la vraie bonne surprise de cet album, elle arrive ensuite. J'admets avoir été quelque peu décontenancé par le choix opéré du côté de chez Urban comics, c'est-à-dire présenter à la suite de la nouvelle série Titans l'autre production actuelle consacrée au groupe, c'est-à-dire World's finest : Teen Titans. Cette fois, ce sont les versions encore adolescentes des héros qui sont mises en avant; leurs vies et leurs problèmes quotidiens, tels qu'il pouvaient être il y a quelques années, mais dans une réécriture moderne, c'est-à-dire sur fond de téléphones portables, réseaux sociaux et autres diableries d'aujourd'hui. Dis comme ça, Mark Waid avait de fortes chances d'écrire n'importe quoi, mais une fois de plus, il démontre toute sa science et son savoir-faire en parvenant, mine de rien, à rendre très attachants tous les personnages, en leur offrant à chacun l'occasion de briller et en dépeignant une jeunesse finalement très crédible. Emanuela Lupacchino au dessin est un excellent choix car son style se marie très bien avec le ton de la série; ses planches sont d'une souplesse admirable, très agréable à regarder. C'est la dynamique entre les héros, plus que l'action, qui est essentielle. Notamment un jeune Robin castré par Batman, qui l'empêche de sortir, tandis que Kid Flash, Aqualad et Roy Harper forment un trio décomplexé et dysfonctionnel. On apprécie aussi de retrouver Bourdon et une Wonder Girl qui décide de vivre à 100 à l'heure. Le grand paradoxe, c'est que ce sont les pages qui me tentaient le moins avant d'ouvrir l'ouvrage et que ce sont celles qui me semblent les plus réussies au final. Même les couvertures de Samnee sont parfaites pour illustrer le propos léger mais pétillant. En conséquence, vous auriez grandement tort de ne pas laisser une chance au tome 1 de Dawn of Titans.



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THE MIGHTY : ANATOMIE DE LA CHUTE D'UNE ICÔNE SUPER-HÉROÏQUE


Ce n'est pas la première réinterprétation du mythe de Superman et ce n'est vraisemblablement pas la dernière. The Mighty est désormais disponible chez Urban comics, une dizaine d'années après sa parution chez l'éditeur Dark Horse, aux États-Unis. Comme la plupart du temps, ce sont les Américains qui ont décroché le gros lot : Alpha One est le super héros local qui défend la veuve et l'orphelin. Ses pouvoirs seraient dus à l'explosion d'une bombe atomique et depuis, il les place au service de l'humanité et principalement de la plus grande puissance mondiale, qui a instauré au fil des décennies d'activités de ce super héros (qui ne vieillit pas, ou presque) une force d'intervention spéciale, entièrement financée par tous les produits dérivés générés par sa popularité. Bref, tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes, si ce n'est que le chef de la sécurité, le capitaine Michael Shaw, vient d'être assassiné et que l'heure est venue de lui trouver un successeur. Ce sera Gabriel, jusqu'ici un de ses fidèles adjoints, qui a une particularité intéressante : lorsqu'il était petit, ses deux parents sont décédés tragiquement et il a été lui-même sauvé par Alpha One, qui est depuis devenu l'objet d'une sorte de culte personnel. Sa petite amie gère un bar et elle l'aide à garder les pieds sur terre, tout en lui rappelant la nécessité de consacrer du temps à sa vie d'homme et de famille, plutôt que tout miser sur un travail extrêmement chronophage. Dès lors, la relation qui va s'instaurer entre le super-héros sans peur et sans reproche et le nouveau superflic d'Amérique va être au centre du récit de The Mighty tandis que peu à peu, la belle vitrine va commencer à se lézarder, comme vous pouvez vous y attendre



Toute la difficulté pour Peter Tomasi, c'était d'être capable de prendre le contre-pied des attentes des lecteurs, sachant qu'il devait nécessairement, à un moment donné, mettre à mal la grandeur et la magnificence de son super-héros iconique. On s'attend tous à le voir disjoncter et commettre les pires atrocités, mais bien entendu, l'évolution et l'explication de son comportement sera beaucoup plus subtile que cela. Plutôt qu'une bande dessinée super héroïque catastrophe, The Mighty évolue vers un thriller passionnant, où chaque minute compte, où il semble quasiment impossible d'échapper au regard et aux sens aiguisés de celui qui sait tout, qui peut tout, qui voit tout et qui pourtant a aussi ses failles et ses secrets. C'est Peter Snejbjerg qui s'occupe du dessin, dans un premier temps, et si à première vue son travail peut sembler plutôt quelconque, c'est en réalité cette apparence de banalité mais cette lisibilité maximale qui permet au récit d'aller de l'avant, avec naturel, comme une évidence imparable. Au bout de quelques épisodes, il doit céder la place à Chris Samnee, mais il continue d'assurer la mise en page, gardant ainsi une unité de storytelling appréciable. Samnee, c'est un véritable génie dans la gestion de l'ombre et du volume des planches, on ne refuse jamais de le voir à l'œuvre dans un comic book. Urban Comics propose l'intégralité de la série, y compris des récits courts signés Keith Champagne et Leonard Kirk, qui approfondissent le rôle pernicieux de Alpha One. Le discours de fond, celui de savoir si l'humanité a besoin qu'on lui prenne la main et qu'on lui mâche le travail, ou si au contraire la liberté véritable, c'est aussi accepter de se tromper et de commettre les pires erreurs, est une fois de plus mis en lumière avec brio, dans un récit susceptible de plaire au plus grand nombre et plus que jamais d'actualité.



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WARLOCK RENAISSANCE : MARZ ET LIM POUR DE LA NOSTALGIE COSMIQUE


 Ok Boomer ! Ils sont malins chez Marvel, ils savent comment se mettre dans la poche les lecteurs nostalgiques qui ont acheté leurs épisodes mythiques des années 1990, quand l'univers cosmique Marvel était aux mains de Jim Starlin et de Ron Lim ! Après une mini série consacrée au Silver Surfer, place maintenant à Adam Warlock (Rebirth). Un épisode inconnu de l'existence de celui qui fut un temps l'être suprême de l'univers, à l'époque où il frayait en compagnie des Gardiens de l'infini et résidait temporairement sur l'île aux monstre de l'Homme-Taupe. Un épisode assez dramatique d'ailleurs, puisque dès l'ouverture on le retrouve en mauvaise posture. Un cocon est apparu (habituellement, c'est lui qui est à l'intérieur) et c'est une version féminine et vindicative qui en sort. La créature artificielle se fait appeler Eve Warlock et elle est venue remplacer sa contrepartie masculine, considérée comme imparfaite et juste une ébauche de ce qui doit venir. Les lecteurs retrouvent aussi Genis-Vell, le fils du premier Captain Marvel, alors en vogue dans les comics de la Maison des idées. Le rejeton est venu sur terre et va prêter main forte à Pip et Gamora, mais aussi au Docteur Strange, un des grands spécialiste dès lors qu'il s'agit d'investiguer dans les territoires mystiques de l'âme. Alors, vous raconter qu'il s'agit d'une aventure absolument incontournable, voire d'un chef-d'œuvre de la bande dessinée super-héroïque, ce serait clairement vous prendre pour des imbéciles. Mais je l'admets, je fais partie de cette catégorie de Marvel fans qui pour des raisons d'âge et de souvenirs attendris achètent de toute manière tout ce qui concerne Adam Warlock. On est bête en vrai, quand on vieillit. 


Cette aventure est donc l'occasion de rencontrer Eve Warlock, une version améliorée, upgradée d'Adam, qui voit le jour grâce aux bons soins du Maître de l'évolution, un de ces personnages un peu dingues, conséquences d'une période de créativité débridée et d'idées complètement fantasques mais fonctionnelles, que Marvel a eu en abondance à la bonne époque du Silver puis du Bronze Age. Ron Marz revient à ses vieux amours, c'est-à-dire écrire du cosmique, tandis que Ron Lim reste fidèle au poste et égal à lui-même. On peut difficilement trouver ses planches impressionnantes mais elles font le job, assurément, et conservent toujours cette empreinte très identifiable, même si l'encrage de Don Ho lui sied moins que celui d'un Tom Christopher de la grande époque. Le grand mérite de cet album, c'est de nous montrer à quel point Warlock est régulièrement sur le point de tout abandonner : c'est un héros malgré lui, sur les épaules de qui repose une charge la plupart du temps trop lourde, dont il se débarrasserait bien volontiers. Le monde de l'âme, dans lequel il se réfugie parfois volontairement, souvent parce qu'il y est replongé de force, agit comme un baume cicatriciel mais aussi comme une sorte de prison conceptuelle, dans laquelle le personnage préfère être enfermé plutôt que d'affronter l'âpreté de l'existence. Warlock, il est un peu comme nous tous; devant l'adversité, il semblerait souvent si simple de jeter l'éponge et de retourner dormir, en fermant les rideaux et les volets et en attendant des jours meilleurs. Mais il faut affronter l'adversité, il faut savoir se relever. C'est un peu le destin d'Adam, l'éternelle résurrection d'un personnage christique, qui même lorsqu'il traverse une histoire sans grands enjeux, parvient toujours à attiser notre intérêt.


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