NOS ANNEES STRANGE 1970/1996 : C'est toute une époque !



Les chiffres de vente des "Années Strange" sont là pour le certifier : le quadra fan de comic-books est pris régulièrement d'accès de nostalgie pour ses années formatrices, cette jeunesse perdue, et qui ne reviendra plus. Le livre est un succès incontestable, et partout, blogs et sites spécialisés, à court d'imagination et d'épithètes, qualifient l'ouvrage de tiroirs à "madeleines" (véridique, j'ai retrouvé cette image systématiquement, dans chaque article!) ou de bibles pour geeks précurseurs. Moi qui ai connu l'époque, je vous confirme un pincement au coeur, certes du en partie au travail de Carletti et Lainé (le livre est beau, très sympa à lire, bien illustré et clair, en somme ce n'est pas un achat qui vous décevra), mais qui se manifeste même dans la moindre des brocantes, ou chez le moindre bouquiniste, à la vue des parutions Lug/Semic qui s'étalent. Et pourtant ! Coupures sauvages dues à la censure (le Daredevil de Miller passé au tamis de cette dernière), manque d'adaptation Vf d'un grand nombre de séries, ou choix arbitraires au grand dam du public (Rom qui disparait, certains ne s'en sont pas remis). Mais aussi crossover inégalement répartis, contraignant le pauvre lecteur à sauter d'une revue à l'autre (Strange/Nova/Special Strange/ et fin de parcours du combattant, dans un Récit Complet Marvel, tu finiras) et à acheter ce qu'il ne souhaite pas forcément; et encore association douteuse, comme les Uncanny X-men aux cotés des Team-ups de Spidey et de la Chose. De plus je passe sur la qualité du papier, les retards de distribution dans certaines villes, et le regard complaisant et dubitatif de nos parents, interdits devant cette jeunesse dévoyée qui délaisse Spirou et ces gaulois irréductibles pour d'absurdes combats d'athlètes hypertrophiés en collants. Panini n'est pas la panacée, mais nous vivons quans même une époque formidable ! Les librairies regorgent de beaux volumes pour toutes les bourses, les kiosques sont pris d'assaut par une foule de revues, où l'essentiel cotoie allégrement le vraiment dispensable. Ce qui n'empêche pas, quand "Nos années Strange" convoque les belles heures de notre jeunesse, que notre coeur bondit sauvagement, et que notre esprit s'égare. La nostalgie, baby. Vous verrez, dans 30 ou 40 ans, quand vos enfants et petits enfants liront leurs comic-books sur l'Ipad 25, en tournant les pages sur impulsion mentale, vous serez les premiers à vous ruer chez votre libraire de confiance (amazon?) pour commander "Nos années Panini" et verser votre petite larme en souvenir de ces merveilleuses premières années du XXI° siècle. Vive la nostalgie, et vive les comics, forever !

ALL-STAR WESTERN #1 : JONAH HEX DEBARQUE A GOTHAM

ALL STAR WESTERN, c'est le grand West qui investit nos comic-books, avec un invité d'honneur d'exception en la personne de Jonah Hex, qui vient juste d'essuyer un four totalement compréhensible (le film est mauvais) au cinéma. Enfin, le grand West, façon de parler, car si je ne m'abuse, dans la topographie Dc, Gotham City, là où se déroule l'action, est bien à l'Est, non? Nous sommes plongés en 1890, à une époque où Batman ne court pas encore les rues dans son costume de chauve-souris, mais où la ville est cependant déjà bien corrompue, à tous les niveaux, de la police aux juges. Le grand mystère du moment, ce sont toutes ces prostitués qui sont barbarement trucidées, ce qui n'est pas sans rappeler Jack the Reaper et From Hell d'Alan Moore, qui a eu l'occasion de raconter son idée de la légende. Jonah Hex débarque dans la plus pure tradition de l'étranger patibulaire et revêche, mais ultra efficace et prêt à faire triompher la justice. Il fait équipe (façon de parler) avec un psychiatre local, le docteur Amadeus Arkham, probablement l'ancêtre de l'asile de dingues dont les occupants semblent s'echapper chaque mois, au grand dam de Batman. Le récit est certes assez conventionnel, mais bien ficelé et sans fausse note véritable. On trouve de tout au menu : de la saine bagarre de saloon, des meurtres, un peu d'humour, et même une secte qui gangrène Gotham, contre laquelle vont devoir lutter nos deux enquêteurs improvisés. Justin Gray a bien compris que Jonah Hex, c'est l'assurance de réussir le lancement de ce titre, et de s'assurer un premier arc narratif aux ventes louables. Et ensuite, on passera vraiment aux histoires de cow-boys et d'indiens, où il y aura un autre subterfuge commercial (du genre, on change le titre, en All Star Jonah Hex?), qui le sait... Palmiotti et Grey ne sont donc pas près de se défaire de leur personnage fétiche, et sont épaulé par un Moritat fort à propos, dont le style correspond parfaitement aux exigences de ce genre de série. C'est une expérience de lecture à tenter, car ce premier numéro ne necessite aucune connaissance particulière de l'univers Dc, et propose un récit qui n'entre pas vraiment dans les canons de la geste superhéroïque. A suivre ces prochains mois, donc...


100% MARVEL : X-MEN LES ORIGINES vol.3

Troisième et dernier volet des origines des X-men, dans la collection 100% Marvel. Un argument qui n'a rien de bien nouveau, mais après avoir publié les deux premiers volumes, il restait trois histoires à présenter à nos amis de Panini. C'est chose faite. Ouf.

Au menu (dans le désordre), les origines de Victor Creed, alias Sabretooth. Un vrai méchant, cruel, sanguinaire. Le monstre a tué son frère pour une part de gâteau, a été enchaîné par son père (et torturé) et ignoré par sa mère. Du coup, il a aussi trucidé ses parents. Le début de cette histoire est assez fort et résume vite et bien en quoi le mutant est une bête sans concession. Le problème, c'est la suite. Dès lors que Victor fait la rencontre de son antagoniste favori, Logan (Wolverine, quoi!), le scénario quitte les rails et nous offre de multiples affrontements, espacés chacun d'entre eux par plusieurs années de distance, et ponctués par des accès de violence gratuite, de la "bagarre" stérile entre hommes, comme pour dire : "rien ne mieux qu'une bonne castagne très macho pour se sentir vivant et libérer la rage qui se cache au fond de chacun de nous". Pourquoi pas. C'est juste que ce n'est pas très intéressant, et c'est un euphémisme. Dan Panosian fait de son mieux aux dessins, mais même là, on pouvait s'attendre à plus.

Wolverine, justement. Ses origines également sont présentes dans ce volume. Cela peut faire sourire, car résumer en une trentaine de pages un sujet aussi fourni et confus, c'est une gageure. Du reste, le petit James enfant, ça ne prend que deux pages, le gros de l'épisode est consacré à la présence du mutant canadien au sein du projet Arme X, et aux expériences cruelles qu'il a du subir pour qu'on fasse de lui, en grand secret, une arme redoutable et mortelle. On assiste à la première rencontre avec le Professeur Xavier, on revoit des scènes archi connues extraites de "Weapon X", et on se demande bien à quoi peut être utile un tel récit, puisqu'on a déjà du le lire une bonne dizaine de fois. A des néophytes qui passeraient par là, par hasard? Au moins les dessins de Mark Texeira sont-ils particulièrement synchros avec l'ambience qui se dégage des accès de rage du mutant griffu. Ce n'est pas pour rien qu'il a déjà officié avec succès sur sa série régulière. Ici, il peut donc s'offrir une leçon de rattrapage, dont nous autres marvélophiles convaincus, ne sentions pas du tout le besoin.

Pour finir, Deadpool. Oui, le mercenaire à la grande ... bouche. Heuseusement qu'il est là, dans ce volume. Nous retrouvons Wade Wilson en plein entretien d'embauche : il cherche un réalisateur pour porter à l'ecran les exploits de son existence. Par chance il finit par dénicher un artiste patient qui l'interroge sur son parcours, et de là nait le pretexte pour approfondir notre connaissance du personnage, son enfance, sa transformation en Deadpool (au passage sa lutte contre le cancer, qui l'a poussé à s'offrir pour une série d'expériences interdites qui bouleversent sa vie), sa femme et son rapport au couple... L'humour est très présent (le sort réservé aux réalisateurs éconduits...) et on a même droit à une petite touche d'émotion salutaire (la papa de Wade et son fiston). Je vous laisse découvrir ce que sera finalement ce film, qui ne ressemblera bien évidemment pas au récit fidèle des origines de Deadpool. Swierczynski et Leandro Fernandez sont convaincants et sauvent notablement le sommaire de ce troisième volume des origines des X-men, qui autrement aurait été bien trop indigent pour les lecteurs au long cours que nous sommes en majorité.

Rating : OOOOO

BRIGHTEST DAY 1 : La maxi-saga DC débarque enfin en kiosque

Panini tire ses dernières cartouches made in Dc cet automne, à commencer par le premier rendez-vous avec BRIGHTEST DAY en kiosque, qui comprend les numéros 0, puis de 1 à 3 de la maxi série homonyme. Ceux qui ne lisent que la Vf seront d'un coté soulagés de voir ces épisodes adaptés (avec retard, coté Dc l'opération Flash Forward aurait été assez compliquée) et d'un autre assez inquiets : Dargaud (et son label Urban comics) poursuivra l'aventure... ou pas? Bref, il y a du lourd et du bon au menu, mais l'avenir de Brightest Day reste pourtant encore assez nébuleux. Et c'est assez déconcertant.

Sinon, quid de Brightest day alors? Commençons par ce numéro 0, qui introduit parfaitement les pistes à explorer durant la saga. La première remarque qui vient à l'esprit, en le parcourant, c'est la couleur, la beauté, la sérénité qui se dégage du travail de Fernando Pasarin, et l'intelligence dans la manière d'imbriquer des différentes pièces du puzzle que Johns et Tomasi vont nous proposer. Dès l'ouverture,  le soleil perce à travers le feuillage des arbres, et la vie reprend ses droits, plus eclatante que jamais, après l'effroyable Blackest Night. Puis symboliquement, un oisillon tombe du nid, et s'ecrase au sol. Et là, au beau milieu d'un cimetière, se dresse Boston Brand, alias Deadman, revenu d'outre tombe, sans avoir véritablement d'explication. Transporté en différents points du globe par un anneau blanc ,il passe en revue les douze héros qui ont été ramenés à la vie à la suite de la chute de Nekron et des lanternes noires. Héros et pas seulement, puisque certains "vilains" sont aussi revenu d'entre les morts, pour l'occasion. Hawkman et Hawkgirl, Martian Manhunter et Aquaman, mais aussi Captain Boomerang ou encore Maxwell Lord. Ils sont tous à nouveau parmi nous, et la raison de ce come-back pourrait être bien plus sinistre que ce qu'il pourrait sembler. Le lecteur est aussi baladé gentillement sur les lieux qui ont fait l'actualité ces derniers temps chez Dc, comme Star City, sinistrée, ou le Khandaq, la patrie de Black Adam. L'enjeu n'est pas seulement de faire planer le mystère autour de l'anneau de lumière blanche, et de savoir qui pourra le porter et pourquoi ( seul Deadman le possède, dans ce numéro 0 ), il s'agit aussi et surtout pour le scénariste Geoff Johns (en tandem avec Peter Tomasi) de placer toutes ses cartes sur la table, tout en conservant une bonne partie retournée et voilée, et d'appater le chaland avec une série d'intrigues qui s'annoncent touffues, complexes, voire passionnantes. Ce numéro O ne déçoit pas les attentes et aiguise l'appétit comme saurait le faire un excellent apéritif. Il porte dans son sillage le numéro un où les premiers héros en tête de gondole sont Hal Jordan et Sinestro (les deux rivaux sont intrigués par la lanterne blanche, mais impuissants devant elle) et Aquaman. J'adore Aquaman !



A l'instar de ce qu'on a pu lire durant Infinite Crisis:52 par exemple, il s'avère donc que plusieurs strates vont se superposer dans Brightest Day. Aquaman qui évoque les créatures mortes des mers, Hawkman et Hawkgirl qui tentent d'échapper à la malédiction séculaire de Hath-Seth, qui les a massacrés à travers les âges, Firestorm dont les deux entités antagonistes sont enfin séparés, Martian Manhunter qui désire repeupler Mars mais va aussi devoir se repencher sur les conditions de son arrivée sur Terre, Deadman qui est censé aider tous ses héros s'en savoir comment ni pourquoi et se retrouve nez à nez avec l'Anti Monitor... Certes, il convient d'avoir les idées claires sur qui est qui, de maîtriser un tant soi peu ces personnages pour profiter pleinement de cette maxi série. Qui en vaut la peine. C'est la dernière longue aventure de l'ère Dc telle que nous la connaissions avant le reboot, c'est une construction architecturale complexe et appréciable. Plusieurs artistes se succèdent aux dessins, pour un résultat globalement fort satisfaisant. Mention particulière pour Ivan Reis, et les covers splendides de David Finch. Tous ceux qui ont trouvé leur compte dans la grande épopée de la nuit la plus sombre, et souhaitent finir en beauté leur rapport avec le vieil univers Dc se doivent de se procurer ces premiers épisodes. Tout comme Dargaud se doit de bien faire attention à ne pas laisser pour compte les lecteurs qui vont s'y plonger, au rique de faire naître par la suite une inimitié fort préjudiciable. Brightest Day, c'est parti, et on veut en voir la fin, dans la décence et une bonne revue, si possible!

Rating : OOOOO

RED HOOD AND THE OUTLAWS #1 : MENAGE A TROIS

Roy Harper n'est pas un Superman, et son seul véritable pouvoir est son habileté incroyable à l'arc et aux flèches. Ce qui ne l'empêche pas d'aller se fourrer dans un sale pétrin, en terre inconnue, et donc, c'est logique, d'être capturé et condamné à mort. Son salut, il le doit à un autre side-kick historique de l'univers Dc, Jason Todd, qui en son heure de gloire fut le second Robin de Batman, avant que le Joker ne le fasse passer de vie à trépas de la plus cruelle des façons, dans la saga "A death in the family". Depuis, il va beaucoup mieux (il existe des antibiotiques contre la mort dans les comic-books?), tout comme Roy par ailleurs, si on considère qu'avant le reboot il s'était retrouvé mutilé durant l'éprouvant et fort réussi "Cry for justice". Mais un bras, ça repousse vite, quand on est un personnage de Bd superhéroïque. Les deux bad boys ne s'ennuient pas, et c'est là que la morale et la brigade des moeurs commencent à faire la moue. Jason a une copine extra terrestre à la plastique parfaite, Starfire la libertine (ce n'est pas le nom de sa planète, c'est un euphémisme pour dire que c'est une fille "open"), qui pourrait être qualifiée assez facilement de "sex friend". Comme sur son monde d'origine le sexe et les sentiments n'ont absolument rien à voir, et que ses émotions fonctionnent de manière très différente des notres, l'auteur (Scott Lobdell, en charge de plusieurs séries à polémique en ce moment, dont Superboy ou encore Teen Titans) en profite pour jouer cartes sur table. Starfire est libérée, et si vous lui plaisez, ce n'est même pas la peine de lui demander, il n'y a qu'à se servir. Du coup Jason aurait été idiot de refuser, ça doit bien le changer de Bruce Wayne dans la bat-cave (comment ça je blasphème?). Deux mercenaires sans foi ni loi, une bombasse à la peau orange et aux jambes écartées, et hop, voilà le menu de cette série qui ne va pas faire dans la dentelle ni dans l'introspection profonde. Action, Kenneth Roccafort aux dessins (un trait anguleux, des muscles et des visages taillés dans la pierre, mais une grande capacité à créer du mouvement) et une bonne dose d'érotisme débridé, et le tour est joué. Quand au cliffhanger final, j'admet ne pas avoir tout compris (bien oui quoi, je ne suis pas omniscient et ne peut pas tout lire non plus!) mais comme les derniers mots de l'épisode sont "To be explained", je pense ne pas être le seul, et d'un coup, ça me rassure! Brouillon, tout ça? Pensez-vous...


FOCUS : LES COMIC-BOOKS SONT-ILS UNE ESPECE EN VOIE DE DISPARITION ?

Les chiffres des ventes consécutifs au reboot Dc ont d'un coté rassuré certains lecteurs, d'un autre ils ont fait bondir les Cassandre du comic-books qui y lisent le déclin inévitable de notre média préféré. Quid de l'avenir de la bd super héroïque américaine telle que nous l'avons connu jusque là? Loin de moi l'idée de détenir la vérité et les solutions, mais juste la volonté de vous rappeler l'évidence en trois points. Trois indices qui mis bout à bout constituent une preuve : les années de vaches grasses sont loin derrière nous, et s'attendre au pire n'est pas forcément une mauvaise stratégie... Un chiffre brut avant de poursuivre cette amère démontration : Si le titre le plus vendu en septembre dépasse de peu peu les 250 000 copies (et ce avec l'effet du reboot, la présence de Jim Lee, une campagne marketing conséquente), le numéro un des X-men de ce même Jim Lee, voilà deux décennies, explosait la barre des huit millions d'unités. Dit comme ça, on aurait presque envie de pleurer.

Alors, pourquoi cet effondrement des ventes? Tout d'abord, parlons gros sous. Nous sommes en pleine prériode de crise mondiale, les porte-monnaies se dégarnissent et les budgets familiaux crient famine. Dans ce cas, c'est souvent sur les loisirs, les biens culturels, que porte l'économie la plus facilement réalisable. J'ai moins d'argent? Je me limiterai donc à un ciné au lieu de deux chaque mois, j'arrête de lire le quotidien (il y a des gratuits), et les comic-books, ce sera à dose homéopathique. J'exagère? A peine. Combien de lecteurs ont réagi ainsi, combien ont-ils opté pour ce serrage de vis salutaire à leurs bourses en danger? Le prix unitaire de nos bd est aujourd'hui de 2,99, voire plus souvent 3,99 dollars ! Une balle dans le pied que se tirent chaque mois les éditeurs.

Ensuite, admettons le franchement. Sur Internet, il n'y a pas que des mp3 et des films gratuits à télécharger. Les comic-books ne font pas exception à la régle. Dès leur jour de sortie, tous les titres disponibles ont fait le tour de la planète, sur des centaines de blogs spécialisés ou sur les forums d'echange. Combien de jeunes lecteurs, parmi la nouvelle génération, se contentent de lire distraitement sur leurs ordinateurs (tablettes tactiles, le must, un confort parfait, une véritable incitation) les comic-books qu'ils n'achètent plus? Un simple passage sur le forum downparadise, par exemple, m'a permis de repérer, en moins de cinq minutes et quelques recherches, l'intégral du catalogue de Lug/Semic, pour les nostalgiques, la grande majorité des albums Panini, toutes les nouveautés Dc liées au reboot, et des miliers de titres différents Marvel/Dc/Image classés sous forme de séries complétes ou de runs cohérent. Sans le téléchargement, combien de comic-books en plus seraient vendus chaque mercredi?

Et puis troisième point, l'évolution des moeurs, et de l'entertainment. Si autrefois les jeunes lecteurs considéraient le comic-book comme un des moyens d'évasion et de rêverie les plus probants, aujourd'hui, que valent 22 pages en couleurs, face aux consoles de jeu, aux ordinateurs, aux réseaux sociaux, à toute cette nouvelle industrie qui demande son lourd tribut économique et de temps disponible, qu'il a bien fallu aller trouver quelque part? Ceci concerne les jeunes, mais aussi nous autres les trentennaires et les quadras, qui avons manifesté au fil du temps un certain snobisme (j'attend la sortie du Tpb avant d'acheter... Je ne veux que des éditions luxueuses et reliées...) et sommes pareillement tombés dans le piège de la distraction fatale des autres rivaux modernes, à coté desquels le comic-book n'est plus attractif et pourvoyeur de bon temps. Un média déjà usé jusqu'à la corde, et en voie d'extinction? Ne raillez pas, la vérité est peut-être très crue et dure à entendre, et sans l'explosion du phénomène des adaptations cinématographiques, où en serions nous aujourd'hui? La survie des comics passe t'elle nécessairement par les salles obscures? L'activité même de lire, une bd ou un livre, est-elle devenue une pratique obsolète, ou si peu répandue qu'elle risque de devenir marginale pour de bon? Les gardiens du temple, les passionés que nous sommes, avec les responsables marketings des grandes maisons d'éditions, et les artistes eux même, chacun devra apporter son lot de solutions et fournir sa propre auto critique, si nous voulons que l'objet de notre flamme perdure. Et conjurer l'extinction, par manque de combustible.

PUNISHERMAX Tome 2 : BULLSEYE

Encore un pas en avant dans le gore malsain avec le second album de la nouvelle série du Punisher, PunisherMax. Après le combat acharné contre le Caïd et son homme de main des plus coriaces (un bucheron que rien n'arrête et qui a bien failli désosser notre justicier, le "Ménnonite", dans le tome 1), c'est cette fois Bullseye qui va se dresser sur la route de Frank Castle. Un Bullseye ici dépeint non seulement comme un assassin infaillible et infatigable, mais surtout comme un fou dangereux, un psychopathe effrayant, complétement allumé du cerveau. Il mène toujours à bien les missions qu'on lui confie, nous fait comprendre Jason Aaron. Qui n'hésite pas à ouvrir ce récit sur un meurtre très scatologique, histoire de donner le ton. Les âmes sensibles auront déjà refermé l'album, les autres pourront continuer la lecture, et il vont en voir de belles! Le Punisher, lui, n'est pas au mieux de sa forme. Il s'est pris une jolie rouste dans les premiers épisodes, et il est encore en phase de convalescence, bien aidé par un médecin qu'il a rencontré à l'époque du Viet-Nam. Le contrat que Wilson Fisk à placé sur sa tête plane comme une sourde menace inéluctable. Bullseye a décidé de s'approprier sa future victime, avant de terminer le boulot. Ce qui veut dire le comprendre, marcher dans ses pas, singer son parcours, en semant après chaque étapes morts et mutilés (au passage une pauvre famille innocente sert de simulacre lorsque le criminel décide de "ressentir" le drame personnel de sa cible). Jamais nous n'avions vu un "Tireur" (vieille appellation Vf de l'ère Lug/Semic) aussi répugnant. Nous savions qu'il était instable, mais à coté de cette version, Hannibal Lecter est un personnage de Carl Banks ou d'Hergé. Même son employeur comprend qu'il risque de créer autant de problèmes qu'il peut apporter de solutions. Avec lui, Aaron se lâche totalement, explore les bas-fonds de l'abject et piétine la bien pensance.



Mais ce récit est plus malin et profond qu'on ne le pense au premier abord. Outre l'outrance avec laquelle est dépeint Bullseye, c'est aussi le portrait de Frank Castle qui mérite qu'on s'y attarde. Castle n'est pas une machine à tuer infaillible, mais au contraire un homme plein de doutes, déjà vieillissant, avec ses cicatrices sur le corps et dans l'âme. Aaron ne le dit jamais, mais à travers l'obsession de Bullseye (se mettre dans la peau de sa victime, rejouer ses derniers instants en famille avant le massacre de celle ci) il met le doigt sur une question cruciale, jamais abordée de manière aussi intéressante et crédible auparavant : le Punisher est-il né après la tuerie de Central Park, ou bien était-il déjà présent, ce matin là, aux cotés de Maria et de ses enfants. Et dans cette seconde hypothèse, le bonheur familial de Frank, tel qu'on nous le vend et présente depuis des lustres, ne serait-il pas qu'une chimère, cachant en fait un secret inavoué? Je vous laisse lire pour vous faire une idée, mais au delà du carnage et du sang qui suinte de ces pages, ce discours traverse l'ensemble de cet arc narratif et le rend plus profond et poignant que tout ce que nous aurions supposé auparavant. Même les dessins de Steve Dillon semblent avoir gagné en noirceur, en maturité, en solennité, tout en gardant cette ligne pure et simple qui fuit tout réalisme exagéré. Il est toujours possible de parler de violence gratuite, et cet album n'échappe pas totalement à ce fléau des temps modernes, mais il renferme suffisament de substance pour en décréter la réussite et la pertinence. Une lecture choquante, paroxistique, presque "insane" comme disent les américains, par endroits. Mais aussi maligne, et révélatrice de ce qu'est vraiment le Punisher, zones d'ombre comprises. A dévorer absolument, pour les fans du personnage.

Rating : OOOOO

PEACEMAKER TRIES HARD : BOUFFONNERIE, SATIRE ET SOLITUDE

Le super-héros ringard et super violent Christopher Smith (alias Peacemaker) sauve un chien errant après avoir neutralisé un groupe de terro...