Même si elle n'est pas (et de loin) le personnage le plus populaire de par chez nous, Wonder Woman est incontestablement une figure incontournable des comic books américains, au point d'être membre de la "sainte trinité" Dc Comics, avec Batman et Superman. Une série lui est consacrée dès 1941 grâce à William Moulston Marston, qui s'amuse comme un fou avec cette héroïne forte et sûre d'elle même, au beau milieu d'un monde d'hommes soudain frappés dans leur virilité dominante. Je passerai les références au sado-masochisme et au bondage, sous-jacentes mais évidentes pour le lecteur averti, et qui firent rouler bien des yeux, aux même titre que les formes et le costume provoquant (pour l'époque) de la belle amazone. Dans les années 1960, Wonder Woman connaît un regain de popularité grâce à une présence fixe au sein du groupe de la Justice League, mais comme le remarque alors Julius Schwarz, le grand editor de la Distinguée Concurrence, le problème n'est plus de présenter une femme dans un contexte masculin, mais de lutter face à d'autres héros (ceux de chez Marvel) plus adultes, complexes, et nuancés. Le réalisme commençait à écorner sérieusement le prestige de Superman et consorts. L'heure était venue de tenter quelque chose de différent, de plus audacieux, de respirer l'air des temps et de le métaboliser. Chez Wonder Woman, la tentative est transformée en 1968-69, années durant lesquelles sa série va connaître un bouleversement radical. C'est un spécialiste du genre qui est aux manettes, ce même Dennis O'Neil qui a œuvré auparavant sur Superman, Batman, et bien sûr a brillé avec le duo Green Lantern/Green Arrow, dans un passionnant road-movie super-héroïque. Dans le numéro 178 de son titre mensuel, Diana change, et de belle manière. Tout débute lorsque Hyppolite (sa mère) est contrainte, avec son peuple d'amazones, de quitter notre plan dimensionnel. La princesse refuse de suivre ses sœurs car elle est trop liée à la vie qu'elle mène parmi nous autres, simples mortels, et plus particulièrement à Steve Trevor, dont elle est amoureuse, et qui a bien des soucis. L'amour vous fait faire de ces bêtises, parfois…
Ce genre de décision a un prix élevé : Wonder Woman doit renoncer à ses pouvoirs et à son statut semi-divin. C'est alors un grand changement pour la série, qui doit mettre de coté la plupart des artifices qui ont fait son succès, des avions invisibles au lasso magique, en passant par les divinités grecques. La super-héroïne est enfin et exclusivement Diana Prince, une femme mortelle, ce qui bouleverse le contexte et les attentes du lecteur, tout à coup projeté dans des intrigues et des considérations quotidiennes et réalistes qui n'étaient pas l'apanage du titre auparavant. Certes, l'action ne fait pas faux bond. Le nouveau scénariste Mike Sekowsky (qui remplace donc O'Neil) introduit le personnage de I-Ching, un mystique aveugle qui se taille une place de choix dans la série de l'Amazone. C'est lui qui enseigne à Diana ce qu'elle doit savoir pour maîtriser les arts martiaux, et s'accomplir dans un nouveau rôle d'agent spécial bien différent de la déesse aux super pouvoirs, qui stoppe des balles avec ses bracelets. Car cette Wonder Woman là est vulnérable. Sekowsky livre une séquence haletante et riche en adrénaline face à la perfide Doctoresse Cyber, au beau milieu d'une Amérique peuplée de hippies, Hell's Angels, et où souffle le vent de la contestation et le flower power. Sekowsky est en charge également des dessins, et il s'en donne à cœur joie pour plonger le titre en full immersion dans une beat-society où l'herbe se fume dans des costumes dignes de Carnaby Street et où le décor se confond avec la pop art d'Andy Warhol. C'est le psychédélisme qui déboule dans les comic books, par la grande porte. Le genre fantasy revient par moments, comme lorsque Diana se retrouve aux prises avec le Dieu Arès, mais globalement c'est le réalisme et la peinture d'une époque qui prédomine, jusque dans les dialogues, et ceci sans jamais tomber dans la banalité complète. L'encrage de Dick Giordano contribue à faire de ces numéros un franc succès artistique, qui est un témoignage éloquent du virage de la fin des années 1960 et de son héritage dans les comics. Inutile de dire que si Urban Comics décide un jour prochain de nous offrir en Vf cette tranche d'histoire de Wonder Woman, mon conseil serait de se procurer l'album, sans trop y réfléchir. Sinon, vous pouvez trouver (en partie) ces épisodes dans une vieille revue Arédit/Artima, les numéros de Aventures Fiction de 1975. Bonne chance avec les brocantes!
Ce genre de décision a un prix élevé : Wonder Woman doit renoncer à ses pouvoirs et à son statut semi-divin. C'est alors un grand changement pour la série, qui doit mettre de coté la plupart des artifices qui ont fait son succès, des avions invisibles au lasso magique, en passant par les divinités grecques. La super-héroïne est enfin et exclusivement Diana Prince, une femme mortelle, ce qui bouleverse le contexte et les attentes du lecteur, tout à coup projeté dans des intrigues et des considérations quotidiennes et réalistes qui n'étaient pas l'apanage du titre auparavant. Certes, l'action ne fait pas faux bond. Le nouveau scénariste Mike Sekowsky (qui remplace donc O'Neil) introduit le personnage de I-Ching, un mystique aveugle qui se taille une place de choix dans la série de l'Amazone. C'est lui qui enseigne à Diana ce qu'elle doit savoir pour maîtriser les arts martiaux, et s'accomplir dans un nouveau rôle d'agent spécial bien différent de la déesse aux super pouvoirs, qui stoppe des balles avec ses bracelets. Car cette Wonder Woman là est vulnérable. Sekowsky livre une séquence haletante et riche en adrénaline face à la perfide Doctoresse Cyber, au beau milieu d'une Amérique peuplée de hippies, Hell's Angels, et où souffle le vent de la contestation et le flower power. Sekowsky est en charge également des dessins, et il s'en donne à cœur joie pour plonger le titre en full immersion dans une beat-society où l'herbe se fume dans des costumes dignes de Carnaby Street et où le décor se confond avec la pop art d'Andy Warhol. C'est le psychédélisme qui déboule dans les comic books, par la grande porte. Le genre fantasy revient par moments, comme lorsque Diana se retrouve aux prises avec le Dieu Arès, mais globalement c'est le réalisme et la peinture d'une époque qui prédomine, jusque dans les dialogues, et ceci sans jamais tomber dans la banalité complète. L'encrage de Dick Giordano contribue à faire de ces numéros un franc succès artistique, qui est un témoignage éloquent du virage de la fin des années 1960 et de son héritage dans les comics. Inutile de dire que si Urban Comics décide un jour prochain de nous offrir en Vf cette tranche d'histoire de Wonder Woman, mon conseil serait de se procurer l'album, sans trop y réfléchir. Sinon, vous pouvez trouver (en partie) ces épisodes dans une vieille revue Arédit/Artima, les numéros de Aventures Fiction de 1975. Bonne chance avec les brocantes!
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