SPIDER-MAN DESTINS CROISES : LE GRAPHIC NOVEL DES ORIGINES

Restons dans la collection Marvel Graphic Novel de Panini, pour un autre album, ce mardi. Il s'agit de Destins Croisés, une aventure de Spider-Man. Une trame ultra classique puisqu'elle reprend les origines du héros, archi connues et répétées, du départ des vrais parents de Peter Parker (qui ne reviendront jamais d'une mission pour le compte du gouvernement) à la morsure de l'araignée, jusqu'au mariage avec Mary-Jane Watson. L'originalité étant (façon de parler) que tout ceci est raconté avec deux angles de vue différents, une narration à deux voix, puisque la belle rouquine elle aussi nous présente son propre passé cahotique et marqué par les drames familiaux, en alternance avec les déboires et les exploits de son futur mari. Angle de vue est le mot juste, car parfois les mêmes scènes sont observées de deux positions différentes. Emblématique en ce sens le soir où l'oncle de Peter est assassiné, et le jeune homme quitte en douce sa maison de Forest Hills, par la fenêtre, et en costume, pour aller se saisir du criminel encerclé par la police. Mary-Jane est à la fenêtre, et elle comprend que derrière le masque de cette star télévisée qui fanfaronne (Spidey a commencé sa carrière ainsi, vous le savez, non?) se cache son voisin, que sa tante ne cesse de vouloir lui présenter, pour en faire un probable boy-friend bien sous tous rapports. Peter et Mary-Jane, unis par les masques et les faux semblants : le premier est un super-héros en collants, qui jouit de mauvaise presse et protège son identité pour le bien de ses proches, la seconde une fille facile en apparence et toujours prête à faire la fête, pour cacher son désarroi, sa tristesse, devant une vie qui lui a donné peu de motifs pour sourire vraiment.

La rencontre entre les deux finira par avoir lieu, bien sur, et ce sera le mariage. Les drames, les luttes, sont ici représentés par la présence du docteur Octopus, qui va même un temps tomber sous le charme de la tante May, et de la possibilité d'une vie paisible aux cotés d'une charmante sexagénaire qui lui prépare de bon cookies et lui apporte la couverture. Ce n'est pas un des épisodes les plus glorieux ou crédibles de la longue carrière de Spider-Man, mais c'est ainsi, et rappelé dans cet album. La couverture est fort jolie, signée Gabriele Dell'Otto, mais l'intérieur est dans des tons très classiques, voire franchement rétro mais assumés. L'artiste est Alex Saviuk, qui a longtemps officié sur les séries du tisseur, principalement Web of Spider-Man dans les années 80 et 90. Le scénario est lui aussi confié à un habitué de la maison, ce Gerry Conway qui a écrit de nombreuses pages des aventures arachnéennes, et qui ne doit faire ici qu'une synthèse de nombreux éléments de la légende, pour un condensé parfois trop bref, trop rapide, mais au charme suranné qui pourra plaire aux lecteurs nostalgiques ou à ceux qui ignorent les premières années de vie du jeune Spider-Man. Il faut quand même bien reconnaître que ce graphic novel est tout à fait dispensable pour les lecteurs de longue date, et que passé le charme naïf qu'il dégage, il n'y a pas grand chose dans le fond, ni même sous la forme. J'oserais dire qu'il s'agit d'une excellente porte d'entrée pour accéder ensuite aux intégrales Spider-Man, publiées par Panini, et qui régaleront ceux qui veulent enquêter sur les exploits d'autrefois du monte en l'air. Dernière chose : sur les étales des bouquinistes, Destins Croisés se négocie facilement à trois quatre euros, avec un peu de chance. A ce prix, pourquoi pas?


DAREDEVIL GUERRE ET AMOUR - LE GRAPHIC NOVEL DE MILLER ET SIENKIEWICZ


Wilson Fisk a tout (ou presque) pour être heureux. Du haut de sa tour d'ivoire, il domine la ville, et écrase sous sa botte tous ceux qui osent, un instant fugace, se dresser sur son chemin. Le Kingpin du crime (le Caïd, c'est ainsi que nous avons appris à le connaître en Vf, à l'époque) c'est lui, et personne d'autre. Mais l'argent, ou la corruption, se sont rien devant le drame qui frappe Vanessa, son épouse. Dans un état quasi catatonique, elle ne parle plus, végète immobile dans son lit, prisonnière d'un monde, d'une relation, qui la pousse inexorablement vers la folie. Alors Fisk a une idée pour la "soigner". Il invite à New-York le célèbre psychiatre comportementaliste Paul Lunda, et pour s'assurer ses services, et sa passion dans la tâche, il fait enlever son épouse, Cheryl, une blonde magnifique au corps angélique. Victor, l'homme de main chargé de la basse besogne, est drogué aux amphétamines, et il est assailli par des visions monstrueuses qui ne s'arrangent guère quand Daredevil, guidé par Turk, un des souffre-douleurs du Kingpin que les lecteurs retrouvent toujours avec plaisir, parvient à libérer la belle. Cheryl est recueillie et hébergée chez Murdock, mais comble de l'ironie, lorsque Victor s'enfuit, dans un état second, et qu'il manque de se faire renverser par une voiture... il cherche (dans sa folie) l'appui d'un avocat et tombe sur la carte de visite de l'étude Nelson et qui vous savez! Le reste de l'histoire, c'est une question de mort, et de déchirure sentimentale.

Panini a sorti Guerre et Amour dans la collection Marvel Graphic Novel. Des albums pas simples à ranger sur nos étagères (format inhabituel pour un comic-book) mais qui rendent hommage aux artistes. Ici le scénario est d'un Frank Miller à son apogée, et à l'aise avec des personnages dont il possède les codes depuis longtemps. Le dessin est de Bill Sienkiewicz, qui livre des planches parfois hallucinantes, élégiaques, expressionnistes, qui superposent à l'avancée du récit les états d'âme et de conscience des intervenants, donnant corps à la folie, aux délires, mais aussi à la grâce sublimée, qui suintent d'une page à l'autre de cet album. Magnifique, c'est le mot. Le Kingpin y est dépeint de manière assez pathétique, physiquement monstrueux, démesuré. Ses méthodes sont criminelles comme toujours, lorsqu'il impose la réussite des soins pour que le docteur Lunda puisse revoir son épouse, mais il se retrouve piégé à son propre jeu, lorsque l'avancée du traitement pointe le problème de fond, la névrose de Vanessa, qui se voit plus en prisonnière (elle forme le mot "escape", à sa façon, avec des cubes) et ne rêve que de fuite. L'amour, le vrai, peut être guidé, orienté, par l'argent et le pouvoir, mais il ne peut perdurer ou s'épanouir totalement. Gagner, mais perdre, c'est le destin de Wilson Fisk, dans ce graphic novel élégant et de qualité, qui saura séduire même les lecteurs peu enclins à lire du super-héros en collants.


SILENT WAR (MARVEL UNIVERSE 6) : RETOUR SUR UNE MINI SERIE DE QUALITE, EN 2007/2008


Silent War est une de ces aventures discrètes mais de qualité que nous a offert Marvel, et donc Panini, sans pour autant l'avoir réclamisé sur tous les toits, et en avoir fait un des grands événements de l'année (2007 date de sortie américaine). C'est la collection Marvel Universe qui a eu le privilège de recevoir cette mini série, qui a prolongé avec plaisir les affres consécutifs à Civil War et House of M. Il est certes préférable de connaître les Inhumains, cette population particulière d’individus tous dotés de physiques et pouvoirs étranges, et qui vit réfugiée sur la face cachée de la Lune, pour profiter pleinement de l'aventure. Ils vont vivre un tournant décisif dans leur histoire, plus particulièrement leur chef, muet par choix, puisque son pouvoir réside dans ses cordes vocales : un simple souffle de Flèche Noire est c’est un village entier qui se retrouve rasé ! Une sorte de Lara Fabian au masculin, le talent en plus. Silent War est une conséquence directe de House of M et, plus précisément, de Son of M. En effet, les cristaux responsables des brumes tératogènes (une substance très importante dans la culture Inhumaine et permettant la mutation de ceux qui s'y exposent) ayant été dérobés par Pietro Maximoff, et étant maintenant en partie aux mains des autorités américaines, les Inhumains ont décidé de déclarer la guerre aux Etats-Unis afin de récupérer ce qui leur revient de droit. Blackagar Boltagon (Flèche Noire), puissant souverain des Inhumains (et accessoirement membre des Illuminati, la secte des grands cerveaux marvéliens qui exilèrent Hulk dans l'espace...), souhaitait des actions limitées et non létales mais, malheureusement, tout ne se passe pas comme prévu. Une fois lancé, le conflit risque fort de prendre des proportions dramatiques, chaque camp étant prêt à employer les grands moyens. 
La fin justifie t-elle toujours les moyens, et où se situe la frontière entre justice, rétribution, et terrorisme? Toute référence à des conflits actuels et fort récents est bien entendu volontaire. Il suffit de regarder la scène du marine américain qui se fait exploser en plein territoire Inhumain pour comprendre où veut en venir le scénariste, David Hine . Coté crayons, il faut rendre hommage au travail de Frazer Irving, qui ose échapper un peu aux conventions des styles réalistes de ses prédécesseurs , il est vrai bien épaulé par le bon boulot des coloristes. Silent War est une bande dessinée plus adulte que ce qu’elle semble, qui éloigne plus encore le microcosme Marvel de ce qu’il était avant les événements de Civil War. Le destin (ou plutôt la déchéance) de Quicksilver, le fils de Magneto, doté de super vitesse, est aussi un autre des plaisirs de cet ouvrage (il est dépeint comme un névropathe asocial et égocentrique, une petite frappe aux prises avec un héritage trop lourd pour ses frêles épaules), avec le triomphe provisoire de Maximus le frère aliéné du roi des Inhumais. Beaucoup d’actions, et de rebondissements, une saga complète que vous auriez grand tort d’ignorer ;d'autant plus que l'actualité va vite devenir brûlante pour les Inhumains, avec Infinity qui arrive en Vf dès le début 2014, et sa suite logique, Inhumanity, dont le titre est déjà un programme en soi. Offrez-vous un cours de rattrapage avant de vous y mettre.


AVENGERS 6 : EVOLUTION

Ce mois-ci, j'ouvre ma revue et pense lire les Avengers de Hickman, et là, coup de théâtre, c'est à la version bande-dessinée de Ocean's eleven que j'ai droit. Allez donc y comprendre quelque chose, vous. Je blague, mais c'est un peu ce qu'on ressent, en voyant les Vengeurs et les hommes de l'A.I.M (des terroristes, normalement...) se payer du bon temps, autour d'un cocktail sur fond de tapis verts. Pas de costume, pas d'action super-héroïque à proprement parler, dans ce premier épisode qui vient rompre nettement la tendance amorcée jusque là, mais une parenthèse où l'enjeu est de comprendre ce que vient faire l'A.I.M lors de la mise aux enchères d'une nouvelle arme potentiellement très dangereuse. Heureusement que Shang-Chi (et ses armes techno-martiales) se rappelle son devoir, pendant que ses camarades se la coulent douce... Dans le second épisode, retour à la normale, même si sur un tempo bien plus tranquille que les mois précédents. Les Avengers se transforment en bons professeurs (Thor se découvre des talents de compteur qui vous feront sourire) lorsqu'ils doivent donner un semblant d'éducation à ces petites créatures nées en Terre Sauvage, après l'explosion de la bombe d'évolution de Ex Nihilo. Elles paraissent n'avoir aucun défaut, aucun besoin, mais ce n'est pas pour autant qu'il n'y aura pas école. Et avec des profs comme Spidey ou Hawkeye, le diplôme de fin d'année est assuré. Inutile de souligner que Deodato Jr aux dessins est une garantie désormais maintes fois éprouvée, juste intéressant de voir comment Hickman ralentit l'allure aux abords du grand événement à venir, Infinity, dont les prémices seront pour janvier, en vf.

Dans New Avengers (deux numéros également) le ton est bien sinistre, depuis le début. On y cause fin du monde, et collisions entre Terres parallèles, ce qui provoque un effet domino néfaste à travers le multivers. La fin du monde qui se répète, encore et encore. Pour repousser ces "incursions" et sauver notre réalité, les Vengeurs (la Panthère Noire en tête) doivent se salir les mains et condamner la Terre. Enfin, les autres Terres, qui nous menacent. Ils reçoivent l'aide de Black Swan, qui semble comprendre ce mécanisme meurtrier, et les aide à fabriquer une arme adéquate. Mais lorsque l'incident survient en Latvérie, chez Fatalis (ou Doom, comme vous préférez), tout risque de se compliquer. En toile de fond, il se prépare un sale conflit entre le Wakanda et les atlantes. Namor souhaiterait éviter l'escalation de la violence, mais après qu'il ait ravagé la nation africaine en ébullition, personne ne risque de vraiment l'écouter. Hickman encore et toujours, avec du Deodato Jr, ici aussi. Mais pas seulement, le premier épisode étant à créditer à Steve Epting, un autre calibre qui ne déçoit jamais et connaît les Avengers comme ses poches.J'en oublierais presque la présence des Young Avengers, avec une histoire anodine en apparence, qui nous montre Speed et l'ancien Prodigy (il a perdu ses pouvoirs mutants) au travail. Pas sur le terrain, au combat, mais dans la vie professionnelle, comme vous et moi. Bien sur, ça dérape, et il va se passer quelque chose aux dépends du jeune bolide qui nous sera expliqué prochainement, parce que pour l'instant, c'est encore assez flou, mais on a au moins envie de savoir. Une invitée de passage pour le dessin, Kate Brown, plus habituée aux albums Marvel for kids. Un style juvénil et cartoony par endroits, ça se laisse lire facilement. Du coup on garde le cap vers le mois prochain, et on se prépare à Infinity, tous ensemble. Hop!


COVER STORY (19) : AVENGERS ANNUAL 2001


Hank Pym est très à la mode, en ce moment, puisque c'est autour de sa personne que se dénoue une partie de l'intrigue d'Age of Ultron. Bio-physicien certes brillant, un des plus grands cerveaux de la planète, Hank a toutefois une personnalité sujette à quelques "trous d'air" sérieux, et sa carrière est jalonnée de dépressions, interrogations identitaires, et autres méditations morbides. D'ailleurs, ses états de service en costume sont répartis entre différentes identités, de Ant-Man à Goliath, de Pourpoint Jaune (Yellowjacket) à Giant-Man. Toujours en déséquilibre parfait, parfois minuscule, d'autre fois géant, souvent en proie au doute, d'autres hyper confiant. Pour avoir un aperçu du bonhomme, jetez donc un oeil sur l'annual 2001 des Avengers. Cette année là, Kurt Busiek occupe le gros de l'équipe avec l'arrivée de Kang sur Terre, à notre époque, dans une saga cataclysmique comme on les aime. Mais certains Vengeurs doivent aussi résoudre le cas du docteur Pym, qui commence à devenir translucide, fait un malaise sévère, et révèle qu'il faut aller au secours de son double (!) qu'il séquestre dans une de ses bases secrètes, un nid de guêpes technologique, sur un arbre. Nous apprenons avec stupeur qu'il existe deux Henry Pym, nés de la scission amorcée lors d'une aventure précédente, toujours durant le règne de Busiek. Il faut dire que tout brillant savant qu'il soit, Pym nourrit un gros complexe d'infériorité dès lors qu'il s'agit de vivre une vie de couple avec sa flamme, Janet Van Dyne (Wasp), avec qui il a déjà eu de gros ennuis (violences conjugales, tout de même). C'est en voulant éliminer de sa personne les aspects les moins reluisants que Hank s'est dédoublé, et il va lui falloir à nouveau accepter sa part de faiblesse, de défauts, pour être complet. Une belle histoire qui parle de s'accepter, de connaître ses limites et de vivre avec. Pour y parvenir, les Avengers ont recours aux services d'une sorte de secte technologique, la Triune Understanding, et son grand maître Jonathan Tremont, sur les conseils de Triathlon, le super-héros de couleur, créé de toutes pièces par cette Triune. Entre celle-ci et nos héros, c'est la guerre froide, mais il faudra bien ravaler sa fierté, pour sauver Hank Pym. Dessins de Ivan Reis, alors à ses premières armes, déjà talentueux, pour un annual introspectif qui se relit avec un plaisir évident.


MARVEL SAGA 20 : DEADPOOL KILLUSTRATED


Autre dimension, autre Deadpool. Cette version là, bien consciente d'être un simple personnage de fiction, et ayant résolu de parcourir les univers parallèles pour trucider tous ceux que les progéniteurs (c'est à dire les artistes, les scénaristes, qui ne permettent pas à leur créatures d'échapper à la fameuse continuity, ni le les laisse jamais mourir bien longtemps) manipulent comme de vulgaires pantins, s'attaque cette fois-ci à un nouveau concept. Nous entrons de plein pied dans l'ideaverse, c'est à dire l'univers de fiction dans lequel évoluent les personnages de romans populaires, de contes, de la littérature mondiale. Éliminer ces personnages semble être le plus court chemin pour tarir la source d'inspiration qui est à la base de la création des héros Marvel. Du coup, Deadpool part découper en tranches la baleine Moby Dick, exploser la cervelle du petit Tom Sawyer, trucider Dracula ou le pauvre Don Quichotte, dont la folie douce n'est pas sans trouver un écho dans celle de Wade Wilson, justement. Cette quête totalement dingue est menée tambour battant par Cullen Bunn, dans quatre épisodes réunis ensemble, sur les pages de Marvel Saga 20. Seul le plus célèbre détective de l'histoire, Sherlock Holmes, paraît avoir quelques pistes sur la manière d'enrayer l'hémorragie. Et encore... Pour compléter l'ensemble, un one-shot consacré à Lady Deadpool, plutôt vulgaire, et totalement anecdotique. Bref, rien qu'y mérite de trop s' attarder.

Le point positif de ce Deadpool Killustrated, c'est bien entendu l'idée de départ, celle de plonger Wade dans un univers fait d'archétypes, de créations de fantaisie, qui sont elles mêmes à l'origine de la plupart des héros Marvel. Ceux ci ne seraient que des déclinaisons de modèles anciens, qu'ils soient littéraires ou fabuleux, comme le souligne souvent Bunn, avec des rapprochements pertinents sous forme de vision (Achab devient le général Thunderbolt Ross, c'est à dire le Hulk Rouge, le cavalier sans tête de Sleepy Hollow devient Ghost Rider, etc). Le gros problème de ce récit, c'est la manière dont évolue l'action. Certes, il s'agit avant tout d'une vaste récréation sanguinolente, mais justement, étant donné la nature du sujet et l'angle de vue plutôt intéressant, il était possible d'en faire quelque chose de plus que cette farce grossière, où tout n'est qu'un prétexte à une longue litanie de coups de sabre et autres aménités ultra violentes. Des morts sans génie, bien loin de ce que fit Garth Ennis avec le Punisher, par exemple. On esquisse un sourire par moments, c'est vrai (la mort de la petite Sirène), mais la plupart du temps on reste de marbre devant cette débauche stérile, et les blagues à froid du mercenaire with a mouth sont loin d'être inoubliables. En cela le grand débat sur la traduction peut être lancé à nouveau. Le traducteur doit-il rester fidèle aux références exposées dans la version de départ, ou doit-il adapter en fonction des repères culturels du lecteur français, quitte à convoquer Dsk dans les élucubrations de Deadpool, ou encore le fameux runing gag des Nuls, le célèbrissime Régis est un con? Les dessins sont de Matteo Lolli, plutôt en accord avec le ton de cet album, assez simple et clairs, même si sans grande personnalité. Reste que les quatre volets de cette aventure, à moins de six euros, ce n'est pas si mal, rapport qualité/prix, mais je reste persuadé que Cullen Bunn a manqué son coup, et fait preuve d'une grosse paresse, ou négligence, en survolant grossièrement un projet qui méritait un tout autre traitement. La suite sera dans quelques mois, avec la dernière partie de la trilogie de Bunn (après Deadpool massacre Marvel, et ce Killustrated) qui s'intitule Deadpool massacre Deadpool. 


MIKROS ARCHIVES TOME 1 : LES TITANS MICROCOSMIQUES


Voici venir un des comic-books les plus français qui soient, dont l'action se situe sur un campus américain (Harvard), avec des héros "stars and stripes" qui frisent la caricature. Place donc à un sacré trio. Un boxeur au grand coeur, qui n'est pas sans rappeler Ben Grimm, Bobby Crabb dit "l'horrible chose de Harvard". Luke Ross, lui, est un incroyable sportif, champion du décathlon dont il pulvérise tous les records, mais c'est aussi un entomologiste de génie. Il est amoureux de Priscilla Conway, une gymnaste hors-pair, dont le sobriquet veut tout dire : Saltarella. Par le plus grand des hasards, ces trois-là vont faire une rencontre du troisième type aussi inattendue qu'improbable. La race des Swizz a traversé l'espace temps pour venir coloniser notre planète, pour rendre aux insectes la place qui devrait leur revenir, celle de race dominante. Les aliens vont utiliser un rayon de leur création pour transmuter Bobby, Luke et Priscilla en insectes, mais le processus sera brutalement interrompu, et le résultat final est la création de trois individus dotés de super-pouvoirs malgré eux, physiquement effrayant (de gros yeux à facettes pour Luke, une pince géante pour Boby, des antennes pour Saltarella) et microscopiques. Par la suite ils apprendront à moduler leur taille, et effectuer une carrière durable dans le super-héroïsme en costume. Leur première tâche est évidente : mettre un terme à l'invasion programmée des Swizz, dont le chef militaire, un certain Termitor, envisage même de féconder Saltarella pour en faire la reine d'une nouvelle race. Ce même Termitor qui va investir le corps du professeur Hoffman, un génie scientifique frustré, pour assumer le titre de Super Termitor, et entamer la colonisation finale de la Terre.

Mikros est par moments ultra naïfs, à d'autre simplement époustouflant et dingo, comme lorsque les créateurs de cette Bd se mettent eux même en scène, et vivent au sein même de leurs aventures! De la méta bande-dessinée à la française, sous perfusion super-héroïque américaine, on en redemande. En fait il est juste dommage que ce volume soit présenté en noir et blanc, certes sur un papier de qualité, fort agréable, qui donne au trait de Jean Yves Mitton (ou Milton, comme il aimait se faire créditer selon la mode dominante et les attentes du marché) toute sa noblesse. Les couleurs, à l'époque de la première publication sur les pages de Mustang (puis la série poursuivra son chemin dans Titans), un des mensuels mythiques de la maison d'édition Lug, contribuaient notablement à l'atmosphère magique et bigger than life de ces encapés américains parlant comme des titis parisiens. La carapace de Crabby, aux couleurs américaines, est un must de kitsch et de génie fusionnés. Impossible pour les quadras d'aujourd'hui, qui allaient chez le marchand de journaux pour retirer les copies régulières de Strange et consorts dans les premières années 80, de ne pas verser une larme nostalgique au souvenir de cette époque glorieuse, des pionniers du super-héroïsme, nimbée d'innocence et mutilée souvent par la censure. Aujourd'hui ces aventures ingénues au parfum inoubliable de notre jeunesse trônent sur les étagères de nos librairie, dans cet album avec couverture rigide qui fera un excellent cadeau pour vos aînés.
Ps : Ne cherchez pas Malcom Naughton, le superviseur de Mikros n'est autre que le regretté Marcel Navarro, un autre de ces passionnés sans qui notre passion commune ne serait peut être pas la même aujourd'hui, en France. Merci les amis, pour tout!



Mikros Archives, publié chez Delcourt.

LE PODCAST LE BULLEUR PRÉSENTE : ROUGE SIGNAL

 Dans le 206e épisode de son podcast, Le bulleur vous présente Rouge signal, album que l’on doit à Laurie Agusti, un ouvrage publié chez 204...