LOW TOME 2 : OPTIMISME DE SURFACE

Stel Caine est d'un optimisme à toute épreuve. Elle est peut-être la dernière à penser qu'il est encore possible de sauver le monde, alors que depuis des siècles tous les habitants de la Terre vivent dans les profondeurs des océans, et que plus personne n'est jamais remonté à la surface, rendue inhabitable par notre soleil mourant. Des sondes ont été envoyé dans l'espace, à la recherche d'une planète à coloniser, mais cela fait bien longtemps et tout espoir semble avoir été abandonné. Jusqu'au jour où l'une d'entre elles est revenue de son périple, avec peut-être de bonnes nouvelles pour l'humanité. Le voyage de Stel vers la surface n'a pas été sans heurts, elle a ainsi perdu son fils Marik, qui a succombé lors de jeux violents dans la mythique "troisième cité". Mais au passage elle a pu également retrouver ses filles, kidnappées durant l'enfance, et bénéficier d'une aide précieuse en la personne de Zem et Mertali, qui autrefois luttaient dans l'arène aux côtés de Marik. Même l'optimisme le plus forcené finit par être ébréché lorsque les événements s'accumulent, et que le quotidien et immergé dans la tristesse et le désespoir. Si des personnages comme Zem ont un passé vraiment peu glorieux et trouvent l'inspiration dans notre héroïne et son fils défunt, pour changer et devenir quelqu'un de meilleur, Stel elle-même a de plus en plus de mal à garder le cap et les rencontres sous-marines n'arrangent pas les choses, avec tout à coup des vampires au pouvoir psychique, capable de faire miroiter aux victimes les instants les plus agréables de leurs vies, afin de mieux boire leur sang. Noir c'est noir, comme le chante un célèbre rocker national, et Rick Remender continue de dresser tant d'embûches devant ses personnages qu'on les admire à les voir rester debout, contre vents et marées. 


Entendons nous bien, nous sommes toujours ici face à une oeuvre magistrale et fantasmagorique. La richesse de l'univers mis sur pieds par Remender se dévoile strate après strate, et se permet le luxe de prendre des sentiers de traverse, où de dérouler le récit selon un rythme et une logique pas forcément attendus. Ainsi ce second volume s'ouvre avec Della, une des filles de Stel, qui a fait du chemin depuis son enlèvement. Elle est désormais ministre de la pensée, et sa tâche consiste principalement à lutter et réprimer toute manifestation d'espoir, et toute velléité artistique. L'art est une arme de destruction massive, nous le savons bien, et dans cet univers à genoux, c'est bien sûr l'état qui assure le contenu et les orientations des pensées du peuple. Et là on se dit que Greg Tocchini s'approche du génie pur et simple. Les cases sont pour la plupart magnifiques, foisonnantes de détails, mériteraient un agrandissement A4 chacune pour être appréciées à leur juste valeur. Décors superbes, corps admirablement surlignés comme dans les deux dernières planches qui prétendent à la perfection, mais aussi de l'action, du dynamisme, le tout restant fort lisible, et mis en couleurs avec une maestria bluffante par le dessinateur lui même (qui laisse la main pour les trois numéros suivants, d'ailleurs légèrement en dessous sur ce plan). Low est une série qui n'a rien de très accessible pour le lecteur occasionnel, qui se contenterait de feuilleter les pages avec un regard distrait, où préférerait se gaver de héros identifiables et identifiés, routine rassurante qui nous saisit tous, à un moment donné. Non, Low est un titre qui exige engagement, empathie, et en échange fournit de l'émerveillement d'une page à l'autre. Il y a tant à dire et à y voir que nous sommes souvent au bord de l'overdose d'informations, mais c'est d'une beauté plastique et thématique fortes, et donc proprement indispensable. 





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