Comme vous le savez sans doute, Zagor, autrement dit l’Esprit à la hache, est mon personnage préféré, tous styles de bande dessinée confondus. Alors forcément, lorsqu’un album contenant l’une de ses aventures débarque sur le marché français, il m’est impossible de passer à côté sans vous en parler. Le problème, hélas, vient de la manière dont cette histoire a été publiée chez Fordis. Je m’explique : tout d’abord, le choix d’un petit épisode de 48 pages, écrit par Stefano Fantelli, proposé dans un grand format à 20 €, laisse perplexe. À ce tarif, une grande partie du lectorat habituel de Zagor — celui de la bande dessinée populaire, les fumetti — n’osera sans doute pas tenter l’expérience. D’autant que la distribution semble pour le moins erratique : par exemple, impossible de trouver l’album dans les différentes Fnac du Sud que j’ai visitées. L’histoire originale était en noir et blanc, et il faut reconnaître que la mise en couleur n’a rien d’exceptionnel ; elle finit même par aplatir le trait de Rodolfo Torti, un dessinateur au style très particulier, assez éloigné de ce que les lecteurs de Zagor connaissent et apprécient. Résultat : cette approche a autant de chances de provoquer l’incompréhension, voire le rejet, que l’adhésion. Le choix reste donc étonnant, même si l’on suppose que le succès d’une autre BD du même artiste (Jan Karta) a pu motiver cette publication. Ajoutons à cela une traduction d’une grande platitude : rien d’exceptionnel, des expressions traduites presque au pied de la lettre, des dialogues qui sonnent faux et une impression générale de lourdeur. La relecture, elle aussi, n'est pas parfaite, loin de là : certaines fautes d’orthographe figurent même dans la présentation officielle de l’album sur le site de l’éditeur, où l’on peut trouver, par exemple, une confusion entre et et est (dans l'album, c'est l'impératif qui pose problème, à un moment donné). Bref, difficile de ne pas penser que ce type de publication aura du mal à trouver son public. Ce n’est pas, à notre sens, la meilleure façon d’adapter la bande dessinée populaire italienne, et tout ce que nous pouvons en dire risque, une fois encore, d’entrer par une oreille et de ressortir par l’autre. Alors oui, difficile de ne pas être déçu, et de ne pas nourrir la certitude que, malheureusement, à part combler une poignée de nostalgiques, ce n’est pas de cette façon que Zagor pourra conquérir le public français. Mais malgré tout, achetez l’album ! Soutenez cette initiative ! Simplement, n’en attendez rien d’autre qu’une petite parenthèse sympathique, qui a toutefois bien peu de chances de s’inscrire dans la durée.
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