Soulfire est un titre un peu particulier, car le regretté Michael Turner, ici à l'apogée de sa créativité, et épaulé au départ par les conseils avisés de Jeph Loeb, n'aura jamais eu l'occasion d'achever l'ouvrage commencé. Après avoir réalisé les six premiers épisodes, c'est son ami Joe Benitez, un artiste brillant depuis devenu célèbre grâce à Lady Mechanika, qui poursuit l'histoire en s'aidant notablement des notes et des ébauches disponibles, jusqu'à atteindre le dixième numéro. Turner est au faîte de son style, disions-nous. Ses planches sont particulièrement "cinématographiques" et audacieuses, elles débordent d'une énergie fougueuse, entre dragons impétueux, silhouettes féminines plus élégantes et tentatrices que jamais, et un montage frénétique, qui n'oublie cependant pas de rester lisible. Tous les personnages sont rapidement introduits et l'introspection psychologique n'est qu'ébauchée, pour privilégier une forme d'humour détaché (mais Malikai est ses amis sont très jeunes, que voudriez-vous de plus, le raisonnement par la pensée présocratique ?). Le principe de Soulfire est simple. La magie dominait autrefois le monde, mais son influence et son pouvoir ont décliné, et elle a fini par disparaître presque totalement. Malikai ne le sait pas (et pour cause, c'est un gamin insouciant voire irritant) mais il est le Samusara, c'est à dire le "porteur de lumière", celui qui va devoir rallumer la magie, un jour prochain. Mais l'âge des merveilles promis est tributaire de sa capacité à dompter ses nouveaux dons, et de l'opposition du perfide et multimilliardaire Rainier, qui a de toutes autres visées sur l'avenir du monde. L'ensemble constitue une opposition entre la magie et ses possibilités illimitées, et la science et son raisonnement plus aride et logique, comme deux pôles distants qui se repoussent sans cesse, tout en présentant dans le même temps des points communs inéluctables. Ajoutez à ceci la sensualité et l'esprit des temps des années 1990, que Michael Turner parvient à transmettre à tout instant, magnifiquement épaulé par les couleurs de Peter Steigerwold, Beth Sotelo e Christina Strain, et vous obtenez une sorte de document historique vraiment agréable, que Delcourt nous sert sur un plateau, agrémenté de l'aperçu de six pages d'une autre série de Michael Turner, Ekos, dont le développement a été stoppé au profit de Soulfire, après le vote des fans de l'artiste. Le genre de (re)lecture qui tombe à point pour un été brûlant.
SOULFIRE : LA SCIENCE-FICTION FANTASY DE MICHAEL TURNER
SPECIAL STRANGE : LE GRAND RETOUR AVEC ORGANIC COMICS & ORIGINAL WATTS
Ceux que la société considère en réalité comme des freaks sont emprisonnés à San Francisco, mais ils vont vite devoir reprendre du service (et donc s'évader) pour contrer la menace de Maelström, un scientifique malheureux et frustré qui décide de se venger en créant de terribles catastrophes naturelles. C'est un vrai retour aux sources, dans un épisode spécial qui reprend les codes de l'époque, aussi bien dans la mise en couleur que dans la narration. Mitton n'est pas au dessin mais Oliver Hudson capture parfaitement l'esprit des temps d'alors. Les planches sont très classiques et fouillées, et le dessinateur parvient à nous convaincre amplement. Si vous aimiez les french comics dans les années 80, nul doute que vous allez passer un excellent moment. La première série publiée s'appelle de son côté Phantasmic Force; il s'agit d'une des créations tardives de Jack Kirby, qui n'a jamais connu les honneurs d'une version française digne de ce nom. Une histoire d'extraterrestres qui infiltrent notre planète dans l'espoir de répliquer les formes de vie qu'ils y rencontrent, pour asseoir leur domination et rétablir la communication avec un avant-poste installé depuis des temps immémoriaux. Même s'il s'agit d'épisode désormais très datés, on retrouve ce dynamisme et ce sens du merveilleux qui sera par la suite digéré et reproduit à sa manière par Rob Liefeld (et tout un pan des années 90). Il y a certes de la naïveté mais aussi beaucoup d'enthousiasme, et c'est une découverte à faire, réellement. Elle est d'ailleurs parfaitement documentée, avec un reportage très pertinent au sein d'un rédactionnel riche et pertinent. The mighty Titan de Joe Martino et Luca Cicchiti nous présente une histoire assez classique, celle d'un super-héros dont tout le monde ignore l'identité, y compris apparemment sa propre famille, et aux prises avec sa Némésis, un inventeur qui utilise ses prouesses technologiques et des hommes de main qu'il manipule, pour entretenir le sempiternel combat de l'homme de bien contre le mal incarné. C'est agréable à lire et plutôt intelligent, on ne s'ennuie pas. Pour terminer, Thierry Lancelot, qui fait partie des architectes du projet Special Strange, est lui-même le scénariste de la série The Orb, illustrée par Chris Orpiano. Le détenteur des pouvoirs de l'Orbe est en fait une sorte d'incarnation de la conscience collective des anciens représentants de la civilisation des Aleph. Un peu comme si les Gardiens de Oa (Green Lantern) fusionnait avec l'Intelligence Suprême des Kree, pour donner naissance à un Super Captain Marvel Quasar. Beaucoup d'influences qui font de ce titre ce qui se rapproche le plus d'une série "codifiée comic book américain de super-héros", et qui ne perd pas de temps en palabres, appuyant sur la pédale de l'accélérateur dès ce premier numéro, qui se termine par un de ces cliffhangers qu'aiment tant les lecteurs de revues sérielles (vous vous souvenez de Byrne sur Alpha Flight, dès le premier épisode, hein?). Une digne conclusion, très efficace, pour un Special Strange qui s'affranchit donc totalement des titres qui ont fait sa gloire, tout en conservant l'âme de ces productions, ici vivantes sous des formes subtilement différentes, mais absolument méritoires de votre intérêt et de votre curiosité. Vous trouverez aussi une longue interview/portrait de Bob Layton et le premier chapitre de ce qui sera la présentation des hommes et des femmes qui ont marqué les années Lug. Ne manque à l'appel qu'une bonne page du courrier des lecteurs (et pour ça il va falloir écrire, logique…) et l'opération fontaine de jouvence aura fait son effet. L'ensemble nous parait suffisamment structuré, crédible, et d'une qualité telle, que Special Strange a toutes les cartes en main pour aborder une seconde carrière prolifique. Welcome back !
LA SENSATIONNELLE SHE-HULK : L'OMNIBUS VERT DE RIRE AVEC JOHN BYRNE
LE PODCAST LE BULLEUR PRÉSENTE : FEUILLES VOLANTES
Dans le 130e épisode de son podcast, Le bulleur vous présente Feuilles volantes, album que l’on doit à Alexandre Clerisse, édité chez Dargaud. Cette semaine aussi, on revient sur l’actualité de la bande dessinée et des sorties avec :
– La sortie de l’album Rien ne sert de m’aimer que l’on doit à Jean-Christophe Morandeau et aux éditions La boite à bulles
– La sortie de l’album Partir, sur les chemins de Compostelle que l’on doit à Lili Sohn et aux éditions Casterman
– La sortie de l’album BFF que l’on doit au scénario conjoint de Thomas Cadène et Joseph Saffiédine, au dessin de Clément C. Fabre et c’est édité chez Delcourt
– La sortie du septième tome des Cahiers d’Esther intitulée Histoires de mes 16 ans édité chez Allard éditions
– La sortie du premier tome sur deux de Céleste « bien sûr monsieur Proust » que l’on doit à Chloé Cruchaudet et aux éditions Soleil dans la collection Noctambule
– La sortie en intégrale de la série Les beaux étés que l’on doit au scénario de Zidrou, au dessin de Jordi Lafebre et c’est édité chez Dargaud
SAISON DE SANG : LE POUVOIR DU DESSIN ET DU SILENCE (LES COMICS CHEZ DUPUIS)
BREAKWATER : L'AMITIÉ ET L'HUMANITÉ SELON KATRIONA CHAPMAN
Bienvenue à Brighton, une station balnéaire du sud de l'Angleterre, à l'ambiance cotonneuse. Pour être plus précis, bienvenue au Breakwater, qui est un grand cinéma de quartier en perte de vitesse. Si les lieux furent autrefois somptueux et très fréquentés, c'est loin d'être le cas aujourd'hui. On y retrouve la vie quotidienne de plusieurs employés et tout particulièrement Chris, une quadragénaire assez anonyme et dont la vie sentimentale et amicale est pratiquement au point mort. Elle est chargée un beau jour d'accueillir le petit nouveau, le dénommé Dan(iel). Gay, asiatique, adepte de la fête et toujours disponible et sympathique avec les autres, il ne va pas tarder à trouver sa place au sein de l'établissement et à convaincre Chris de s'ouvrir un peu. L'histoire se concentre aussi sur d'autres personnages qui travaillent dans le cinéma, et notamment un jeune gamin de 16 ans un peu paumé, qui n'a pas trouvé sa place dans le système scolaire et qui a quelques difficultés pour se fondre dans le moule de la vie professionnelle. Tous ces individus effectuent des tâches très routinières mais qui ont au moins l'avantage de ne pas être trop stressantes ou de demander une qualification et une concentration sans faille; en retour il faut parfois gérer l'insatisfaction du public, qui n'hésite pas à être désagréable, ou supporter de petites humiliations au quotidien, comme nettoyer toutes les saletés que laissent les spectateurs désobligeants derrière eux. Et là, je vous sens venir… mais tout ce que nous avons pu lire jusqu'à maintenant, cela peut-il suffire à faire d'un album une grande et belle épopée, ou bien ces portraits d'âmes en peine, esseulées et fragilisées, sont-ils à eux seuls l'essence même de cette bande dessinée au rythme lent et à la longue envoûtant ? La réponse est oui et non à la fois, mais clairement il faut bien comprendre qu'ici aucun effet spécial ne viendra interrompre votre lecture, qui ressemble à une expérience humaine aussi banale que poignante. C'est ce qui en fait le charme.
BATMAN CHRONICLES 1987 VOLUME 1 : LA NOUVELLE COLLECTION URBAN COMICS
THE BOYS SAISON 3 : TOUS LES COUPS SONT PERMIS
FATHOM : DANS LES PROFONDEURS DE L'OEUVRE DE MICHAEL TURNER
LE PODCAST LE BULLEUR PRÉSENTE : SPIROU L'ESPOIR MALGRÉ TOUT
Dans le 129e épisode de son podcast, Le bulleur vous présente la quatrième et dernière partie de L’espoir malgré tout, album que l’on doit à Émile Bravo, édité chez Dupuis. Cette semaine aussi, on revient sur l’actualité de la bande dessinée et des sorties avec :
– La sortie de l’album Les reflets du monde — En lutte de Fabien Toulmé, un titre édité chez Delcourt dans la collection Encrages
– La sortie de l’album Les fleurs de la guérilla que l’on doit à Lorenzo pour le scénario, Léo Trinidad pour le dessin et aux éditions Les Arènes BD
– La sortie de l’album Soixante printemps en hiver que l’on doit au scénario d’Ingrid Chabbert pour le scénario, Aimée de Jongh pour le dessin et aux éditions Dupuis dans la collection Aire libre
– La sortie de l’album Automne en baie de somme que l’on doit à Philippe Pelaez pour le scénario, Alexis Chabert pour le dessin et c’est édité chez Grand angle
– La sortie de l’album Djemnah les ombres corses que l’on doit à Philippe Donadille pour le scénario, Patrice Réglat-Vizzanova pour le dessin et c’est édité chez Delcourt
– La réédition de l’album Trompe la mort que l’on doit à Alexandre Clerisse et aux éditions Dargaud
JUDGE DREDD LES AFFAIRES CLASSÉES : TOME 7 CHEZ DELIRIUM
À chaque fois que j'ai l'occasion de discuter avec un lecteur de bande dessinée qui ne s'intéresse absolument pas au Judge Dredd, l'excuse est plus ou moins la même : il s'agit selon lui d'un comic book violent avec pour protagoniste un personnage pseudo fasciste qui impose sa loi par la force; bref, le Punisher avec une moto et un insigne. Sauf que cette définition sommaire passe complètement à côté de son sujet, c'est-à-dire qu'elle ignore la drôlerie, le sarcasme, le commentaire politique et social qui sont présents
UNIVERSCOMICS LE MAG' #24 DE JUIN 2022 : téléchargez votre numéro gratuit
UniversComics Le Mag' #24 JUIN 2022 84 pages GRATUIT
LA NUIT DES LANTERNES CHEZ DELCOURT : LE DEUIL, LA COLÈRE, L'HORREUR
Le personnage principal de cet album signé Jean-Étienne s'appelle Eloane. C'est une jeune femme qui retourne dans la maison familia...

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Comme chaque samedi désormais, nous vous proposons de plonger dans l'univers de la bande dessinée au sens le plus large du terme,...
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WORLD WAR HULK (Marvel Deluxe - Panini) A l'occasion de la sortie (avant les fêtes, bien entendu) du Marvel Deluxe consacré à...
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UNIVERSCOMICS LE MAG' 46 Octobre 2024 / 60 pages / gratuit Disponible ici (lecture + téléchargement) : https://madmagz.app/fr/viewer/...