La nouvelle collection Batman Chronicles pourrait être vaguement rapprochée de ce que propose Panini avec ses intégrales; mais ici il s'agit d'un album à la pagination encore plus conséquente et présenté doté une couverture souple, ce qui le rend particulièrement maniable. De plus, si les épisodes de Batman sont édités dans leur ordre chronologique à partir de 1987, ils sont aussi espacés par des articles critiques, des éditoriaux ou tout simplement la traduction de la page du courrier des lecteurs des albums Vo, et c'est un plus indéniable pour le lecteur curieux. Le choix de l'année de départ pour ce projet n'est pas innocent; nous sommes en effet au lendemain du grand crossover Crisis On Infinite Earths qui change la donne pour l'univers DC, et c'est aussi l'époque où des scénaristes au talent fou sont en train de révolutionner la manière même de faire des comics, à commencer par Alan Moore et ses Watchmen. Le génial scénariste irascible livre d'ailleurs une vingtaine de pages dans un annual présent dans ce premier tome (une triste et touchante histoire d'amour avec le troisième Gueule d'Argile du nom). Quand je parle de révolutionner la manière de faire des comics, Batman n'échappe pas à ce procédé. Ainsi nous trouvons dans ces Chronicles la saga en quatre parties Batman Year One de Frank Miller et David Mazzucchelli, qui s'ouvre fort justement par l'arrivée de deux personnages fondamentaux à Gotham, le commissaire Gordon, qui vient d'être muté et va devoir apprendre à composer avec la faune interlope locale et la corruption de la police, mais aussi Bruce Wayne, dont les parents ont été assassinés lorsqu'il était jeune et qui s'est absenté pendant de nombreuses années, le temps de se former à l'étranger pour fomenter sa lutte contre le crime à venir. Est-il bien utile de revenir sur cette histoire que vous devez tous probablement connaître, et qui redéfinit les premiers pas d'un héros ici présenté comme quelqu'un d'inexpérimenté et d'imprudent, mais qui peu à peu commence à s'adapter à sa croisade, d'autant plus qu'il trouve en Gordon un allié précieux pour le seconder et l'aiguiller ? BYO est magistralement orchestré par deux artistes au talent conséquent et dont le style tranche un peu par rapport au reste de notre album. Il suffit par exemple de comparer avec les deux premiers épisodes qui précèdent qui sont eux l'occasion de plonger dans une ambiance bien plus vintage.
Max Allan Collins, Jim Starlin et Dennys Cowan racontent l'histoire d'un individu à la psyché perturbée, un ancien flic aux méthodes expéditives dont la famille a été assassinée. Un geste tragique qui le pousse à vouloir rendre justice à sa manière sous le costume de Batman, une version ultra-violente et déviante du héros, assumée par un psychotique qui finit par douter même de son identité, et se prendre pour l'original. Un récit en deux parties, pathétique et poignant. Les autres épisodes de la série Batman présents dans ce premier volume permettent de se familiariser avec un petit loubard qui traîne dans Crime Alley et qui est orphelin. Jason Todd est appelé à devenir le nouveau Robin, malgré la promesse qu'avait fait le Dark Knight de ne plus être épaulé par un gamin dans ses enquêtes. Jason n'a rien du Robin traditionnel; son éducation est à faire et sa première rencontre avec le super-héros qui va le prendre sous son aile se déroule lorsqu'il essaie de lui voler les pneus de sa Batmobile, pensez donc ! Les deux compères vont vite devenir un duo dynamique notamment quand il va s'agir d'affronter Harvey Dent -alias double face- qui est aussi le responsable de la mort du père de Jason. De grands noms se relaient pour illustrer ces aventures; citons entre autres Dave Cockrum, que tous les fans des X-Men connaissent par cœur, ou encore Chris Warner et Jim Aparo. Cerise sur le gâteau, un épisode complètement barré où le petit Jason intègre une école dirigée par une vieille dame d'âge respectable, mais dont les mœurs le sont beaucoup moins. Sous l'apparente placidité d'une directrice d'école alternative et indépendante, elle enseigne la criminalité à tous ceux qui tombent sous sa coupe. Il y a souvent des touches d'humour dans ces épisodes, et Batman lui-même commente certaines de ses mésaventures avec un bon mot. Même si les récits sont un peu datés et la mise en couleurs trahie son époque, le dessin lui reste très souvent de haute facture et globalement on passe un excellent moment de lecture. En complément, il est possible de retrouver le graphic novel Son of the Demon qui nous relate la relation entre Bruce Wayne et Talia Al G'hul, qui va donner naissance au petit Damian, dont nous connaissons aujourd'hui très bien les aventures. Je passe beaucoup plus vite sur cette histoire réalisée par Mike Barr et Jerry Bingham, car nous l'avons déjà abordée à plusieurs reprises au travers des différentes éditions qu'Urban Comics nous a proposés. C'est là aussi un récit très important et réussi, qui fait partie de ces histoires que tout fan du personnage se doit absolument de connaître et de posséder. De bons débuts donc pour ces Batman Chronicles, qui à défaut de présenter uniquement de l'inédit ou de l'inattendu pose les premiers jalons d'une collection qui devrait en ravir plus d'un.
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